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13/11/2012 | FRANCE | N°12LY01444

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 13 novembre 2012, 12LY01444


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 juin 2012 sous le n° 12LY01444, présentée pour la commune de Chasse-sur-Rhône, représentée par son maire en exercice, par Me Bornand ;

La commune de Chasse-sur-Rhône demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 0900171 du 5 avril 2012 qui a annulé l'arrêté, en date du 26 août 2008, par lequel son maire a refusé à la société Foncière du Sud la délivrance d'un permis de construire, ensemble sa décision portant rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté ;<

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2°) de rejeter la demande présentée au tribunal administratif de Grenoble par la soc...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 6 juin 2012 sous le n° 12LY01444, présentée pour la commune de Chasse-sur-Rhône, représentée par son maire en exercice, par Me Bornand ;

La commune de Chasse-sur-Rhône demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Grenoble n° 0900171 du 5 avril 2012 qui a annulé l'arrêté, en date du 26 août 2008, par lequel son maire a refusé à la société Foncière du Sud la délivrance d'un permis de construire, ensemble sa décision portant rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté ;

2°) de rejeter la demande présentée au tribunal administratif de Grenoble par la société Foncière du Sud ;

Elle soutient que le tribunal a commis une erreur de droit et une erreur d'appréciation en estimant qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que le maire aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur la hauteur insuffisante du plancher du local annexe, la dangerosité des accès et le non-respect de la règle de recul par rapport aux limites séparatives, motifs de refus de permis de construire dont le jugement admet le bien-fondé ; que, de fait, le projet contrevient aux prescriptions de l'article UA 7 du règlement du plan d'occupation des sols ; qu'il ne pouvait dès lors être fait droit à la demande de permis de construire, même au bénéfice d'une adaptation mineure, celle-ci n'étant ni demandée ni rendue nécessaire par la nature du sol, la configuration du terrain ou le caractère des constructions avoisinantes ; que, s'agissant de la desserte des constructions projetées, le maire s'est appuyé sur l'avis défavorable du service gestionnaire de la voirie départementale ; qu'il était tenu de refuser le permis en application des dispositions du plan de prévention des risques d'inondation, la mise en conformité du projet ne pouvant être envisagée au moyen d'une simple prescription spéciale ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure adressée le 18 septembre 2012 à la Société Foncière du Sud, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 octobre 2012, présenté par la société Foncière du Sud, non représentée par un avocat ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la construction et de l'habitation ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2012 :

- le rapport de M. Zupan, président-assesseur ;

- les conclusions de M. Vallecchia, rapporteur public ;

- et les observations de Me Rigoulot, représentant le cabinet Léga-Cité avocats, avocat de la commune de Chasse-sur-Rhône ;

