Vu la requête, enregistrée le 16 septembre 2010, présentée pour M. Guy A, demeurant B ;
M. A demande à la Cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 0800775 du 20 juillet 2010 par laquelle le président de la 6ème chambre du Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions par lesquelles le ministre de l'intérieur a procédé au retrait, respectivement de 2, 2, 2, 1 et 4 points de son permis de conduire à la suite des infractions commises les 27 juillet 2007, 26 septembre 2006, 18 août 2006, 23 mars 2006 et 26 février 2006 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, lesdites décisions ;
3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui restituer ces points dans un délai de 15 jours, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, en application des dispositions des articles L. 911-11 et L. 911-13 du code de justice administrative ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que, contrairement a ce qu'a retenu le premier juge, il a régularisé sa demande devant le Tribunal en fournissant le courrier d'invalidation 48SI récapitulant l'ensemble des retraits de points ; que les décisions critiquées sont entachées d'un vice de procédure, l'administration n'apportant pas la preuve qu'elle a satisfait à l'obligation d'information préalable prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; qu'il n'a été avisé ni de la perte de points encourue, ni des modalités d'accès aux informations y afférentes ni du nombre de points exact ; qu'il n'a pas reçu notification des différents retraits de points ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu le mémoire, enregistré le 29 novembre 2010 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration conclut au rejet de la requête par les moyens que depuis le 13 juin 2003, il n'y a plus d'obligation d'informer le contrevenant du nombre de points susceptibles d'être retirés de son permis de conduire ; que les informations sur le droit d'accès n'ont pas un caractère substantiel ; que les informations prévues par les textes ont été portées à la connaissance du requérant et qu'il appartient à ce dernier de produire les copies des procès-verbaux correspondant aux amendes forfaitaires qu'il a réglées pour justifier que les modèles vierges ne correspondraient pas ; que par la notification de la lettre 48 SI les décisions de retrait de points antérieures deviennent opposables à l'intéressé ;
Vu enregistré le 30 décembre 2010, le mémoire présenté par M. A qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et par le moyen, en outre, que excepté le procès-verbal de contravention du 18 août 2006 produit par le ministre de l'intérieur, les autres procès-verbaux ne sont pas produits ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la route ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 novembre 2011 :
- le rapport de Mme Verley-Cheynel, président-assesseur ;
- et les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public ;
Considérant que M. A a demandé, le 11 février 2008, au Tribunal administratif de Lyon l'annulation de cinq décisions du ministre de l'intérieur portant retrait de points de son permis de conduire à la suite des infractions commises les 27 juillet 2007, 26 septembre 2006, 18 août 2006, 23 mars 2006 et 26 février 2006 ; que si le demandeur s'était borné à produire, à l'appui de sa demande, la copie de l'extrait du relevé d'information intégral relatif à sa situation où elles sont enregistrées, il est constant, qu'à la suite de l'invitation à régulariser qui lui a été faite, il a produit la lettre référencée 48 SI en date du 12 août 2009 par laquelle le ministre de l'intérieur, après avoir procédé au retrait supplémentaire d'un point à la suite d'une nouvelle infraction verbalisée le 9 juin 2008 et rappelé les retraits de points précités, a constaté la perte de validité de son permis de conduire ; que dans la mesure où cette dernière décision, notifiée par lettre recommandée, a rendu opposables à l'intéressé, pour la première fois, les décisions de retraits de points en litige qu'elle récapitule, qui n'avaient été notifiées que par lettre simple, sa production a eu pour effet de régulariser la demande de M. A, sans que la circonstance que ladite décision soit intervenue en cours d'instance ait pu y faire obstacle ; que, par suite, c'est à tort que la demande de M. A a été rejetée comme irrecevable ; qu'ainsi l'ordonnance du président de la 6ème chambre du Tribunal administratif de Lyon en date du 20 juillet 2010 doit être annulée ;
Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Considérant que les conditions de la notification au conducteur des retraits de points de son permis de conduire, prévues par les dispositions de l'article L. 223-3 du code de la route, ne conditionnent pas la régularité de la procédure suivie et partant la légalité de ces retraits ; que M. A ne saurait dès lors utilement se prévaloir de ce que divers retraits de points ne lui auraient pas été notifiés avant l'intervention de la décision constatant la perte de validité de son permis de conduire ;
Considérant qu'il résulte des dispositions des articles L. 223-1, L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route que, lorsqu'il est fait application de la procédure de l'amende forfaitaire ou de la procédure de composition pénale, l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie, que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, lesquelles constituent une garantie essentielle lui permettant de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis ; qu'il appartient à l'administration d'apporter la preuve, par tout moyen, qu'elle a satisfait à cette obligation d'information ;
En ce qui concerne la décision consécutive à l'infraction relevée le 23 mars 2006 :
