La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/11/2011 | FRANCE | N°10LY02171

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 10 novembre 2011, 10LY02171


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 septembre 2010, présentée pour M. Gil A, demeurant ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901453 du 8 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que les pénalités y afférentes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui ver

ser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 7 septembre 2010, présentée pour M. Gil A, demeurant ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901453 du 8 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que les pénalités y afférentes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que :

- il ne peut être regardé comme ayant bénéficié de revenus distribués dès lors qu'il a remboursé à la SARL Etablissement Aussert la totalité des sommes que cette dernière lui avait versées ;

- il doit bénéficier de la mesure dite du bouclier fiscal dans la mesure où les impositions mises à sa charge dépassent 50% du montant de ses revenus ;

- il peut se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, de la prise de position de l'administration sur sa situation fiscale contenue dans la décision de rejet de sa réclamation préalable du 25 mai 2009 ;

- la position de l'administration peut être regardée comme un enrichissement sans cause au sens de l'article 1371 du code civil, méconnaissant le principe de l'égalité devant la loi et devant l'impôt garanti par les articles 6 et 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen et remettant en cause le principe de sécurité juridique ;

- les sommes en litige constituent des remboursements de frais kilométriques de nature professionnelle et non un revenu imposable ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- les frais kilométriques et d'entretien remboursés ne correspondent pas à des frais professionnels ou à des charges déductibles de la société ;

- la restitution à la SARL ETABLISSEMENTS A des sommes correspondant aux distributions litigieuses est donc sans incidence sur le bien fondé des impositions supplémentaires mises à la charge de M. Gil A ;

- le requérant ne saurait utilement invoquer, au motif du remboursement des sommes litigieuses à la société, ni les dispositions de l'article 1371 du code civil relatives à l'enrichissement sans cause, ni le principe d'égalité devant la loi auquel l'administration n'a en l'espèce nullement dérogé ;

- les sommes en litige n'ayant pas été régulièrement déclarées par le requérant mais ayant donné lieu à des impositions supplémentaires faisant suite à une procédure de rectification opérée par l'administration, le requérant ne saurait utilement se prévaloir du droit à restitution prévu à l'article 1 du code général des impôts ;

- le requérant ne peut utilement se prévaloir, concernant la position prise par l'administration dans sa décision de rejet de la réclamation, de la garantie prévue par l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales dès lors que l'interprétation de la situation de fait est postérieure à la mise en recouvrement des impositions primitives faisant l'objet des rehaussements et qu'elle n'a jamais indiqué qu'il n'avait bénéficié d'aucun avantage et qu'il était en droit de demander l'annulation des rehaussements, objet du litige ;

Vu l'ordonnance en date du 14 juin 2011 fixant la clôture d'instruction au 12 juillet 2011, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 octobre 2011:

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Considérant que M. A relève appel du jugement du 8 juillet 2010 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que les pénalités y afférentes, auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 23-1 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : Devant les juridictions relevant du Conseil d'Etat (...), le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est, à peine d'irrecevabilité, présenté dans un écrit distinct et motivé. (...) ; qu'aux termes de l'article R. 771-3 du code de justice administrative : Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est soulevé, conformément aux dispositions de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, à peine d'irrecevabilité, dans un mémoire distinct et motivé. Ce mémoire, ainsi que, le cas échéant, l'enveloppe qui le contient, portent la mention : question prioritaire de constitutionnalité ; et qu'aux termes de l'article R. 771-4 du même code : L'irrecevabilité tirée du défaut de présentation, dans un mémoire distinct et motivé, du moyen visé à l'article précédent peut être opposée sans qu'il soit fait application des articles R. 611-7 et R. 612-1 ; que si M. A a entendu, dans sa requête, soutenir que les dispositions du code général des impôts appliquées par l'administration méconnaîtraient le principe à valeur constitutionnelle d'égalité des contribuables devant l'impôt qui découle de l'article 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, celui d'égalité devant la loi issu de l'article 6 de ladite déclaration, et celui de répartition de l'impôt selon la faculté contributive issu dudit article 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, ou encore du principe de sécurité juridique qui découle de l'article 16 de cette déclaration, et ait ainsi entendu poser une question prioritaire de constitutionnalité, lesdits moyens n'ont pas été présentés par le mémoire distinct et motivé prévu à l'article R. 771-3 du code de justice administrative ; qu'ils ne peuvent, par suite, qu'être écartés comme irrecevables ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts 1. Sont considérés comme revenus distribués : (...) / 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. ;

