La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/04/2012 | FRANCE | N°11LY02508

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 24 avril 2012, 11LY02508


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 19 octobre 2011, présentée pour Mme Fahrije A, domiciliée ... ;

Mme Fahrije A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104162, du 22 septembre 2011, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 1er juin 2011, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut po

ur elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était ...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 19 octobre 2011, présentée pour Mme Fahrije A, domiciliée ... ;

Mme Fahrije A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1104162, du 22 septembre 2011, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet du Rhône, du 1er juin 2011, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet du Rhône de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " valant autorisation de travail à compter du prononcé de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 196 euros, à son profit, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Elle soutient que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour viole les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cette décision méconnaît également les stipulations de l'article 3-1 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ; que la décision l'obligeant à quitter le territoire français, entachée de défaut de motivation faute de transposition de la directive du 16 décembre 2008 et d'erreur manifeste d'appréciation, méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que les décisions d'obligation de quitter le territoire français et de fixation du pays de destination sont illégales par voie d'exception ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet du Rhône qui n'a pas produit d'observations ;

Vu la lettre du 15 mars 2012 par laquelle le président de la 2ème chambre de la Cour a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la Cour était susceptible de soulever d'office un moyen d'ordre public ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant du 20 novembre 1989, signée par la France le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2012 :

- le rapport de M. Chanel, président de chambre,

- les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public,

- et les observations de Me Sabatier, avocat de Mme A ;

Sur la décision de refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

Considérant que Mme A, ressortissante kosovare née le 2 juillet 1976, est irrégulièrement entrée en France, accompagnée de ses trois enfants, à la date déclarée du 3 juin 2009 en vue d'y rejoindre son époux, lequel séjourne sur le territoire français depuis 2008 sous couvert d'un titre de séjour mention " salarié " valable un an expirant le 13 juin 2011 ; que sa demande tendant à la reconnaissance de la qualité de réfugié a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides par une décision du 11 janvier 2011, confirmée le 9 mars 2011 par la Cour nationale du droit d'asile ; que si la requérante se prévaut de la durée de sa présence en France où elle aurait établi le centre de sa vie privée et familiale en compagnie de son époux qui y travaille et de ses enfants qui y sont scolarisés et de l'impossibilité pour eux de reconstituer leur cellule familiale dans leur pays d'origine où ils seraient démunis de logement et de ressources, il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme A se maintient sur le territoire français depuis seulement 2 ans à la date de la décision litigieuse sans apporter la preuve de la réalisation d'efforts d'intégration à la société française durant cette période ; que l'intéressée n'est pas fondée à se prévaloir de l'installation en France de son époux, dont elle n'établit pas le caractère durable compte tenu, notamment, de la brièveté de sa présence en France et de l'expiration imminente de son titre de séjour en qualité de salarié le 13 juin 2011 et alors que rien ne fait obstacle, au vu des pièces du dossier, à la reconstruction de la cellule familiale dans leur pays d'origine, où ils ont vécu jusqu'à leur entrée récente en France ; qu'en outre, la requérante n'établit pas que la récente scolarisation en France de ses enfants, âgés de 10, 12 et 14 ans, ne pourrait pas se poursuivre dans leur pays d'origine où ils ont vécu la majeure partie de leur enfance ; qu'enfin, Mme A n'établit ni même n'allègue avoir tissé en France des liens, notamment privés, alors qu'elle doit être regardée comme ayant nécessairement conservé des attaches dans son pays d'origine dès lors qu'elle n'allègue pas y être isolée et qu'elle y a vécu jusqu'à l'âge de 34 ans ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour de la requérante en France et alors qu'elle conserve la possibilité de rejoindre régulièrement son époux en France dans le cadre d'une procédure de regroupement familial qu'il lui est loisible d'initier, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux motifs du refus ; qu'elle n'a, ainsi, méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, Mme A n'établit pas l'impossibilité de la reconstruction de la cellule familiale, composée de son époux et de ses trois enfants, dans leur pays d'origine compte tenu notamment de la brièveté de la scolarisation en France de ses enfants et de l'absence d'obstacles avérés à la poursuite de cette scolarité dans leur pays d'origine ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance de l'intérêt supérieur de l'enfant doit être écarté ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, que le moyen, qui n'est pas d'ordre public, tiré de ce que la décision querellée obligeant Mme A à quitter le territoire français serait entachée d'un défaut de motivation, a été soulevé par l'intéressé pour la première fois en appel, alors que la requérante n'avait pas soulevé, en première instance, de moyens tirés de la légalité externe de cette décision ; que ce nouveau moyen, qui relève d'une cause juridique distincte de celle invoquée devant le tribunal administratif, est, par suite, irrecevable et ne peut être qu'écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que la décision refusant à Mme A la délivrance d'un titre de séjour n'étant pas illégale, cette dernière n'est pas fondée à invoquer l'exception d'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision litigieuse l'obligeant à quitter le territoire français ;

Considérant, enfin, que pour les mêmes motifs que ceux précédemment exposés dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision refusant à Mme A la délivrance d'un titre de séjour, le moyen tiré de la méconnaissance, par la décision l'obligeant à quitter le territoire français, des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ; que, pour les mêmes motifs, cette décision n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

Sur la décision désignant le pays de destination :

Considérant que les décisions refusant à Mme A la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire français n'étant pas illégales, elle n'est pas fondée à invoquer l'exception d'illégalité de ces décisions à l'encontre de la mesure fixant le pays de sa destination ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par elle et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Fahrije A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2012 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Besson et Segado, premiers-conseillers,

Lu en audience publique, le 24 avril 2012.

''

''

''

''

1

2

N° 11LY02508

ld


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY02508
Date de la décision : 24/04/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Christian CHANEL
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-04-24;11ly02508 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award