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27/09/2012 | FRANCE | N°12LY00618

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 27 septembre 2012, 12LY00618


Vu la requête, enregistrée le 5 mars 2012, présentée pour le centre hospitalier de Roanne, représenté par son directeur ;

Le centre hospitalier de Roanne demande à la Cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 0904640 du 19 janvier 2012, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé le commandement de payer d'un montant de 660 033,26 euros émis le 2 juillet 2009 par le trésorier de Roanne à l'encontre de la société Soffimat ;

2°) de mettre à la charge de la société Soffimat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761

-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens de l'instance, et notamment...

Vu la requête, enregistrée le 5 mars 2012, présentée pour le centre hospitalier de Roanne, représenté par son directeur ;

Le centre hospitalier de Roanne demande à la Cour :

1°) d'ordonner le sursis à exécution du jugement n° 0904640 du 19 janvier 2012, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé le commandement de payer d'un montant de 660 033,26 euros émis le 2 juillet 2009 par le trésorier de Roanne à l'encontre de la société Soffimat ;

2°) de mettre à la charge de la société Soffimat une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens de l'instance, et notamment la contribution pour l'aide juridique d'un montant de 35 euros qu'il a acquittée ;

Il soutient qu'il est en proie à une situation de surendettement, alors qu'il doit faire face à des investissements importants, dès lors qu'il est engagé dans un processus de reconstruction ; que sa dette représente 115 % de ses produits d'exploitation ; que la créance qu'il détient sur la société Soffimat représente 19 % de son déficit comptable, lequel devrait atteindre 3,9 millions d'euros en 2011 ; que le jugement litigieux contribue ainsi à le fragiliser financièrement et est de nature à entraîner pour lui des conséquences difficilement réparables ; que le Tribunal a entaché son jugement d'irrégularité en se prononçant sur le fond de l'affaire sans écarter comme porté devant une juridiction incompétente le moyen tiré de ce que le commandement de payer n'était pas suffisamment motivé ; que le jugement est irrégulier, en ce qu'il a annulé le commandement de payer au lieu de décharger la requérante de son obligation de payer la somme en résultant et de déclarer cet acte sans fondement ; que la société Soffimat n'a pas établi avoir transmis au pouvoir adjudicateur un mémoire en réclamation dans les délais prescrits à l'article 8.2 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de fournitures courantes et de services ; que, de ce fait, le décompte général est devenu définitif et le titre exécutoire du 18 novembre 2005 n'est pas susceptible d'être utilement contesté ; que le décompte général est devenu définitif par l'effet de l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon du 22 novembre 2011 ; qu'ainsi que l'a jugé la Cour, le groupement formé par la société Soffimat et la société Visage était un contrat indivis ; que chaque entreprise était dès lors engagée pour le tout, dès lors que les prestations formaient un ensemble indissociable ; que seule la rémunération du cocontractant faisait l'objet d'une répartition, uniquement pour organiser le règlement des redevances ; qu'une telle répartition n'est pas incompatible avec un engagement solidaire ; que la circonstance que l'assurance prévue à l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché a été souscrite par la société Visage est sans incidence sur la nature des liens unissant les co-traitants ; que le juge judiciaire est seul compétent pour connaître de la régularité formelle des poursuites ; qu'au demeurant, le commandement de payer comporte toutes les informations utiles, le titre exécutoire du 18 novembre 2005 et le document qui l'accompagnait précisant de manière suffisamment détaillée les bases de liquidation de la créance ; que les rendements réels de l'installation de cogénération ont été inférieurs aux rendements attendus, ce qui justifiait l'application de pénalités contractuelles ; que le commandement de payer ne peut être annulé par voie de conséquence de l'annulation des titres exécutoires émis entre 2002 et 2004, dès lors que ces actes ne portent pas sur le même objet et ne dépendent nullement les uns des autres ; que le titre exécutoire du 18 novembre 2005 n'est donc pas un acte d'application ou un acte indissociable des titres exécutoires précédents ; que la résiliation du contrat était justifiée en raison des nombreux manquements contractuels de la société Soffimat à ses obligations ; qu'en effet, elle n'a pas procédé à la maintenance et à l'entretien de la centrale de cogénération pour permettre le démarrage de la saison d'exploitation le 1er novembre 2004 ; qu'un cocontractant de l'administration ne peut cesser d'exécuter ses prestations en opposant une exception d'inexécution à l'administration ; que les conditions dans lesquelles la société Soffimat a proposé de remplacer la société Visage pour la saison de cogénération 2005/2006 étaient contraires aux règles de la commande publique ; qu'il a pu dès lors résilier le contrat pour assurer la continuité du fonctionnement du service public ;

