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18/10/2012 | FRANCE | N°11LY02936

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2012, 11LY02936


Vu la requête, enregistrée le 29 août 2007 sous le n° 07LY01950, puis sous le n° 11LY02936 après son renvoi par le Conseil d'Etat, présentée pour M. Martial A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

- d'annuler le jugement n° 0300201 du Tribunal administratif de Grenoble, du 7 juin 2007, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 novembre 2002 par lequel le maire de la commune de Chanos-Curson a refusé de lui délivrer un permis de construire ;

- d'annuler cet arrêté ;

- de mettre à la charge de la commune de Chanos-Curson

le versement à son profit d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code...

Vu la requête, enregistrée le 29 août 2007 sous le n° 07LY01950, puis sous le n° 11LY02936 après son renvoi par le Conseil d'Etat, présentée pour M. Martial A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

- d'annuler le jugement n° 0300201 du Tribunal administratif de Grenoble, du 7 juin 2007, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 novembre 2002 par lequel le maire de la commune de Chanos-Curson a refusé de lui délivrer un permis de construire ;

- d'annuler cet arrêté ;

- de mettre à la charge de la commune de Chanos-Curson le versement à son profit d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le Tribunal a écarté, sans qu'ils aient été utilement contredits, l'acte notarié et l'attestation de Mme B, qui permettent de considérer que la construction, bien qu'étant actuellement inhabitée, était effectivement à usage d'habitation ; qu'il verse au débat des éléments supplémentaires pour démontrer l'erreur commise par le Tribunal ; que son projet a pour objet la réhabilitation et l'extension de cette construction, sans modification substantielle de ses caractéristiques ; que cette dernière consiste en une maison en pierres d'un étage, d'une surface habitable de 77 m², dont le nombre d'ouvertures permet de penser qu'il s'agit d'une maison à usage d'habitation ; que le maire ne pouvait présumer l'usage agricole du seul fait que le bâtiment se situe en zone agricole ; qu'il démontre l'existence d'un habitat généralisé dans les vignes en produisant des photographies ; que la circonstance que la maison est inoccupée de longue date ne lui a pas fait perdre sa destination initiale ; qu'ainsi, le Tribunal et le maire ne pouvaient, sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer que le projet consistait en la transformation et l'extension d'un bâtiment situé en zone agricole en habitation ; que la limite de 250 m² de surface hors oeuvre nette est respectée ; que le maire a commis une erreur de droit en faisant application des dispositions relatives à la nécessité de justifier d'un lien avec une exploitation agricole ; qu'en effet, cette question est en dehors du débat, s'agissant d'un projet portant sur une maison qui est déjà à usage d'habitation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires, enregistrés les 4 juin et 2 octobre 2008, présentés pour la commune de Chanos-Curson, qui conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de M. A le versement d'une somme de 2 000 euros, à son profit, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que M. A disposant déjà d'une habitation, sur une autre parcelle, et le bâtiment existant ne présentant aucun aménagement permettant de le regarder comme affecté à l'habitation, le maire a pu, sans commettre d'erreur, considérer que la question de la transformation de ce bâtiment se posait ; que la destination du bâtiment au jour de la demande d'autorisation conditionne les dispositions d'urbanisme applicables ; que la construction appartenant à M. A est une ancienne bâtisse agricole dénuée de tout aménagement pour l'habitation ; qu'elle n'est pas raccordée aux différents réseaux ; que, par suite, le bâtiment n'étant pas affecté à l'habitation, seules les dispositions du 2ème alinéa de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols sont applicables ; que le maire n'a pas commis d'erreur de droit en estimant que le projet n'est pas directement lié et nécessaire à l'activité agricole ;

Vu l'arrêt n° 07LY01950 en date du 26 novembre 2009, de la Cour administrative d'appel de Lyon ;

Vu l'arrêt n° 335707 du Conseil d'Etat, rendu le 9 décembre 2011 dans l'affaire opposant M. Martial A et la commune de Chanos-Curson, qui annule l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon en date du 26 novembre 2009 et renvoie l'affaire devant la Cour ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 juin 2012, présenté pour M. A ; il conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

M. A demande en outre :

- qu'il soit ordonné au maire de la commune de Chanos-Curson de délivrer le permis de construire sollicité le cas échéant, d'enjoindre au maire de statuer de nouveau sur sa demande, dans les deux cas dans un délai de 30 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard passé ce délai ;

- de mettre à la charge de la commune de Chanos-Curson une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient, en outre, que son projet a pour objet la réhabilitation et l'extension d'une construction existante à usage d'habitation ; que le refus de délivrance du permis de construire ne pouvait être tiré du défaut de lien de causalité et de nécessité entre la construction et l'activité agricole du requérant ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 août 2012, présenté pour la commune de Chanos-Curson ; elle conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ; elle demande que la somme sollicitée en application de l'article L . 761-1 du code de justice administrative soit ramenée à 1 500 euros ;

