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24/04/2012 | FRANCE | N°10LY02673

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 24 avril 2012, 10LY02673


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 1er décembre 2010, régularisée le 6 décembre 2010, présentée pour M. Patrick A, demeurant 6 rue Couturier à Vichy (03200) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901300 du 21 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté le surplus de sa demande tendant à titre principal, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2004, et à titre subsidiaire à ce qu'il soit enjoint au délégué charg

des vérifications nationales et internationales " d'établir un nouvel avis d'impositio...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 1er décembre 2010, régularisée le 6 décembre 2010, présentée pour M. Patrick A, demeurant 6 rue Couturier à Vichy (03200) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901300 du 21 septembre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté le surplus de sa demande tendant à titre principal, à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2004, et à titre subsidiaire à ce qu'il soit enjoint au délégué chargé des vérifications nationales et internationales " d'établir un nouvel avis d'imposition tenant compte de l'abattement de 20 % prévu par l'article 158 (5) du code général des impôts " ;

2°) de le décharger des impositions contestées, d'un montant de 43 093 euros, et d'ordonner leur restitution ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que les impositions contestées sont fondées sur une application inexacte des dispositions de l'article 80 duodecies du code général des impôts ; que la somme de 315 120 euros qu'il a perçue de la société Laboratoire Aventis, le 8 juin 2004, au titre d'indemnité transactionnelle à la suite de son licenciement, est inférieur au montant de l'indemnité prévue par la convention collective des industries chimiques et connexes, applicable à son contrat de travail, qui, pour les salariés de plus de quinze ans d'ancienneté, s'élève à " 8/10 de mois par année au-delà de quinze ans ", majoré de deux mois pour les cadres de plus de 55 ans, dans la limite d'un plafond de 20 mois ; que la convention collective d'entreprise, visée par le contrat de travail, ne doit pas être prise en compte pour l'application de l'article 80 duodecies, ces dispositions ne visant pas de telles conventions, et, compte tenu de la règle selon laquelle le salarié bénéficie de la convention collective qui lui est la plus favorable ; que selon la convention collective, la base de calcul de l'indemnité de licenciement est la dernière rémunération perçue par le salarié, et comprend notamment, contrairement à ce qu'estime l'administration fiscale, les " primes de toutes natures, y compris à la productivité et les participations au chiffre d'affaires et aux résultats " ; qu'en l'espèce, au regard de son dernier bulletin de salaire, la base de calcul de l'indemnité s'élève à la somme de 35 199, 56 euros ; que si c'est le cas de certaines conventions collectives, celle applicable à M. A ne prévoyait pas expressément de proratiser les primes annuelles versées le dernier mois ; que ces dernières doivent donc être intégralement prises en compte pour le calcul du plafond de 20 mois, qui par ailleurs s'applique à l'indemnité prévue par la convention collective, et non à l'indemnité effectivement perçue, le cas échéant pour un montant moindre au terme d'une transaction ; que ce plafond est donc en l'espèce de 703 991, 20 euros ; que c'est ce plafond, et non le double de la rémunération annuelle brute perçue en 2003, qui constitue la limite la plus favorable prévue par l'article 80 duodecies ; qu'étant d'un montant inférieur à ce plafond, l'indemnité en litige, de 315 120 euros, n'était pas imposable ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 mars 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les dispositions de l'article 80 duodecies du code général des impôts limitent le montant de l'exonération qu'elles prévoient à concurrence du plus favorable des trois plafonds qu'elles définissent ; que le " montant prévu par la convention collective de branche, par l'accord professionnel et interprofessionnel ou, à défaut, par la loi " est celui de l'indemnité effectivement perçue par le salarié licencié, et non celui qui aurait dû l'être en application de la convention ; qu'il s'élève en l'espèce à 185 120 euros ; qu'à supposer même que soit pris en compte le montant prévu par la convention collective applicable au requérant, il ne saurait être calculé que dans la limite de 20 mois de salaires appréciés non pas au regard du dernier bulletin de paye, mais après proratisation des primes annuelles qu'il inclut ; que le salaire mensuel moyen de l'intéressé étant alors de 9 377,06 euros, et non de 39 199, 56 euros comme il le prétend, le montant d'indemnité prévu par cette convention s'élevait alors à 187 541,20 euros, et non 703 991, 20 euros ; qu'ainsi, le plafond d'exonération qui lui a été appliqué, afférent, pour une somme de 204 524 euros, au double de la rémunération brute annuelle de l'année 2003, était le plus favorable au contribuable ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 octobre 2011 par télécopie, régularisé le 28 octobre 2011 présenté pour M. A, qui conclut aux mêmes fins, par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance en date du 31 octobre 2011 fixant la clôture d'instruction au 2 décembre 2011 en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 mars 2012, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la convention collective nationale des industries chimiques et connexes du 30 décembre 1952 modifiée, étendue par arrêté du 13 novembre 1956 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2012 :