1. Considérant que la commune de Chasse-sur-Rhône relève appel du jugement, en date du 5 avril 2012, par lequel le tribunal administratif de Grenoble a annulé l'arrêté de son maire du 26 août 2008 refusant à la société Foncière du Sud la délivrance d'un permis de construire en vue de l'édification de trois immeubles collectifs à usage d'habitation, totalisant 65 logements, au lieudit " Les Georgelières ", ensemble sa décision portant rejet du recours gracieux formé contre cet arrêté ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 7-2 du titre IV du règlement du plan de prévention des risques d'inondation de Chasse-sur-Rhône, fixant les dispositions particulières applicables en zone bleue où se situe le terrain d'assiette du projet : " Les constructions nouvelles (...) ne pourront être autorisées que sous les conditions suivantes : (...) - [que] le niveau du premier plancher utilisable soit situé au dessus de la cote centennale de référence ; - Les réseaux et équipements électriques (...) doivent être placés au dessus de la cote de référence (...) ; - Toutes les ouvertures des bâtiments doivent être placées au dessus de la cote de référence (...) " ; qu'il ressort des pièces du dossier que les trois immeubles collectifs projetés doivent être édifiés sur des pilotis permettant d'élever leur premier niveau d'habitation au dessus de la " cote centennale de référence " déterminée par le plan de prévention des risques ; que les aires de stationnement prévues entre ces pilotis, donc sous les immeubles, ne sauraient être regardées comme un niveau de plancher au sens des dispositions précitées, qui ne leur sont donc pas applicables ; que l'article 6 du même règlement interdisant le stationnement temporaire ou permanent de tous véhicules " dès que les eaux de crues débordent les berges du Rhône " ne saurait davantage faire obstacle à l'aménagement d'aires de stationnement en dessous de la cote de référence et ne comporte aucune prescription d'urbanisme imposant de prévoir, dans le cadre de projets immobiliers subordonnés à l'obtention d'un permis de construire, un dispositif de mise en sécurité des véhicules en cas de crue ; que, par ailleurs, les escaliers donnant accès, depuis les aires de stationnement, au premier niveau d'habitation ne constituent pas des " ouvertures des bâtiments " au sens des dispositions précitées ; que si, comme le relève le jugement attaqué, le local technique de l'ensemble immobilier projeté, dont le sol constitue en partie une " surface de plancher utilisable ", se situe, selon les plans annexés à la demande de permis de construire, en dessous de la cote de référence, il ne ressort pas des pièces du dossier que, compte tenu de sa faible importance au regard de l'ensemble du projet, son déplacement ou son rehaussement ne pouvait faire l'objet d'une prescription spéciale ; qu'ainsi, le motif de l'arrêté contesté fondé sur les dispositions du règlement du plan de prévention des risques d'inondation de Chasse-sur-Rhône se révèle dans son ensemble entaché d'illégalité ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales " ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les 172 emplacements de stationnement prévus par la société Foncière du Sud seraient de nature, par leur nombre ou du fait de l'aménagement de la plupart d'entre eux entre les pilotis supportant les immeubles en cause, à porter atteinte aux lieux avoisinants, dépourvus de tout attrait particulier et déjà marqués par la proximité, notamment, d'une voie ferrée, d'une autoroute et d'une ligne électrique à haute tension ; qu'ainsi, comme l'énonce à bon droit le jugement attaqué, le maire de Chasse-sur-Rhône, en refusant pour cette raison le permis de construire demandé par la société Foncière du Sud, a fait une inexacte application de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article UA 13 du règlement du plan d'occupation des sols de Chasse-sur-Rhône : " En cas de construction de logements à usage d'habitation, l'autorité qui délivre le permis de construire (...) peut exiger la réalisation, par le constructeur, au profit notamment des enfants et des adolescents, d'une aire de jeux et de loisirs situés à proximité de ces logements et correspondant à leur importance " ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'aire de jeux prévue, en sus de plusieurs espaces verts, par la société Foncière du Sud, et qui s'étend sur environ 1 500 m², serait inadaptée à l'importance du projet ; qu'ainsi, c'est encore à bon droit que le tribunal a censuré le motif de l'arrêté contesté selon lequel l'aire de jeux prévue " ne présente pas une surface suffisante pour un aménagement cohérent de cet espace compte tenu du nombre de logements envisagés " ;

5. Considérant, toutefois, que l'arrêté contesté est également motivé par le risque d'atteinte à la sécurité publique résultant de la dangerosité de la desserte routière du terrain d'assiette du projet ; que les premiers juges, qui ont admis le bien fondé de ce motif de refus du permis de construire, en ont méconnu la portée en estimant qu'il ne ressortait pas des pièces du dossier que le maire de Chasse-sur-Rhône eût pris la même décision en se fondant uniquement sur lui ; qu'ainsi, c'est à tort qu'ils ont annulé les décisions contestées par le motif tiré de l'illégalité sus-relevée des trois autres motifs de refus ;

6. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, de se prononcer sur les autres moyens d'annulation invoqués par la société Foncière du Sud ;

7. Considérant que le projet litigieux comporte, pour les bâtiments A et B, un accès sur la rue Copernic et, pour le bâtiment C, un accès sur la rue Galilée débouchant elle-même, quelques dizaines de mètres plus loin, sur la rue Copernic ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, alors que la largeur de ces deux voies urbaines quasiment rectilignes approche ou dépasse six mètres, que la desserte ainsi organisée présenterait un danger particulier pour les habitants de celles-ci ou pour les riverains et usagers desdites voies ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier, en dépit de l'avis défavorable émis par le président du conseil général de l'Isère, que le surcroît de trafic résultant de la réalisation du projet serait de nature à compromettre sensiblement les conditions de circulation à l'intersection de la rue Copernic et de la route départementale n° 4 ; qu'ainsi, le motif de refus fondé sur les dangers de la circulation procède d'une inexacte application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme sur lequel le maire l'a fondé ;

