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14/06/2011 | FRANCE | N°09LY00575

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 14 juin 2011, 09LY00575


Vu la requête, enregistrée le 13 mars 2009, présentée pour la SARL PEFYRAIL, dont le siège est 415 rue de la Poste à Châtillon-en-Michaille (01200) ;

La SARL PEFYRAIL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0606795 du Tribunal administratif de Lyon

du 10 février 2009 en tant, que, par ce jugement, le Tribunal a rejeté sa demande d'annulation des dispositions de la délibération du 18 septembre 2006, par laquelle le conseil municipal de Bellegarde-sur-Valserine a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, classant en zone habitable le site ind

ustriel qu'elle occupe ;

2°) d'annuler cette délibération ;

3°) de condamner l...

Vu la requête, enregistrée le 13 mars 2009, présentée pour la SARL PEFYRAIL, dont le siège est 415 rue de la Poste à Châtillon-en-Michaille (01200) ;

La SARL PEFYRAIL demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0606795 du Tribunal administratif de Lyon

du 10 février 2009 en tant, que, par ce jugement, le Tribunal a rejeté sa demande d'annulation des dispositions de la délibération du 18 septembre 2006, par laquelle le conseil municipal de Bellegarde-sur-Valserine a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune, classant en zone habitable le site industriel qu'elle occupe ;

2°) d'annuler cette délibération ;

3°) de condamner la commune de Bellegarde-sur-Valserine à lui verser une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La société requérante soutient que :

- le Tribunal a commis une erreur de droit en faisant découler le classement en zone habitable du site industriel litigieux de la servitude instituée en application de l'article

L. 123-2 a) du code de l'urbanisme ; qu'en effet, cette servitude a seulement pour objet de contribuer à la mise en oeuvre dans le temps d'un classement supposé légal ;

- le Tribunal a également commis une erreur de fait ; que, si le jugement mentionne que la commune souhaite engager la reconversion du site industriel, afin de transformer son image et cadre de vie, le mécanisme prévu par l'article L. 123-2 a) doit avoir quelque consistance et quelque chance de voir le jour ; que le dossier ne contient aucun élément objectif donnant consistance au projet d'aménagement allégué par la commune, en dehors des doléances des habitants du quartier d'Arlod et des déclarations de cette dernière ; qu'en revanche, les éléments négatifs sont d'une consistance singulière, la pollution centenaire du site s'opposant à une affectation à l'habitation ; qu'en outre, le projet ne dispose d'aucune chance d'aboutir, le site constituant une propriété privée ; que la commune a décidé de l'avenir d'un terrain ne lui appartenant pas, et ce contrairement à sa destination objective ;

- la délibération attaquée est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière au regard de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, aucun élément ne permettant d'établir la consistance de l'information qui a été délivrée aux conseillers municipaux avant le vote de la délibération attaquée, relativement aux motifs et aux choix de la révision ;

- dans son avis du 23 mai 2006, le préfet a constaté l'existence d'une pollution sur le site et a prescrit la dépollution et un contrôle a posteriori de l'effectivité de cette dernière, l'ensemble devant être préalable au changement d'affectation ; que la commune n'a fait valoir aucun élément susceptible d'invalider cette appréciation ; qu'en conséquence, l'affectation du site industriel à l'habitation est entachée d'une erreur d'appréciation, les terrains présentant un risque avéré pour la santé ;

- ledit avis du préfet fait état de risques de dommages graves et irréversibles, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques, dans l'hypothèse d'une affectation du site à l'habitation ; que, par suite, cette affectation méconnaît le principe de précaution, tel qu'énoncé à l'article L. 110-1 du code de l'environnement, compte tenu de l'existence avérée de risques élevés de dommages sur la santé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 février 2010, présenté pour la commune de Bellegarde-sur-Valserine, qui demande à la Cour :

- de rejeter la requête ;

- de condamner la SARL PEFYRAIL à lui verser une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que :

- conformément aux dispositions de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales, une note explicative de synthèse, contenant des éléments suffisants, a été adressée aux conseillers municipaux, avec la convocation à la séance

du 18 septembre 2006 ;

- le Tribunal n'a fait état de la servitude de gel qu'en dernier lieu ; qu'il est erroné de soutenir que le Tribunal aurait estimé que le classement en zone urbaine se justifie par cette servitude, cet élément étant seulement venu conforter l'appréciation selon laquelle le parti d'aménagement retenu tient suffisamment compte de la situation existante ;

