Vu la requête, enregistrée le 16 décembre 2011, présentée pour la SARL Rochebelle, dont le siège est chez M. , ... représentée par son gérant en exercice ;
La SARL Rochebelle demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0804315 du 21 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er mai 2004 au 31 mars 2005 ;
2°) de prononcer la décharge de l'imposition contestée, des intérêts et des pénalités afférentes ;
3°) de lui allouer le bénéfice des intérêts moratoires conformément aux dispositions de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales;
4°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que son activité d'hébergement para-hôtelière effectuée au sein du chalet dont elle est propriétaire est soumise à la taxe sur la valeur ajoutée, en application des dispositions de l'article 261 D 4° du code général des impôts ; qu'elle offre au moins trois services parmi les quatre cités par les dispositions précitées ; qu'en l'espèce, elle assure l'accueil de la clientèle, la prestation de ménage, ainsi que la fourniture de linge de maison ; qu'il n'est pas nécessaire que ces prestations soient assurées de manière automatique pour que l'activité entre dans le champ des dispositions précitées ; qu'en tout état de cause, de tels services ne sauraient être obligatoires, sans contrevenir aux dispositions de l'article L. 122-1 du code de la consommation ; que la doctrine administrative, publiée et opposable à l'administration, admet le caractère optionnel de ces services ; que, dans la mesure où elles transposent l'article 13 B b) de la 6ème directive CEE qui prévoyait que l'exonération ne s'appliquerait qu'aux locaux meublés à usage d'habitation, les dispositions du code général des impôts ne peuvent prévoir une exonération de taxe sur la valeur ajoutée que pour les seules activités de location à usage d'habitation, qui impliquent un minimum de pérennité dans l'occupation du bien ; que tel n'est pas le cas pour le chalet loué ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2012, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que les dispositions de l'article 261 D du code général des impôts issues de l'article 18 de la loi de finances rectificative pour 2002 sont conformes aux objectifs de l'article 13 B-b-1 de la directive 77/388/CEE ; que la durée du séjour n'est qu'un des critères à prendre en compte ; que les conditions de l'offre de prestations para-hotelières n'étaient pas respectées ; qu'aucun document ne précisait aux locataires que de telles prestations pouvaient être fournies ; que la fourniture d'une prestation de ménage et de linge de maison ne figure pas dans le mandat d'administration du bien ; qu'il n'est pas établi que ces prestations étaient proposées aux locataires ; que les rappels sont conformes à l'avis rendu par la commission départementale des impôts directs et taxes sur le chiffre d'affaires ; que la requérante ne peut se prévaloir de la doctrine référencée 3 A-2-03 du 30 avril 2003, le fait qu'elle fournissait en annexe au contrat de location une liste de prestataires auxquels le locataire peut recourir ne permettant pas de démontrer le caractère effectif de l'offre de services ; que la demande d'intérêts moratoires est irrecevable en l'absence de litige né et actuel sur le remboursement des sommes dont le dégrèvement a été obtenu ; qu'il n'y a pas eu de frais au titre des dépens ;
Vu le mémoire, enregistré le 18 avril 2012, présenté pour la SARL Rochebelle, qui se désiste de sa demande d'intérêts moratoires en maintenant le surplus de ses conclusions par les mêmes moyens, les frais d'avocat étant portés à 4 200 euros et la société précisant que les dépens consistent dans l'acquittement de la contribution de 35 euros ;
Vu l'ordonnance en date du 23 avril 2012 reportant la clôture d'instruction au 11 mai 2012, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la sixième directive n° 77/388/CE du Conseil des Communautés Européennes du 17 mai 1977 ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 octobre 2012 :
- le rapport de M. Besse, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Lévy Ben Cheton, rapporteur public ;
1. Considérant que la SARL Rochebelle, qui loue un chalet sur le territoire de la commune de Megève (Haute-Savoie), a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, portant sur la période du 1er mai 2004 au 31 mars 2005, pendant laquelle elle avait obtenu le remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée afférents à cette activité ; que l'administration fiscale ayant remis en cause le principe même de son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, la SARL Rochebelle a été déclarée redevable d'un rappel de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'elle relève appel du jugement du 21 octobre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette imposition ;
Sur le désistement partiel :
2. Considérant que, par mémoire enregistré le 18 avril 2012, la SARL Rochebelle s'est désistée de ses conclusions tendant à ce que lui soit alloué le bénéfice des intérêts moratoires ; que ce désistement est pur et simple ; qu'il y a lieu d'en donner acte ;
Sur le surplus des conclusions à fin de décharge :
