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22/09/2011 | FRANCE | N°10LY00860

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 22 septembre 2011, 10LY00860


Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2010, présentée pour la SOCIETE BATI, dont le siège est 16 rue Jacquard, zone industrielle à Chassieu (69680), représentée par son gérant en exercice ;

La SOCIETE BATI demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601693 du 23 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 54 149,81 euros que lui réclame la commune de Ville-La-Grand (Haute-Savoie) en règlement du lot n° 13 cloison, doublage, isolation du marché de réalisati

on d'équipements publics La bergerie ;

2°) de mettre à la charge de la commune...

Vu la requête, enregistrée le 16 avril 2010, présentée pour la SOCIETE BATI, dont le siège est 16 rue Jacquard, zone industrielle à Chassieu (69680), représentée par son gérant en exercice ;

La SOCIETE BATI demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601693 du 23 février 2010 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 54 149,81 euros que lui réclame la commune de Ville-La-Grand (Haute-Savoie) en règlement du lot n° 13 cloison, doublage, isolation du marché de réalisation d'équipements publics La bergerie ;

2°) de mettre à la charge de la commune de Ville-La-Grand, respectivement au titre de la première et de la deuxième instance, les sommes de 1 000 et 2 000 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le titre de recettes émis par la commune est irrégulier faute de comporter les informations requises concernant l'imputation budgétaire et comptable à donner à la recette, la date à laquelle le titre est rendu exécutoire par la commune, des indications sur le caractère exécutoire du titre et sur les modalités de règlement et de réclamation ; qu'il ne pouvait être émis en l'absence d'établissement préalable et de notification du décompte général ; que la motivation du titre est insuffisante en ce qui concerne les modalités de calcul et les bases de liquidation de la somme demandée au titre des frais de mise en régie, ce qui la prive de la possibilité de se défendre utilement ; que les conséquences onéreuses de la mise en régie ne sauraient être mises à sa charge dès lors qu'elle est irrégulière, le marché de substitution confié à la société CLC Peinture ne lui ayant pas été communiqué, ce qui ne lui permet pas d'en vérifier la teneur ; que la date retenue comme point de départ des pénalités n'était que prévisionnelle et ne correspond pas à celle à laquelle les travaux devaient effectivement débuter, le maître d'oeuvre ne lui ayant pas demandé de commencer avant le 10 février 2004 et l'état des lieux ne le permettant pas avant le 4 mars 2004 ; que les autres pénalités ne sont pas justifiées compte tenu de sa présence à plusieurs réunions de chantier, de ce que le retard dans la remise des documents de sécurité est dû au comportement du maître d'ouvrage ; que ne constituant pas la contrepartie d'une prestation de service, les pénalités ne sauraient être grevées de TVA ; qu'en l'absence de déclaration de sa créance dans le délai d'un an à compter de la fin de la période d'observation, la commune est forclose ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2010, présenté pour la commune de Ville-La-Grand qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la SOCIETE BATI en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par les moyens que la mise en régie a été régulièrement précédée d'une mise en demeure ; que la société a été défaillante à toutes les convocations et qu'en toutes hypothèses, le constat contradictoire n'avait pas lieu d'être en l'absence de début d'intervention ou d'approvisionnement sur le chantier ; que la société a été parfaitement informée de la mise en régie et a été mise en mesure de suivre l'exécution du marché à compter du 19 février 2004 conformément aux dispositions de l'article 49.5 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) ; que le constat produit quant à l'impossibilité de débuter les travaux ne fait état que de la partie droite de l'école et pas de la partie gauche qui était hors d'eau et hors d'air ainsi qu'en atteste le constat dressé par la police municipale, et permettait l'exécution des travaux ; que le décompte du marché établi et notifié avant d'être contesté le 13 septembre 2004 par la société dont la réclamation a été rejetée le 27 septembre 2004, est devenu définitif ; que les conditions d'application des pénalités étaient réunies compte tenu du retard pris par le chantier, des absences aux rendez-vous de chantier et à la réunion du collège interentreprises de sécurité santé et de conditions de travail (CISSCT) et du non respect des délais fixés s'agissant des obligations relatives à la sécurité ; que le courrier adressé à la société le 9 mars 2004 est particulièrement détaillé quant au calcul opéré ; que les frais de mise en régie sollicités correspondent au surcoût supporté du marché ; que le tribunal administratif reste compétent pour statuer sur les litiges, nonobstant l'existence de procédure collective, et que la créance n'est pas éteinte ;

