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20/10/2011 | FRANCE | N°10LY00176

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 20 octobre 2011, 10LY00176


Vu la requête, enregistrée le 18 janvier 2010 au greffe de la Cour, présentée pour M. et Mme Christian A, domiciliés 10 avenue de la Libération à Saint-Etienne (42000), par Me Martin ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0701852 du 17 novembre 2009 du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à leur demande en réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2001, 2002 et 2004 ainsi que des pénali

tés dont elles ont été assorties ;

2°) de prononcer la décharge desdites cotis...

Vu la requête, enregistrée le 18 janvier 2010 au greffe de la Cour, présentée pour M. et Mme Christian A, domiciliés 10 avenue de la Libération à Saint-Etienne (42000), par Me Martin ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0701852 du 17 novembre 2009 du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à leur demande en réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2001, 2002 et 2004 ainsi que des pénalités dont elles ont été assorties ;

2°) de prononcer la décharge desdites cotisations et pénalités ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. et Mme A soutiennent que :

- s'agissant des revenus réputés distribués retenus par l'administration résultant des redressements de la SARL Alfocim dont ils sont les associés, le Crédit Agricole n'a pas procédé à l'abandon des intérêts échus dans le cadre de la cession de créance sur la société si bien que celle-ci était fondée à comptabiliser en charges financières lesdits intérêts à hauteur de 161 773,82 euros ;

- l'inscription de la somme de 396 367,44 euros au crédit de leur compte courant correspondant au capital restant dû de l'emprunt contracté par la SARL Alfocim est justifiée dès lors que le Crédit Agricole n'a pas renoncé à la déchéance du prêt et leur a cédé la créance en l'état et sans aucune garantie et que les sommes échues depuis 1977 étaient par définition exigibles ;

- il y a lieu de tenir compte, pour corriger le solde de leur compte courant, de la facture du 14 avril 2002 de la société Décibel d'un montant de 2 346,16 euros correspondant au règlement par la société d'un fournisseur pour le compte d'un de ses clients et de la facture du restaurant Chicano's Café du 31 janvier 2001 mis à leur charge du fait de son défaut de comptabilisation par la société ;

- l'apport de meubles est justifié ;

- les pénalités de mauvaise foi mises à leur charge ne sont pas justifiées au regard des nombreuses avances et abandons de compte courant consentis à la société et de ce que le principal chef de redressement n'est qu'un débat de qualification juridique de la nature de la créance détenue par le Crédit Agricole ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 19 juillet 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat tendant au rejet de la requête ;

Le ministre fait valoir que :

- l'abandon de créance concernant les intérêts, démontré par les pièces du dossier, ne constituait pas une charge déductible au sens des dispositions de l'article 39-1 du code général des impôts et les époux A ne les ont pas acquittés ;

- la comptabilisation au compte courant des époux A du capital restant dû de la créance à hauteur de 396 367, 44 euros est erronée dès lors qu'elle traduit une majoration de la dette exigible et la SARL Alfocim ne pouvait pas transférer une dette à moyen terme auprès du Crédit Agricole en une dette liquide et exigible immédiatement transférable sur le compte courant d'associés des époux A ;

- les requérants ne justifient pas de ce que leur compte courant doit être corrigé des factures de 2 436,16 euros et de la dépense de 445,21 euros ;

- l'apport complémentaire de meubles de 41 007,25 euros n'est pas justifié par les documents produits ;

- la succession d'écritures comptables irrégulières traduit la volonté délibérée de s'approprier, sans justification, des fonds appartenant à la société et les époux A ont obtenu un crédit d'impôt par la présentation d'un document falsifié justifiant les pénalités appliquées ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 septembre 2011 :

- le rapport de M. Duchon-Doris, président ;

- les observations de Me Bret substituant Me Martin, avocat de M. et Mme A ;

- et les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;

- la parole ayant été de nouveau donnée à Me Bret substituant Me Martin, avocat de M. et Mme A ;

