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31/01/2012 | FRANCE | N°10LY01292

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 31 janvier 2012, 10LY01292


Vu la requête, enregistrée le 31 mai 2010, présentée pour la SOCIETE PUIGRENIER représentée par ses représentants légaux, dont le siège est quai de Stalingrad BP 1126 à Monluçon (03103) ;

La société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801593 du 18 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de trois titres de recettes émis à son encontre le 6 juin 2008 par l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions pour des montants de 25 716,18 euros, 804,40 euros, et 10 717,34

euros ;

2°) d'annuler lesdits titres ;

3°) de condamner France Agrimer à lu...

Vu la requête, enregistrée le 31 mai 2010, présentée pour la SOCIETE PUIGRENIER représentée par ses représentants légaux, dont le siège est quai de Stalingrad BP 1126 à Monluçon (03103) ;

La société demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0801593 du 18 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation de trois titres de recettes émis à son encontre le 6 juin 2008 par l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions pour des montants de 25 716,18 euros, 804,40 euros, et 10 717,34 euros ;

2°) d'annuler lesdits titres ;

3°) de condamner France Agrimer à lui payer une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit, car France Agrimer, qui vient aux droits de l'office de l'élevage, devait recourir à un avocat, selon l'article R. 431-2 du code de justice administrative, car, dans l'affaire soumise à la Cour, les conclusions de la société tendent à la décharge d'une somme d'argent qui lui est réclamée ; que le Tribunal aurait dû écarter des débats les pièces présentées en défense ; que les titres de recettes ne sont pas motivés et n'indiquent pas les bases de liquidation, en violation de l'article 81 du décret du 29 décembre 1962, applicable aux établissements publics industriels et commerciaux comme l'office, ainsi que l'a jugé la décision Ifremer du Conseil d'Etat ; que les titres de recettes ne font que référence à un courrier d'envoi, lequel ne précise pas suffisamment les bases de liquidation ; que le courrier d'accompagnement n'est pas suffisamment précis pour l'adjudication 258 en se bornant à indiquer le montant, et le courrier n'indique pas les éléments permettant de calculer les montants, la facture 93365 étant d'un montant de 29 594,56 euros, montant supérieur à celui indiqué dans le courrier d'accompagnement du titre de recette ; qu'en se fondant sur un courrier précédemment adressé au débiteur, le Tribunal n'a pas tenu compte de la jurisprudence administrative et le titre de recette et le courrier d'accompagnement ne font pas référence aux dispositions communautaires ou nationales permettant de demander le remboursement de sommes prétendument indues ; que ni le règlement n° 562/2000 du 15 mars 2000, ni les textes nationaux figurant sur les titres de recettes ne prévoient les modalités d'un tel recouvrement ; que la SOCIETE PUIGRENIER ne pouvait pas connaître les motifs des sanctions qui ne sont pas suffisamment motivées, alors que le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, par jugement Puigrenier du 6 avril 2006, a rappelé l'obligation de motivation, comme les cours administratives d'appel ; que l'office a commis une erreur de droit, car il estime que la modification du marquage des carcasses par le responsable des achats de la société n'est pas conforme aux textes (article 4 du règlement CE n° 562/2000 et article 4 du règlement CEE n° 1208/81 du Conseil du 28 avril 1981) ; qu'il faut tenir compte de l'article 4-3 du règlement CE n° 562/2000 qui indique que le refus d'un produit ne peut intervenir qu'après contrôle approfondi de chaque partie de la carcasse ; qu'en effet, l'acheteur de l'office lors de l'abattage a effectué un contrôle approfondi des carcasses qui lui a permis de refuser les carcasses non conformes, comme l'adjudication 264 ; que le rapport de contrôle de la commission interministérielle reprend les constatations de la direction de la concurrence qui indique page 5 que 59 carcasses sur 64 ont été retenues pour le lot A facture 93332 du 20 avril 2001 ; que l'absence de remise en cause par l'acheteur de l'office du classement effectué juste après l'abattage par le responsables des achats de la SOCIETE PUIGRENIER confirme qu'aucune irrégularité ne peut être retenue ; qu'il apparaît que les modifications étaient faites au vu et su de l'agent de l'office, comme l'a indiqué la société dans le procès-verbal de déclaration de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), lequel pouvait refuser les modifications et l'a fait, dans certains cas, comme pour une adjudication qui a conduit à la perte de la caution de 21 600 euros ; que, c'est à tort que, l'office indique, dans son courrier d'accompagnement du titre de recettes, qu'il n'y a pas de lien entre les carcasses refusées à l'époque par l'office et celles concernées par le rapport de contrôle de l'administration ; que ce contrôle porte sur les trois adjudications qui ont fait l'objet des titres de recettes, donc le lien est avéré, et l'office ne peut invoquer sa propre turpitude, son acheteur n'ayant pas refusé les carcasses et n'ayant pas été trompé ; que le Tribunal estime que les modifications faites par la SOCIETE PUIGRENIER constituent des manoeuvres frauduleuses, et que l'agent de l'office n'était pas en permanence présent sur le site, sans indiquer sur quoi il se fonde pour l'affirmer ; que, de plus, la SOCIETE PUIGRENIER a aussi modifié le marquage en faveur de l'office, ce qui n'a pas été compensé et démontre sa bonne foi ; qu'il y a défaut de base légale et de fondement juridique, l'office ne mentionnant pas dans les titres et les courriers d'accompagnement les bases légales du reversement, les textes visés par l'office y étant étrangers ; que ceci est confirmé par l'article 2 du règlement n° 2988/1995 de la Commission du 18 décembre 1995 ; que l'office n'a jamais contesté dans ses écritures l'absence de base légale, et le jugement n'indique pas ces bases ; qu'à titre subsidiaire le quantum doit être modifié ; que l'office ne tient pas compte du classement effectué par son acheteur et du procès-verbal de la DGCCRF qui constate que la différence de classement modifie légèrement le montant ; que, pour la somme de 11 152,05 euros, facture 93365, il n'est dû que 453,25 euros, et il en est de même des autres factures ; que le calcul doit tenir compte des restitutions qui auraient dû être versées si les carcasses n'avaient pas été surclassées, ce qui est contesté car fait avec l'accord de l'agent de l'office ;