Vu le jugement dont le sursis à exécution est demandé ;

Vu la requête en annulation, enregistrée le 5 mars 2012, sous le n° 12LY00615 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 mars 2012, présenté pour la société Soffimat, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge du requérant la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'il n'est pas démontré que l'annulation prononcée par le Tribunal administratif a des conséquences difficilement réparables pour le centre hospitalier de Roanne ; que l'établissement ne produit aucun élément financier probant à l'appui de ses allégations concernant ses difficultés financières ; qu'a supposer même que le déficit annoncé soit exact, il n'est pas démontré que, s'agissant d'un établissement public, il puisse avoir des conséquences difficilement réparables ; que, d'ailleurs, le centre hospitalier de Roanne mène d'importants investissements ; que l'établissement n'est pas suivi par l'agence régionale de santé en raison de ses difficultés financières ; que le Tribunal administratif a pu régulièrement annuler l'acte litigieux sans se prononcer sur tous les moyens ; que le juge administratif peut annuler un acte de poursuite entaché d'illégalité ; que le jugement était donc régulier ; qu'elle a formé une réclamation dans les délais à l'encontre du décompte général qui lui avait été notifié ; que l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon du 22 novembre 2011 n'est pas définitif, dès lors qu'elle a formé un recours en cassation devant le Conseil d'Etat ; que le titre exécutoire du 18 novembre 2005 ne comportait aucune précision quant aux modalités de calcul des pénalités, ni même un renvoi aux stipulations contractuelles appliquées ; qu'aucune justification n'était donnée sur la compensation opérée ; que les titres exécutoires de 2002, 2003, 2004 et 2005 étaient indivisibles ; que l'annulation des trois premiers titres doit nécessairement entraîner l'annulation du quatrième, qui reprend des éléments contenus dans les premiers ; qu'elle n'était pas membre d'un groupement solidaire ; que l'acte d'engagement précisait les missions incombant à chaque intervenant ; que l'acte d'engagement fait reposer sur la seule société Visage une garantie de résultat, ce qui justifie qu'elle a seule contracté une assurance ; que l'article 10.6.2 du CCAP prévoyait que la pénalité ne serait appliquée qu'au seul cotraitant concerné ; qu'aucune facture d'EDF n'ayant été produite, le centre hospitalier de Roanne ne justifie pas le quantum des sommes mises à sa charge, lesquelles correspondent au remboursement du prix de la facturation manquante établie par EDF ; que seul le comportement de l'établissement public suite à la liquidation judiciaire de son cotraitant a été à l'origine des difficultés connues dans l'exécution du contrat ; que le centre hospitalier de Roanne a indûment arrêté le paiement des redevances ; que l'intervention de ses agents sur le site a été gênée ; qu'aucune faute de sa part justifiant la résiliation du marché n'est établie ; qu'au demeurant, le centre hospitalier aurait dû prendre en compte les conséquences de la défaillance de son cotraitant, laquelle a nécessairement affecté les conditions d'exécution du contrat ; que le maître d'ouvrage a refusé le cotraitant qu'elle avait proposé ; que l'équilibre économique du contrat a été ainsi bouleversé du fait du maître d'ouvrage ; que les divers frais mis à sa charge dans le décompte de résiliation, au titre des réunions complémentaires, de nouvelles consultations, de publicité, d'inspection, de nettoyage ne sont étayés par aucun justificatif et ne peuvent lui être imputés ; que, s'agissant des frais de nettoyage, de ramonage et de remise en état des turbos, il s'agissait de missions incombant à la société Visage ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 avril 2012, présenté pour le centre hospitalier de Roanne, qui persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens, en soutenant en outre qu'il suit un plan de retour à l'équilibre financier, sous le contrôle de l'agence régionale de santé ; que les performances de la centrale de cogénération dépendaient de l'exécution de l'ensemble des prestations ; que les réunions qui se sont tenues les 12 février et 28 septembre 2004 résultaient de la mauvaise exécution par la société Soffimat de son marché ; que l'intervention sur les turbos de la centrale a été rendue nécessaire par le fait que la société Soffimat les avait démontés pour faire obstacle au démarrage de la saison de cogénération ; que la société Visage avait résilié son marché bien avant ce démontage, ladite opération relevant au demeurant de la maintenance préventive ; que le coût de cette opération est justifié ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 avril 2012, présenté pour la société Soffimat qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 août 2012, présenté pour le centre hospitalier de Roanne qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 31 août 2012, présenté pour la société Soffimat qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 septembre 2012 :