Vu le mémoire enregistré le 16 août 2011 par lequel la SOCIETE BATI qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux approuvé par le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er septembre 2011 :

- le rapport de Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

- les observations de Me Vacheron, représentant la SOCIETE BATI, et de Me Peyronnard, représentant la commune de Ville-La-Grand ;

- et les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée à Me Vacheron et à Me Peyronnard ;

Considérant que par acte d'engagement du 4 juin 2003, la commune de Ville-La-Grand a confié à la société BATI le lot n° 13 cloisons, doublages, isolation du marché public de réalisation de l'ensemble d'équipements publics La bergerie pour un prix global et forfaitaire de 159 500 euros HT ; que l'entreprise n'ayant pas entamé le chantier, la commune l'a mise en demeure, le 28 janvier 2004, de mener à bien les travaux dont elle avait la charge, avant de l'informer le 19 février 2004 de la mise en régie de ce lot, qui serait confié à un autre entrepreneur ; qu'ultérieurement, la commune a mis à la charge de la SOCIETE BATI une somme de 54 149,81 euros au titre des diverses pénalités de retard, pour absence aux réunions de chantier, pour retard dans la remise des documents sécurité protection de la santé des travailleurs et absence aux réunions du collège interentreprises de sécurité santé et de conditions de travail (CISSCT), ainsi que pour les frais de mise en régie ; que la SOCIETE BATI fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté les conclusions qu'elle avait formées tendant à la décharge de l'obligation de payer ladite somme que lui a réclamée la commune en émettant à son encontre un titre exécutoire ;

Sur la forclusion :

Considérant que la société requérante reprend en appel l'exception, qu'elle avait déjà soulevée devant le tribunal administratif, tirée de la forclusion de la commune à défaut pour cette dernière d'avoir procédé à la déclaration de sa créance lors de la procédure de redressement dont la société a fait l'objet ; qu'il résulte de l'instruction qu'il y a lieu, par adoption des motifs des premiers juges, d'écarter ce moyen ;

Sur la régularité en la forme du titre exécutoire :

Considérant que si la SOCIETE BATI soutient que le titre de recettes émis par la commune ne comporterait pas les mentions requises, il résulte de l'instruction que le titre litigieux ne correspond pas au mémoire qui lui a été adressé le 7 septembre 2004 mais au bulletin de liquidation joint au commandement de payer ; qu'il est constant que ce document, dont au demeurant la requérante se borne à ne produire qu'une copie partielle, était accompagné de pièces justificatives ; que l'ensemble de sa motivation permettait à l'entreprise de discuter les sommes mises à sa charge ; que l'absence alléguée d'indications sur ses modalités de contestation est, en tout état de cause, sans incidence sur la validité formelle du titre litigieux ; que par suite le moyen tiré de l'irrégularité formelle du titre de recettes doit être écarté ;

Sur le décompte général :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que par lettre recommandée du 9 mars 2004, la commune de Ville-La-Grand a notifié à l'entreprise un document récapitulant le montant des sommes dont elle devrait s'acquitter, comprenant différentes pénalités ainsi que le calcul de l'excédent de dépenses résultant de la mise en régie ; qu'à la suite de la notification, le 7 septembre 2004, d'un mémoire reprenant le détail des sommes précitées, la SOCIETE BATI a formé une réclamation ; qu'en raison de la carence complète de l'entreprise, aucune somme n'était à mentionner au crédit de son décompte ; que, par suite, elle ne peut soutenir que le décompte du marché dont elle était titulaire n'aurait pas été établi ;

Sur les sommes en litige :

Considérant qu'aux termes de l'article 49.1 du CCAG applicable aux marchés de travaux : (...) lorsque l'entrepreneur ne se conforme pas aux dispositions du marché ou aux ordres de service, la personne responsable du marché le met en demeure d'y satisfaire, dans un délai déterminé, par une décision qui lui est notifiée par écrit.(...) ; que l'article 49.2 du même cahier stipule que : Si l'entrepreneur n'a pas déféré à la mise en demeure, une mise en régie à ses frais et risques peut être ordonnée ou la résiliation du marché peut être décidée ; qu'aux termes de l'article 49.5 : l'entrepreneur dont les travaux sont mis en régie est autorisé à en suivre l'exécution sans pouvoir entraver les ordres du maître d'oeuvre et de ses représentants. Il en est de même en cas de nouveau marché passé à ses frais et risques. ; qu'enfin l'article 49.6 de ce cahier stipule que : Les excédents de dépenses qui résultent de la régie ou du nouveau marché sont à la charge de l'entrepreneur. (...) ;

