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21/07/2011 | FRANCE | N°10LY01284

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 21 juillet 2011, 10LY01284


Vu la requête, enregistrée le 2 juin 2010 au greffe de la Cour, présentée, d'une part, pour l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES CHASSEURS DE L'AIN (ADCAIN) représentée par son président en exercice, dont le siège est à la mairie de Villars-les-Dombes (01330), d'autre part, pour M. Jean-Pierre A, domicilié ... ;

L'ADCAIN et M. A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0804877-0804869 du 12 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a, d'une part, rejeté leurs requêtes tendant à l'annulation de l'article IV de l'arrêté du préfet de l'Ain en date

du 1er juillet 2008 relatif à l'ouverture et la clôture de la chasse dans le...

Vu la requête, enregistrée le 2 juin 2010 au greffe de la Cour, présentée, d'une part, pour l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES CHASSEURS DE L'AIN (ADCAIN) représentée par son président en exercice, dont le siège est à la mairie de Villars-les-Dombes (01330), d'autre part, pour M. Jean-Pierre A, domicilié ... ;

L'ADCAIN et M. A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0804877-0804869 du 12 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a, d'une part, rejeté leurs requêtes tendant à l'annulation de l'article IV de l'arrêté du préfet de l'Ain en date du 1er juillet 2008 relatif à l'ouverture et la clôture de la chasse dans le département de l'Ain pour la campagne 2008-2009 en ce qu'il n'exclut pas le gibier d'eau de la suspension de la chasse, deux jours par semaine, les mardis et vendredis, sauf jours fériés et, d'autre part, les a condamnés au paiement d'une somme de 800 euros au profit de l'Etat ;

2°) d'annuler les dispositions querellées de l'arrêté du 1er juillet 2008 ;

Ils soutiennent que :

- aux termes de la dernière phrase de l'article R. 424-9 du code de l'environnement, il appartient désormais au seul ministre de l'écologie et du développement durable de fixer les conditions spécifiques de la chasse ;

- l'arrêté attaqué a méconnu les dispositions de l'article R. 424-1 du code en ne limitant pas l'interdiction qu'il édicte à une ou plusieurs espèces mais en l'étendant à la totalité du gibier d'eau et en n'en justifiant pas le bien-fondé ;

- il n'est pas possible de favoriser le repeuplement d'espèces en une période de l'année où elles ne se reproduisent pas et il n'existe pas de couples reproducteurs nichant ou se reproduisant dans le département en période de chasse, si bien que l'interdiction n'est pas justifiée ;

- en décidant d'interdire l'exercice de la chasse à tir, à l'arc et au vol de toutes les espèces de gibier, sans distinction, les mardis et vendredis, le préfet a pris une mesure d'interdiction générale de la chasse, sans qu'il soit établi qu'une telle mesure soit justifiée par la nécessité de favoriser la protection et le repeuplement de tous les gibiers ;

- la circonstance qu'une partie du territoire ait été désignée zone de protection spéciale " Natura 2000 " est sans incidence sur le litige ;

- les avis de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage et de la fédération départementale des chasseurs de l'Ain sont partiaux et le préfet a seul le pouvoir de décision ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 mars 2011, présenté pour la Fédération départementale des chasseurs de l'Ain, représenté par son président en exercice, tendant au rejet de la requête et à la condamnation de l'ADCAIN et de M. A à lui verser la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle fait valoir que :

- son intervention est recevable et elle est donc fondée à solliciter la condamnation des appelants ;

- le préfet, nonobstant les compétences ministérielles précisées à l'article R. 424-9 du code de l'environnement, possède le pouvoir de limiter le nombre de jours de chasse pour toutes les espèces sur le fondement de l'article R. 424-1-2° ;

- de très nombreux départements ont adopté des dispositions similaires ;

- les appelants ne s'expliquent pas sur leur intérêt à agir dès lors qu'ils ne sont pas représentatifs des chasseurs de l'Ain et alors que les organismes consultés ont donné leur accord ;

- ils n'ont pas contesté l'interdiction avant la procédure d'adoption de l'arrêté préfectoral ;

- la suspension de deux jours de chasse par semaine est une pratique ancienne qui ne cause pas de difficulté aux pratiquants de la chasse compte tenu des 1 100 étangs du département ;

- la suspension est justifiée compte tenu des caractéristiques du gibier d'eau et dès lors que la zone des étangs de la Dombes est une zone de nidification essentielle pour le territoire national ;

Vu l'ordonnance en date du 10 février 2011 par laquelle le président de la 5ème chambre de la Cour a fixé la clôture de l'instruction au 11 mars 2011 à 16 heures 30 ;