- le rapport de M. Besse, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public,

- et les observations de Me Calvet-Baridon, représentant le centre hospitalier de Roanne, et de Me Zeglin, représentant la société Soffimat ;

1. Considérant que le centre hospitalier de Roanne demande le sursis à exécution du jugement du 19 janvier 2012 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé le commandement de payer d'un montant de 660 033,26 euros émis le 2 juillet 2009 par le trésorier de Roanne à l'encontre de la société Soffimat ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-17 du code de justice administrative : " Dans les autres cas, le sursis peut être ordonné à la demande du requérant si l'exécution de la décision de première instance attaquée risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens énoncés dans la requête paraissent sérieux en l'état de l'instruction. " ;

3. Considérant que le commandement de payer litigieux, émis sur le fondement du titre de recettes du 18 novembre 2005, a cessé d'être exécutoire dès l'introduction de la demande tendant à son annulation présentée par la société Soffimat devant le Tribunal administratif de Lyon ; que, dès lors, le jugement par lequel celui-ci a annulé ledit commandement de payer n'entraîne en tant que tel aucune mesure d'exécution susceptible de faire l'objet d'une demande de sursis à exécution ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier de Roanne n'est pas fondé à demander qu'il soit sursis à l'exécution du jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 19 janvier 2012 ;

Sur les dépens :

5. Considérant qu'aux termes de l'article R. 761-1 du code de justice administrative : " Les dépens comprennent la contribution pour l'aide juridique prévue à l'article 1635 bis Q du code général des impôts (...). Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l'affaire justifient qu'ils soient mis à la charge d'une autre partie ou partagés entre les parties. " ; qu'il y a lieu de laisser la charge des dépens au centre hospitalier de Roanne, partie perdante ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative:

6. Considérant que, d'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie tenue aux dépens du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions du centre hospitalier de Roanne doivent être rejetées ; que, d'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'établissement la somme demandée en application des dispositions précitées par la société Soffimat ;

DECIDE :

Article 1er : La requête du centre hospitalier de Roanne est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Soffimat tendant au paiement par le centre hospitalier de Roanne des frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Roanne, à la société Soffimat et au ministre des affaires sociales et de la santé.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2012, où siégeaient :

- M. du Besset, président de chambre,

- M. Besse et Mme Samson-Dye, premiers conseillers ;

Lu en audience publique, le 27 septembre 2012.

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N° 12LY00618

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY00618
Date de la décision : 27/09/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-07-01-02 Procédure. Pouvoirs et devoirs du juge. Questions générales. Sursis à statuer.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Thierry BESSE
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : DELPLANQUE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-09-27;12ly00618 ?
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