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14/06/2011 | FRANCE | N°09LY01527

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 14 juin 2011, 09LY01527


Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2009, présentée pour la SA GRAND FRAIS IMMOBILIER, dont le siège est 40 rue Glesener au Luxembourg (1630) ;

LA SA GRAND FRAIS IMMOBILIER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703784 du Tribunal administratif de Lyon du 30 avril 2009 qui a annulé la décision du 13 mars 2007 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial de la Loire l'a autorisée à créer un magasin de commerce de détail à dominante alimentaire d'une surface de vente de 999 m², à l'enseigne Grand Frais , sur le territoire de la

commune d'Andrézieux-Bouthéon ;

2°) de rejeter la demande devant le Tribunal...

Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2009, présentée pour la SA GRAND FRAIS IMMOBILIER, dont le siège est 40 rue Glesener au Luxembourg (1630) ;

LA SA GRAND FRAIS IMMOBILIER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0703784 du Tribunal administratif de Lyon du 30 avril 2009 qui a annulé la décision du 13 mars 2007 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial de la Loire l'a autorisée à créer un magasin de commerce de détail à dominante alimentaire d'une surface de vente de 999 m², à l'enseigne Grand Frais , sur le territoire de la commune d'Andrézieux-Bouthéon ;

2°) de rejeter la demande devant le Tribunal administratif ;

3°) de condamner les demandeurs à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société requérante soutient que :

- en estimant que les demandeurs devaient être regardés comme soulevant le moyen tiré de l'erreur de droit commise par la commission départementale d'équipement commercial, en omettant de rechercher préalablement si le projet était de nature à compromettre l'équilibre recherché par le législateur, alors que ceux-ci ont, en réalité, uniquement contesté l'appréciation portée par cette commission, le Tribunal a dénaturé les écritures des parties et annulé la décision attaquée au vu d'un moyen qui n'était pas invoqué, et encore moins argumenté ;

- selon le rapport de la DDCCRF, la densité des équipements commerciaux de la zone de chalandise étant légèrement supérieure aux moyennes nationale et départementale, il convenait dès lors d'examiner les effets positifs du projet ; que la commission départementale d'équipement commercial a suivi ce raisonnement et a examiné les effets positifs du projet ; qu'en autorisant ce dernier, cette commission a incontestablement estimé que ces effets compensent les risques d'écrasement du petit commerce et de gaspillage des équipements commerciaux ; que, par suite, en estimant que ladite commission a commis une erreur de droit en n'examinant pas si le projet est de nature à compromettre l'équilibre recherché par le législateur, le Tribunal a entaché sa décision d'une erreur de droit et a dénaturé les pièces du dossier ;

- M. C et M. B ont produit des extraits K bis ; mais sans démontrer en quoi l'enseigne Grand Frais viendrait concurrencer leurs activités ; que la demande est, par suite, irrecevable, à défaut de tout intérêt à agir ;

- le moyen tiré du fait que l'arrêté préfectoral fixant la composition de la commission départementale d'équipement commercial est irrégulier à défaut de procéder à une désignation nominative est inopérant, en raison de la validation opérée par l'article 102-IV de la loi de modernisation de l'économie ;

- si les requérants soutiennent que les formalités prévues à l'article 23 du décret du 9 mars 1993 ont été méconnues, aucun des membres de la commission n'a prétendu ne pas avoir reçu un dossier complet, ou ne pas avoir été mis à même d'en prendre connaissance ; que les demandeurs ne démontrent pas l'inverse, que, par suite, le moyen doit être écarté ;

- le maire peut désigner un représentant, en application de l'article L. 2121-25 du code général des collectivités territoriales ; qu'ainsi, il n'est pas établi que le représentant du maire de la commune d'Andrézieux-Bouthéon aurait été irrégulièrement désigné ; que le maire de la commune de Montbrison s'est fait représenter en vertu d'un arrêté de délégation, dont l'irrégularité n'est pas démontrée ; qu'à supposer même qu'une transmission en préfecture soit nécessaire, la date du tampon apposé sur cet arrêté n'est pas postérieure à celle de la réunion de la commission ; que l'article 7 du décret du 9 mars 1993 prévoit que les présidents des chambres consulaires peuvent être représentés ;

- la décision attaquée est suffisamment motivée et la motivation n'est pas erronée ; qu'au surplus, la commission départementale d'équipement commercial a statué en toute connaissance de cause, dès lors que le rapport de la DDCCRF aborde l'ensemble des points nécessaire à l'analyse ;