Considérant qu'il résulte des arrêtés pris pour l'application des articles R. 49-1 et R. 49-10 du code de procédure pénale, notamment de leurs dispositions codifiées à l'article A. 37-8 de ce code, que lorsqu'une contravention mentionnée à l'article L. 121-3 du code de la route est constatée sans interception du véhicule, à l'aide d'un système de contrôle automatisé enregistrant les données en numérique, le service verbalisateur adresse à l'intéressé un formulaire unique d'avis de contravention, qui comprend en bas de page la carte de paiement et comporte, d'une part, les références de l'infraction dont la connaissance est matériellement indispensable pour procéder au paiement de l'amende forfaitaire et, d'autre part, une information suffisante au regard des exigences résultant des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route ; qu'il s'en suit que, lorsqu'il est établi que le titulaire du permis de conduire a payé l'amende forfaitaire prévue à l'article 529 du code de procédure pénale au titre d'une infraction constatée par radar automatique, il découle de cette seule constatation que l'intéressé a nécessairement reçu l'avis de contravention ; qu'eu égard aux mentions dont cet avis doit être revêtu, la même constatation conduit également à regarder comme établi que l'administration s'est acquittée envers lui de son obligation de lui délivrer, préalablement au paiement de l'amende, les informations requises, à moins que l'intéressé, à qui il appartient à cette fin de produire l'avis qu'il a nécessairement reçu, ne démontre avoir été destinataire d'un avis inexact ou incomplet ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'examen du relevé d'information intégral relatif à la situation du permis de conduire du requérant, que la décision de retrait de points consécutive à l'infraction commise le 23 mars 2006 ayant été constatée par radar automatique sans interception du véhicule et M. A ayant payé l'amende forfaitaire, celui-ci a nécessairement reçu l'avis de contravention comportant l'information préalable prévue par les dispositions précitées de l'article L. 223-3 du code de la route ; que le requérant, qui n'a pas produit ce document, n'établit pas qu'il ne comporterait pas une information suffisante ;
En ce qui concerne les décisions consécutives aux infractions relevées les 26 février 2006, 18 août 2006, 26 septembre 2006 et 27 juillet 2007 :
Considérant qu'il résulte des mentions du relevé d'information intégral relatif à la situation du permis de conduire de M. A que le requérant s'est acquitté des amendes forfaitaires correspondant aux infractions précitées, lesquelles ont été verbalisées après interception de son véhicule ; que le ministre de l'intérieur a produit les procès-verbaux des infractions du 18 août 2006 et du 27 juillet 2007, constatées au moyen d'un formulaire conforme aux dispositions des articles A. 37 à A. 37-4 du code de procédure pénale, sur lesquels figure la signature de l'intéressé qui y reconnaît avoir reçu la carte de paiement et l'avis de contravention ; que le modèle de ces avis de contravention comporte les informations requises par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, selon lesquelles, depuis l'entrée en vigueur de la loi du 12 juin 2003 renforçant la lutte contre la violence routière, l'information du seul principe d'un retrait de points est suffisante ; que, faute pour M. A de produire ces avis de contravention pour démontrer qu'ils seraient inexacts ou incomplets, la preuve du respect de l'obligation d'information préalable doit être regardée comme apportée ;
Considérant, en revanche, que s'agissant des infractions commises les 26 février 2006 et 26 septembre 2006, s'il est établi par la mention figurant au système national des permis de conduire que M. A a effectivement réglé les amendes forfaitaires correspondantes, le ministre de l'intérieur, qui ne produit pas les procès-verbaux de ces infractions, n'apporte pas la preuve qui lui incombe de ce que l'administration aurait délivré à l'intéressé un avis de contravention satisfaisant à l'obligation d'information lors de la constatation desdites infractions ; qu'ainsi, le requérant est fondé à soutenir que les décisions par lesquelles le ministre de l'intérieur lui a retiré respectivement quatre points et deux points de son permis de conduire sont entachées d'illégalité et à en demander l'annulation ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ;
Considérant que l'annulation des retraits de 4 points et 2 points consécutifs, respectivement, aux infractions relevées le 26 février 2006 et le 26 septembre 2006 implique nécessairement que le ministre de l'intérieur procède à la reconstitution du capital des points du permis de conduire de M. A en y réintégrant ces 6 points, dans la limite du capital de douze points ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, à ladite reconstitution de points du permis de conduire de M. A ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ;
Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 000 euros au titre des frais que M. A a exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 0800775 du président de la 6ème chambre du Tribunal administratif de Lyon en date du 20 juillet 2010 est annulée.
Article 2 : Les décisions par lesquelles le ministre de l'intérieur a retiré respectivement quatre points et deux points du capital affecté au permis de conduire de M. A, à la suite des infractions verbalisées les 26 février 2006 et 26 septembre 2006, sont annulées.
Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration de réintégrer six points au capital du permis de conduire de M. A, dans la limite d'un total de douze points, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'Etat versera à M. A une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon et des conclusions de sa requête est rejeté.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Guy A et au ministre de l'intérieur, de l'outre mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.
Délibéré après l'audience du 17 novembre 2011, à laquelle siégeaient :
M. du Besset, président de chambre,
Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,
M. Arbarétaz, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 8 décembre 2011.
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N° 10LY02210
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