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20/03/2012 | FRANCE | N°11LY02275

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 20 mars 2012, 11LY02275


Vu la requête, enregistrée le 13 septembre 2011, présentée pour le DEPARTEMENT DE L'AIN, représenté par son président en exercice, dont le siège est 45 avenue Alsace Lorraine à Bourg-en-Bresse (01000) ;

Le DEPARTEMENT DE L'AIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906646 du 13 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a, à la demande de M. A, annulé l'arrêté en date du 26 août 2009 par lequel le président du conseil général de l'Ain lui a infligé la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions de 14 jours ;

2°) de rejet

er les conclusions présentées en première instance par M. A ;

3°) de mettre à la char...

Vu la requête, enregistrée le 13 septembre 2011, présentée pour le DEPARTEMENT DE L'AIN, représenté par son président en exercice, dont le siège est 45 avenue Alsace Lorraine à Bourg-en-Bresse (01000) ;

Le DEPARTEMENT DE L'AIN demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906646 du 13 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a, à la demande de M. A, annulé l'arrêté en date du 26 août 2009 par lequel le président du conseil général de l'Ain lui a infligé la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions de 14 jours ;

2°) de rejeter les conclusions présentées en première instance par M. A ;

3°) de mettre à la charge de M. A la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- aucun texte et aucun principe n'oblige l'autorité disciplinaire territoriale à préciser le motif qui l'a conduit à s'écarter de l'avis du conseil de discipline ;

- l'arrêté en litige est suffisamment motivé au regard de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, contrairement à ce qu'indique le jugement attaqué ;

- le signataire de l'arrêté en litige était compétent, sans qu'y fassent obstacle les circonstances que l'intéressé ait été postérieurement informé de la sanction par un autre, et que la décision attaquée n'a été notifiée que quelques jours avant sa date d'effet ;

- les griefs retenus contre l'agent ne sont pas l'alcoolisme, mais l'utilisation d'un véhicule de service pour l'achat d'une boisson alcoolisée avec consommation de cet alcool pendant les heures de travail, le 21 janvier 2009, et la tentative réitérée de mettre le feu à des broussailles avec un mélange d'huile et d'essence ;

- que ces faits établis par les témoignages concordants de deux collègues présents sur les lieux, et reconnus par M. A devant son chef d'agence, le conseil de discipline et le Tribunal, justifient une exclusion de fonctions de 14 jours ;

- l'intéressé ne peut valablement soutenir qu'il aurait fait l'objet de harcèlement moral en raison des soupçons d'alcoolisme qui auraient été portés contre lui ;

- le retrait des astreintes constitue un litige distinct, l'intéressé ne détenant d'ailleurs aucun droit à leur maintien ;

- sur les autres conclusions M. A ne pouvait, en l'absence de service fait, prétendre à la restitution de la rémunération dont il a été privé par l'arrêté litigieux ;

- ses conclusions de première instance tendant à faire constater, par le juge administratif, une volonté de l'administration de le qualifier d'alcoolique et de sanctionner cette attitude, sont irrecevables, comme constituant une demande nouvelle, et comme excédant les pouvoirs du juge administratif ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été communiquée à M. A et la lettre en date du 25 novembre 2011 par laquelle M. A été mis en demeure de produire ses observations dans le délai de 10 jours et l'avis de réception de cette lettre ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu l'ordonnance du 4 janvier 2012 fixant la clôture de l'instruction au 20 janvier 2012 à 16 h 30 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

Vu la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

Vu le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2012 :

- le rapport de M. Rabaté, président ;

- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

- les observations de Me Hammerer, pour le DEPARTEMENT DE L'AIN ;

Sur le jugement attaqué :

Considérant que M. A, adjoint technique territorial du département de l'Ain, a fait l'objet d'une procédure disciplinaire pour avoir, le 21 janvier 2009, utilisé un véhicule de service pour l'achat d'une boisson alcoolisée, l'avoir consommé pendant les heures de service, et avoir eu un comportement dangereux en mettant le feu à un tas de broussailles par un mélange d'huile et d'essence ; que le conseil de discipline a, le 3 juillet 2009, émis l'avis de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre jours ; que l'intéressé s'est vu infliger, par arrêté du président du conseil général de l'Ain du 26 août 2009, la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatorze jours ; que le DEPARTEMENT DE L'AIN fait appel du jugement du 13 juillet 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé cet arrêté pour défaut de motivation ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi susvisée du 11 juillet 1979 : " les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) - infligent une sanction ; ", qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ; qu'enfin l'article 19 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 prévoit : " (...) Aucune sanction disciplinaire autre que celles classées dans le premier groupe par les dispositions statutaires relatives aux fonctions publiques de l'Etat, territoriale et hospitalière ne peut être prononcée sans consultation préalable d'un organisme siégeant en conseil de discipline dans lequel le personnel est représenté. " ;