- à supposer même que la zone de chalandise ait été définie de façon inexacte, le service instructeur a rectifié les données du dossier de la demande ; que la commission départementale d'équipement commercial a disposé de tous les éléments nécessaires ; que la zone de chalandise a été délimitée à partir de la règle de l'isochrone, fixée en l'espèce à 15 minutes ; que les communes intégrées dans cette zone l'ont été à bon droit ; que les villes de Saint-Chamond et de Firminy, qui sont respectivement situées à 20 et 22 minutes du projet, n'ont pas à être intégrées à la zone de chalandise ; qu'ainsi, celle-ci a été correctement délimitée ;

- le projet, qui présente une surface de vente de 999 m², n'avait pas à faire l'objet d'une étude d'impact, dès lors que l'article R. 752-9 alors en vigueur du code de commerce n'impose la réalisation d'une telle étude que pour les projets dont la surface de vente est supérieure à 1 000 m² ;

- la surdensité commerciale doit être relativisée au regard des effets positifs attendus du projet ; que la réalisation du projet portera la densité commerciale dans la zone de chalandise à un niveau très légèrement supérieur à la moyenne départementale et inférieure à la moyenne nationale ; que le projet, qui sera implanté dans une zone commerciale périphérique, n'est pas de nature à concurrencer les petits commerces traditionnels, implantés pour l'essentiel dans le centre ville ; que l'enseigne Grand Frais n'est pas présente dans la zone de chalandise et porte sur une offre spécifique ; que le taux d'emprise du projet est très faible ; qu'il créera 32,23 emplois ETP et ne sera pas destructeur d'autres emplois ; que, par suite, en autorisant le projet, la commission départementale d'équipement commercial de la Loire n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 juin 2010, présenté pour M. C, M. B, Mme F, M. I, Mme J, M. M, M. L, M. E, M. A, M. D, la SARL Piotery René, M. H et Mme G qui demandent à la Cour de rejeter la requête ;

Les intimés soutiennent qu'ils se réfèrent à leurs écritures de première instance, qui établissent l'illégalité de l'autorisation attaquée ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 26 novembre 2010, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 décembre 2010 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de commerce ;

Vu la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat ;

Vu le décret n° 93-306 du 9 mars 1993 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mai 2011 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

Considérant que, par un jugement du 30 avril 2009, le Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 13 mars 2007 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial de la Loire a autorisé la SA GRAND FRAIS IMMOBILIER à créer un magasin de commerce de détail à dominante alimentaire d'une surface de vente de 999 m², à l'enseigne Grand Frais , sur le territoire de la commune d'Andrézieux-Bouthéon ; que cette société relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant, en premier lieu, que le Tribunal a admis la recevabilité de la demande en tant qu'elle émane de M. C et de M. B ; que la SA GRAND FRAIS IMMOBILIER soutient que ceux-ci ne démontrent pas en quoi l'enseigne Grand Frais exercera effectivement une concurrence sur leurs activités ; que, toutefois, la décision attaquée autorise la création d'un ensemble commercial spécialisé dans la vente de produits frais, de fruits et légumes, de fromages, outre des produits de boucherie et de poissonnerie ; que, par suite, M. C et M. B, qui exploitent, respectivement, sur le territoire de la commune de la Fouillouse, dans la zone de chalandise du projet litigieux, une épicerie et une boucherie, justifient, ainsi que le Tribunal l'a jugé, d'un intérêt à agir à l'encontre de l'autorisation attaquée ;

Considérant, en second lieu, que, pour annuler la décision attaquée, le Tribunal administratif de Lyon s'est fondé sur le motif tiré de ce que, en omettant de rechercher préalablement à l'examen des effets positifs du projet soumis à autorisation, si celui-ci est de nature à compromettre, dans la zone d'influence, l'équilibre recherché par le législateur entre les différentes formes de commerce, la commission départementale d'équipement commercial de la Loire a commis une erreur de droit ; que la SA GRAND FRAIS IMMOBILIER soutient que, ce faisant, le Tribunal a dénaturé les écritures des parties et annulé la décision attaquée au vu d'un moyen qui n'était pas invoqué ;