Vu le jugement et les titres de recettes attaqués ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 janvier 2011, présenté pour France Agrimer, qui conclut au rejet du recours, à la confirmation du jugement attaqué, et à la condamnation de la requérante à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que, pour le ministère d'avocat, l'article R. 431-2 du code de justice administrative s'applique en demande, non en défense ; que, sur l'indication des bases de liquidation par les titres de recettes, les motifs du jugement attaqué doivent être approuvés, la décision n° 262299 du Conseil d'Etat Commune de Saint-Maurice les Charencey permettant que les bases de liquidation soient préalablement portées à la connaissance du débiteur ; que les titres de recettes et leurs annexes mentionnent les n° d'adjudication, les séances d'achat, les n° de facture d'achat par l'office, les quantités en anomalie, les prix d'achat et le coefficient de conversion figurant sur la facture d'achat de l'époque ; que ces bases sont complétées par le courrier joint à la notification des titres qui confirme les calculs faits par le courrier du 7 juin 2007 et reprend les informations sur les titres ; que ce courrier de juin 2007, qui donne à la société le n° de chaque animal en anomalie, est rattaché aux bons de livraison, auxquels correspond une facture d'achat ; que la somme et la quantité des animaux en anomalie sur les bons de livraison listés correspond au montant indiqué dans le courrier du 7 juin 2007, repris dans le courrier du 6 juin 2008 et les titres de recettes ; qu'ainsi la société disposait des éléments nécessaires pour identifier les opérations et les éléments du décompte des sommes ; qu'il n'y a pas de discordance entre les montants des factures et des reversements ; que, sur les factures 93365 et 93545 citées, les discordances sont logiques car l'ensemble de la facture et des livraisons n'est pas remis en cause, seuls sont retenus les animaux listés en anomalie pour lesquels le remboursement du prix d'achat est demandé ; que le jugement du Tribunal indique les bases légales, que les titres les mentionnent, et il doit être confirmé ; que l'office dans ses mémoires a contesté l'absence de base légale ; que le principe du reversement des aides indues est renforcé par l'article 4 du règlement n° 2988/95 du Conseil du 18 décembre 1995 ; que la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) dans son arrêt du 20 mars 1997 n° C624/95 a jugé que les textes nationaux sont inopposables s'ils compromettent la bonne application des règlements et principes communautaires, ce qu'a confirmé la décision n° 274923 du 29 mars 2006 du Conseil d'Etat ; que le règlement n° 562/2000 s'inscrit dans un ensemble légal de préservation des intérêts financiers de l'union européenne ; que l'office en première instance a rappelé qu'il était organisme payeur au sens du règlement de la Commission CE n° 85/2006 du 21 juin 2006, et devait poursuivre les irrégularités, article 9, les titres n'étant pas des sanctions selon l'article 4 paragraphe 4 du règlement ; que le Tribunal a donc écarté à juste titre l'erreur de droit ; qu'en application de l'article 4 paragraphe 1 du règlement CE n° 1208/81 et de l'article 4 du règlement CE n° 562/2000, toute carcasse ou semi-carcasse où le marquage est illisible ou double est refusée par l'acheteur public ; que la DGCCRF a indiqué dans son rapport de contrôle du 10 juin 2003 qu'il y avait des différences entre le classement présenté à l'office et celui de l'abattoir sur les adjudications 258, 264, et 267, lesquelles ont été constatées par rapprochement entre les factures d'achat de l'office et les tickets de pesée des abattoirs ; que cette pratique est contraire à la règlementation, article 3 du règlement CE n° 344/91 de la Commission du 13 février 1991 et décret n° 94-808 du 12 septembre 1994, qui prévoit un seul classement, par une personne, qui ne doit pas être modifié, car elle révèle un double classement, le 1er étant modifié sur la carcasse après l'intervention du classificateur de l'abattoir ; que la non-conformité des produits résulte d'une double procédure de classement et d'identification irrégulière que l'acheteur de l'office ne pouvait connaître, seul un contrôle en abattoir pouvant le révéler ; que chaque fois qu'un défaut de conformité était manifeste l'acheteur de l'office a refusé le produit, comme l'adjudication 264 où les motifs du refus sont expliqués ; que l'acheteur de l'office n'était pas présent à l'abattoir et ignorait les modifications, la carcasse ne répondant pas aux conditions de l'article 4 du règlement CE n° 562/2000 ; que c'est lors d'un contrôle à postériori de l'administration que l'irrégularité a été révélée ; que, même si le contrôle de l'office avait été défaillant, ce qui n'est pas le cas, le reversement serait dû ; que, sur le calcul, la méthode suggérée par la SOCIETE PUIGRENIER basée sur un différentiel, ne peut être retenue, car en application des articles 29 et 30 du règlement CE n° 562/2000 l'Office est tenu de refuser l'ensemble des carcasses non conformes, sans reclassement du produit ; que ce principe implique l'impossibilité de compenser les produits surpayés et sous-payés, comme l'a jugé le Tribunal ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 février 2011, présenté pour la requérante, tendant aux mêmes fins que celles invoquées dans la requête, et sollicitant, en outre, le sursis à statuer et la saisine de la Cour de justice des communautés européennes d'une question préjudicielle ;