Considérant que la circonstance que l'autorité territoriale ne suive pas l'avis du conseil de discipline est sans incidence sur la portée de l'obligation de motiver une sanction ; que le législateur a seulement entendu imposer à l'autorité qui prononce une sanction disciplinaire l'obligation de préciser elle-même, dans sa décision, les griefs qu'elle entend retenir à l'encontre de la personne intéressée, de sorte que cette dernière puisse à la seule lecture de la décision qui lui est notifiée connaître les motifs de la sanction qui la frappe ; qu'en l'espèce, l'arrêté du président du conseil général du 26 août 2009 vise les dispositions applicables, relate avec précision les faits reprochés à l'agent, caractérise l'existence d'une faute, et justifie la sanction par la gravité de la faute retenue ; que, dès lors, et contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, il est suffisamment motivé ;

Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens exposés par M. A devant le Tribunal ;

Sur la demande de M. A :

Considérant qu'aux termes de l'article 24 du décret susvisé du 23 juin 1985 : " Les médecins du service de médecine préventive sont habilités à proposer des aménagements de poste de travail ou de conditions d'exercice des fonctions, justifiés par l'âge, la résistance physique ou l'état de santé des agents. Ils peuvent également proposer des aménagements temporaires de postes de travail ou de conditions d'exercice des fonctions au bénéfice des femmes enceintes. Lorsque l'autorité territoriale ne suit pas l'avis du service de médecine préventive, sa décision doit être motivée et le comité d'hygiène ou, à défaut, le comité technique doit en être tenu informé (...) " ;

Considérant en premier lieu, qu'il ne résulte d'aucun texte ou d'aucun principe que l'avis rendu par le conseil de discipline soit communiqué au fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée ; qu'aucun texte, ni l'article 24 précité du décret du 10 juin 1985, inapplicable en l'espèce, n'imposait la consultation préalable du comité technique paritaire ou du comité d'hygiène ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la sanction contestée soit fondée sur des faits ayant fait l'objet de sanctions antérieures ;

Considérant, en troisième lieu, que la circonstance que M. A ait été informé par son supérieur direct de la sanction prise à son encontre avant que l'arrêté litigieux ne soit signé par le président du conseil général, ainsi que l'illégalité supposée de la suspension des astreintes et de l'interdiction de conduire des véhicules de service imposées à l'agent, sont sans influence sur la légalité de la décision en litige ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des témoignages concordants établis le 22 juillet 2009 par deux collègues se trouvant sur les lieux, que M. A, le 21 janvier 2009, a consommé de l'alcool durant le service et a mis le feu à des broussailles à l'aide d'un mélange d'huile et d'essence ; que ces faits, reconnus par l'intéressé devant le conseil de discipline le 23 juillet 2009 comme l'indique l'avis dudit conseil, portaient atteinte à la sécurité des personnes ; qu'ils constituent ainsi des fautes de nature à justifier une sanction disciplinaire ; que la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de quatorze jours infligée à M. A à raison desdits faits n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; qu' enfin l'intéressé, qui ne peut utilement faire valoir qu'il a subi une perte de revenu et qu'il a fait l'objet d'une sanction déguisée, n'établit pas qu'il aurait été victime, de la part de sa hiérarchie ou dans ses conditions de travail, d'un quelconque harcèlement moral ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le DEPARTEMENT DE L'AIN est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé l'arrêté du 26 août 2009 par lequel le président du conseil général de l'Ain a exclu M. A de ses fonctions pour quatorze jours ;

Sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A une somme quelconque au titre des frais exposés par le DEPARTEMENT DE L'AIN et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 13 juillet 2011 est annulé.

Article 2 : La demande de M. A devant le Tribunal administratif de Lyon est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions du DEPARTEMENT DE L'AIN est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au DEPARTEMENT DE L'AIN et à M. William A.

Délibéré après l'audience du 28 février 2012 à laquelle siégeaient :

M. Fontanelle, président de chambre,

M. Rabaté, président-assesseur,

M. Seillet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 mars 2012.

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N° 11LY02275


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11LY02275
Date de la décision : 20/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. FONTANELLE
Rapporteur ?: M. Vincent RABATE
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : DOITRAND et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-03-20;11ly02275 ?
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