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01/03/2012 | FRANCE | N°10LY02646

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 01 mars 2012, 10LY02646


Vu la requête enregistrée le 26 novembre 2010, présentée pour la COMMUNE D'UGINE (73401) ;

La COMMUNE D'UGINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 070143 du 15 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant, dans le dernier état de ses écritures, à la condamnation de la société SMAC à lui verser, outre intérêts de droit à compter du 8 janvier 2007 et capitalisation, sur le fondement de la garantie décennale, les sommes de 74 000 euros en indemnisation des travaux de reprise de l'asphalte du parking public am

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Vu la requête enregistrée le 26 novembre 2010, présentée pour la COMMUNE D'UGINE (73401) ;

La COMMUNE D'UGINE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 070143 du 15 octobre 2010 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant, dans le dernier état de ses écritures, à la condamnation de la société SMAC à lui verser, outre intérêts de droit à compter du 8 janvier 2007 et capitalisation, sur le fondement de la garantie décennale, les sommes de 74 000 euros en indemnisation des travaux de reprise de l'asphalte du parking public aménagé place du Val d'Arly, de 10 886,59 euros et de 4 688,32 euros en indemnisation des travaux de reprise de l'étanchéité du parking privé souterrain aménagé sous la place du Val d'Arly, de 11 643,06 euros en indemnisation des travaux de reprise du béton du même ouvrage et de 5 000 euros en indemnisation des désordres affectant le revêtement et des troubles de jouissance résultant de ces désordres ;

2°) de condamner la société SMAC à lui verser les sommes de 74 000 euros, 10 886,59 euros, 4 688,32 euros, 11 643,06 euros et 5 000 euros outre intérêts de droit à compter de l'enregistrement de la présente requête et capitalisation un an après cet enregistrement ;

3°) de mettre à la charge de la société SMAC une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La COMMUNE D'UGINE soutient que les désordres généralisés qui compromettent à la fois la circulation des véhicules en surface et l'étanchéité du sous-sol, rendent l'ouvrage impropre à sa double destination et entrent dans le champ d'application de la garantie décennale ; que dans la mesure où ils affectent les zones ayant fait l'objet de reprises elles-mêmes couvertes par la garantie décennale, ils constituent une aggravation des désordres initiaux ; que les chefs de préjudices résultent de devis présentés par la société SMAC pour le revêtement ; que doivent être également indemnisées les dépenses de reprise du support de béton dont l'effritement provient directement des infiltrations elles-mêmes provoquées par la détérioration du revêtement du parking public ; que les troubles de jouissance résultent des moyens communaux affectés à l'examen des plaintes des riverains et au traitement du sinistre ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 26 juillet 2011, présenté pour la société SMAC dont le siège est 40 rue Fanfan la Tulipe à Boulogne-Billancourt (92653 cedex) ;

La société SMAC conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge de la COMMUNE D'UGINE une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société SMAC soutient que s'ils gênent les utilisateurs, les désordres ne font pas obstacle à l'utilisation de l'ouvrage et ne le rendent donc pas impropre à sa destination ; que la reprise des désordres du parking doit être limitée à la somme de 9 034,25 euros HT correspondant au devis des travaux approuvé par l'expert et annexé au protocole transactionnel qui aurait été mis en oeuvre si la COMMUNE D'UGINE avait réalisé les travaux de reprise du béton du sous-sol dont la dégradation ne résulte pas des désordres litigieux ; que, pour le même motif, la réalisation d'une étanchéité provisoire rendue nécessaire par l'absence de réparation du béton, ne doit pas lui incomber ; que cette dépense, soit 4 688,32 euros, doit rester à la charge de la requérante ; que la réalité des troubles de jouissance n'est pas établie dès lors que les désordres n'ont pas fait obstacle à l'utilisation de l'ouvrage ;

Vu le mémoire enregistré le 29 août 2011 par lequel la COMMUNE D'UGINE conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 8 novembre 2011 par lequel la société SMAC conclut aux mêmes fins que son premier mémoire par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 février 2012 :

- le rapport de M. Arbarétaz, premier conseiller ;

- les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public ;

- les observations de Me Balestas, représentant la COMMUNE D'UGINE, et de Me Clerc, représentant la société SMAC ;

Sur la responsabilité décennale de la société SMAC :

Considérant qu'en vertu des principes dont s'inspirent les dispositions aujourd'hui codifiées aux articles 1792 et 1792-4-1 du code civil, les constructeurs sont pendant dix ans à compter de la réception, responsables de plein droit des désordres, même résultant d'un vice du sol, apparus postérieurement à la réception qui sont de nature à compromettre la solidité de l'ouvrage ou à le rendre impropre à sa destination ;

