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15/03/2012 | FRANCE | N°11LY00992

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 5, 15 mars 2012, 11LY00992


Vu la requête, enregistrée le 19 avril 2011, présentée pour la COMMUNE DE VAULNAVEYS LE HAUT, représentée par son maire ;

La commune demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903689, 0904936, et 1003901 du 24 février 2011 en tant que le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes qui tendaient :

- à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 30 juin 2010 réglant le budget primitif 2010 du syndicat intercommunal de gestion de la station d'Uriage ;

- à ce qu'il soit enjoint au préfet de prendre un nouvel arrêté régla

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Vu la requête, enregistrée le 19 avril 2011, présentée pour la COMMUNE DE VAULNAVEYS LE HAUT, représentée par son maire ;

La commune demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0903689, 0904936, et 1003901 du 24 février 2011 en tant que le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes qui tendaient :

- à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 30 juin 2010 réglant le budget primitif 2010 du syndicat intercommunal de gestion de la station d'Uriage ;

- à ce qu'il soit enjoint au préfet de prendre un nouvel arrêté réglant le budget 2010 intégrant dans les recettes du syndicat la totalité du prélèvement sur le produit des jeux du casino, conformément à l'article 5 des statuts du syndicat, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

- à ce qu'il soit enjoint au préfet de prendre un nouvel arrêté réglant le budget 2004 en exécution du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 19 mars 2008 intégrant dans les recettes du syndicat le produit des jeux du casino, conformément à l'article 5 des statuts du syndicat, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

2°) de faire droit aux demandes susmentionnées qu'elle a présentées devant le Tribunal ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que le Tribunal, pour rejeter les demandes n° 0904936 et 1003901, s'est fondé sur l'absence de convention entre le syndicat et la commune de Saint-Martin d'Uriage, au sens de l'article L. 2333-54 du code général des collectivités territoriales, qui n'a pas été invoqué par cette commune et le préfet ; qu'il ressort du mémoire du préfet du 6 octobre 2010 que le préfet conditionne le reversement de tout ou partie du produit des jeux du casino au syndicat à la conclusion d'un accord conventionnel entre les deux communes fixant les modalités du reversement, alors que la commune de Saint-Martin d'Uriage n'invoque pas l'article précité ; que le Tribunal a statué au-delà des moyens des parties ; que le Tribunal, pour écarter l'article 5 des statuts, s'est fondé sur une interprétation du dernier alinéa de l'article L. 2333-54 contraire à l'esprit et l'objectif de l'article 7 de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004 qui a institué cet alinéa, interprétation qui remet en cause le financement des structures intercommunales ; qu'il ressort des travaux parlementaires que l'article 7 vise à améliorer le financement des structures intercommunales compétentes en matière touristique par affectation du produit des jeux du casino, ce qui coïncide avec l'article 5 des statuts du syndicat ; que le dernier alinéa de l'article L. 2333-54 du code n'est pas applicable en l'espèce, mais en cas de création de structure intercommunale postérieure au 1er janvier 2005, alors que le syndicat intercommunal a été créé en 1959 ; que l'alinéa est aussi applicable aux structures intercommunales compétentes en tourisme ne profitant pas du reversement du produit des jeux du casino, alors que les statuts du syndicat prévoient ce reversement depuis 1959 ; que les statuts du syndicat peuvent être qualifiés de convention, au sens de l'article L. 2333-54 du code ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 1er juillet 2011, présenté par le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, tendant au rejet de la requête ;