Elle soutient que, sur l'erreur de droit, la procédure suivie lors des adjudications impliquait que le responsable des achats de la société, dans les dix minutes suivant l'abattage, procède à la rectification du classement effectué par le classificateur de l'Office, cf procès-verbal du 16 mai 2003, puis l'agent de l'Office achetait les carcasses conformément au classement de ces dernières et non d'après le ticket de pesée ; que, par suite, l'agent de l'Office était informé de la modification du classement et pouvait refuser la carcasse s'il l'estimait non conforme ; qu'il ne l'a pas fait, ce qui exclut les manoeuvres frauduleuses ; que le classement effectué par l'appelante est conforme à la règlementation, le règlement n° 562/2000 ne prévoyant pas qu'un double marquage emporte refus d'achat, seul le marquage lisible avec une encre inaltérable étant prévu à l'article 4 ; que, sur la proportionnalité, la requérante a subi une double peine, la perte des aides et l'impossibilité de bénéficier du produit de la vente des carcasses, contraire au principe de proportionnalité définie par CJCE ; qu'elle a droit aux compensations, sauf à saisir la Cour de justice d'une question préjudicielle ;

Vu l'ordonnance du 10 décembre 2010 fixant la clôture de l'instruction au 7 janvier 2011 à 16 heures 30 ;

Vu l'ordonnance du 13 janvier 2011, par laquelle la date de la clôture de l'instruction a été reportée au 4 février 2011 à 16 heures 30 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le règlement CEE n° 1208/81 du Conseil du 28 avril 1981 établissant la liste communautaire du classement des carcasses de gros bovins ;

Vu le règlement CE Euratom n° 2988/95 du Conseil du 18 décembre 1995 relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes ;