3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du B de l'article 13 de la sixième directive susvisée alors applicable : " Sans préjudice d'autres dispositions communautaires, les Etats membres exonèrent (...) b. l'affermage et la location de biens immeubles, à l'exception : 1. Des opérations d'hébergement telles qu'elles sont définies dans la législation des Etats membres qui sont effectuées dans le cadre du secteur hôtelier ou des secteurs ayant une fonction similaire (...). Les Etats membres ont la faculté de prévoir des exclusions supplémentaires au champ d'application de cette exonération (...) " ; qu'aux termes de l'article 261 D du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2002-1576 du 30 décembre 2002, applicable en l'espèce : " Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : (...) 4° Les locations occasionnelles, permanentes ou saisonnières de logements meublés ou garnis à usage d'habitation. Toutefois, l'exonération ne s'applique pas : (...) b. Aux prestations de mise à disposition d'un local meublé ou garni effectuées à titre onéreux et de manière habituelle, comportant en sus de l'hébergement au moins trois des prestations suivantes, rendues dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d'hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle : le petit déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle. " ; que les critères utiles à la distinction entre la location d'un logement meublé susceptible d'être exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu des dispositions précitées de la sixième directive européenne et la mise à disposition d'un tel logement dans des conditions l'apparentant à un hébergement hôtelier doivent être propres à garantir que ne soient exonérés du paiement de cette taxe que des assujettis dont l'activité ne remplit pas la ou les fonctions essentielles des entreprises hôtelières, avec lesquelles ils ne se trouvent donc pas en situation de concurrence potentielle ; que, contrairement à ce que prétend la SARL Rochebelle, la durée du séjour ne constitue pas le seul critère approprié pour opérer une telle distinction ; que, par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'en ce qu'elles prévoient des critères relatifs au fait de savoir si des prestations additionnelles sont assurées, les dispositions précitées du code général des impôts seraient incompatibles avec les objectifs de l'article 13 de la sixième directive ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que la SARL Rochebelle soutient proposer à sa clientèle des prestations de réception, de fourniture de linge de maison et de nettoyage régulier des locaux ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que les contrats de location et documents joints concernant la période du 1er mai 2004 au 31 mars 2005 mentionnaient que la location ne comprenait pas le linge de maison et ne faisaient pas référence à la fourniture de prestations de nettoyage, qui auraient été proposées en complément de l'hébergement, la SARL Rochebelle ne pouvant utilement se prévaloir de documents établis postérieurement ; que, si la SARL Rochebelle soutient que la mention selon laquelle le linge de maison n'était pas fourni signifiait qu'une telle prestation n'était pas gratuite, elle ne produit aucun document précisant aux locataires les conditions dans lesquelles celle-ci pouvait être assurée et n'établit pas avoir effectivement facturé de telles prestations pendant la période litigieuse ; que, s'agissant de la prestation de nettoyage des locaux, si elle produit le mandat d'administration de ses biens stipulant que le mandataire percevrait des frais pour prestations supplémentaires et des factures établies par ce dernier pour des prestations de ménage, il résulte de l'instruction que le montant ainsi facturé par le mandataire à la SARL Rochebelle était identique pour tous les locataires, alors pourtant que leur durée du séjour a varié de une à six semaines ; que, dès lors, les documents produits ne permettent pas d'établir que la SARL Rochebelle aurait proposé à ses clients un nettoyage régulier des locaux, au-delà d'une intervention en début et en fin de séjour, dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d'hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle ; que, par suite, la SARL Rochebelle n'était pas passible de la taxe sur la valeur ajoutée en application des dispositions précitées du b du 4° de l'article 261 D du code général des impôts ;
5. Considérant, enfin, que la SARL Rochebelle ne saurait se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction 3 A-2-03 du 30 avril 2003, qui ne comporte pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait ici application ;
6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Rochebelle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;
Sur les dépens :
7. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts (...). Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. " ; qu'il y a lieu de mettre la charge des dépens à la SARL Rochebelle, partie perdante ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative:
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie tenue aux dépens du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions de la SARL Rochebelle doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il est donné acte du désistement des conclusions de la requête de la SARL Rochebelle tendant au paiement des intérêts moratoires.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Rochebelle et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 9 octobre 2012, à laquelle siégeaient :
M. Chanel, président de chambre,
M. Bourrachot, président-assesseur,
M. Besse, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 6 novembre 2012.
''
''
''
''
2
N° 11LY03056