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09/06/2011 | FRANCE | N°10LY01158

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 09 juin 2011, 10LY01158


Vu le recours, enregistré le 11 mai 2010 au greffe de la Cour, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0706211-0706212-0706213 du 29 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a déchargé M. Joël A de la part contestée des rappels de taxe professionnelle mis à son nom au titre des années 2004, 2005 et 2006 ;

2°) de remettre les impositions en litige à la charge de M. A à hauteur des dégrèvements prononcés par les premiers juges ; r>
Il soutient :

- que c'est à tort que le tribunal administratif a regardé l'activit...

Vu le recours, enregistré le 11 mai 2010 au greffe de la Cour, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA REFORME DE L'ETAT ;

Le ministre demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0706211-0706212-0706213 du 29 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a déchargé M. Joël A de la part contestée des rappels de taxe professionnelle mis à son nom au titre des années 2004, 2005 et 2006 ;

2°) de remettre les impositions en litige à la charge de M. A à hauteur des dégrèvements prononcés par les premiers juges ;

Il soutient :

- que c'est à tort que le tribunal administratif a regardé l'activité de M. A comme relevant de la fourniture de marchandises ; que les matériaux ne représentent que 30 % environ du coût des travaux et leur sont indissolublement liés ; que le Conseil d'Etat a estimé que, pour l'application du 4° de l'article 1469 du code général des impôts, les travaux publics relevaient des prestations de services ;

- que les entreprises, telles celles qui réalisent les travaux immobiliers et fournissent, outre la main-d'oeuvre, les matériaux et matières premières, doivent être imposées selon les règles applicables en présence d'exercice conjoint d'activités mixtes ; que cette position est conforme tant à la documentation administrative 6 E-2212 n° 21, du 10 décembre 1996, applicable en matière de taxe professionnelle, qu'à celle relative au régime des micro-entreprises - instruction du 20 juillet 1999, 4 G-2-99, n° 17 - et à celle relative au régime simplifié d'imposition - instruction 4 G-341, n° 5 du 25 juin 1998 ;

- qu'en cas d'activité mixte, s'agissant de la taxe professionnelle, la valeur locative des matériels et outillages n'est pas prise en compte dans la base imposable de la taxe professionnelle si le chiffre d'affaires pondéré ne dépasse pas 61 000 euros ; que cette pondération s'obtient en affectant le coefficient de 1 aux recettes procurées par l'activité de prestation de services et du coefficient de 0, 4 aux recettes de l'activité de vente ;

- que le chiffre d'affaires pondéré de M. A est supérieur à la limité fixée pour les activités mixtes, soit 61 000 euros ;

- que M. A dépassant le seuil d'exonération pour les années précédentes, c'est à tort que le tribunal administratif a appliqué pour 2006 la réduction prévue par les dispositions de l'article 1469 B du code général des impôts ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 août 2010, présenté pour M. A qui conclut au rejet du recours et, à titre subsidiaire, à ce que les impositions litigieuses soient réduites, au titre des trois années en litige, d'un total de 8 372 euros par application des dispositions de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur ;

Il soutient :

- que son activité de rénovation de bâtiments ne saurait être classée automatiquement dans la catégorie des prestations de services ; que l'achat des marchandises représente environ 30 % du chiffre d'affaires ;

- que l'absence de distinction dans la facturation entre marchandises vendues et main-d'oeuvre ne doit pas nécessairement entraîner la requalification en prestation de main-d'oeuvre de l'ensemble du chiffre d'affaires ; que le débat porte sur la nature d'activité " mixte " ou d'activité de vente des entreprises de maçonnerie au regard de la taxe professionnelle ;

- que la doctrine applicable jusqu'au 20 juillet 1999 considérait, dans le cadre du forfait, les entreprises du bâtiment comme des activités de vente, que la jurisprudence a fait la même analyse ;

- que la jurisprudence citée par le ministre, - CE 20 mars 1996, n° 123716 Angely - n'est pas pertinente car l'activité de travaux publics concernée consistait exclusivement en la pose ou la dépose de matériels fournis par l'administration des postes et télécommunications ; qu'il fournit, en plus de la main-d'oeuvre, des matériaux qui entrent dans le prix de l'ouvrage ;