En ce qui concerne les frais de mise en régie :

Considérant que si le maire de Ville-La-Grand a informé la SOCIETE BATI, le 19 février 2004, que les travaux étaient confiés à un autre entrepreneur à ses frais et risques et qu'elle était autorisée à suivre l'exécution des travaux conformément à l'article 49.5 du CCAG, il n'est pas contesté que ni l'identité du nouvel attributaire ni le contrat passé avec le nouvel entrepreneur n'ont été communiqués à la SOCIETE BATI avant le commencement des travaux ; qu'ainsi, elle n'a pas été mise à même d'user du droit qu'elle avait de suivre, en vue de sauvegarder ses intérêts, les opérations exécutées à ses frais et risques par le nouvel entrepreneur ; que, par suite, elle ne saurait être tenue de supporter les conséquences onéreuses qui en seraient résultées ; que la commune ne pouvait, dès lors, légalement mettre à la charge de la requérante la somme de 37 855,69 euros hors taxe, soit 45 275,40 euros TTC, au titre des frais de mise en régie ; qu'en conséquence il y a lieu, dans cette mesure, de faire droit aux conclusions à fin de décharge de la société requérante ;

En ce qui concerne les pénalités :

Considérant que si la société soutient que le décompte du retard donnant lieu à pénalités ne saurait être calculé à partir du calendrier prévisionnel du chantier, qui n'aurait été que théorique, il résulte de l'instruction que son intervention était prévue à partir du 26 janvier 2004, date qui lui a été confirmée par des courriers du maître d'oeuvre des 15 et 23 janvier 2004 et à laquelle l'état hors d'eau et hors d'air d'une partie des ouvrages rendait effectivement possible l'exécution de ses prestations ; qu'elle ne justifie pas de sa présence aux neuf réunions de chantier et aux trois réunions du CISSCT qui ont fait l'objet des pénalités pour absence prévues au cahier des clauses administratives particulières (CCAP), ni de ce que le retard dans la remise des documents de sécurité serait dû au comportement du maître d'ouvrage ;

Considérant, que le solde du marché ne comporte en l'espèce que les pénalités de retard contractuelles à la charge de l'entreprise ; que ces sommes n'étant pas dues en rémunération d'une prestation de service ou d'une livraison de biens, elles ne doivent pas être assorties du montant de la taxe sur la valeur ajoutée ; que, par suite, le montant des pénalités dues par la SOCIETE BATI doit être ramené à 7 420,08 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE BATI est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à être déchargée de l'obligation de payer la somme de 45 275,40 euros TTC, au titre des frais de mise en régie et la somme excédant 7 420,08 euros au titre des pénalités ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SOCIETE BATI, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par la commune de Ville-La-Grand et non compris dans les dépens ;

Considérant, en revanche, qu'il y a lieu, sur le fondement des dispositions susvisées, de mettre à la charge de la commune de Ville-La-Grand le paiement à la SOCIETE BATI de la somme de 2 000 euros au titre des frais que celle-ci a exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La SOCIETE BATI est déchargée de la somme de 37 855,69 euros hors taxe, soit 45 275,40 euros TTC, mise à sa charge au titre des frais de mise en régie et de la somme excédant 7 420,08 euros au titre des pénalités.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 23 février 2010 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : La commune de Ville-La-Grand versera à la SOCIETE BATI, une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SOCIETE BATI et les conclusions de la commune de Ville-La-Grand tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE BATI, à la commune de Ville-La-Grand et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration.

Délibéré après l'audience du 1er septembre 2011, à laquelle siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Arbarétaz, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 septembre 2011.

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N° 10LY00860

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY00860
Date de la décision : 22/09/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-03 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Mise en régie.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: Mme Geneviève VERLEY-CHEYNEL
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : SCP MAURICE- RIVA-VACHERON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-09-22;10ly00860 ?
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