- le rapport de M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

- et les observations de Me Habrial, avocat de M. A ;

Considérant que M. A, après avoir été licencié au cours de l'année 2004, a perçu, en exécution d'un accord transactionnel en date du 8 juin 2004, une indemnité d'un montant total de 315 120 euros ; qu'à l'issue d'un contrôle sur pièces, l'administration fiscale a estimé, sur le fondement des dispositions de l'article 80 duodecies du code général des impôts, que cette somme, qui n'avait pas été déclarée par l'intéressé, n'ouvrait pas entièrement droit à exonération, et l'a réintégrée dans les revenus imposables de M. A au titre de l'année 2004, à concurrence d'un montant de 110 596 euros ; que M. A relève appel du jugement du 21 septembre 2010 par lequel le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge de cette imposition complémentaire ;

Considérant qu'aux termes de l'article 80 duodecies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : " 1. Sous réserve de l'exonération prévue au 22° de l'article 81, constitue une rémunération imposable toute indemnité versée à l'occasion de la rupture du contrat de travail, à l'exception des indemnités de licenciement ou de départ volontaire versées dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi au sens des articles L. 321-4 et L. 321-4-1 du code du travail, des indemnités mentionnées à l'article L. 122-14-4 du même code ainsi que de la fraction des indemnités de licenciement ou de mise à la retraite qui n'excède pas le montant prévu par la convention collective de branche, par l'accord professionnel et interprofessionnel ou, à défaut, par la loi. / La fraction des indemnités de licenciement ou de mise à la retraite exonérée en application du premier alinéa ne peut être inférieure ni à 50 % de leur montant ni à deux fois le montant de la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l'année civile précédant la rupture de son contrat de travail, dans la limite de la moitié ou, pour les indemnités de mise à la retraite, du quart de la première tranche du tarif de l'impôt de solidarité sur la fortune fixé à l'article 885 U. (...). " ; que la première tranche du tarif de l'impôt de solidarité sur la fortune étant fixée à 720 000 euros par l'article 885 U du même code dans sa rédaction applicable aux années d'imposition en litige, le plafond défini par l'article 80 duodecies précité s'élève, pour les années d'imposition en litige, à la somme de 360 000 euros ; qu'aux termes de l'article L.122-9 du code du travail alors en vigueur : " Le salarié lié par contrat de travail à durée indéterminée et qui est licencié alors qu'il compte deux ans d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité minimum de licenciement. (...). " ; que l'article 14 de l'observation préliminaire à la convention collective nationale des industries chimiques et connexes du 30 décembre 1952 susvisée stipule que : " 1. A partir de deux ans d'ancienneté il est alloué aux cadres congédiés, sauf pour faute grave de leur part, une indemnité distincte du préavis tenant compte de leur ancienneté dans l'entreprise et s'établissant comme suit : / - pour la tranche de zéro à dix ans, quatre dixièmes de mois par année à compter de la date d'entrée dans l'entreprise ; / - pour la tranche de dix à quinze ans, six dixièmes de mois par année au-delà de dix ans ; / - pour la tranche au-delà de quinze ans, huit dixièmes de mois par année au-delà de quinze ans. / L'indemnité de congédiement est majorée, après cinq ans d'ancienneté, de : / - un mois pour les cadres âgés de plus de quarante-cinq ans ; / - deux mois pour les cadres âgés de plus de cinquante-cinq ans. / L'indemnité de congédiement résultant du barème ci-dessus ne peut être supérieure à vingt mois. (...) / 3. La base de calcul de l'indemnité de congédiement est la rémunération totale mensuelle gagnée par le cadre pendant le mois précédant le préavis de congédiement ; elle ne saurait être inférieure à la moyenne des rémunérations mensuelles des douze mois précédant le préavis de congédiement. / Pour le calcul de cette rémunération entrent en ligne de compte, outre les appointements de base, les majorations relatives à la durée du travail, les avantages en nature, les primes de toute nature, y compris les primes à la productivité, les participations au chiffre d'affaires ou aux résultats, les indemnités n'ayant pas le caractère d'un remboursement de frais, les gratifications diverses ayant le caractère contractuel ou le fait d'un complément de rémunération annuelle, à l'exclusion des gratifications exceptionnelles, notamment celles résultant de l'application de l'article 17. / 4. Il est versé au cadre congédié bénéficiant de primes ou participations au chiffre d'affaires ou aux résultats une somme correspondent à ces primes ou participations calculée prorata temporis pour l'exercice en cours au moment du congédiement. (...). " ;