- le reclassement du site SKW s'accompagne de dispositions qui tiennent compte de l'ensemble des enjeux liés à la reconversion de cette friche industrielle, et notamment de la dépollution du site ; que, par son avis du 23 mai 2006, le préfet a considéré que le reclassement du site est tout à fait possible, mais qu'il doit s'accompagner d'une étude détaillée, pour établir le degré de dépollution nécessaire, ainsi que d'une vérification après la réalisation des travaux ; que ces remarques ont été prises en compte, des prescriptions spéciales ayant été intégrées dans le règlement, à l'article UB 3-5, lesquelles permettent de s'assurer qu'aucune construction ne pourra être réalisée avant que la dépollution n'ait été effectuée ; qu'au surplus, le secteur est soumis à la servitude d'urbanisme prévue à l'article L. 123-2 a) du code de l'urbanisme, qui gèle les possibilités de construire durant cinq ans, dans l'attente de la réalisation d'un projet d'aménagement global ; que les études en possession des services de l'Etat ne révèlent aucun danger pour la santé publique ; qu'ainsi, en affirmant une vocation d'habitat pour le site, tout en prenant l'ensemble des dispositions nécessaires pour éviter tout risque, elle n'a commis aucune erreur manifeste d'appréciation ; que le simple fait que le plan local d'urbanisme oriente pour l'avenir l'urbanisme dans une direction différente ne saurait permettre de constituer une telle erreur ;

- le Tribunal a estimé que les dispositions de l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme n'ont pas été respectées en tant que le règlement fixa à 0 m², sur la zone Ub, la surface au delà de laquelle les constructions et installations sont interdites ; que, ce faisant, le Tribunal a admis qu'en elle-même, l'instauration d'une telle servitude est justifiée en l'espèce ; que les seules exigences prévues pour l'institution de ladite servitude sont fixées par l'article

R. 123-1 3° du code de l'urbanisme, qui impose de justifier de cette institution dans le rapport de présentation, ce qui est bien le cas en l'espèce, du fait de la nécessité de procéder aux études préalables et pré-opérationnelles sur la dépollution à mettre en oeuvre et sur les choix à faire pour la restructuration du site ; qu'elle ne peut à ce stade présenter de projet urbain précis, dès lors que la servitude a justement pour utilité de pouvoir disposer du temps nécessaire pour concevoir un projet d'aménagement global ; que la requérante ne peut soutenir qu'il ne serait possible de décider que du seul devenir des terrains communaux ; qu'en fonction du projet global qui sera retenu, elle mettra en oeuvre tous les outils adaptés à la réalisation de son projet ;

- les auteurs du plan local d'urbanisme ont pris l'ensemble des mesures nécessaires afin de prévenir tout risque de dommage, puisqu'aucune construction ne sera possible avant une dépollution complète ; que les mesures qui accompagnent le reclassement du site permettent de prévenir tout risque d'atteinte à la santé ou à la salubrité publique ; que le principe de précaution a, par suite, été respecté ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 23 février 2010, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 mars 2010 ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 mars 2010, présenté pour la SARL PEFYRAIL, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La société requérante soutient, en outre, que :

- par sa délibération du 3 février 2003, contrairement à ce qu'impose les dispositions de l'article L. 300-2 du code de l'urbanisme, le conseil municipal n'a pas délibéré sur les objectifs poursuivis par la révision, s'étant borné à lister des réflexions, et non les grandes lignes d'aménagement et d'urbanisme dans lesquelles il entendait engager la commune ;

- la délibération du 3 février 2003 par laquelle le conseil municipal a prescrit la révision mentionne des convocations du lundi 27 janvier 2003 ; qu'il appartient à la ville de rapporter la preuve que les convocations ont bien été distribuées aux domiciles des conseillers municipaux au plus tard le lendemain ; qu'en l'état, cette délibération est entachée d'un vice substantiel au regard des dispositions de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales ;

- la délibération attaquée mentionne des convocations du mardi 12 septembre 2006 ; qu'il appartient à la ville de rapporter la preuve que les convocations ont bien été distribuées aux domiciles des conseillers municipaux le jour même ; qu'en l'état, cette délibération est illégale au regard des dispositions de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales ;

- il ne ressort pas de la note de synthèse qui aurait été communiquée avec la convocation du 12 septembre 2006 ou de la délibération attaquée elle-même que l'ensemble du projet de plan local d'urbanisme aurait préalablement été adressé aux membres du conseil municipal ; que les dispositions combinées des article L. 2121-12 et L. 2121-13 du code général des collectivités territoriales ont donc été méconnues ; que la note de synthèse ne comporte aucune explication relative aux motifs et choix qui ont conduit à la révision ; que la délibération elle-même est insusceptible de régulariser, pour autant que cela soit possible, le vice qui affecte la note de synthèse ;

