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07/07/2011 | FRANCE | N°10LY00450

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 07 juillet 2011, 10LY00450


Vu la requête enregistrée le 26 février 2010, présentée pour M. Claude A domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901680 du 10 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation des décisions des 31 décembre 2008 et du 23 janvier 2009 par lesquelles le chef du bureau Réglementation puis le directeur du service navigation Rhône-Saône ont respectivement immobilisé à titre conservatoire puis immobilisé temporairement le bâtiment Le Littoral dans le port de Salaise-sur-Sannes ;

2°) d'a

nnuler pour excès de pouvoir lesdites décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat...

Vu la requête enregistrée le 26 février 2010, présentée pour M. Claude A domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0901680 du 10 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation des décisions des 31 décembre 2008 et du 23 janvier 2009 par lesquelles le chef du bureau Réglementation puis le directeur du service navigation Rhône-Saône ont respectivement immobilisé à titre conservatoire puis immobilisé temporairement le bâtiment Le Littoral dans le port de Salaise-sur-Sannes ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir lesdites décisions ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. A soutient que la première décision a été prise sur la foi de déclaration de tiers, sans visite préalable des agents du service de la navigation ; que le procès-verbal de visite établi le 9 janvier 2009 ne relève pas d'avarie incompatible avec la navigation du bâtiment ; que l'expert missionné par l'exploitant parvient à la même conclusion ; qu'en ce qu'il déclare la non-conformité du bâtiment avec son certificat de navigation rhénan, l'auteur de la décision du 23 janvier 2009 était incompétent ; que le service Rhône-Saône ne disposait pas du personnel qualifié ; que le signataire de la décision du 23 janvier 2009 n'a pas participé au contrôle des aménagements réalisés à dire d'expert ; que les deux décisions ne pouvaient être prononcées à titre conservatoire et ne reposent sur aucun motif tiré de l'état de dangerosité manifeste pour la navigation ; que le maintien de la timonerie en position basse n'occultait pas la visibilité du pilote ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire enregistré le 28 mai 2010 par lequel le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer conclut au rejet de la requête ;

Le ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer soutient qu'en vertu des articles 22 et 49 de la loi du 23 décembre 1972 les agents assermentés du service de navigation Rhône-Saône sont compétents pour contrôler et sanctionner par l'immobilisation du bâtiment les dangers manifestes que ce bâtiment présente, quel que soit le service ayant délivré le titre de navigation ; que le 12 janvier 2009, la commission centrale pour la navigation du Rhin a été informée dans le respect de l'article 50 du décret du 2 août 2007 ; qu'il est sans incidence sur la réalité du motif tiré de la dangerosité du bâtiment que la mesure ait été prise sur information de tiers ; qu'il est constant que le choc subi par le bâtiment contre une pile de pont compromettait sa manoeuvrabilité et représentait un danger manifeste au sens de l'article 31 du décret du 2 août 2007 ; qu'au 9 janvier 2009, date de la visite par les agents assermentés du service, la conduite n'était possible que depuis la trappe, ce qui ne permettait pas au pilote d'accéder aux boutons de commandes et lui ménageait une visibilité très insuffisante ; que, par suite, l'indisponibilité du poste de pilotage ordinaire était de nature à constituer un danger manifeste ;

Vu le courrier informant les parties qu'en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la Cour est susceptible de soulever d'office l'incompétence du directeur du service de navigation Rhône-Saône à l'effet de signer la décision du 23 janvier 2009 qui ne pouvait être prise que par les agents assermentés qui avaient effectué la visite du 9 janvier 2009 (application combinée de l'article 22 de la loi n° 72-1202 du 23 décembre 1972 et de l'article 49 du décret n° 2007-1168 du 2 août 2007) ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 72-1202 du 23 décembre 1972 ;

Vu le décret n° 2007-1168 du 2 août 2007 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 juin 2011 :

- le rapport de M. Arbarétaz, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Vinet, rapporteur public ;

Sur les conclusions à fins d'annulation :

Sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens de la requête :

