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13/07/2012 | FRANCE | N°11LY02425

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 13 juillet 2012, 11LY02425


Vu, I, sous le n° 11LY02425, la requête, enregistrée à la Cour le 3 octobre 2011, présentée pour M. Adem A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005642-1005644, du 8 mars 2011, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère du 27 septembre 2010, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce d

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Vu, I, sous le n° 11LY02425, la requête, enregistrée à la Cour le 3 octobre 2011, présentée pour M. Adem A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005642-1005644, du 8 mars 2011, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère du 27 septembre 2010, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à défaut, d'examiner à nouveau sa situation, dans un délai d'un mois, à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente de la décision, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que :

- le préfet n'était saisi d'aucune demande d'admission au séjour et ne pouvait lui opposer un refus d'admission au séjour, sans entacher sa décision d'une erreur de droit ;

- dès lors qu'il vit en France, depuis quatre ans, qu'il a fui son pays d'origine après avoir fait l'objet de menaces physiques, qu'il suit avec son épouse, un traitement pour un problème d'infertilité, qu'il a suivi des cours de français, qu'il justifie de plusieurs promesses d'embauche et que son épouse ne dispose plus d'aucune attache familiale au Kosovo, le refus de titre méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour, méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- dès lors que ses craintes en cas de retour en Serbie, sont établies, la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations ;

Vu, II, sous le n° 11LY02426, la requête, enregistrée à la Cour le 3 octobre 2011, présentée pour Mme Kimete B, épouse A, domiciliée ... ;

Mme B, épouse A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005642-1005644, du 8 mars 2011, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère du 27 septembre 2010, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à défaut, d'examiner à nouveau sa situation, dans un délai d'un mois, à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer, dans l'attente de la décision, une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travailler, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Elle invoque, à l'appui de sa requête, les mêmes moyens que ceux, énoncés ci-dessus, soulevés par son époux dans sa propre requête ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations ;

Vu les ordonnances des 22 août 2011, rendues sur recours, par lesquelles le président de la Cour administrative d'appel de Lyon a accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. et Mme A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 juin 2012 le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;

Considérant que les requêtes de M. et Mme A, enregistrées sous le n° 11LY02425 et le n° 11LY02426, émanent de deux époux et présentent à juger des questions semblables ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt ;

Sur la légalité des décisions de refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme A, ont déclaré être entrés en France, le 29 décembre 2006 ; que les demandes d'asile qu'ils avaient déposées ont été rejetées par décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 10 mai 2007, puis par la Cour nationale du droit d'asile, le 29 septembre 2008 ; que le 13 avril 2010, ils ont sollicité la délivrance d'une admission provisoire au séjour en vue du réexamen de leur demande d'asile ; que, par décisions du 19 avril 2010, le préfet de l'Isère a rejeté leur demande ; que leurs demandes d'asile réexaminées selon les modalités de la procédure prioritaire, ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 26 mai 2010 ; qu'à la suite de ces rejets de leurs demandes d'asile, par les décisions en litige du 27 septembre 2010, le préfet de l'Isère a refusé de leur délivrer le titre de séjour qui doit être accordé à l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié ; que ces décisions doivent être regardées comme également prise en réponse aux demandes d'admission au séjour en qualité de demandeurs d'asile, présentées par M. et Mme A ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les décisions précitées du 19 avril 2010, par lesquelles le préfet de l'Isère leur avait refusé la délivrance d'une admission provisoire au séjour en vue du réexamen de leur demande d'asile ne peuvent être regardées comme ayant apporté une réponse aux demandes d'admission au séjour en qualité de demandeur d'asile présentées par les intéressés, lesquelles restaient toujours pendantes ; que, dès lors, le préfet n'a pas commis d'erreur de droit en prenant les décisions attaquées ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. " et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

Considérant que si M. et Mme A font valoir qu'ils vivent en France depuis quatre ans, qu'ils y sont bien intégrés, qu'ils y disposent de perspectives professionnelles et qu'ils y sont suivis pour un problème d'infertilité, il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard aux conditions d'entrée et de séjour des intéressés en France, à la durée de leur séjour, et au fait qu'ils ne sont pas dépourvus d'attaches familiales dans leur pays d'origine, que le préfet de l'Isère aurait porté une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale en refusant de les admettre au séjour ; que les moyens tirés de ce que le préfet aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ; qu'à cet égard, sont sans incidence sur la légalité des décisions de refus de titre de séjour, les raisons pour lesquelles les époux A ont fui leur pays ainsi que l'existence alléguée de menaces en cas de retour dans le pays d'origine ;

Considérant, en dernier lieu, que si les requérant font également valoir que leur présence en France serait indispensable en raison du traitement qu'ils suivent pour combattre une infertilité, ils n'apportent aucun élément de nature à établir qu'un tel traitement doive se poursuivre et ne puisse être dispensé dans leur pays d'origine ; que ces circonstances ne permettent pas de faire regarder les décisions attaquées comme entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle des intéressés ;

Sur la légalité des obligations de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité des refus de titre de séjour qui leur ont été opposés pour contester les obligations de quitter le territoire français dont ces refus ont été assortis ;

Considérant, en second lieu, que les moyens tirés de ce que les obligations de quitter le territoire français dont ont été assortis les refus de titre de séjour opposés à M. et Mme A méconnaîtraient les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou qu'elles seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation doivent, pour les motifs exposés ci-dessus lors de l'examen de la légalité de la décision portant refus de titre de séjour, être écartés ;

Sur la légalité des décisions désignant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

Considérant que les requérants font valoir que M. A a été victime de menaces et d'un attentat à l'explosif dans son pays d'origine et qu'ils encourent des risques en cas de reconduite au Kosovo ; que toutefois, les époux A dont les demandes tendant à ce que leur soit reconnue la qualité de réfugié ont été rejetées, n'apportent aucun élément précis et probant à même d'établir qu'ils encourraient des risques personnels et réels pour leur sécurité en cas de retour au Kosovo ; que, par suite, le préfet, qui ne s'est pas cru en situation de compétence liée du fait de la décision de rejet de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et qui a procédé à un examen particulier de leur situation, a pu fixer ce pays comme destination de la mesure de reconduite, sans méconnaître les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes ; que leurs conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par eux et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. et Mme A sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Adem A, à Mme Kimete B, épouse A et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 26 juin 2012 à laquelle siégeaient :

M. Rabaté, président,

M. Seillet, premier conseiller,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 juillet 2012.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY02425
Date de la décision : 13/07/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. RABATE
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : PIEROT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-07-13;11ly02425 ?
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