- que l'instruction administrative du 29 juillet 1999, 4 G-2-99 n° 17, relative au régime du " BIC micro-entreprises " qui a remplacé le régime du forfait, précise que les artisans du bâtiment doivent désormais être regardés comme exerçant une activité mixte ; que cependant pour l'appréciation des chiffres limites du régime simplifié, il y a lieu de se référer purement et simplement aux règles relatives au régime forfaitaire, qui figurent toujours dans la doctrine applicable (instructions 3 E 1331 n° 5 au 2 novembre 1996 et 4 G-341 n° 5 du 25 juin 1998) ; que lorsque l'entrepreneur fournit main-d'oeuvre et matériaux ou matière première, c'est le maximum relatif aux ventes qui doit être appliqué (instruction 3 F 2212 n° 6 du 15 octobre 1997, instruction 4 G 3221 n° 8 du 25 juin 1998, instruction 3 E-1331 n° 5 du 2 novembre 1996, instruction 4 G-341 n° 5 du 25 juin 1998 ) ; que plusieurs réponses ministérielles indiquent que la précision exposée dans l'instruction 4 G-2-99 du 20 juillet 1999 ne valait que pour l'éligibilité au régime des micro-entreprises et à la franchise à la base, laissant intacte la doctrine antérieure pour les entreprises relevant du régime simplifié d'imposition ; que la jurisprudence va dans le même sens : Cour administrative d'appel de Nantes 28 octobre 1997 - B;

- que pour l'imposition de l'année 2006, son chiffre d'affaires 2004 ayant dépassé pour la première fois la limite d'exonération applicable aux ventes, il y a lieu d'appliquer les dispositions de l'article 1469 B du code général des impôts, et qu'en conséquence, le rappel de taxe professionnelle doit être limité à 1 948 euros ;

- qu'à titre subsidiaire, il y a lieu d'appliquer le plafonnement prévu par les dispositions de l'article 1647 B sexies ancien, d'où un dégrèvement total de 8 372 euros ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 14 avril 2011, présenté par le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat ;

Il conclut à ce que M. A soit rétabli dans les rôles de la taxe professionnelle à hauteur de 4 344 euros pour 2004, 4 621 euros pour 2005 et 3 393 euros pour 2006, compte tenu des droits du requérant au bénéfice des dispositions anciennes de l'article 1649 B sexies du code général des impôts ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 mai 2011 :

- le rapport de M. Raisson, premier conseiller ;

- les observations de Me Brosse, avocat de M. A ;

- et les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;

- la parole ayant été donnée à nouveau à Me Brosse, avocat de M. A ;

Considérant que M. A, artisan maçon à Etables (Ardèche), a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2003, 2004 et 2005 ; qu'à la suite de ce contrôle, il a été averti le 25 octobre 2006 de l'intention de l'administration fiscale de rehausser les cotisations de taxe professionnelle mises à sa charge au titre des années 2003 à 2006, à raison, d'une part, de l'omission dans la base imposable de la valeur locative, des biens soumis à la taxe foncière et dont disposait l'entreprise, d'autre part, de l'application indue des dispositions de l'article 1452 du code général des impôts, l'exploitant ayant employé au cours de ces années plusieurs ouvriers ; qu'il a fait valoir devant l'administration qu'il entendait bénéficier, au titre des années 2004 et 2005, des dispositions du 4) de l'article 1469 de ce même code et, au titre de l'année 2006, de l'article 1469 B ; que le Tribunal administratif de Lyon a fait droit à ses demandes à ce titre, et a prononcé la décharge correspondante des rappels de cotisations relatifs aux années 2004 et 2005, et la réduction du rappel 2006 ; que le ministre fait appel de ce jugement ;

Sur l'étendue du litige :

Considérant que, dans son mémoire en défense, M. A a demandé, en application des dispositions de l'article 1647 B sexies du code général des impôts dans sa rédaction alors en vigueur, le plafonnement des cotisations litigieuses à raison de leur plafonnement en fonction de la valeur ajoutée ; que le ministre a répondu favorablement à cette demande pour des montants non contestés ; qu'il doit être regardé comme limitant ses conclusions à la remise à la charge de M. A des sommes de 4 344 euros pour 2004, 4 621 euros pour 2005 et 3 393 euros pour 2006 ;

Sur l'application des articles 1469 et 1469 B du code général des impôts :

Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : " La taxe professionnelle a pour base : 1° Dans le cas des contribuables autres que ceux visés au 2° : a. la valeur locative, telle qu'elle est définie aux articles 1469, 1518 A, 1518 A bis et 1518 B, des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité professionnelle pendant la période de référence définie aux articles 1467 A et 1478, à l'exception de celles qui ont été détruites ou cédées au cours de la même période ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 1469 du même code : " (...) 4° Il n'est pas tenu compte de la valeur locative définie aux 2° et 3° pour l'imposition des redevables sédentaires dont les recettes annuelles n'excèdent pas 61 000 euros s'il s'agit de prestataires de services ou de membres de professions libérales et 152 500 euros dans les autres cas ; pour les redevables sédentaires ne remplissant pas ces conditions, cette valeur locative est réduite d'un montant fixé à 3 800 euros ; les limites prévues seront réévaluées lors du vote de chaque loi de finances (...) " ; qu'aux termes de l'article 1469 B du même code : " I. Pour les redevables de la taxe professionnelle dont les recettes annuelles deviennent supérieures, à compter des impositions de 1983, aux limites d'exonération des biens non passibles d'une taxe foncière, l'abattement de 3 800 euros prévu au 4° de l'article 1469 est remplacé par une réduction de la valeur locative de ces biens, calculée chaque année en fonction du montant des recettes annuelles du redevable. (... ) " ; qu'il résulte de ces dispositions que la détermination de la base imposable des contribuables assujettis à la taxe professionnelle est exonérée de la valeur locative des immobilisations corporelles dont le redevable a disposé pour les besoins de son activité lorsque ses recettes annuelles n'excèdent pas 61 000 euros s'il s'agit de prestataires de services ou de membres de professions libérales et 152 500 euros dans les autres cas ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'activité de maçonnerie exercée par M. A consiste en la rénovation ou la construction de bâtiments ou ouvrages pour le compte de propriétaires immobiliers ; que les achats de marchandises et matières premières représentent environ 30 % de son chiffre d'affaires et que ces fournitures sont en leur totalité intégrées aux travaux qu'il effectue sur les immeubles de ses clients ; qu'il ne peut, dans ces conditions, être regardé comme réalisant principalement une activité de vente de marchandises dont il assurerait par ailleurs la pose mais doit être considéré comme un prestataire de services ; qu'il n'est pas contesté que son chiffre d'affaires, au titre des années 2002 et 2003, servant de base à l'imposition pour 2004 et 2005, est supérieur à la somme de 61 000 euros, soit le plafond de l'exonération prévue par les dispositions précitées ; qu'à supposer même que M. A entende soutenir qu'il exerçait une activité mixte, - les achats de marchandises et matières premières étant considérés comme des ventes et affectés du coefficient de pondération de 0, 4 - son chiffre d'affaires dépasserait en tout état de cause la limite susmentionnée de 61 000 euros ; que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, pour ce motif, le Tribunal administratif de Lyon a prononcé les dégrèvements dont la remise à la charge est demandée ; qu'il y a lieu, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les parties tant devant le Tribunal que devant la Cour ;

Considérant que si M. A se prévaut des instructions administratives, 3 E 1331 n°5 au 2 novembre 1996, 4 G-341 n° 5 du 25 juin 1998, 3 F 2212 n° 6 du 15 octobre 1997, 4 G 3221 n° 8 du 25 juin 1998, 3 E-1331 n° 5 du 2 novembre 1996, 4 G-341 n° 5 du 25 juin 1998 et de ce que plusieurs réponses ministérielles indiquent que la précision exposée dans l'instruction 4 G-2-99 du 20 juillet 1999 ne valait que pour l'éligibilité au régime des micro-entreprises et à la franchise à la base, laissant intacte la doctrine antérieure pour les entreprises relevant du régime simplifié d'imposition, d'une part, seule l'instruction 6 E-2212 concerne la taxe professionnelle, d'autre part, cette dernière ne donne aucune définition de l'activité de prestations de services en général ou de la nature des activités des entreprises de maçonnerie ; que, par suite, son argumentation sur ce point ne peut qu'être écartée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lyon a prononcé les dégrèvements dont il demande la remise à la charge ; qu'il y a lieu, de réformer le jugement ;

DECIDE :

Article 1er : Les cotisations de taxe professionnelle dont le Tribunal administratif de Lyon a prononcé la réduction sont remises à la charge de M. A à hauteur des sommes de 4 344 euros pour 2004, 4 621 euros pour 2005 et 3 393 euros pour 2006.

Article 2 : le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 29 décembre 2009 est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT et à M. Joël A.

Délibéré après l'audience du 12 mai 2011 à laquelle siégeaient :

M. Duchon-Doris, président de chambre,

M. Montsec, président-assesseur,

M. Raisson, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 juin 2011.

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N° 10LY01158


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY01158
Date de la décision : 09/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-03-04-04 Contributions et taxes. Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances. Taxe professionnelle. Assiette.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: M. Denis RAISSON
Rapporteur public ?: M. MONNIER
Avocat(s) : SELARL AM CONSULTANTS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-06-09;10ly01158 ?
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