La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/05/2011 | FRANCE | N°08LY02077

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 31 mai 2011, 08LY02077


Vu la requête, enregistrée le 5 septembre 2008 au greffe de la Cour, présentée pour la société LA MISOTIERE, dont le siège est avenue de la gare à Mauriac (15200) ;

La société LA MISOTIERE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0500291 du 30 juillet 2008 par laquelle le président du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à ce que soit prononcée la restitution des droits de taxe sur les achats de viande qu'elle a acquittés au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 octobre 2003, assortis des intérêts moratoires

;

2°) de prononcer la restitution de la taxe en litige, assortie des intérêts ...

Vu la requête, enregistrée le 5 septembre 2008 au greffe de la Cour, présentée pour la société LA MISOTIERE, dont le siège est avenue de la gare à Mauriac (15200) ;

La société LA MISOTIERE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 0500291 du 30 juillet 2008 par laquelle le président du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à ce que soit prononcée la restitution des droits de taxe sur les achats de viande qu'elle a acquittés au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 octobre 2003, assortis des intérêts moratoires ;

2°) de prononcer la restitution de la taxe en litige, assortie des intérêts moratoires ;

Elle soutient :

- qu'après avoir prononcé le dégrèvement de la taxe mise à sa charge, l'administration fiscale ne pouvait légalement revenir sur cette décision, sans procéder à la mise en recouvrement d'une nouvelle imposition, au terme d'une nouvelle procédure contradictoire ;

- que la taxe sur les achats de viande telle qu'elle existait au titre de la période en cause constituait une aide d'Etat au sens de l'article 92 du traité de Rome ; que faute de notification préalable, et de non exécution avant décision de la Commission, tant lors de sa création que lors de sa modification en 2001, cette taxe est contraire à l'article 88, paragraphe 3, du même traité ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 août 2009, présenté pour le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

- que le service était en droit de rapporter la décision de dégrèvement regardée rétroactivement comme illégale en tant qu'elle accordait indûment une restitution de taxe ; que la lettre modèle adressée à l'entreprise, l'informant du dégrèvement accordé n'était pas motivée, et ne pouvait dès lors être regardée comme une prise de position formelle ; que le service pouvait ainsi rapporter cette décision, dès lors qu'il avait constaté que lesdits dégrèvements, qui ne sont pas créateurs de droits, avaient été accordés à tort ; qu'ainsi, après avoir accordé un dégrèvement, l'administration fiscale peut établir, sur les mêmes bases, une nouvelle imposition en ayant préalablement informé le contribuable de son intention de l'imposer ; que le dégrèvement intervenu n'a aucune incidence sur la régularité des actes antérieurement et régulièrement accomplis ; qu'en l'espèce, la taxe sur les achats de viande avait été régulièrement déclarée et versée par la société requérante ; que, faute d'exécution comptable, ledit dégrèvement n'avait pas eu pour effet de faire disparaître l'imposition initiale ; que c'est donc à bon droit que le service a pu informer l'intéressée que le dégrèvement intervenu, procédant d'une erreur de liquidation, ne pouvait être maintenu ; que le service était en situation de compétence liée, ne pouvant renoncer à une imposition légalement due ; que n'ayant pas procédé au remboursement effectif des cotisations, il n'était pas tenu de suivre une nouvelle procédure de reprise, dans le délai de l'article L. 176 du livre des procédures fiscales, et d'émettre un nouvel avis d'imposition ; que l'entreprise ayant été, in fine, destinataire d'une décision de rejet motivée, elle n'a été privée d'aucune garantie de procédure ;

- que l'imposition en litige est bien fondée, et ne méconnaît aucune norme ni principe communautaire ;

- que les conclusions tendant au paiement d'intérêts moratoires sont, faute de litige né et actuel entre le comptable et le requérant, sans objet, et donc irrecevables ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré au greffe de la Cour le 3 novembre 2009 présenté pour la société LA MISOTIERE, qui conclut aux mêmes fins, par les mêmes moyens ;