- l'affectation du site litigieux à l'habitation est entachée d'une erreur de fait ; qu'en effet, la pollution affecte l'ensemble du tènement et, par suite, le reclassement du terrain, par l'effet exclusif de la servitude, est illégal, aucune partie ne concordant avec la définition du zonage qui a été instauré ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 31 mars 2010, la clôture de l'instruction a été reportée au 28 avril 2010 ;

Vu le mémoire, enregistré le 20 avril 2010, présenté pour la SARL PEFYRAIL, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La société requérante soutient, en outre, que le classement en zone habitable du site litigieux est entaché aussi bien d'erreur de droit que d'erreur de fait, le terrain n'étant pas habitable en l'absence de la servitude de gel qui a été instituée sur l'intégralité du site ; que la servitude ne constitue donc qu'une fiction juridique ; que l'avis précité du préfet impose une seconde campagne de mesure, pour vérifier le niveau de dépollution atteint ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 avril 2010, présenté pour la commune de Bellegarde-sur-Valserine, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La commune soutient, en outre, que :

- il ressort des termes mêmes de la délibération prescrivant la révision du plan que les conseillers municipaux ont bien délibéré sur les objectifs de la révision ; que les réflexions listées dans cette délibération constituent autant d'objectifs et d'orientations ; qu'en outre, ces points ne constituent qu'un résumé de l'exposé fait par le maire sur l'intérêt et l'opportunité de la révision, sur lequel les conseillers ont ensuite délibéré ;

- il est constant que les convocations à la séance du 3 février 2003 ont été adressées le 27 janvier 2003 ; que le délai de cinq jours francs a donc été respecté ; que l'allégation selon laquelle les convocations n'auraient pas été adressées aux domiciles de leurs destinataires ne s'appuie, comme celle tiré du non respect de ce délai, sur aucun élément ; que, si les convocations au conseil municipal ne sont pas adressées en recommandé avec accusé de réception, elle produit des attestations permettant d'établir que les convocations à ladite séance ont bien été adressées aux domiciles des conseillers municipaux ;

- le même moyen dirigé contre la délibération attaquée elle-même n'est, là encore, étayé par aucun élément ; qu'il est constant que les convocations à la séance du 18 septembre 2006 ont été adressées le 12 septembre 2006 ; que le délai de cinq jours francs a, par suite, été respecté ; que les attestations produites permettent d'établir que les convocations à ladite séance ont effectivement été adressées aux domiciles des conseillers municipaux ;

- la note de synthèse qui a été jointe à la convocation à la séance du 18 septembre 2006 est suffisante ; que la requérante ne peut soutenir que la délibération attaquée serait illégale au motif que l'ensemble du projet n'aurait pas été préalablement communiqué aux conseillers municipaux ; que les convocations précisaient que les documents pouvaient être consultés au service foncier-urbanisme ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 30 avril 2010, la clôture de l'instruction a été reportée au 28 mai 2010 ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 mai 2010, présenté pour la commune de Bellegarde-sur-Valserine, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 mai 2010, présenté pour la SARL PEFYRAIL, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La société requérante soutient, en outre, que :

- aucun élément ne permet d'affirmer que, comme le soutient la commune en défense, les objectifs de la révision auraient été oralement exposés par le maire en séance ;

- le délai de cinq jours ne se décompte qu'à compter du jour où la convocation est effectivement parvenue à son destinataire, et non à compter du jour de l'envoi ; que les attestations produites n'établissent pas les dates auxquelles les convocations ont été reçues ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 2 juin 2010, la clôture de l'instruction a été reportée au 30 juin 2010 ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 juin 2010, présenté pour la commune de Bellegarde-sur-Valserine, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

La commune soutient, en outre, que :

- l'exposé qui a été fait par le maire sur l'intérêt et l'opportunité de réviser le plan est visé par la délibération du 3 février 2003

- dès lors que les convocations aux séances des 3 février 2003 et 18 septembre 2006 ont bien été envoyées aux domiciles des membres du conseil municipal, c'est la date d'envoi de ces convocations qui doit être prise en compte ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 28 juin 2010, la clôture de l'instruction a été reportée au 8 septembre 2010 ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 septembre 2010, présenté pour la SARL PEFYRAIL, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 13 septembre 2010, la clôture de l'instruction a été reportée

au 11 octobre 2010 ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 septembre 2010, présenté pour la commune de Bellegarde-sur-Valserine, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 octobre 2010, présenté pour la SARL PEFYRAIL, tendant aux mêmes fins que précédemment ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, et notamment son préambule ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mai 2011 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- les observations de Me Brocheton, avocat de la SARL PEFYRAIL, et celles de Me Camière, représentant la SCP Maurice-Riva-Vacheron, avocat de la commune de Bellegarde-sur-Valserine ;

