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07/06/2011 | FRANCE | N°10LY01985

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 07 juin 2011, 10LY01985


Vu la requête, enregistrée le 15 août 2010 à la Cour, présentée pour Mme Nathalie B épouse A, domiciliée chez M. Jean A, ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1000658 en date du 6 mai 2010, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 26 octobre 2009 par lesquelles le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays dans

lequel elle établirait être légalement admissible ;

2°) d'annuler, pour excès ...

Vu la requête, enregistrée le 15 août 2010 à la Cour, présentée pour Mme Nathalie B épouse A, domiciliée chez M. Jean A, ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n°1000658 en date du 6 mai 2010, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 26 octobre 2009 par lesquelles le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays dans lequel elle établirait être légalement admissible ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire, à titre principal de lui délivrer un titre de séjour mention vie privée et familiale dans le mois suivant la notification de l'arrêt, en cas d'annulation de l'obligation de quitter le territoire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le mois suivant la notification de l'arrêt et, en cas d'annulation de la décision fixant le pays de destination, de lui délivrer une assignation à résidence, dans le mois suivant la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 300 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Elle soutient que :

- à défaut de demande de titre de séjour depuis la décision en date du 31 octobre 2008 lui refusant une autorisation provisoire de séjour, le refus de titre est dépourvu de base légale ;

- dès lors qu'elle partage la vie de M. Calcagno, de nationalité française, qu'elle a épousé, qu'elle justifie d'une parfaite intégration au sein de la société française, qu'elle ne peut envisager de retourner en toute sécurité dans son pays d'origine, qu'elle souffre de sérieux problèmes de santé sans qu'un traitement adapté soit disponible dans son pays d'origine, le refus de titre méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de l'illégalité du refus de titre, insuffisamment motivée, ne repose sur aucune base légale et seul un arrêté de reconduite à la frontière pouvait être pris à son encontre, et enfin, méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale du fait de l'illégalité des deux autres décisions et méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne des droits de l'homme, compte tenu des risques encourus dans son pays d'origine ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2010, présenté par le préfet de la Loire, qui conclut au rejet de la requête ;

Après s'en être remis à ses écritures de première instance, il soutient que :

- la situation de l'intéressée ne relevant pas des cas prévus par les dispositions de l'article L. 511-1 II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aucune erreur de droit n'a été commise ;

- les demandes présentées par l'intéressée en tant qu'étranger malade ou conjoint de français sont postérieures aux décisions attaquées ;

Vu le mémoire enregistré le 27 octobre 2010, présenté pour Mme A, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu la décision du 1er juillet 2010 du bureau d'aide juridictionnelle accordant à Mme A le bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 mai 2011 :

- le rapport de Mme Dèche, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

Considérant que Mme B épouse A, de nationalité congolaise, relève appel du jugement en date du 6 mai 2010, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 26 octobre 2009, par lesquelles le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer un titre de séjour et a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont elle a la nationalité, ou de tout autre pays dans lequel elle établirait être légalement admissible ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A ressortissante de la République démocratique du Congo, née le 12 février 1968, a déclaré être entrée en France, le 15 décembre 2006 ; que la demande d'asile qu'elle avait déposée a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 25 avril 2007, puis par la Cour nationale du droit d'asile, le 29 septembre 2008 ; que le 13 octobre 2008, elle a sollicité la délivrance d'une admission provisoire au séjour en vue du réexamen de sa demande d'asile ; que par décision du 31 octobre 2008, confirmée par un jugement en date du 16 juin 2009, du Tribunal administratif de Lyon, le préfet de la Loire a rejeté sa demande ; que sa demande d'asile réexaminée selon les modalités de la procédure prioritaire, a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, le 18 novembre 2008 ; qu'à la suite de ce rejet de sa demande d'asile, par la décision en litige du 26 octobre 2009, le préfet de la Loire a refusé de lui délivrer le titre de séjour qui doit être accordé à l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié ; que cette décision prise en application des dispositions de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doit être regardée comme également prise en réponse à la demande d'admission au séjour en qualité de demandeur d'asile, présentée par Mme A ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, la décision précitée du 31 octobre 2008, par laquelle le préfet de la Loire lui avait refusé la délivrance d'une admission provisoire au séjour en vue du réexamen de sa demande d'asile ne peut être regardée comme ayant apporté une réponse à la demande d'admission au séjour en qualité de demandeur d'asile présentée par l'intéressée, laquelle restait toujours pendante ; que, dès lors, le préfet n'a pas commis d'erreur de droit en prenant la décision attaquée ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui(...) ;

Considérant que Mme A fait valoir qu'elle bénéficie d'une parfaite intégration dans la société française où réside son frère qui bénéficie du statut de réfugié politique, qu'elle dispose d'une promesse d'embauche, que depuis le mois de juillet 2008, elle partage la vie de M. Jean A, de nationalité française et que leur mariage, le 3 avril 2010, certes postérieur, à la date de la décision attaquée, confirme l'intensité des liens qui les unissent ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressée qui est entrée en France en 2006, n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de 38 ans et où résident ses trois enfants biologiques et deux autres dont son frère lui avait confié la garde ; que la décision du préfet de la Loire lui refusant un titre de séjour n'ayant ni pour objet, ni pour effet, de la renvoyer dans son pays d'origine, l'intéressée ne peut utilement invoquer les risques encourus par elle tant pour sa santé, que pour sa sécurité, en cas de retour en République Démocratique du Congo ; que, dans ces conditions, la décision attaquée n'a pas porté au droit de Mme A au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, ladite décision n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs, la décision susmentionnée n'est pas davantage entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de la requérante ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de délivrance de titre de séjour que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 : I - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger (...) pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. ; que, dès lors, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision contestée ne peut qu'être écarté ;

Considérant, en dernier lieu, que, pour les mêmes motifs que ceux qui ont été énoncés ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour, les moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale, dès lors qu'étant déboutée d'une demande d'asile, elle ne pouvait faire l'objet d'une reconduite à la frontière, que cette décision aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et qu'elle serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, doivent être écartés ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus dans le cadre de l'examen de la légalité du refus de délivrance de titre de séjour et de celle de l'obligation de quitter le territoire que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de ces décisions doit être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. et que ce dernier texte énonce que : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que ces dispositions combinées font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement, un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ;

Considérant que Mme A fait valoir qu'elle a subi des mauvais traitements en République Démocratique du Congo en raison de l'engagement politique de son frère et qu'elle craint d'autant plus d'y être exposée personnellement en cas de retour dans ce pays, qu'elle ne pourrait bénéficier du traitement nécessaire à son état de santé et qu'elle serait séparée de son époux ; que, toutefois, elle ne produit aucun élément permettant d'établir la réalité des risques encourus ; que, par suite, le moyen tiré de la violation, par la décision désignant la République Démocratique du Congo comme destination de la mesure d'éloignement, des stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par elle et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Nathalie B épouse A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2011 à laquelle siégeaient :

M. Fontanelle, président,

M. Seillet, premier conseiller,

Mme Dèche, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juin 2011.

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N° 10LY01985

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY01985
Date de la décision : 07/06/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FONTANELLE
Rapporteur ?: Mme Pascale DECHE
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : PETIT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-06-07;10ly01985 ?
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