La société LA MISOTIERE soutient en outre :

- que la remise en cause du dégrèvement initialement accordé est irrégulière en tant qu'elle n'a pas donné lieu à émission d'un nouvel avis de mise en recouvrement ; qu'elle constitue en outre une atteinte au droit au respect des biens au sens de l'article 1er du 1er protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- qu'elle méconnaît en outre les principes généraux de confiance légitime et de sécurité juridique, ainsi que de coopération et d'effectivité du droit communautaire ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 juillet 2010 présenté pour le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat, qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que le moyen tiré de la violation de l'article 1er du 1er protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est en l'espèce inopérant, et que la remise en cause du dégrèvement initialement accordé n'a méconnu aucun principe général issu du droit communautaire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 avril 2011 :

- le rapport de M. Lévy Ben Cheton, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant que la société LA MISOTIERE, après avoir déclaré conformément aux dispositions de l'article 302 bis ZD du code général des impôts alors en vigueur la valeur de ses achats et payé la taxe sur les achats de viande qu'elle estimait en conséquence devoir au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 octobre 2003, en a demandé la restitution par une réclamation du 26 novembre 2003 ; que l'administration lui a accordé le dégrèvement total des impositions en litige par décision du 22 septembre 2004 ; qu'elle a ensuite adressé à la société une lettre du 17 novembre 2004 l'informant de sa décision de rapporter ledit dégrèvement, dès lors que la taxe sur les achats de viande avait été légalement perçue, avant de rejeter sa réclamation par décision du 22 décembre 2004 ; que la société requérante relève appel de l'ordonnance du 30 juillet 2008 par laquelle le président du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la restitution des sommes acquittées ;

Considérant qu'en vertu du VI de l'article 302 bis ZD du code général des impôts, alors en vigueur, la taxe sur les achats de viande est constatée, recouvrée et contrôlée selon les mêmes procédures et sous les mêmes sanctions, garanties et privilèges que la taxe sur la valeur ajoutée ; que selon l'article L. 256 du livre des procédures fiscales, dont les dispositions ont ainsi été rendues applicables à cette taxe : Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité (...) ; que, lorsqu'une taxe a été déclarée et payée spontanément par le redevable, puis a fait l'objet d'un dégrèvement, cette décision implique, alors même que le paiement a été effectué à la date d'exigibilité, que l'administration émette un avis de mise en recouvrement si elle entend rétablir l'imposition ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que faute d'avoir, après prononcé du dégrèvement des taxes payées par la société LA MISOTIERE au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 octobre 2003, émis un avis de mise en recouvrement correspondant au montant dégrevé, l'administration ne pouvait lui refuser la restitution de ces taxes ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un Tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés. ; qu'en vertu du 3ème alinéa de l'article R. 208-1 du même livre, ces intérêts moratoires sont payés d'office en même temps que les sommes remboursées par le comptable chargé du recouvrement des impôts ; qu'en l'absence de litige né et actuel entre le comptable responsable du remboursement et la société requérante, les conclusions tendant au versement d'intérêts moratoires sont irrecevables et ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société LA MISOTIERE est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la restitution desdites taxes ;

DECIDE :

Article 1er : Il est accordé à la société LA MISOTIERE la restitution de la taxe sur les achats de viande qu'elle a versée au titre de la période du 1er janvier 2001 au 31 octobre 2003.

Article 2 : L'ordonnance n° 0500291 du 30 juillet 2008 du président du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand est réformée en ce qu'elle est contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société LA MISOTIERE et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 19 avril 2011 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Pourny et Lévy Ben Cheton, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 31 mai 2011.

''

''

''

''

1

2

N° 08LY02077


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY02077
Date de la décision : 31/05/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-06-04 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Autres taxes sur le chiffre d'affaires et taxes assimilées.


Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Laurent LEVY BEN CHETON
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : LES JURISTES ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-05-31;08ly02077 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award