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25/10/2011 | FRANCE | N°10LY01273

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 25 octobre 2011, 10LY01273


Vu la requête, enregistré au greffe de la Cour le 28 mai 2010 sous le n° 10LY01273, présentée pour M. Christian A, demeurant ... par Me Vial ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0705408 du 17 septembre 2009 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 14 décembre 2006, par lequel le préfet de l'Isère a approuvé le plan de prévention des risques naturels prévisibles sur la commune de Corenc, en tant que ledit plan classe les parcelles cadastrées AB n° 189 et AB n° 190 en zone r

ouge ;

2°) d'annuler ledit arrêté, en tant que le plan qu'il approuve classe le...

Vu la requête, enregistré au greffe de la Cour le 28 mai 2010 sous le n° 10LY01273, présentée pour M. Christian A, demeurant ... par Me Vial ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0705408 du 17 septembre 2009 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté, en date du 14 décembre 2006, par lequel le préfet de l'Isère a approuvé le plan de prévention des risques naturels prévisibles sur la commune de Corenc, en tant que ledit plan classe les parcelles cadastrées AB n° 189 et AB n° 190 en zone rouge ;

2°) d'annuler ledit arrêté, en tant que le plan qu'il approuve classe lesdites parcelles en zone rouge ;

3°) de faire injonction au préfet de l'Isère de classer ces parcelles en zone de faibles contraintes ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil, Me Vial, la somme de 1 196 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

M. A soutient que le classement contesté, correspondant à une très forte exposition aux phénomènes naturels et/ou à une fonction de régulation hydraulique, est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ; qu'en effet, il a été établi par une étude géotechnique réalisée en 2005 que la parcelle AB 190, dont les sols sont compacts, ne présente aucun indice de mouvement de terrain ; qu'une récente étude hydraulique apporte par ailleurs la démonstration qu'il n'existe à cet endroit aucun cours d'eau au sens technique du terme ; que cette parcelle n'est exposée à aucun risque hydraulique ni à aucun risque d'érosion ; que même un débit de crue centennale ne pourrait générer une vitesse d'écoulement torrentiel ; que la proximité, au Nord-Ouest, d'un terrain effectivement soumis au risque hydraulique ne pouvait justifier le classement contesté ; que l'erreur manifeste d'appréciation est encore caractérisée par le fait que la parcelle voisine AB 206 a quant à elle été classée en zone Bg1 de faible aléa ;

Vu le jugement attaqué et l'arrêté contesté ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 avril 2011, présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement, concluant au rejet de la requête ;

Le ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement soutient que l'étude géotechnique de 2005, dûment prise en compte dans l'élaboration du plan de prévention contesté, a souligné le risque hydraulique présenté par la parcelle mitoyenne des terrains litigieux, et relevé, sur ceux-ci, de nombreuses traces d'hydromorphismes ; que la partie de la parcelle AB 190 que l'auteur de cette étude estime constructible correspond à celle que le plan a inscrit en zone bleue (Bg2) ; que l'étude hydraulique réalisée en mars 2010, si elle conclut à l'absence de cours d'eau à proprement parler , mentionne que cette parcelle se situe en tête de bassin versant, en bordure de l'axe d'écoulement préférentiel d'un talweg ; qu'elle reconnaît explicitement la possibilité du caractère torrentiel des écoulements dans ce secteur ;

Vu l'ordonnance du 11 avril 2011 fixant la clôture de l'instruction au 16 mai 2011 à 16 heures 30 ;

Vu le courrier, adressé aux parties le 14 septembre 2011, les avisant, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de relever d'office un moyen d'ordre public ;

Vu la décision, en date du 12 février 2010, par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Lyon a admis M. A au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle, au taux de 40 % ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 octobre 2011 :

- le rapport de M. Zupan, président-assesseur ;

- les observations de Me Vial, avocat de M. A ;

- et les conclusions de M. Vallechia, rapporteur public ;

- la parole ayant été à nouveau donnée à la partie présente ;

Considérant que M. A, propriétaire à Corenc, au lieu-dit Château Pilon , de parcelles non bâties cadastrées AB n° 189 et AB n° 190, relève appel du jugement, en date du 17 septembre 2009, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 14 décembre 2006 approuvant le plan de prévention des risques naturels prévisibles sur la commune de Corenc, en tant que ce plan classe une partie desdites parcelles en zone rouge ;