Le ministre soutient que les statuts du syndicat sont approuvés par arrêté du 15 septembre 1959, mais le casino a fermé ses portes au début des années 1980, et le produit des jeux a disparu des recettes, même si l'article 5 n'a pas été supprimé ; que la commune de Saint-Martin d'Uriage a pris seule l'initiative de recréer le casino, qui est sa propriété exclusive, avec un mécanisme de reversement du produit des jeux prévu par le cahier des charges signé entre la commune et la société nouvelle des casinos d'Uriage ; qu'aucune convention n'existe entre le syndicat, qui n'est pas compétent pour promouvoir le tourisme, et la commune de Saint-Martin d'Uriage, ce qui rend inapplicable le dernier alinéa de l'article L. 2333-54 du code ; que, par suite, le produit des jeux du casino n'a pas été indument perçu par la commune de Saint-Martin d'Uriage et ne devait pas être affecté au syndicat intercommunal ; que le préfet ne pouvait légalement régler les budgets 2004 et 2010 du syndicat intercommunal ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 octobre 2011, présenté pour la commune de Saint-Martin d'Uriage, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la requérante à lui payer un montant de 4 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient qu'elle a soulevé en première instance le moyen tiré de l'absence de convention visée par l'article L. 2333-54 du code général des collectivités territoriales ; que cet article, qui s'applique même si la structure intercommunale est antérieure à 2005, impose clairement la passation d'une convention pour définir la part des recettes du casino ; que l'article 5 des statuts du syndicat ne peut être assimilé à une convention ; que cette clause statutaire n'a de force juridique que parce qu'elle est approuvée par arrêté préfectoral ; que les statuts d'un syndicat sont signés par les communes membres, et non par la commune et le syndicat ; que l'article 5 prévoit le versement direct au syndicat, non le reversement ; que cette clause est caduque, car le casino a disparu en 1980 quand la COMMUNE DE VAULNAVEYS LE HAUT, membre du syndicat, a rejeté le plan de restructuration de la station ; que la commune de Saint-Martin d'Uriage s'est employée à reconstituer un casino sous sa seule maîtrise d'ouvrage, et a conclu une convention avec un nouveau concessionnaire ; que ce casino aux faibles recettes a disparu, ce qui rend la clause de l'article 5 caduque et inapplicable ; que cette clause est illégale, au regard de la réglementation sur les jeux ; que conformément à l'arrêté du 23 décembre 1959 venant en application du décret du 22 décembre 1959, la compétence pour gérer les casinos appartient à la commune où ils ont leur siège ; que le syndicat ne peut intervenir sur le casino, qui ne lui appartient pas, la commune ayant financé seule la construction et ayant obtenu seule l'autorisation d'ouverture du casino du ministère de l'intérieur ; que le cahier des charges du casino lie l'exploitant et la commune, le syndicat étant tiers ; que l'article 5 est contraire au cahier des charges et à l'autorisation ministérielle ; que les articles L. 2333-54 et suivants du code général des collectivités territoriales prévoient que seule une commune siège d'un casino peut recevoir la part publique des jeux, et non un établissement intercommunal ; que le syndicat n'est pas habilité à recevoir des recettes en l'absence de service rendu, il ne remplit aucune des compétences prévues initialement dans ses statuts, son faible budget étant principalement destiné à l'école de musique et à faire transiter une subvention vers l'office de tourisme ; que le syndicat est chargé de fleurir la station et entretenir la voierie, et n'a jamais engagé de dépense relative au casino depuis sa création ; que le préfet a enclenché en mai 2011 la procédure de dissolution du syndicat ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 novembre 2011, présenté pour la COMMUNE DE VAULNAVEYS LE HAUT, qui conclut aux mêmes fins et moyens que précédemment ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 décembre 2011, par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l' immigration persiste dans ses écritures ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 décembre 2011, par lequel la commune de Saint-Martin d'Uriage persiste dans ses écritures ;

Vu l'ordonnance en date du 14 novembre 2011 reportant la clôture d'instruction au 16 décembre 2011 à 16 heures 30, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 2 mars 2012, présentée pour la commune de Saint-Martin d'Uriage ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2012 :

- le rapport de M. Rabaté, président ;

- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

- les observations de Me Duraz pour la COMMUNE DE VAULNAVEYS LE HAUT, et de Me Kern pour la commune de Saint-Martin d'Uriage ;

Considérant que la COMMUNE DE VAULNAVEYS LE HAUT relève appel du jugement du 24 février 2011 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes, et réitère ces dernières devant la Cour, en demandant d'annuler l'arrêté du préfet de l'Isère du 30 juin 2010 qui règle le budget primitif 2010 du syndicat intercommunal de gestion de la station d'Uriage, et d'enjoindre au préfet, sous astreinte, de régler par arrêtés les budgets 2004 et 2010 du syndicat ;