Considérant que M. et Mme A ont fait l'objet, au titre des années 2001 à 2004, d'un contrôle sur pièces de leur dossier fiscal personnel à la suite de la vérification de comptabilité de la SARL Alfocim dont ils sont les dirigeants, au terme duquel l'administration fiscale a remis en cause diverses sommes inscrites à leur compte courant dans la société en considérant qu'elles constituaient des revenus distribués au sens des articles 109 et 111 du code général des impôts et qu'elles étaient imposables à l'impôt sur le revenu en leur nom dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ; qu'ils interjettent appel du jugement du 17 novembre 2009 du Tribunal administratif de Lyon en tant qu'il n'a pas entièrement fait droit à leur demande en réduction des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été, en conséquence, assujettis au titre des années 2001, 2002 et 2004 ainsi que des pénalités dont elles ont été assorties ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : 1. Sont considérés comme revenus distribués : 2° Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices. ; qu'aux termes de l'article 111 du même code : Sont notamment considérés comme revenus distribués : a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes (...) ;

Considérant que, pour contester les impositions demeurant en litige, M. et Mme A font valoir que les écritures relatives au rachat du titre de créance détenue par le Crédit Agricole sur la SARL Alfocim affectant leur compte courant sont justifiées par la nature de l'opération et qu'il y a lieu de corriger les écritures de leur compte courant au regard de certaines factures et d'un apport complémentaire de meubles ;

En ce qui concerne les écritures relatives au rachat de la créance de la SARL Alfocim :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SARL Alfocim a contracté, le 27 avril 1994, un prêt de 3 300 000 francs (503 081,80 euros) auprès du Crédit Agricole, dont les mensualités de remboursement ont cessé d'être honorées à partir de 1997 ; que l'établissement bancaire s'est retourné contre M. et Mme A, associés et caution solidaire de la SARL Alfocim, pour avoir paiement de sa créance dont le montant s'est élevé, en principal, intérêts et frais, à la somme de 3 708 711,22 francs (565 389,40 euros) ; qu'afin d'éviter la vente aux enchères du bien immobilier détenu par la société, un accord a été conclu, le 28 juin 2000, par lequel le Crédit Agricole a accepté de la part des époux A une somme de 2 600 000 francs (396 367,44 euros) pour solde de tout compte ; que ce paiement a été effectué par l'émission de trois chèques débités du compte des requérants ouvert dans les écritures du Crédit Lyonnais lui-même alimenté par un virement de 2 400 000 francs provenant de la société Alfocim consécutif, notamment, à la souscription, par cette société, à hauteur de 2 000 000 francs, d'un emprunt auprès de la Caisse d'Epargne ; qu'à la suite de ces opérations, la SARL Alfocim a alors crédité le compte courant d'associé de M. et Mme A des sommes de 396 367,44 euros et 169 021,97 euros correspondant, selon elle, au capital et aux intérêts dus à la banque ;

Considérant, toutefois, en premier lieu, que si, pour justifier l'inscription au crédit de leur compte courant de la somme de 169 021,97 euros correspondant aux intérêts dus, M. et Mme A font valoir que la banque leur a cédé la totalité de sa créance sans renoncer aux intérêts, ils n'en justifient pas par les documents produits ; qu'en particulier, la lettre du 8 juin 2000 du Crédit Agricole indique tout au contraire que, dans le cadre d'une solution amiable poursuivie avec les époux A, recherchés en tant que caution solidaire de l'emprunt contracté par la société dont ils sont associés, la banque accepte le versement immédiat et comptant d'une somme de 2 600 000 francs à titre de tout compte indiquant ainsi, implicitement mais nécessairement, qu'elle renonce aux intérêts de la créance ; que, par suite, le service était fondé à regarder l'inscription au compte courant d'associé de M. et Mme A, au cours de l'année 2001, de la somme de 169 021,97 euros, au titre des intérêts du prêt, comme ne correspondant à aucune dette sociale réelle et à imposer ladite somme comme un revenu distribué imposable au nom des intéressés à l'impôt sur le revenu au titre de la même année ;