Vu le mémoire présenté par le ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement enregistré le 18 mars 2011, soit postérieurement à la clôture de l'instruction ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 juin 2011 :

- le rapport de M. Duchon-Doris, président ;

- et les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;

Sur l'intervention de la Fédération départementale des chasseurs de l'Ain :

Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 421-5 du code de l'environnement : " Les associations dénommées fédérations départementales des chasseurs participent à la mise en valeur du patrimoine cynégétique départemental, à la protection et à la gestion de la faune sauvage ainsi que de ses habitats. Elles assurent la promotion et la défense de la chasse ainsi que des intérêts de leurs adhérents. / (...) Elles conduisent des actions de prévention des dégâts de gibier et assurent l'indemnisation des dégâts de grand gibier dans les conditions prévues par les articles L. 426-1 et L. 426-5. / Elles élaborent, en association avec les propriétaires, les gestionnaires et les usagers des territoires concernés, un schéma départemental de gestion cynégétique, conformément aux dispositions de l'article L. 425-1. / Elles peuvent apporter leur concours à la validation du permis de chasser. (...) " et qu'aux termes de l'article R. 424-6 du même code : " La chasse à tir est ouverte pendant les périodes fixées chaque année par arrêté du préfet, pris sur proposition du directeur départemental de l'agriculture et de la forêt après avis de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage et de la fédération des chasseurs, et publié au moins vingt jours avant la date de sa prise d'effet. ", d'autre part, qu'il résulte de l'instruction que la Fédération départementale des chasseurs de l'Ain a été saisie pour avis par le préfet de ce département durant la phase d'élaboration de l'arrêté attaqué et a été partie en première instance ; que, dès lors, l'intervention en appel de la Fédération départementale des chasseurs de l'Ain est recevable ;

Sur les conclusions en annulation :

Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article IV de l'arrêté en date du 1er juillet 2008 par lequel le préfet de l'Ain a, pour la campagne 2008-2009, fixé les périodes d'ouverture de la chasse dans son département : " Afin de favoriser la protection et le repeuplement du gibier, la chasse à tir, à l'arc et la chasse au vol sont suspendues deux jours par semaine, les mardis et les vendredis, sauf jours fériés. " ;

Considérant que, pour demander l'annulation du jugement du 12 mars 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a, d'une part, rejeté leurs requêtes tendant à l'annulation partielle de l'article IV de l'arrêté du préfet de l'Ain en date du 1er juillet 2008 relatif à l'ouverture et la clôture de la chasse dans le département de l'Ain pour la campagne 2008-2009, d'autre part, les a condamnés au paiement d'une somme de 800 euros au profit de l'Etat, l'ADCAIN et M. A font valoir qu'en n'excluant pas le gibier d'eau de la suspension de la chasse, deux jours par semaine, les mardis et vendredis, sauf jours fériés, l'arrêté précité méconnait les dispositions de l'article R. 424-9 qui donnent compétence en la matière au seul ministre, est illégal en ce qu'il emporte interdiction générale de la chasse sans en justifier et est entaché d'une erreur d'appréciation ;

En ce qui concerne la compétence du préfet :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 424-1 du code de l'environnement : " Afin de favoriser la protection et le repeuplement du gibier, le préfet peut dans l'arrêté annuel prévu à l'article R. 424-6, pour une ou plusieurs espèces de gibier : / (...) 2º Limiter le nombre des jours de chasse (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 424-6 de ce code : " La chasse à tir est ouverte pendant les périodes fixées chaque année par arrêté du préfet, pris sur proposition du directeur départemental de l'agriculture et de la forêt après avis de la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage et de la fédération des chasseurs, et publié au moins vingt jours avant la date de sa prise d'effet. " ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 424-9 du même code : " Par exception aux dispositions de l'article R. 424-6, le ministre chargé de la chasse fixe par arrêté les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse aux oiseaux de passage et au gibier d'eau, après avis du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage. Cet arrêté prévoit les conditions spécifiques de la chasse de ces gibiers. " ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions, lesquelles ne sont pas contradictoires, que le préfet peut, sans modifier la période de chasse aux oiseaux de passage et au gibier d'eau que le ministre chargé de la chasse est seul compétent pour fixer annuellement, et pour des motifs de protection de la ressource cynégétique, limiter le nombre de jours par semaine au cours desquels la chasse de ces espèces sera pratiquée ; que, par suite, le préfet de l'Ain a pu, sans méconnaître l'article R. 424-9 précité du code de l'environnement et afin de favoriser la reproduction du gibier d'eau, instituer dans le dernier paragraphe de l'article IV de l'arrêté du 1er juillet 2008, une suspension de la chasse du gibier d'eau les mardis et les vendredis, sauf jours fériés ; que, par suite, le moyen tiré de l'incompétence du préfet à prendre les mesures attaquées au regard des dispositions de l'article R. 424-9 du code de l'environnement ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne l'étendue de la suspension :