Sur le jugement attaqué en tant qu'il concerne l'arrêté du préfet de l'Isère du 30 juin 2010 :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2333-54 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-809 du 13 août 2004, applicable au 1er janvier 2005 : " Dans les communes qui réalisent des actions de promotion en faveur du tourisme, le conseil municipal peut instituer un prélèvement sur le produit brut des jeux dans les casinos. Le taux maximum des prélèvements opérés par les communes sur le produit brut des jeux dans les casinos régis par la loi du 15 juin 1907 réglementant le jeu dans les cercles et les casinos des stations balnéaires, thermales et climatiques en vertu des clauses des cahiers des charges de ces établissements ne doit, en aucun cas, dépasser 15 %. Lesdits prélèvements ont la même assiette que le prélèvement de l'Etat, c'est-à-dire s'appliquent au produit brut des jeux diminué de 25 %. Lorsque le taux du prélèvement de l'Etat ajouté au taux du prélèvement communal dépasse 80 %, le taux du prélèvement de l'Etat est réduit de façon que le total des deux prélèvements soit de 80 %. Les communes peuvent, par convention, reverser tout ou partie du prélèvement au groupement de communes ou au syndicat mixte dont elles sont membres lorsqu'il réalise des actions de promotion en faveur du tourisme. " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commune de Saint-Martin d'Uriage a formé avec la COMMUNE DE VAULNAVEYS LE HAUT le syndicat intercommunal de gestion de la station d'Uriage (SIGU), dont les statuts, approuvés par délibérations des deux conseils municipaux, ont été validés par le préfet de l'Isère, par arrêté du 15 septembre 1959 modifié par arrêté du 20 décembre 1977 ; que l'article 5 desdits statuts prévoit que " le produit des jeux du casino, perçu précédemment par la chambre d'industrie thermale d'Uriage, figure parmi les ressources du syndicat " ; que ces stipulations n'ont pas été modifiées ou abrogées par la suite, même si la procédure de dissolution du syndicat a été engagée par le préfet de l'Isère en mai 2011, sans aboutir ; qu'elles étaient en vigueur au 30 juin 2010, date d'intervention de l'arrêté préfectoral attaqué réglant le budget 2010 du SIGU ; que la commune de Saint-Martin d'Uriage fait valoir qu'elle n'a pas conclu avec le syndicat la convention prévue par le dernier alinéa de l'article L. 2333-54 précité du code ; que, toutefois, les dispositions de cet article n'ont eu ni pour objet, ni pour effet, de modifier l'engagement prévu par l'article 5 précité des statuts ou d'entrainer sa caducité ; que les circonstances que la clause fixée par l'article 5 n'ait pas été appliquée pendant plusieurs années, que la commune de Saint-Martin d'Uriage soit devenue seule propriétaire du casino, qu'elle ait obtenu l'autorisation du ministère de l'intérieur de le rouvrir en 1993, et qu'elle en ait confié l'exploitation à une société privée, par convention du 2 mars 1994, ne faisaient pas obstacle à ce que le SIGU continue à percevoir le produit des jeux du casino, en application de l'article 5 des statuts, resté en vigueur ; qu'il suit de là que, sans qu'il soit besoin d'examiner ses autres moyens et de statuer sur la régularité du jugement, la COMMUNE DE VAULNAVEYS LE HAUT est fondée à soutenir que les recettes du syndicat intercommunal pour l'année 2010, qui omettent ledit produit des jeux, n'ont pas été évaluées de façon sincère, en méconnaissance de l'article L. 1612-14 du code général des collectivités territoriales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la COMMUNE DE VAULNAVEYS LE HAUT est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 30 juin 2010 ;

Sur les demandes d'injonction :

Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de l'Isère arrête à nouveau le budget 2010 du syndicat en y intégrant en recettes le produit des jeux du casino ; qu'il convient, par suite, d'enjoindre au préfet d'y procéder, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit utile d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Considérant que si la commune requérante demande à la Cour d'annuler le jugement attaqué en tant qu'il a refusé d'enjoindre au préfet, sous astreinte, et en exécution d'un précédent jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 19 mars 2008, de régler le budget 2004 du syndicat, et d'accueillir ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, elle n'assortit lesdites conclusions de l'énoncé d'aucun moyen ; que ces conclusions, dès lors, sont vouées au rejet ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de cet article font obstacle à la condamnation de la commune requérante, qui n'est pas partie perdante à l'instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la COMMUNE DE VAULNAVEYS LE HAUT et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 24 février 2011 du Tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet de l'Isère du 30 juin 2010 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Isère, dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt, d'arrêter et de régler le budget primitif 2010 du syndicat intercommunal de gestion de la station d'Uriage, en y incluant en recettes le produit des jeux du casino prévu par l'article 5 des statuts, calculé en application des dispositions de l'article L. 2333-54 du code général des collectivités territoriales.

Article 4 : L'Etat versera à la COMMUNE DE VAULNAVEYS LE HAUT une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE VAULNAVEYS LE HAUT, au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration, au syndicat intercommunal de gestion de la station d'Uriage, et à la commune de Saint-Martin d'Uriage.

Délibéré après l'audience du 28 février 2012 à laquelle siégeaient :

M. Fontanelle, président de chambre,

M. Montsec, président-assesseur,

M. Rabaté, président-assesseur,

M. Seillet, premier conseiller,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 mars 2012.

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N° 11LY00992


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 5
Numéro d'arrêt : 11LY00992
Date de la décision : 15/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Département - Finances départementales - Recettes.

Collectivités territoriales - Coopération - Finances des organismes de coopération.


Composition du Tribunal
Président : M. FONTANELLE
Rapporteur ?: M. Vincent RABATE
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : LIOCHON et DURAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-03-15;11ly00992 ?
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