Elle soutient, en outre, que l'acte de vente du 20 décembre 1929 ne permet pas d'établir que le bâtiment litigieux serait l'une des habitations visées dans le document ; que les attestations ne mentionnent qu'une maison, contrairement à l'acte de vente ; que le bâtiment n'a pas de cheminée ; que le Conseil d'Etat ne s'est pas prononcé sur le moyen tiré de la nécessité de l'habitation pour l'activité, dont il n'a pas été saisi ; que, compte tenu de l'ancienneté de la demande, il ne pourra être fait application des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 septembre 2012, présenté pour M. A ; il conclut aux mêmes fins que la requête et son précédent mémoire, par les mêmes moyens ; il soutient que l'aménagement et l'extension d'une construction existante n'ont pas à être liés et nécessaires à une activité agricole ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 septembre 2012, présenté pour la commune de Chanos-Curson, par lequel elle demande le report de la clôture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 septembre 2012, présenté pour la commune de Chanos-Curson ; elle conclut aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes moyens ; elle soutient, en outre, que le bâtiment appartenant à M. A était une ruine qu'il a commencé à rénover sans attendre la décision de la juridiction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2012 :

- le rapport de Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

- et les observations de Me Lamamra, substituant Me Anceau, avocat de M. A et de Me Proust, avocat de la commune de Chanos-Curson ;

1. Considérant que M. A relève appel du jugement du Tribunal administratif de Grenoble, du 7 juin 2007, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 novembre 2002 par lequel le maire de la commune de Chanos-Curson a refusé de lui délivrer un permis de construire pour l'extension et la réhabilitation à fin d'habitation d'un bâtiment implanté sur la parcelle dont il est propriétaire et qui est située en zone NC (zone agricole protégée) du plan d'occupation des sols ;

2. Considérant qu'aux termes du 2 de l'article NC 1 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Chanos-Curson : " Les occupations et utilisations du sol suivantes ne sont autorisées que si elles respectent les conditions ci-après : / Les constructions à usage d'habitation sous réserve qu'elles soient directement liées et nécessaires aux activités agricoles. / L'aménagement et l'extension des autres constructions à usage d'habitation, dans la limite d'une surface hors oeuvre nette de 250 m² (...) " ;

3. Considérant que doivent être regardées comme des constructions à usage d'habitation, au sens et pour l'application du 2 de l'article NC1 du règlement du POS précité, les édifices destinés, compte tenu de leurs caractéristiques propres, à l'habitation ; que la circonstance qu'une construction à usage d'habitation n'aurait pas été occupée, même durant une longue période, n'est pas par elle-même de nature à changer sa destination ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des clichés photographiques que la construction litigieuse se présente comme un bâtiment ancien, d'une surface habitable d'environ 77 m² sur deux niveaux reliés par un escalier, avec des murs en pierres, un toit à deux pentes et plusieurs ouvertures à chaque niveau sur toutes les façades, avec porte, chassis de fenêtres et volets de bois ; qu'elle doit être regardée, par ses caractéristiques propres, comme ayant été principalement destinée à l'habitation ; que, si ce bâtiment a cessé d'être habité durant de nombreuses années, aucune nouvelle autorisation n'est venue consacrer un changement de destination, le bâtiment n'est pas en ruine, nonobstant la circonstance qu'il n'a pas de cheminée, et n'a pas été affecté de façon pérenne à un usage différent ; que, dès lors, le permis de construire sollicité par M. A concernait l'aménagement et l'extension d'une construction à usage d'habitation qui est autorisée par les dispositions précitées du POS, sans que la commune puisse utilement se prévaloir de la circonstance que la construction ne serait pas directement liée aux activités agricoles ; que, par suite, c'est à tort que le maire de la commune de Chanos-Curson a opposé un refus à la demande de permis de construire sur le fondement de l'article NC 1 du POS ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort, que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu d'annuler ce jugement et l'arrêté du maire du 21 novembre 2002 refusant le permis de construire sollicité ;

Sur les conclusions à fin d'exécution :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;

7. Considérant que le présent arrêt n'implique pas nécessairement la délivrance du permis sollicité ; qu'il implique nécessairement que le maire de Chanos-Curson se prononce à nouveau sur la demande de permis de construire de M. A ; qu'il y a lieu d'enjoindre au maire de statuer à nouveau sur cette demande dans un délai d'un mois à compter de la confirmation de la demande ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir la présente injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. A, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Chanos-Curson demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Chanos-Curson la somme de 1 500 euros, au profit de M. A, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Grenoble en date du 7 juin 2007 et l'arrêté du 21 novembre 2002 du maire de la commune de Chanos-Curson portant refus de permis de construire sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au maire de la commune de Chanos-Curson de statuer à nouveau sur la demande de permis de construire de M. A, dans un délai d'un mois à compter de la confirmation de la demande.

Article 3 : La commune de Chanos-Curson versera à M. A la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Chanos-Curson tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le surplus des conclusions de M. A est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A et à la commune de Chanos-Curson.

Délibéré après l'audience du 27 septembre 2012 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président de chambre,

Mme Mear, président-assesseur,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 18 octobre 2012.

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N° 11LY02936

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY02936
Date de la décision : 18/10/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Nature de la décision. Refus du permis.


Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : ANCEAU

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-10-18;11ly02936 ?
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