Considérant que les requérants font valoir que l'arrêté attaqué, d'une part, a méconnu les dispositions précitées de l'article R. 424-1 du code de l'environnement en ne limitant pas la suspension qu'il édicte à une ou plusieurs espèces et en n'en justifiant pas le bien-fondé au regard des objectifs de ce texte et, d'autre part, constitue une mesure d'interdiction générale de la chasse non justifiée ; qu'il ressort toutefois de la lecture du dernier alinéa de l'article IV de l'arrêté du 1er juillet 2008 que celui-ci limite la suspension qu'il édicte à deux jours par semaine, les mardis et vendredis, sauf jours fériés et la justifie expressément afin " de favoriser la protection et le repeuplement du gibier " au sens des dispositions de l'article R. 424-6 du code de l'environnement ; que, par suite, ledit arrêté ne méconnait ni les dispositions de l'article R. 424-1, lesquelles ne lui interdisent pas, le cas échéant, de prendre un arrêté relatif au gibier dans son ensemble, ni le principe de proportionnalité des mesures de police de l'environnement à l'objectif de protection des espèces qu'elles recherchent ; que, par suite, l'argumentation des requérants sur ce point ne peut être qu'écartée ;

En ce qui concerne le moyen tiré de l'erreur d'appréciation :

Considérant que les requérants allèguent qu'il n'est pas possible de favoriser le repeuplement d'espèces en une période de l'année où elles ne se reproduisent pas et qu'il n'existe pas de couples reproducteurs nichant ou se reproduisant dans le département en période de chasse, si bien que le préfet de l'Ain n'aurait pas justifié le bien-fondé de la suspension ; que, toutefois, alors que le secteur de la Dombes et celui de l'Etournel et du Défilé de l'Ecluse ont été désignés zone de protection spéciale " Natura 2000 " par des arrêtés ministériels en date du 12 avril 2006, que la commission départementale de la chasse et de la faune sauvage et la fédération départementale des chasseurs de l'Ain, saisies pour avis par le préfet conformément aux dispositions de l'article R. 424-6 du code de l'environnement susmentionné, se sont prononcées en faveur d'une telle limitation et que la Fédération départementale des chasseurs de l'Ain a fait valoir, sans être contredite sur ce point, que la suspension de la chasse du gibier d'eau deux jours par semaine se justifie compte tenu des caractéristiques du gibier d'eau de plus en plus sédentaire et dès lors que la zone des étangs de la Dombes est une zone de nidification essentielle pour le territoire national, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Ain ait commis une erreur manifeste d'appréciation en décidant de suspendre la chasse à tir, à l'arc et au vol deux jours par semaine, les mardis et vendredis, sauf jours fériés, notamment pour le gibier d'eau ; que ce moyen doit, dès lors, être écarté ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que l'ADCAIN et M. A ne sont pas fondés à demander l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il rejette leur demande en annulation de l'arrêté attaqué ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en condamnant seulement M. Jean-Pierre A et l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES CHASSEURS DE L'AIN au versement d'une somme de 800 euros au profit de l'Etat, les premiers juges aient méconnu les dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, par suite, les conclusions tendant à la réformation sur ce point du jugement attaqué doivent être rejetées ;

Considérant, en deuxième lieu et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de ces conclusions, qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner M. Jean-Pierre A et l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES CHASSEURS DE L'AIN à verser à la Fédération départementale des chasseurs de l'Ain la somme que celle-ci réclame au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de la Fédération départementale des chasseurs de l'Ain est admise.

Article 2 : La requête de l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES CHASSEURS DE L'AIN et de M. A est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'ASSOCIATION DE DEFENSE DES CHASSEURS DE L'AIN, à M. Jean-Pierre A, au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement et à la Fédération départementale des chasseurs de l'Ain.

Délibéré après l'audience du 23 juin à laquelle siégeaient :

M. Duchon-Doris, président de chambre,

M. Montsec, président-assesseur,

Mme Besson-Ledey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 juillet 2011.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY01284
Date de la décision : 21/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-046-01 Nature et environnement.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: M. Jean Christophe DUCHON-DORIS
Rapporteur public ?: M. MONNIER
Avocat(s) : SELARL JURILEX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-07-21;10ly01284 ?
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