Vu le règlement CE n° 562/2000 de la Commission du 15 mars 2000 portant modalités d'application du règlement CE n° 1254/1999 du Conseil en ce qui concerne les régimes d'achat à l'intervention publique dans le secteur de la viande ;

Vu le code rural ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le décret n° 94-808 du 12 septembre 1994 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 janvier 2012 :

- le rapport de M. Rabaté, président ;

- les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

Considérant que la SOCIETE PUIGRENIER a été déclarée adjudicataire d'adjudications de viande bovine, organisées les 19 décembre 2000, 27 mars et 15 mai 2001 par l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions, auquel s'est substitué l'établissement public national de produits d'agriculture et de la mer (France Agrimer) ; qu'elle a bénéficié pour ces trois adjudications d'aides à l'intervention ; qu'estimant, au vu d'un contrôle administratif réalisé en mai 2003 par la direction générale de la consommation, de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF), que les conditions d'éligibilité des produits n'étaient pas respectées, l'office, par trois titres exécutoires émis le 8 juin 2008 pour des montants respectifs de 25 716,18 euros, 804,40 euros, et 10 717,34 euros, a mis à la charge de la société le reversement des aides perçues pour les carcasses et demi-carcasses litigieuses ; que la SOCIETE PUIGRENIER demande à la Cour l'annulation du jugement du 18 mars 2010 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand rejetant sa demande d'annulation des titres, ainsi que l'annulation desdits titres ;

En ce qui concerne la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 431-2 du code de justice administrative : Les requêtes et les mémoires doivent, à peine d'irrecevabilité, être présentés soit par un avocat, soit par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, soit par un avoué en exercice dans le ressort du tribunal administratif intéressé, lorsque les conclusions de la demande tendent au paiement d'une somme d'argent, à la décharge ou à la réduction de sommes dont le paiement est réclamé au requérant ou à la solution d'un litige né d'un contrat. ;

Considérant que l'appelante soutient que le tribunal administratif devait écarter des débats les mémoires et pièces produites par France Agrimer, défendeur en première instance, lequel n'avait pas d'avocat, en méconnaissance de l'article R. 431-2 précité du code de justice administrative ; que, toutefois, les mémoires présentés en première instance par France Agrimer tendaient au rejet de la demande, et non au paiement à la réduction ou à la décharge d'une somme d'argent ; qu'ainsi ils ne nécessitaient pas le ministère d'un avocat ; que, par suite, l'exception d'irrégularité du jugement invoquée sera écartée ;

En ce qui concerne la demande d'annulation :

Sur l'indication des bases de liquidation des titres de recettes :

Considérant qu'un état exécutoire doit indiquer les bases de liquidation de la dette, alors même qu'il est émis par une personne publique autre que l'Etat, pour lequel cette obligation est expressément prévue par l'article 81 du décret du 29 décembre 1962 ; qu'en jugeant qu'en application de ce principe, l'office national interprofessionnel de l'élevage et de ses productions ne pouvait mettre en recouvrement sa créance, sans indiquer, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou adressé un an avant au débiteur, les bases et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde pour mettre les sommes en cause à la charge des redevables, le Tribunal n'a pas commis d'erreur de droit ;

Considérant qu'il convient, par adoption des motifs retenus par les premiers juges, d'écarter le moyen invoqué par l'appelante, tiré du non respect par l'Office de son obligation d'indication des bases de liquidation des titres de recettes ;

Sur l'erreur de droit :

Considérant que la SOCIETE PUIGRENIER soutient que le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit, le double marquage et le double classement des carcasses qui lui sont reprochés ne constituant pas une irrégularité prohibée par la règlementation communautaire ;

Considérant que l'article 4 du règlement susvisé du 15 mars 2000 dispose: Conditions d'éligibilité des produits : 3. Ne peuvent être achetées que des carcasses ou demi-carcasses (...) b) classées conformément à la grille communautaire de classement prévue par le règlement CEE n° 1208/81 (...) c) identifiées, d'une part par un marquage indiquant la catégorie et les classes de conformation et d'état d'engraissement et, d'autre part, par l'inscription du numéro d'identification ou d'abattage. Le marquage (...) doit être parfaitement lisible (...). ; que l'article 1er du règlement n° 1208/81 du 28 avril 1981 prévoit : 1. le classement des carcasses ou des demi-carcasses doit intervenir aussi rapidement que possible après l'abattage et être effectué dans l'abattoir. ; qu'enfin l'article 4 du décret n° 94-808 du 12 septembre 1994 dispose : L'exécution des opérations de pesage, classement et marquage est confiée à des personnes qualifiées inscrites, en considération de leur formation ou de leur expérience professionnelle, sur une liste d'aptitude établie par le directeur de l'Office interprofessionnel des viandes, de l'élevage et de l'aviculture. ;