Considérant, en premier lieu, que l'administration ne tient d'aucun texte la faculté de retenir un bâtiment à titre conservatoire sans avoir identifié préalablement les dangers qu'il ferait peser sur la navigation fluviale ; que, par suite, la décision du 31 décembre 2008 par laquelle le chef du bureau Réglementation du service de navigation Rhône-Saône a immobilisé le bateau Le Littoral dans le port de Salais-sur-Sannes en attendant une visite d'inspection ne peut qu'être annulée ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 31 du décret susvisé du 2 août 2007 relatif au respect des prescriptions techniques du certificat de navigation délivré aux bâtiments de transport de marchandises sur les eaux intérieures, dans sa rédaction applicable à l'espèce : (...) II - Au sens du présent article, un danger manifeste est présumé notamment lorsque les prescriptions applicables au certificat considéré (...) concernant la solidité structurelle de la construction (...) la manoeuvrabilité (...) du bâtiment (...) sont affectées ; qu'aux termes de l'article 49 du même décret, dans sa rédaction applicable à l'espèce : Les agents mentionnés à l'article 22 de la loi du 23 décembre 1972 susvisée peuvent vérifier à tout moment la présence à bord d'un des documents mentionnés à l'article 47 (...) Ils peuvent également vérifier si le bâtiment (...) constitue un danger manifeste pour les personnes à bord, l'environnement ou la navigation ; qu'aux termes de l'article 51 dudit décret, dans sa rédaction applicable à l'espèce : Si, lors du contrôle prévu à l'article 49, les agents constatent (...) que le bâtiment présente un danger manifeste au sens du II de l'article 31, lesdits agents peuvent interrompre sa navigation dans les plus brefs délais permis par la réglementation de la voie d'eau empruntée jusqu'au moment où les mesures nécessaires auront été prises pour remédier à la situation constatée (...) ; qu'enfin, les agents mentionnés à l'article 22 de la loi du 23 décembre 1972 alors applicable sont les membres de la commission de surveillance placée auprès de l'autorité qui a délivré le titre de navigation et les fonctionnaires et agents des services déconcentrés du ministère compétent en matière de navigation intérieure (...) assermentés et commissionnés à cet effet ;

Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions qu'un bâtiment de transport de marchandises naviguant sur les eaux intérieures ne peut être temporairement immobilisé en raison du danger manifeste qu'il fait encourir à ses occupants ou aux autres usagers de la voie d'eau que par les agents assermentés du service de la navigation qui ont effectué le contrôle du bâtiment et constaté, à cette occasion, par procès-verbal, les avaries ou non-conformités aux prescriptions du titre de navigation ;

Considérant qu'en application de l'article 22 de la loi du 23 décembre 1972 et de l'article 49 du décret du 2 août 2007 combinés, seuls les agents assermentés du service de navigation Rhône-Saône ayant visité Le Littoral, le 9 janvier 2009, étaient compétents pour décider de l'immobilisation temporaire du bâtiment à compter de cette date ; qu'il suit de là que la décision du 23 janvier 2009, signée du directeur du service de navigation Rhône-Saône, est entachée d'incompétence ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal a rejeté sa demande ; que ledit jugement et les décisions des 31 décembre 2008 et du 23 janvier 2009 immobilisant temporairement le bâtiment Le Littoral dans le port de Salaise-sur-Sannes doivent, dès lors, être annulés ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0901680 du Tribunal administratif de Lyon en date du 10 décembre 2009, ensemble les décisions des 31 décembre 2008 et du 23 janvier 2009 par lesquelles le chef du bureau Réglementation puis le directeur du service navigation Rhône-Saône ont respectivement immobilisé à titre conservatoire puis immobilisé temporairement le bâtiment Le Littoral dans le port de Salaise-sur-Sannes, sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à la M. A une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Claude A et au ministre de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2011 à laquelle siégeaient :

M. du Besset, président de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Arbarétaz, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juillet 2011.

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N° 10LY00450

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY00450
Date de la décision : 07/07/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

01-02-03-05 Actes législatifs et administratifs. Validité des actes administratifs - Compétence. Compétence en matière de décisions non réglementaires. Autres autorités.


Composition du Tribunal
Président : M. du BESSET
Rapporteur ?: M. Philippe ARBARETAZ
Rapporteur public ?: Mme VINET
Avocat(s) : JACOB DANIEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-07-07;10ly00450 ?
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