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03/05/2012 | FRANCE | N°11LY00213

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 03 mai 2012, 11LY00213


Vu la requête enregistrée le 25 janvier 2011, présentée pour la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES, dont le siège est 14 rue de Saint-Nazaire à Strasbourg (67100) ;

La SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605583-0605584 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 3 décembre 2010, d'une part, en ce qu'il l'a condamnée à verser à la commune de la Verpillière la somme de 21 657,34 euros TTC outre intérêts moratoires au taux contractuel à compter du 30 novembre 2006 et capitalisation au 4 décembre 2007 puis à chaque date anniv

ersaire en indemnisation des désordres affectant le bâtiment couvrant les cour...

Vu la requête enregistrée le 25 janvier 2011, présentée pour la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES, dont le siège est 14 rue de Saint-Nazaire à Strasbourg (67100) ;

La SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0605583-0605584 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 3 décembre 2010, d'une part, en ce qu'il l'a condamnée à verser à la commune de la Verpillière la somme de 21 657,34 euros TTC outre intérêts moratoires au taux contractuel à compter du 30 novembre 2006 et capitalisation au 4 décembre 2007 puis à chaque date anniversaire en indemnisation des désordres affectant le bâtiment couvrant les courts de tennis, d'autre part, en ce qu'il a rejeté les appels en garantie qu'elle a présentés contre la société d'architecture et d'urbanisme Jean Lovera et la société Socotec ;

2°) de rejeter la demande présentée contre elle par la commune de la Verpillière ;

3°) d'ordonner la restitution des sommes versées en exécution du jugement attaqué ;

4°) de condamner la société d'architecture et d'urbanisme Jean Lovera et la société SOCOTEC à la garantir de toute condamnation laissée à sa charge ;

La SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES soutient que l'absence de jointoiement entre les bardeaux était visible à la livraison de l'ouvrage ; que, le défaut d'étanchéité étant prévisible dans toute son étendue, l'absence de réserve émise à la réception a libéré le constructeur de la garantie décennale ; qu'il en va de même de l'inversion du profilé couvrant le portail dont il était prévisible qu'il favoriserait la pénétration de l'eau de pluie au lieu de l'évacuer ; que ces malfaçons pouvaient être décelées par le maître d'ouvrage conseillé par son maître d'oeuvre et le contrôleur technique ; subsidiairement, que le maître d'oeuvre doit répondre à son égard des manquements aux règles de son art qui ont concouru aux désordres indemnisés ; que l'architecte n'a pas décelé le risque d'infiltrations résultant des jours entre éléments de bardage alors que ceux-ci étaient visibles à l'oeil nu ; qu'en outre, aucun dispositif d'étanchéité n'avait été prévu lors de la conception de l'ouvrage ; qu'en sa qualité de contrôleur technique investi d'une mission de vérification de la solidité des équipements indissociables du gros oeuvre, la société SOCOTEC a négligé de s'assurer de l'étanchéité de cette partie de l'ouvrage ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 18 août 2011, présenté pour la commune de la Verpillière (38290) ;

La commune de la Verpillière conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune de la Verpillière soutient que les désordres litigieux n'étaient pas apparents à la réception, faute de précipitations, et n'étaient pas prévisibles dès lors que toutes leurs conséquences dommageables ne pouvaient pas être anticipées ; qu'ils sont donc couverts par la garantie décennale, ainsi que l'a jugé le Tribunal ;

Vu le mémoire enregistré le 16 septembre 2011 par lequel la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 10 janvier 2012 présenté pour la société d'architecture et d'urbanisme Jean Lovera dont le siège est 12 boulevard Edouard Rey à Grenoble (38000) ;

La société d'architecture et d'urbanisme Jean Lovera conclut au rejet des conclusions de la requête dirigées contre elle et demande à la Cour :

1°) de condamner solidairement la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES et la société SOCOTEC à la garantir de toute condamnation mise à sa charge ;

2°) de mettre à la charge de la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES ou de qui mieux le devra une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société d'architecture et d'urbanisme Jean Lovera soutient que les désordres litigieux n'étaient pas apparents à la réception ; que si les interstices étaient visibles à l'oeil nu, tel n'est pas le cas de l'absence de profils d'étanchéité à l'intérieur des bardages ; qu'en outre, toutes leurs conséquences dommageables ne pouvaient pas être anticipées ; que les désordres sont exclusivement imputables à l'entreprise à qui il appartenait de mettre en oeuvre un dispositif d'étanchéité au titre de l'exécution de son lot ; que le maître d'oeuvre ne lui a communiqué aucune instruction ni aucun plan pouvant l'induire en erreur sur ses obligations ; que l'insuffisance de surveillance de l'auteur des désordres ne saurait constituer une faute quasi-délictuelle ayant concouru au dommage ; qu'en sa qualité de contrôleur technique investi d'une mission de vérification de la solidité des équipements indissociables du gros oeuvre, la société SOCOTEC a négligé de s'assurer de l'étanchéité de cette partie de l'ouvrage ;

Vu le mémoire enregistré le 13 mars 2012 par lequel la commune de la Verpillière conclut aux mêmes fins que son premier mémoire par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 13 mars 2012 par lequel la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ; elle demande, en outre, à la Cour de rejeter les conclusions présentées contre elle au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 avril 2012 :

- le rapport de M. Arbarétaz, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public ;

- et les observations de Me Broquet, représentant la SOCIETE SOPREMA, de Me Gay, représentant la commune de La Verpillière, et de Me Gabrielle, représentant la société d'architecture et d'urbanisme Jean Lovera ;