Considérant qu'en dépit de leur formulation maladroite, les conclusions de première instance de M. A doivent être interprétées, eu égard au contenu de l'argumentation sur laquelle elles s'appuyaient, comme contestant aussi bien le classement de tout ou partie des parcelles susmentionnées en zone rouge d'exposition au risque d'écoulements torrentiels ( RT ) qu'en zone rouge d'exposition aux risques de glissements de terrain ( RG ) ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'environnement : I. - L'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones. II. - Ces plans ont pour objet, en tant que de besoin : 1° De délimiter les zones exposées aux risques, dites zones de danger, en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités ; 2° De délimiter les zones, dites zones de précaution, qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° (...) ;

Considérant que M. A n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause le bien fondé du classement de la parcelle AB n° 189 en zones rouges de glissement de terrain et d'écoulements torrentiels ;

Considérant que si l'étude géotechnique réalisée en mars 2005 à l'initiative de M. A relève la bonne compacité des sols limono-argileux de la parcelle AB 190 et souligne qu'elle ne présente aucun indice de mouvement de terrain, elle mentionne par ailleurs de nombreuses traces d'hydromorphismes témoignant d'importantes circulations d'eau et fait état de contraintes, non évaluées, résultant pour elle du risque hydraulique auquel sont directement exposés les terrains situés au Nord-Ouest ; que l'étude hydraulique réalisée à la demande du requérant en mars 2010 ne se prononce que sur la pertinence du classement en zone RT et n'évalue pas les risques de glissement ou de solifluxion ; que, dans ces conditions, et nonobstant la circonstance qu'une parcelle voisine a été inscrite en zone bleue Bg1 (faible aléa), comme du reste une partie de la parcelle AB n° 190, le classement de celle-ci en zone rouge RG ne peut être regardé comme entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en revanche, qu'il ressort de l'étude hydraulique susmentionnée, dont le ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement ne conteste ni la méthodologie ni les conclusions, et à laquelle il n'oppose aucun document technique, pas même ceux qui ont concouru à l'élaboration du plan de prévention contesté, d'une part, que la parcelle considérée jouxte un simple talweg et non un cours d'eau, même non pérenne, d'autre part, que l'étendue et la vitesse d'écoulement de la masse d'eau transitant en fond de talweg ne serait pas suffisante, en cas de précipitations centennales, pour atteindre la propriété de M. A et y provoquer un phénomène d'érosion ; que, dans ces conditions, le classement de la parcelle AB n° 190 en zone rouge RT , censé correspondre à l'exposition maximale à un risque de crues caractérisé par une augmentation brutale du débit d'un cours d'eau avec transport de matériaux solides, doit être regardé comme procédant d'une appréciation manifestement exagérée du risque d'écoulement torrentiel auquel cette parcelle est réellement exposée ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande en tant qu'elle concernait le classement d'une partie de la parcelle AB n° 190 en zone rouge RT et à demander dans cette mesure, le classement critiqué étant divisible des autres dispositions du plan de prévention, l'annulation de l'arrêté contesté ;

Sur les conclusions en injonction :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ; qu'eu égard au motif d'annulation retenu par le présent arrêt, et en l'absence de tout changement dans l'état du droit ou la situation de fait depuis l'arrêté contesté, il y a lieu de faire injonction au préfet de l'Isère de procéder, dans le délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt, à la modification du plan de prévention des risques naturels prévisibles sur la commune de Corenc afin de classer l'intégralité de la parcelle AB n° 190 en zone bleue d'exposition au risque d'écoulements torrentiels ;

Sur l'application combinée des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat sur le fondement de ces dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 17 septembre 2009 est annulé en ce qu'il a rejeté la demande de M. A tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 14 décembre 2006 en tant que, portant approbation du plan de prévention de des risques naturels prévisibles sur la commune de Corenc, il opère le classement de la parcelle AB n° 190 en zone rouge RT de ce plan.

Article 2 : L'arrêté du préfet de l'Isère du 14 décembre 2006 est annulé dans la mesure mentionnée à l'article 1er.

Article 3 : Il est fait injonction au préfet de l'Isère de procéder, dans le délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt, à la modification du plan de prévention des risques naturels prévisibles sur la commune de Corenc afin de classer l'intégralité de la parcelle AB n° 190 en zone bleue d'exposition au risque d'écoulements torrentiels.

Article 4 : Les conclusions de M. A tendant à l'application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Christian A, au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement et au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 4 octobre 2011, où siégeaient :

M. Moutte , président de chambre,

M. Bézard, président,

M. Zupan, président-assesseur.

Lu en audience publique, le 25 octobre 2011.

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N° 10LY01273

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY01273
Date de la décision : 25/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-001-01-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Règles générales d'utilisation du sol. Règles générales de l'urbanisme. Prescriptions d'aménagement et d'urbanisme.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUTTE
Rapporteur ?: M. David ZUPAN
Rapporteur public ?: M. VALLECCHIA
Avocat(s) : VIAL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-10-25;10ly01273 ?
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