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24/04/2012 | FRANCE | N°11LY02566

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 24 avril 2012, 11LY02566


Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 27 octobre 2011 et régularisée le 31 octobre 2011, présentée pour M. Dejan B et Mme Aslijana B, domiciliés chez Mme C, ... ;

M. et Mme B demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1102088-1102090 du 23 juin 2011, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 4 février 2011, leur refusant la délivrance d'un titre de séjour, les obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant

le pays à destination duquel ils seraient reconduits à l'expiration de ce délai, à ...

Vu la requête, enregistrée à la Cour par télécopie le 27 octobre 2011 et régularisée le 31 octobre 2011, présentée pour M. Dejan B et Mme Aslijana B, domiciliés chez Mme C, ... ;

M. et Mme B demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1102088-1102090 du 23 juin 2011, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Isère, du 4 février 2011, leur refusant la délivrance d'un titre de séjour, les obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel ils seraient reconduits à l'expiration de ce délai, à défaut pour eux d'obtempérer aux obligations de quitter le territoire français qui leur étaient faites ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de leur délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à défaut, de réexaminer leur situation administrative dans le délai d'un mois à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir et, dans cette attente, de leur délivrer une autorisation provisoire de séjour valant autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Ils soutiennent que les décisions leur refusant la délivrance d'un titre de séjour et les obligeant à quitter le territoire français sont entachées d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation, et méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'article 3-1 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989 ; que les décisions leur faisant obligation de quitter le territoire français méconnaissent encore les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'enfin, les décisions fixant le pays de leur destination méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention susmentionnée relative aux droits de l'enfant et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement et les décisions attaqués ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de l'Isère qui n'a pas produit d'observations ;

Vu les décisions du 16 septembre 2011, par lesquelles le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon (section administrative d'appel) a, d'une part, accordé le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale à M. B et, d'autre part, rejeté la demande présentée en ce sens par Mme B ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2012 :

- le rapport de M. Rabaté, président ;

Sur les décisions de refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme B, de nationalité macédonienne, ont déposé auprès du préfet de l'Isère, le 31 août 2010, une demande d'admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile, en vue de solliciter le bénéfice du statut de réfugié ; que, par décisions du 13 septembre 2010, le préfet de l'Isère a refusé de les admettre provisoirement au séjour en France le temps de l'instruction de leurs demandes d'asile, en considérant que leurs demandes entraient dans le champ d'application du 2° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par décisions du 2 novembre 2010, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a rejeté les demandes d'asile des époux B ; qu'ainsi, les décisions de refus de séjour du 4 février 2011 du préfet de l'Isère, qui ont été édictées alors que la qualité de réfugié avait été refusée aux époux B, doivent être regardées comme prises en réponse à une demande d'admission au séjour en qualité de demandeur d'asile, dont le préfet de l'Isère était, implicitement mais nécessairement, saisi ; que, dès lors, contrairement aux allégations des requérants, les décisions de refus de séjour contestées ne sont pas entachées d'erreur de droit ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " et qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

Considérant que M. et Mme B, ressortissants macédoniens nés respectivement en 1979 et en 1978, sont irrégulièrement entrés sur le territoire français le 29 août 2010, selon leurs déclarations, accompagnés de leurs deux enfants, Susana et Dajana, nés respectivement en 1997 et en 2000 ; que si les intéressés se prévalent de leurs attaches familiales en France, constituées par la grand-mère, les oncles, la tante et la cousine de Monsieur B, de leur parfaite intégration à la société française, de l'impossibilité pour eux de mener une vie privée et familiale normale dans leur pays d'origine, en raison des menaces y pesant sur eux et du suivi médical, exclusivement réalisable en France, nécessité par l'état de santé de leur fille Susana, il ressort toutefois des pièces du dossier que les intéressés, dont la durée de présence sur le territoire français s'élevait seulement à 4 mois à la date des décisions contestées, n'établissent pas, par la seule production d'attestations de tiers, au demeurant toutes postérieures auxdites décisions, le lien de parenté allégué entre Monsieur et les personnes susmentionnées présentées comme étant les membres de sa famille, et la réalité de leur intégration à la société française ; qu'en outre, M. et Mme B, dont les demandes de reconnaissance de la qualité de réfugié ont été rejetées par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, en raison de l'absence de crédibilité de leur récit afférent aux traitements subis dans leur pays d'origine, n'en établissent pas la réalité ; que, de plus, les intéressés, dont il ressort des pièces médicales produites, au demeurant toutes postérieures aux décisions attaquées, que l'état de santé de leur fille Susana nécessite un suivi médical annuel en conséquence d'une pathologie cardiaque chirurgicalement traitée dans leur pays d'origine, n'établissent pas, au regard des pièces du dossier, l'impossibilité, pour leur enfant, de bénéficier dans ce pays du suivi médical requis par son état de santé ; que, les intéressés n'établissent pas davantage, en se bornant à citer un extrait d'un rapport, prétendument élaboré par une organisation internationale, constatant " un niveau élevé de déscolarisation prématurée " d'enfant roms en Macédoine, que leur enfant Dajana n'a jamais été scolarisée avant son entrée en France, et qu'elle ne pourrait pas l'être en cas de retour dans le pays d'origine ; qu'enfin, comme il a été dit, M. et Mme B n'établissement pas l'intensité, la stabilité et l'ancienneté des attaches privées et familiales tissées en France, alors qu'il est constant que les requérants conservent des liens, notamment familiaux, dans leur pays d'origine où eux-mêmes ont vécu jusqu'à leur venue en France ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour des requérants en France, les décisions contestées n'ont pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus, et n'ont pas davantage méconnu l'intérêt supérieur de leurs enfants ; qu'elles n'ont, ainsi, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant ; qu'il résulte de ce qui précède que ces décisions ne sont pas davantage entachées d'erreur manifeste d'appréciation ; que, par suite, ces moyens doivent être écartés ;

Sur les décisions portant obligation de quitter le territoire français :

Considérant que pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés, les décisions obligeant M. et Mme B à quitter le territoire français ne sont pas entachées d'erreur de droit et de violation des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, pour les mêmes motifs, ces décisions ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant, et ne sont pas davantage entachées d'erreur manifeste d'appréciation ; que, dès lors, ces moyens doivent être écartés ;

Sur les décisions désignant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, que pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

Considérant que si M. et Mme B se prévalent des traitements dont eux et leurs enfants sont susceptibles de faire l'objet de la part de l'oncle de Monsieur B en Macédoine en raison de leur conversion au christianisme, alors que ce dernier serait un " dignitaire religieux musulman ", les intéressés n'apportent toutefois aucun élément suffisamment probant propre à établir la réalité des menaces pesant sur eux dans ce pays ; que, dès lors, le moyen doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté leurs demandes ; que leurs conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par eux et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Dejan B, Mme Aslijana Bet au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 27 mars 2012 à laquelle siégeaient :

M. Rabaté, président,

M. Reynoird, premier-conseiller,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 avril 2012.

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N° 11LY02566

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY02566
Date de la décision : 24/04/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. RABATE
Rapporteur ?: M. Vincent RABATE
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : CANS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-04-24;11ly02566 ?
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