Sur l'appel de la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES :

En ce qui concerne la garantie décennale :

S'agissant du principe de la responsabilité :

Considérant qu'en vertu des principes dont s'inspirent les dispositions aujourd'hui codifiées aux articles 1792 et 1792-4-1 du code civil, les constructeurs liés au maître de l'ouvrage par un contrat de louage sont responsables de plein droit des désordres de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination lorsqu'ils sont survenus dans un délai de dix ans à compter de la date d'effet de la réception ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport d'expertise, que les infiltrations d'eau pluviale affectant les cours de tennis proviennent, premièrement, des raccords entre bardeaux métalliques, deuxièmement, du profilé métallique couvrant le portail et, troisièmement, du faîtage et de la noue de la toiture ; que l'absence de relevé d'étanchéité et de larmier ainsi que la présence de contrepentes en toiture, bien que visibles à la réception, ne permettaient pas de prévoir le défaut d'étanchéité de la couverture provoqué par le refoulement épisodique des gouttes de pluie vers les interstices des plaques métalliques, sous l'action du vent ; qu'en revanche, les éléments de bardages laissant passer l'air à leur jonction, un maître d'ouvrage normalement avisé devait présumer qu'ils laisseraient nécessairement passer la pluie ; qu'il en va de même de la couverture du portail dont le profilé avait été orienté vers l'intérieur du bâtiment ;

Considérant qu'il suit de là que les désordres provoqués par l'absence de traitement d'étanchéité des joints de bardages et la couverture du portail étaient apparents à la réception de l'ouvrage dans toute leur étendue ; que, dans ces conditions, la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES est fondée à soutenir qu'elle est dégagée de son obligation de les indemniser au titre de la garantie décennale ; qu'elle reste néanmoins tenue d'indemniser la commune de la Verpillière des conséquences du défaut d'étanchéité de la toiture dès lors que, d'une part, le contrat de louage dont elle était titulaire ayant porté sur la couverture métallique, ces désordres lui sont imputables et que, d'autre part, il résulte de l'instruction que les infiltrations provenant de la couverture suffisent à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ;

S'agissant du montant de l'indemnité due à la commune de La Verpillière :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort du devis non contesté de l'entreprise ECB, sur lequel repose l'estimation proposée par l'expert, que les travaux de reprise de la couverture s'élèvent à la somme globale de 4 789,60 euros HT, soit 5 728, 36 euros TTC ;

Considérant, en second lieu, que les désordres ne relevant que partiellement, ainsi qu'il vient d'être dit, de la responsabilité décennale de la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES, il sera fait une juste appréciation des frais de nettoyage des courts de tennis exposés à cause du défaut d'étanchéité de la couverture en les fixant à 4 700 euros TTC, soit la moitié du montant du devis, non contesté, de l'entreprise EnviroSpor sur lequel s'est appuyé l'expert pour estimer le coût global de nettoyage des courts ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES est fondée à demander que la somme de 21 657,34 euros TTC, outre intérêts et capitalisation, qu'elle a été condamnée par le Tribunal à verser à la commune de La Verpillière soit ramenée à 10 428,36 euros TTC et que le jugement attaqué soit réformé dans cette proportion ;

Considérant, en revanche, qu'en l'absence de litige né et actuel sur l'exécution du présent arrêt, la requérante n'est pas recevable à demander que soit enjoint à la commune de La Verpillière de lui restituer la différence entre les condamnations de première instance et d'appel ;

En ce qui concerne les appels en garantie :

Considérant que le recours entre constructeurs, non contractuellement liés, ne peut avoir qu'un fondement quasi-délictuel et que ces constructeurs ne sont tenus entre eux que chacun, pour sa part, déterminée à proportion du degré de gravité des fautes respectives qu'ils ont personnellement commises ;

Considérant que l'aménagement de noues à contrepentes ou l'absence de pose de relevé et de larmier relèvent des manquements de la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES aux règles de son art ; qu'il appartenait à l'entreprise, et à elle seule, de réaliser une étanchéité exempte d'erreurs d'exécution ; que l'intéressée ne se prévalant d'aucune intervention ou directive donnée par le maître d'oeuvre ou le contrôleur technique qui l'aurait conduite à réaliser une couverture défaillante, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal a rejeté ses appels en garantie contre la société d'architecture et d'urbanisme Jean Lovera et la société SOCOTEC ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés non compris dans les dépens :

Considérant, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que , par suite, les conclusions présentées par la commune de la Verpillière contre la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES doivent être rejetées ;

Considérant, en second lieu que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société d'architecture et d'urbanisme Jean Lovera dirigées contre la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES ;

DECIDE :

Article 1er : La condamnation de 21 657,34 euros TTC mise à la charge de la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES par l'article 1er du jugement n° 0605583-0605584 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 3 décembre 2010 est ramenée à 10 428,36 euros TTC.

Article 2 : Le jugement n° 0605583-0605584 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 3 décembre 2010 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus de la requête et des conclusions des parties sont rejetés.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE SOPREMA ENTREPRISES, à la commune de la Verpillière, à la société d'architecture et d'urbanisme Jean Lovera, à la société SOCOTEC et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Délibéré après l'audience du 12 avril 2012 à laquelle siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Arbarétaz, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 mai 2012.

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N° 11LY00213

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY00213
Date de la décision : 03/05/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04-03 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité décennale. Désordres de nature à engager la responsabilité décennale des constructeurs.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Philippe ARBARETAZ
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : CROSET-DE VILLARD-BROQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-05-03;11ly00213 ?
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