Considérant que le rapport de contrôle effectué le 10 juin 2003 par la DGCCRF, par rapprochement des factures d'achat de l'Office et des tickets de pesée des abattoirs, a permis de révéler des différences entre le classement établi par l'Office, et le classement retenu par l'abattoir sur les adjudications n° 258, 264 et n° 267, organisées les 19 décembre 2000, 27 mars et 15 mai 2001 ; qu'il est constant que le responsable des achats de la SOCIETE PUIGRENIER, dont il n'est ni soutenu, ni même allégué, qu'il ait été inscrit sur la liste d'aptitude établie par le directeur de l'office interprofessionnel de viandes pour exécuter des opérations de marquage des carcasses ou demi-carcasses a, alors qu'il n'était pas qualifié pour ce faire, dans les dix minutes suivant l'abattage, procédé à la modification du marquage effectué par le classificateur de l'abattoir, sans qu'il ait été procédé à une rectification des tickets de pesée des abattoirs ; qu'il a également modifié le classement des carcasses ; que ces agissements, dès lors que, contrairement à ce que soutient la SOCIETE PUIGRENIER, les dispositions communautaires précitées faisant obstacle à ce qu'il soit procédé à un double marquage et à un double classement, avaient pour effet, préalablement à leur présentation à l'acheteur public, de survaloriser les carcasses par rapport au classement initial effectué lors de l'abattage et pour objet, d'obtenir un prix d'achat supérieur à celui qui aurait dû être ; que, par suite, c'est à bon droit que l'Office, se fondant sur l'article 4 précité du règlement du 15 mars 2000, a remis en cause l'éligibilité des carcasses ; que, dès lors, le moyen invoqué, tiré de l'erreur de droit commise par l'administration, sera écarté ;

Sur la base légale :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er du règlement susvisé 18 décembre 1995: 2. Est constitutive d'une irrégularité toute violation d'une disposition du droit communautaire résultant d'un acte ou d'une omission d'un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de procéder préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci (...) par une dépense indue. ; qu'aux termes de l'article 4 du même règlement : 1. Toute irrégularité entraîne en règle générale, le retrait de l'avantage indûment obtenu : par l'obligation de verser les montants dus ou de rembourser les montants indûment perçus, par la perte totale ou partielle de la garantie constituée à l'appui de la demande d'un avantage octroyé ou lors de la perception d'une avance. 2. L'application des mesures visées au paragraphe 1 est limitée au retrait de l'avantage obtenu augmenté, si cela est prévu, d'intérêts qui peuvent être déterminés de façon forfaitaire. 3. Les actes pour lesquels il est établi qu'ils ont pour but d'obtenir un avantage contraire aux objectifs du droit communautaire applicable en l'espèce, en créant artificiellement les conditions requises pour l'obtention de cet avantage, ont pour conséquence, selon le cas, soit la non-obtention de l'avantage, soit son retrait. 4. Les mesures prévues par le présent article ne sont pas considérées comme des sanctions. ; qu'aux termes de l'article 29 du règlement CE n° 562/2000 de la Commission du 15 mars 2000 : 3. par dérogation aux dispositions des paragraphes 1 et 2, lorsque, en raison d'une négligence grave ou d'une fraude, l'entreprise de désossage ne respecte pas les dispositions des articles 20 et 28, tous les produits obtenus après désossage pendant la journée pour laquelle le non-respect des dispositions susmentionnées a été établi sont refusés par l'organisme d'intervention et aucune rémunération n'est due (...). ; que les articles 20 et 28 du règlement sont relatifs aux opérations de désossage ; que l'article 30 du même règlement prévoit : (...) 4. Au cours de la période de stockage, l'autorité compétente procède à un contrôle régulier portant sur des quantités significatives des produits stockés à la suite des adjudications effectuées au cours du mois. Les produits qui, au cours du contrôle, ne sont pas trouvés conformes aux exigences prévues dans le présent règlement sont refusés et marqués comme tels. L'autorité compétente procède, si nécessaire, et sans préjudice de l'application de sanctions, au recouvrement des paiements auprès des parties intéressées responsables (...). ;