Considérant que, dans leurs écritures devant le Tribunal, les demandeurs ont soutenu, notamment, que, à la lecture de la décision attaquée, il apparaît que la commission départementale d'équipement commercial a omis, préalablement, de rechercher si le projet était de nature à compromettre l'équilibre recherché par le législateur entre les différentes formes de commerce et, en outre, que le Conseil d'Etat a récemment rappelé que les commissions doivent, dans un premier temps, s'interroger sur les densités commerciales, et ensuite rechercher si les effets positifs du projet sont de nature à compenser une éventuelle surdensité ; que les demandeurs ont également cité plusieurs décisions juridictionnelles, et notamment deux décisions du Conseil d'Etat, censurant, pour le motif précité qui a été retenu par le Tribunal, des autorisations d'équipement commercial ; que, dans ces conditions, contrairement à ce que soutient la société requérante, même si lesdites écritures des demandeurs figurent dans la partie consacrée à la légalité externe, sous l'intitulé relatif à l'insuffisance de la motivation de la décision , le Tribunal n'a pas statué au vu d'un moyen qui n'aurait pas été invoqué devant lui ;

Sur la légalité de la décision attaquée :

Considérant que, pour l'application des dispositions combinées de l'article 1er de la loi susvisé du 27 décembre 1973 et des articles L. 750-1 et L. 752-6 du code de commerce, dans leur rédaction applicable en l'espèce, il appartient aux commissions d'équipement commercial, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, d'apprécier si un projet soumis à autorisation est de nature à compromettre, dans la zone de chalandise intéressée, l'équilibre recherché par le législateur entre les diverses formes de commerce et, dans l'affirmative, de rechercher si cet inconvénient est compensé par les effets positifs du projet appréciés, d'une part, en tenant compte de sa contribution à l'emploi, à l'aménagement du territoire, à la concurrence, à la modernisation des équipements commerciaux et, plus généralement, à la satisfaction des besoins des consommateurs et, d'autre part, en évaluant son impact sur les conditions de circulation et de stationnement aux abords du site envisagé ;

Considérant que, pour accorder l'autorisation litigieuse, la commission départementale d'équipement commercial s'est fondée sur le fait que la création d'un magasin à dominante alimentaire d'une surface de vente de 999 m² à l'enseigne Grand Frais est de nature à développer l'offre et à favoriser la concurrence au bénéfice des consommateurs en proposant des produits frais et ultra frais en provenance des producteurs régionaux et nationaux et que ce projet permettra la création de 36 emplois, soit 32,23 emplois en équivalent temps plein ; que, si la SA GRAND FRAIS IMMOBILIER fait valoir, d'une part, que le rapport d'instruction de la direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a estimé qu'en présence d'une densité commerciale légèrement supérieure aux moyennes départementale et nationale, il convenait d'examiner les effets positifs du projet et, qu'en conséquence, la commission départementale d'équipement commercial a suivi une même démarche, d'autre part, qu'en autorisant le projet, cette commission a estimé que les effets positifs du projet compensent les risques d'écrasement du petit commerce et de gaspillage des équipements commerciaux, cependant, aucun élément du dossier ne peut permettre d'établir que, comme le soutient la requérante, cette commission a effectivement préalablement recherché si le projet soumis à autorisation est susceptible de compromettre, dans la zone d'influence, l'équilibre entre les différentes formes de commerce ; que, dès lors, ainsi que le Tribunal l'a jugé, ladite commission a fait une inexacte application des dispositions ci-dessus analysées ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la SA GRAND FRAIS IMMOBILIER n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du 13 mars 2007 par laquelle la commission départementale d'équipement commercial de la Loire l'a autorisée à créer un magasin de commerce de détail sur le territoire de la commune d'Andrézieux-Bouthéon ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les intimés, qui ne sont pas, dans la présente instance, parties perdantes, soient condamnés à payer à la SA GRAND FRAIS IMMOBILIER la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SA GRAND FRAIS IMMOBILIER est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA GRAND FRAIS IMMOBILIER, à M. Americo C et à M. André B. Copie en sera transmise à Mme Ferdinande F, M. Gilles I, Mme Béatrice J, M. Régis K, M. Vivien L, M Gilles E, M. Jean-Marie A, M. Robert D, la SARL Piotery René, M. Patrick H, et à Mme Karine G.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2011 à laquelle siégeaient :

M. Fontbonne, président,

M. Chenevey et Mme Chevalier-Aubert, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 14 juin 2011.

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N° 09LY01527


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY01527
Date de la décision : 14/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

14-02-01-05 Commerce, industrie, intervention économique de la puissance publique. Réglementation des activités économiques. Activités soumises à réglementation. Urbanisme commercial.


Composition du Tribunal
Président : M. FONTBONNE
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : SCP BOUYSSOU et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-06-14;09ly01527 ?
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