Considérant, en second lieu, que M. et Mme A soutiennent, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, qu'à la suite de l'accord intervenu entre eux et le Crédit Agricole, la créance que détenait cette banque sur la société Alfocim leur a été cédée ; que la cession de créances, qui consiste à transmettre une créance qui conserve ses caractéristiques originelles à un tiers, ne peut avoir pour effet de transformer une obligation à moyen terme, comme l'est en l'espèce la créance initialement détenue par le Crédit Agricole sur la Sarl Alfocim, en dette liquide et immédiatement exigible ; qu'elle suppose, par ailleurs, que la banque ait renoncé à se prévaloir de toute déchéance préalable ; qu'en conséquence, le service était fondé à replacer la somme de 396 367,44 euros dans les dettes à moyen terme de la société et à remettre en cause l'inscription au crédit du compte courant de M. et Mme A, au titre d'une seule année, de la somme de 396 367,44 euros ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a regardé cette somme comme un revenu distribué imposable à l'impôt sur le revenu au nom de M. et Mme A au titre de l'année 2001 ;

En ce qui concerne la prise en compte de diverses factures :

Considérant que les requérants ne démontrent pas plus en appel qu'en première instance que la facture du 14 avril 2000 de la société Décibel, d'un montant de 2 346,16 euros, libellée au nom du Dr B aurait été comptabilisée à tort sur leur compte courant dès lors qu'elle concernerait la Sarl Alfocim et qu'ils l'auraient réglée pour le compte de celle-ci ; qu'ils n'apportent pas davantage cette preuve, s'agissant de la facture du restaurant Chicano's Café du 31 janvier 2001 dont le montant comptabilisé, soit 445,10 euros, ne correspond pas au montant de la facture qu'ils produisent d'un montant de 822, 80 euros ;

En ce qui concerne la justification d'un apport complémentaire de meubles :

Considérant que les époux A soutiennent qu'ils auraient effectué au cours de l'exercice clos en 2001 un apport de meubles supplémentaire de 41 007,25 euros qui n'aurait pas été comptabilisé sur leur compte courant ; qu'ils n'en justifient toutefois pas plus en appel qu'en première instance en produisant des documents consistant en des annotations manuelles ou faisant état de ventes qui ne sauraient, par elles-mêmes, démontrer l'apport complémentaire de meubles allégué ; que, par suite, leur argumentation sur ce point doit être écartée ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, alors applicable : 1. Lorsque la déclaration ou l'acte mentionnés à l'article 1728 font apparaître une base d'imposition ou des éléments servant à la liquidation de l'impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 40 p. 100 si la mauvaise foi de l'intéressé est établie ou de 80 p. 100 s'il s'est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d'abus de droits au sens de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales et qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ;

Considérant que, si l'administration fiscale fait valoir que M. et Mme A ont souscrit des engagements financiers en utilisant la trésorerie de la société Alfocim, organisé le remboursement des sommes concernées par des écritures de transfert sur leur compte courant d'associés et recherché un profit personnel à partir des intérêts abandonnés par le Crédit agricole en sollicitant de la société le paiement de frais financiers au titre d'un avantage non fondé et que la succession d'écritures comptables irrégulières effectuées à la demande des époux A traduit une volonté délibérée de s'approprier, sans justification, des fonds appartenant à la société, elle n'apporte pas, ce faisant, la preuve qui lui incombe que les époux A ont sciemment tenté d'éluder l'impôt ; que, par suite, M. et Mme A sont fondés à demander la décharge des pénalités pour mauvaise foi mises à leur charge au titre des années en litige ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les époux A ne sont fondés à demander l'annulation du jugement attaqué qu'en tant qu'il a rejeté leurs conclusions tendant à la décharge des pénalités mises à leur charge au titre des années en litige ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu de condamner l'Etat à verser aux époux A une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : M. et Mme A sont déchargés des majorations pour mauvaise foi afférentes aux impositions en litige, mises à leur charge au titre des années 2001, 2002 et 2004.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 17 novembre 2009 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er.

Article 3 : L'Etat est condamné à verser à M. et Mme A une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la requête de M. et Mme A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Christian A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2011 à laquelle siégeaient :

M. Duchon-Doris, président de chambre,

M. Montsec, président-assesseur,

Mme Chevalier-Aubert, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 octobre 2011.

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N° 10LY00176


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY00176
Date de la décision : 20/10/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations - Pénalités pour mauvaise foi.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: M. Jean Christophe DUCHON-DORIS
Rapporteur public ?: M. MONNIER
Avocat(s) : SCP LAMY et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-10-20;10ly00176 ?
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