Considérant que le jugement attaqué a estimé que les dispositions précitées des articles 29 et 30 du règlement n° 562/2000 habilitaient l'Office à réclamer le reversement des aides versées ; que, toutefois, il ne ressort d'aucune pièce produite, et pas du contrôle de la DGCCRF susmentionné, que la société ait manqué aux règles de désossage des bovins ; qu'il résulte de l'instruction que la surfacturation et l'irrégularité du marquage relevés par la DGCCRF l'ont été au cours d'un contrôle de pièces comptables réalisé en mai 2003, soit deux ans après les adjudications, et non lors d'un contrôle des produits réalisé dans le mois des adjudications ; que les carcasses litigieuses n'avaient pas été refusées par l'Office, mais acceptées et payées par ce dernier ; que, dans ces conditions, les articles 29 et 30 précités du règlement du 15 mars 2000 n'étaient pas applicables à l'appelante ;

Considérant toutefois que France Agrimer fait valoir en appel que le reversement des aides trouve un fondement légal dans les dispositions de l'article 4 du règlement CE Euratom du 18 décembre 1995 ; qu'il résulte de l'instruction et qu'il n'est pas sérieusement contesté que le montant du reversement demandé à la société, correspondant au prix d'achat des carcasses et demi-carcasses dont le classement était irrégulier, coïncide au montant des aides à l'intervention versées à la société pour lesdites carcasses ; que si l'appelante fait valoir que l'acheteur de l'Office était informé de ses pratiques et a manqué à ses obligations de contrôle des produits, ces circonstances ne peuvent avoir d'effet sur la qualification de l'irrégularité, au sens du règlement susvisé du 18 décembre 1995 ; que, par suite, les dispositions précitées de l'article 4 de ce règlement habilitaient l'office à solliciter le reversement des aides perçues pour toutes les carcasses irrégulières ; qu'il suit de là que la SOCIETE PUIGRENIER ne peut demander de compensation pour les différences de pesée qui auraient joué en sa défaveur ;

Sur la motivation :

Considérant que la SOCIETE PUIGRENIER ne peut utilement invoquer le défaut de motivation des titres de recettes litigieux et les dispositions de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, le reversement, en application de l'article 4 précité du règlement du 18 décembre 1995, ne constituant pas une sanction ;

Sur la proportionnalité :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit l'appelante, contrairement à ce qu'elle soutient, n'a subi ni double peine ni sanction du fait du reversement des aides indûment perçues ; que si elle fait valoir à titre subsidiaire que l'Office a tiré un profit indu de la vente des produits considérés comme irréguliers dont elle n'a pu bénéficier, elle n'apporte ni précision ni justificatif quant au prix de vente des produits litigieux qu'elle aurait pu escompter ; que les irrégularités de marquage et de classement constatées sont constitutives de fraude ; que le reversement n'est pas inapte à réaliser les objectifs poursuivis par le règlement du 18 décembre 1995, à savoir la protection des intérêts financiers de l'Union européenne, et la lutte contre les irrégularités et les fraudes, et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ces objectifs ; que, par suite, le reversement demandé ne méconnait pas le principe de proportionnalité ; qu'il suit de là, qu'en l'absence de difficulté sérieuse sur ce point, il n'y pas lieu de saisir la Cour de justice des communautés européennes d'une question préjudicielle, et ce moyen doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE PUIGRENIER n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande d'annulation des trois titres de recettes émis le 8 juin 2008 ;

En ce qui concerne l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à la condamnation de France Agrimer, qui n'est pas partie perdante à l'instance ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la SOCIETE PUIGRENIER à payer à France Agrimer une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par cette dernière et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE PUIGRENIER est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE PUIGRENIER versera à France Agrimer une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE PUIGRENIER et à l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer (France Agrimer).

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2012 à laquelle siégeaient :

M. Fontanelle, président de chambre,

M. Rabaté, président-assesseur,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 janvier 2012.

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N° 10LY01292


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

03-03-06 Agriculture, chasse et pêche. Exploitations agricoles. Aides communautaires.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. FONTANELLE
Rapporteur ?: M. Vincent RABATE
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : ABENSOUR-GIBERT

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 31/01/2012
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10LY01292
Numéro NOR : CETATEXT000025366614 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2012-01-31;10ly01292 ?
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