Considérant que le marché attribué à la société SMAC le 9 août 1993 portait non seulement sur la réalisation d'une couche d'asphalte sur la place publique du Val d'Arly mais aussi sur la pose d'un nouveau dispositif d'étanchéité permettant de protéger le parc privé de stationnement construit sous la place ; que, dès lors, la destination de l'ouvrage et, partant, l'étendue de la garantie décennale due par le constructeur doivent s'apprécier en fonction de cette double fonction ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la dégradation du revêtement de la place du Val d'Arly, si elle ne fait pas obstacle à la circulation et au stationnement publics, expose le parc de stationnement souterrain aux infiltrations d'eau pluviale et de fonte des neiges ; que, dès lors, ces désordres rendent l'ouvrage public impropre à sa destination qui est, non seulement de permettre la circulation publique en surface, mais de protéger l'ouvrage qu'il recouvre ; que ces désordres sont imputables à la société SMAC qui a réalisé le revêtement de la place du Val d'Arly et engage sa responsabilité décennale ;

Considérant qu'il suit de là, d'une part, que la COMMUNE D'UGINE est fondée à demander l'annulation du jugement attaqué, d'autre part, qu'il y a lieu d'entrer en voie de condamnation contre la société SMAC ;

Considérant qu'il résulte des conclusions non contestées de l'expertise, que les travaux de réfection de l'enrobé s'élèvent à la somme non contestée de 9 467,54 euros TTC ; que la société SMAC n'ayant pas effectué en temps utile lesdits travaux, la collectivité requérante a exposé des frais supplémentaires d'un montant non contesté de 4 688,32 euros TTC, afin de protéger l'ouvrage de nouvelles dégradations au cours de l'hiver 2008/2009 ; que le montant de la condamnation de la société SMAC doit s'élever, en conséquence, à 14 155,86 euros TTC ;

Considérant, en revanche, que s'il est constant que le parc de stationnement souterrain était exposé à des infiltrations d'eau, rien ne permet d'imputer la dégradation généralisée des bétons à la reptation du revêtement de la place du Val d'Arly, en l'absence d'éléments relatifs à l'état d'entretien et de vétusté de cet ouvrage avant la survenance des désordres litigieux ; qu'il suit de là que la COMMUNE D'UGINE n'est pas fondée à demander la condamnation de la société SMAC à l'indemniser du coût de reprise de l'ouvrage souterrain ; qu'enfin, l'existence de troubles de jouissance n'étant pas établie, la COMMUNE D'UGINE ne saurait être indemnisée de ce chef ;

Considérant que, comme elle le demande, la COMMUNE D'UGINE a droit, en application de l'article 1153 du code civil, aux intérêts au taux légal sur la condamnation de 14 155,86 euros TTC à compter de la date d'enregistrement de la présente requête soit le 26 novembre 2010 ; qu'ils seront capitalisés au 26 novembre 2011 en application de l'article 1154 du même code ;

Sur la charge des dépens de première instance :

Considérant qu'à l'issue de l'instance d'appel, la société SMAC est partie perdante au sens de l'article R. 761-1 du code de justice administrative ; que l'expertise ordonnée en référé par les premiers juges ayant été utile à la résolution du litige et en l'absence de circonstances particulières, il y a lieu de mettre à la charge de ladite entreprise les frais et honoraires d'expertise liquidés à la somme de 6 093,29 euros ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, d'une part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société SMAC une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la COMMUNE D'UGINE et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Cour fasse bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais exposés à l'occasion du litige soumis au juge et non compris dans les dépens ; que, dès lors, les conclusions présentées par la société SMAC doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 070143 du Tribunal administratif de Grenoble en date du 15 octobre 2010 est annulé.

Article 2 : La société SMAC est condamnée à verser à la COMMUNE D'UGINE une somme de 14 155,86 TTC assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 novembre 2010, capitalisés au 26 novembre 2011.

Article 3 : Les frais et honoraires d'expertise de première instance liquidés à la somme de 6 093,29 euros, sont mis à la charge de la société SMAC.

Article 4 : La société SMAC versera à la COMMUNE D'UGINE une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE D'UGINE, à la société SMAC et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Délibéré après l'audience du 9 février 2012 à laquelle siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Arbarétaz, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er mars 2012.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY02646
Date de la décision : 01/03/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-06-01-04-03-02 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Responsabilité décennale. Désordres de nature à engager la responsabilité décennale des constructeurs. Ont ce caractère.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Philippe ARBARETAZ
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : BALESTAS et DETROYAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-03-01;10ly02646 ?
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