Considérant qu'en application des dispositions précitées du code général des impôts, l'administration fiscale a limité la fraction exonérée de l'indemnité en litige à la somme de 204 524 euros, dont il est constant qu'elle correspond au montant de la rémunération annuelle brute perçue par M. A au cours de l'année 2003 ; que ce dernier soutient cependant que ce terme de comparaison lui était moins favorable que celui afférent, aux termes de l'article 80 duodecies du code général des impôts, au montant prévu par la convention collective de branche, lequel, compte tenu des stipulations de convention collective des industries chimiques et connexes, applicable à son contrat de travail, s'élevait selon lui à la somme de 703 991, 20 euros ;

Considérant que cette convention prévoyait, en son article 14 précité, que l'indemnité de licenciement est calculée, s'agissant des cadres de plus de 55 ans, sur la base de huit dixièmes de mois par année au-delà de quinze ans, majorée de deux mois pour les cadres âgés de plus de cinquante-cinq ans, et ce dans la limite de vingt mois ; qu'elle stipulait en outre que ce calcul se basait sur la rémunération totale mensuelle gagnée par le cadre pendant le mois précédant le préavis de congédiement, incluant, outre les appointements de base, l'ensemble des primes et indemnités, à l'exclusion des gratifications exceptionnelles et des remboursements de frais ; qu'il résulte implicitement mais nécessairement de ces stipulations que le salaire de référence à prendre en considération pour le calcul de ladite indemnité s'entend du salaire de base du mois de référence, augmenté des gratifications ayant le caractère d'un complément de salaire versées le même mois ; que toutefois, celles des gratifications versées au cours de ce mois, dont la périodicité est supérieure à un mois, ne peuvent être prises en compte que pour la part venant en rémunération dudit mois ; que, dès lors, M. A n'est pas fondé à prétendre que la rémunération totale mensuelle gagnée, au sens de ces stipulations, au mois de mars 2004, s'élevait à la somme de 35 199, 56 euros, dès lors que ce montant incluait le versement d'une prime annuelle de résultats de 28 170 euros ; qu'il résulte ainsi de l'instruction qu'une fois cette prime ramenée à sa valeur mensuelle de 2347,50 euros, la rémunération mensuelle de référence de M. A s'élevait à la somme de 9 377, 06 euros, et que, par conséquent, l'indemnité de licenciement à laquelle il pouvait prétendre en vertu de cette convention collective s'élevait à vingt fois ce montant, soit 187 540 euros ; que, par suite, M. A ne saurait se plaindre de ce que l'administration a retenu la somme, plus favorable pour lui, de 204 524 euros, pour déterminer la fraction exonérée de l'indemnité transactionnelle en litige, et a réintégré le surplus de cette indemnité dans ses revenus imposables, dans la catégorie des traitements et salaires, au titre de l'année 2004 ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté le surplus de sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à la restitution des sommes en litige, ainsi qu'à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Patrick A, et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 3 avril 2012 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Besson et Lévy Ben Cheton, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 24 avril 2012.

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N° 10LY02673


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-07 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Traitements, salaires et rentes viagères.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Laurent LEVY BEN CHETON
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : JURIDECA

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 24/04/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10LY02673
Numéro NOR : CETATEXT000025753820 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-04-24;10ly02673 ?
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