8. Considérant cependant que la commune de Chasse-sur-Rhône a fait valoir devant le tribunal, en sollicitant à ce titre, en tant que de besoin, une substitution de motifs, d'une part, que le projet de la société Foncière du Sud est dépourvu d'indications relatives à l'existence d'une borne incendie et d'un débit d'eau suffisant pour assurer la lutte contre l'incendie, d'autre part, que l'implantation du bâtiment C méconnaît l'article UA 7 du règlement du plan d'occupation des sols ; que l'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis l'auteur du recours à même de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ;

9. Considérant que le projet de la société Foncière du Sud, qui n'est pas relatif à la construction d'un immeuble de grande hauteur au sens de l'article L. 122-1 du code de la construction et de l'habitation ou à la réalisation d'un établissement recevant du public au sens des articles L. 123-1 et suivants du même code, n'entre pas dans le champ d'application des articles R. 431-29 et R. 431-30 du code de l'urbanisme imposant au pétitionnaire, en pareils cas, de joindre à sa demande de permis de construire un dossier technique permettant de vérifier la conformité du projet avec les règles de sécurité, notamment en matière d'incendie ; qu'aucune des autres dispositions des articles R. 431-1 et suivants du code de l'urbanisme n'exige par ailleurs, de façon générale, l'indication de la borne incendie la plus proche ou du débit du réseau alimentant cette borne ; qu'il appartient à l'autorité d'urbanisme d'apprécier, en fonction des caractéristiques des constructions envisagées et des informations qu'elle détient ou est à même de se procurer auprès des services de secours, si le projet satisfait ou non aux exigences de la lutte contre l'incendie ; que la commune n'apporte aucun élément de nature à démontrer l'existence, à cet égard, d'une atteinte à la sécurité publique ; qu'ainsi, le motif dont elle demande la substitution, que ce soit au titre de la composition du dossier ou sur le fondement de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, ne saurait être retenu pour fonder le refus de permis de construire opposé à la société Foncière du Sud ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article UA 7 du règlement du plan d'occupation des sols de Chasse-sur-Rhône : " A moins que le bâtiment à construire ne jouxte la limite parcellaire, la distance comptée horizontalement de tout point de ce bâtiment au point de la limite parcellaire qui en est le plus rapprochée doit être au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre ces deux points, sans pouvoir être inférieure à trois mètres " ; qu'il ressort des pièces du dossier que, comme le fait valoir la commune, la façade Nord-Est du bâtiment C, qui présente une hauteur à l'égout de 11,38 mètres, est située à seulement 5,48 mètres de la limite séparative du fonds voisin, au lieu des 5,69 mètres dès lors imposés par les dispositions précitées, pour l'application desquelles, en l'absence de précision expressément contraire, il y a lieu de prendre en compte le débord de toiture ; que le projet de la société Foncière du Sud méconnaît dès lors cette règle de recul ; que, toutefois, la commune n'établissant pas l'impossibilité alléguée d'imposer une prescription spéciale à l'effet de rendre le projet conforme à ladite règle, eu égard au très faible écart constaté, il ne résulte pas de l'instruction que son maire aurait pris la même décision s'il s'était fondé initialement sur ce motif ;

11. Considérant enfin, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, qu'aucun des autres moyens invoqués par la société Foncière du Sud n'est susceptible d'entraîner l'annulation des décisions contestées ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Chasse-sur-Rhône n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Grenoble a annulé lesdites décisions ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Chasse-sur-Rhône est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Chasse-sur-Rhône et à la société Foncière du Sud.

Délibéré après l'audience du 23 octobre 2012, à laquelle siégeaient :

M. Moutte, président de chambre,

M. Bézard, président,

M. Zupan, président-assesseur.

Lu en audience publique, le 13 novembre 2012.

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N° 12LY01444

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY01444
Date de la décision : 13/11/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. David ZUPAN
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : CABINET LEGA-CITE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-11-13;12ly01444 ?
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