- les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

- et la parole ayant à nouveau été donnée aux parties présentes ;

Considérant que, par un délibération du 18 septembre 2006, le conseil municipal de Bellegarde-sur-Valserine a approuvé le plan local d'urbanisme de la commune ; que la SARL PEFYRAIL a demandé au Tribunal administratif de Lyon d'annuler cette délibération ; que, par un jugement du 10 février 2009, le Tribunal n'a que partiellement fait droit à cette demande, en annulant la délibération attaquée en tant seulement que la servitude instituée en application de l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme fixe à 0 m², dans la zone Ub située dans le quartier d'Arlod, la surface au-delà de laquelle les constructions et installations sont interdites ; que, par la présente requête, la SARL PEFYRAIL demande à la Cour d'annuler, en premier lieu, ce jugement en tant qu'il rejette sa demande d'annulation des dispositions de la délibération du 18 septembre 2006 classant dans ladite zone habitable Ub le site industriel qu'elle occupe, en second lieu, cette délibération ; que, si ces conclusions sont contradictoires, il y a lieu, compte tenu de l'ensemble des écritures de la société requérante, de regarder la requête comme tendant seulement à l'annulation de ladite délibération en tant qu'elle classe en zone Ub le site industriel situé dans le quartier d'Arlod et en tant qu'elle institue une servitude, en application de l'article L. 123-2 a) du code de l'urbanisme, sur ce site ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales : Toute convocation est faite par le maire. Elle indique les questions portées à l'ordre du jour (...) ; qu'aux termes de l'article L. 2121-12 du même code : Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal (...) ;

Considérant que la note de synthèse qui a été adressée aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation à la séance du 18 septembre 2006, se borne à procéder à un rappel chronologique de la procédure, puis à lister les modifications à apporter au projet initial, à la suite des avis des personnes associées et de l'enquête publique ; que ces modifications portent sur des points ponctuels et ne permettent pas de donner une idée suffisamment générale du projet, de ses motifs et des choix qui ont été effectués ; qu'il n'est pas soutenu qu'un autre document, également joint à la convocation, aurait pu permettre de pallier cette lacune ; que la circonstance que la convocation indiquait que le dossier pouvait être consulté au service foncier-urbanisme est sans incidence ; que, dans ces conditions, la SARL PEFYRAIL est fondée à soutenir que la note de synthèse n'est pas suffisante et ne permet pas de répondre aux exigences posées par les dispositions précitées ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 123-2 du code de l'urbanisme : Dans les zones urbaines, le plan local d'urbanisme peut instituer des servitudes consistant : / a) A interdire, sous réserve d'une justification particulière, dans un périmètre qu'il délimite et pour une durée au plus de cinq ans dans l'attente de l'approbation par la commune d'un projet d'aménagement global, les constructions ou installations d'une superficie supérieure à un seuil défini par le règlement ; les travaux ayant pour objet l'adaptation, le changement de destination, la réfection ou l'extension limitée des constructions existantes sont toutefois autorisés (...) .

Considérant qu'en application de ces dispositions, la commune de Bellegarde-sur-Valserine a institué une servitude sur ladite zone Ub ; qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport de présentation, et n'est pas contesté, que cette servitude a pour objet de permettre à la commune de disposer d'un délai pour élaborer un projet d'aménagement global sur cette zone, mais également de déterminer le niveau de pollution du site et les mesures de dépollution à mettre en oeuvre ; que ce second motif est entaché d'erreur de droit, la servitude prévue par les dispositions précitées ne pouvant légalement être instituée, aux termes de ces dispositions, que dans l'attente de l'approbation par la commune d'un projet d'aménagement global ; que, par suite, dès lors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la servitude litigieuse aurait également été instituée si la commune ne s'était fondée que sur le seul premier motif précité, dont l'illégalité n'est pas démontrée, ni même alléguée, la SARL PEFYRAIL est fondée à soutenir qu'en instituant cette servitude, le conseil municipal de la commune de Bellegarde-sur-Valserine a entaché sa décision d'illégalité ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction ; que s'ils ne sont pas liés, pour déterminer l'affectation future des différents secteurs, par les modalités existantes d'utilisation des sols, dont ils peuvent prévoir la modification dans l'intérêt de l'urbanisme, leur appréciation peut cependant être censurée par le juge administratif au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la commune de Bellegarde-sur-Valserine, marquée par son passé industriel, souhaite modifier son image et son cadre de vie ; que cette commune a ainsi fait du renouvellement urbain l'enjeu majeur du plan local d'urbanisme ; que, dans ce cadre, elle souhaite engager la reconversion d'anciens sites industriels et, notamment, de la friche SKW, dans le quartier d'Arlod, qui est située à proximité du centre ville et est imbriquée dans des quartiers d'habitation ; qu'une partie de cette friche industrielle a ainsi été classée en zone Ub, qui correspond aux quartiers d'extension du centre ville comprenant notamment un habitat de type collectif ;