Considérant qu'au titre des années 2005 et 2006, l'administration fiscale a constaté que les frais kilométriques remboursés par la Sarl Etablissements Aussert, dont M. A était associé ainsi que le gérant, ont été calculés par cette dernière suivant le barème établi par l'administration mais en retenant un nombre de kilomètres supérieur à celui inscrit au compteur du véhicule de M. A ; qu'elle a alors admis en charges déductibles les frais kilométriques correspondant au nombre de kilomètres inscrits au compteur du véhicule personnel de M. A, et réintégré dans le bénéfice imposable le surplus des frais kilométriques constatés en charges par la société ; que cette somme a été considérée comme un revenu distribué imposable à l'impôt sur le revenu au nom de M. A ; que, comme le soutient le ministre, le requérant n'a produit aucun élément établissant l'existence de frais kilométriques supérieurs à ceux retenus par l'administration à partir du compteur kilométrique du véhicule personnel du contribuable, et démontrant que les dépenses en cause, dont il ne résulte pas de l'instruction qu'elles aient eu un rapport avec les fonctions de M. A, avaient effectivement été engagées dans l'intérêt de l'entreprise et constituaient des frais de déplacements professionnels de M. A ; que, par ailleurs, la société a comptabilisé en charges les factures d'entretien du véhicule personnel de M. A alors que, comme le fait valoir l'administration, la société a utilisé, pour le remboursement des frais kilométriques, les barèmes établis chaque année par l'administration pour l'évaluation forfaitaire des dépenses d'automobile lesquels comprennent la dépréciation des véhicules, les frais d'entretien et de réparation, les dépenses de pneumatiques, le carburant et les primes d'assurance ; que M. A n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause les éléments ainsi justifiés par le ministre permettant de regarder les dépenses d'entretien du véhicule de M. A comme faisant double emploi avec les remboursements kilométriques retenus comme charges déductibles ; que l'administration doit, par suite, être regardée comme établissant que les sommes dont il s'agit constituaient des revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers en application des dispositions du 2° du 1. de l'article 109 du code général des impôts ;

Considérant, en troisième lieu, que la circonstance que le contribuable ait, postérieurement à la vérification de comptabilité de la société qui s'est déroulée entre le 1er février et le 5 mars 2008, reversé les sommes litigieuses est sans influence sur le bien-fondé de l'imposition des sommes au titre des années au cours desquelles elles ont été mises à sa disposition ; qu'en outre, ces impositions ne sauraient être regardées comme formant une double imposition avec celles mises à la charge de la société à raison de la remise en cause du caractère déductible de ces frais kilométriques et d'entretien qui portent sur des impositions et un contribuable distincts de ceux en litige ; qu'ainsi, et alors que ces impositions ont été ainsi établies conformément à la loi fiscale, le requérant ne saurait soutenir qu'à raison du remboursement des sommes litigieuses effectué en 2008, ces impositions auraient constitué un enrichissement sans cause pour l'administration ou auraient méconnu les principes d'égalité devant l'impôt ou de sécurité juridique ;

Considérant, en quatrième lieu, que les contribuables ne sont en droit d'invoquer, sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 80 A et sur celui de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, lorsque l'administration procède à un rehaussement d'impositions antérieures, que des interprétations et appréciations antérieures à l'imposition primitive, ou sur le fondement du deuxième alinéa de l'article L. 80 A du même livre, qu'il s'agisse d'impositions primitives ou supplémentaires, que des interprétations antérieures à l'expiration du délai de déclaration ; que M. A ne saurait donc, et en tout état de cause, se prévaloir de la décision de rejet de sa réclamation préalable en date du 25 mai 2009 prise postérieurement à la mise en recouvrement des impositions primitives auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 et 2006 ;

Considérant, en dernier lieu, que M. A soutient que ses impôts directs payés dépasseraient le plafond de ses revenus prévu par l'article 1er du code général des impôts et qu'il doit ainsi bénéficier de la mesure dite du bouclier fiscal ; qu'il ne saurait toutefois bénéficier du dispositif du droit de restitution prévu par les dispositions combinées des articles 1er et 1649-0 A dudit code dans leurs rédactions applicables aux revenus réalisés en 2005 et en 2006 alors que les revenus en litige, qui ont été imposés à la suite d'une procédure de rectification, n'ont pas été régulièrement déclarés en méconnaissance du 2. de l'article 1649-0 A, la circonstance invoquée par le requérant que les montants en litige ont été déclarés par la société comme des frais professionnels n'est pas de nature à regarder les revenus distribués litigieux comme ayant été régulièrement déclarés au sens desdites dispositions ; que, par suite, les conclusions aux fins de restitution doivent être, en tout état de cause, rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Gil A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 18 octobre 2011, où siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Besson et Segado, premiers conseillers,

Lu en audience publique, le 10 novembre 2011.

''

''

''

''

2

N° 10LY02171


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY02171
Date de la décision : 10/11/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-04-02-03-01-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus des capitaux mobiliers et assimilables. Revenus distribués. Notion de revenus distribués. Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : EYRAUD

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-11-10;10ly02171 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award