Considérant qu'il est constant que l'ancien site industriel SKW est pollué ; que la commune admet qu'aucune construction d'habitation n'est immédiatement réalisable, avant une dépollution ; qu'ainsi, notamment, le rapport de présentation mentionne que le niveau de pollution potentiel empêche toute évolution dans l'attente d'études complémentaires , lesquelles constituent un préalable à toute construction nouvelle ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la commune connaîtrait les mesures à engager pour la dépollution du site et dans quel délai ces mesures pourraient être effectuées, ni même si une dépollution suffisante, permettant l'habitation, pourra effectivement être réalisée dans un délai raisonnable ; que les terrains n'appartenant pas à la commune, la dépollution ne pourra, en principe, pas être effectuée dans le cadre du projet global qu'elle envisage pour l'aménagement de la zone ; qu'en tout état de cause, il n'est pas soutenu qu'une dépollution du site serait envisagée dans le cadre de la législation des installations classées pour la protection de l'environnement ; que, si la commune fait valoir que l'article Ub 2-5 du règlement impose, avant la réalisation de tous travaux et constructions, de réaliser une étude détaillée pour évaluer le degré de pollution, puis de vérifier la dépollution des sols, après la réalisation des travaux nécessaires, ledit projet global d'aménagement ne peut que difficilement se concilier avec une dépollution aléatoire et ponctuelle du site, au gré de la réalisation des différents projets particuliers au sein de la zone ; que, dans ces conditions, la SARL PEFYRAIL est fondée à soutenir qu'en classant en zone Ub la friche industrielle du quartier d'Arlod, le conseil municipal de la commune de Bellegarde-sur-Valserine a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant que, pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, aucun autre moyen n'apparaît, en l'état de l'instruction, également susceptible de fonder l'annulation des dispositions attaquées de la délibération du 18 septembre 2006 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL PEFYRAIL est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation des dispositions de la délibération du 18 septembre 2006 classant en zone Ub le site industriel situé dans le quartier d'Arlod et instituant une servitude sur ce site, en application de l'article L. 123-2 a) du code de l'urbanisme ; qu'en conséquence, il y a lieu d'annuler ce jugement, dans cette mesure, et ces dispositions ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SARL PEFYRAIL, qui n'est pas, dans la présente instance, partie perdante, soit condamnée à payer à la commune de Bellegarde-sur-Valserine la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de cette commune le versement d'une somme de 1 200 euros au bénéfice de la société requérante sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 10 février 2009 est annulé en tant que, par ce jugement, le Tribunal a rejeté les conclusions de la SARL PEFYRAIL tendant à l'annulation des dispositions de la délibération du 18 septembre 2006 classant en zone Ub le site industriel situé dans le quartier d'Arlod et instituant une servitude sur ce site, en application de l'article L. 123-2 a) du code de l'urbanisme.

Article 2 : La délibération du 18 septembre 2006 est annulée en tant qu'elle classe en zone Ub le site industriel situé dans le quartier d'Arlod et institue une servitude sur ce site, en application de l'article L. 123-2 a) du code de l'urbanisme.

Article 3 : La commune de Bellegarde-sur-Valserine versera à la SARL PEFYRAIL une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Bellegarde-sur-Valserine tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL PEFYRAIL et à la commune de Bellegarde-sur-Valserine.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2011, à laquelle siégeaient :

M. Fontbonne, président,

M. Chenevey et Mme Chevalier-Aubert, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 14 juin 2011.

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N° 09LY00575


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY00575
Date de la décision : 14/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-01-01-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Plans d'aménagement et d'urbanisme. Plans d'occupation des sols et plans locaux d'urbanisme. Légalité des plans.


Composition du Tribunal
Président : M. FONTBONNE
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : SELARL BROCHETON ET COMBARET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-06-14;09ly00575 ?
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