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22/03/2011 | FRANCE | N°10LY00982

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 22 mars 2011, 10LY00982


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 30 avril 2010 et régularisée par courrier le 4 mai 2010, présentée pour Mme Gayane B, épouse A, domiciliée ...) ;

Mme B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Lyon n° 0906121 du 15 décembre 2009 rejetant sa demande tendant à l'annulation d'un arrêté du 9 juin 2009 par lequel le préfet de la Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et lui a fixé comme pays de destination le pays dont elle a la

nationalité ou tout autre pays où elle établirait être légalement admissible ;

2°) d...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 30 avril 2010 et régularisée par courrier le 4 mai 2010, présentée pour Mme Gayane B, épouse A, domiciliée ...) ;

Mme B demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Lyon n° 0906121 du 15 décembre 2009 rejetant sa demande tendant à l'annulation d'un arrêté du 9 juin 2009 par lequel le préfet de la Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et lui a fixé comme pays de destination le pays dont elle a la nationalité ou tout autre pays où elle établirait être légalement admissible ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté du 9 juin 2009 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de lui délivrer un titre de séjour portant la mention vie privée et familiale ;

Elle soutient que le jugement attaqué est irrégulier, dès lors que l'expédition qui lui a été adressée ne porte que la mention Pour expédition, Un greffier, , sans aucune précision sur l'identité du signataire et sans qu'il soit justifié d'une délégation de signature du greffier en chef, seul compétent aux termes de l'article R. 751-2 du code de justice administrative pour signer et délivrer les expéditions et attester de la conformité de l'expédition à la minute du jugement, en justifiant que cette minute a été régulièrement signée ; que le secrétaire général de la préfecture de la Loire, M. C, ne disposait pas d'une délégation régulière et opposable pour signer l'arrêté attaqué ; que la motivation de cet arrêté est incomplète, dès lors qu'il ne fait pas état de l'insuffisance de ses attaches personnelles en France, et erronée, dès lors qu'il mentionne la présence de son concubin et de son enfant en Russie, alors qu'elle avait déclaré être mariée à M. D résidant en Ukraine ; que le refus de titre de séjour qui lui est opposé porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, méconnaissant ainsi les dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et qu'il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français devra être annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour ; qu'il en va de même de la décision lui fixant l'Arménie ou l'Ukraine comme pays de destination, laquelle méconnaît également les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 19 novembre 2010 et régularisé par courrier le 22 novembre 2010, présenté par le préfet de la Loire, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient qu'il ne lui appartient pas de justifier de la légalité formelle du jugement attaqué ; qu'il a été justifié en première instance que la délégation consentie à M. C pour signer l'arrêté attaqué avait été valablement publiée ; que l'arrêté attaqué est suffisamment motivé et que l'intéressée avait elle-même indiqué que son époux était en Russie ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 novembre 2010, présenté pour Mme B, qui maintient ses conclusions et demande en outre à la Cour d'autoriser la traduction des annexes 5, 6, 8, 16 et 17 par un organisme agréé au titre de l'aide juridictionnelle ;

Vu l'ordonnance du 22 novembre 2010 fixant la clôture d'instruction au 31 décembre 2010, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu la décision du 12 février 2010 accordant à Mme Gayane B le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er mars 2011 :

- le rapport de M. Pourny, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Considérant que Mme Gayane B, ressortissante arménienne mariée à M. D, de nationalité azerbaïdjanaise, conteste le jugement du 15 décembre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 9 juin 2009 par lequel le préfet de la Loire lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai d'un mois et lui a fixé comme pays de destination le pays dont elle a la nationalité ou tout autre pays où elle établirait être légalement admissible ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes R. 741-7 du code de justice administrative : Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. ; qu'il résulte de l'examen de la minute du jugement attaqué, transmise dans le dossier de première instance, qu'elle a été signée par le président de la formation de jugement, le magistrat rapporteur et le greffier d'audience, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'expédition reçue par la requérante ne permettrait pas de s'assurer du respect de ces dispositions doit, en tout état de cause, être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 751-2 du même code : Les expéditions des décisions sont signées et délivrées par le greffier en chef (...) ; que si la requérante soutient que l'expédition du jugement qui lui a été délivrée ne comporte, sous la formule exécutoire, que la mention Pour expédition, Un greffier, , sans autre indication sur l'identité du signataire de cette expédition, ce qui ne permettrait pas de vérifier que le signataire de cette expédition avait compétence pour la signer, ce moyen, relatif à la notification du jugement, doit, en tout état de cause, être écarté comme inopérant ;

Sur la légalité externe de l'arrêté du 9 juin 2009 :

Considérant, en premier lieu, que l'arrêté du 9 juin 2009 contesté par Mme B a été signé par M. C, secrétaire général de la préfecture de la Loire, lequel avait reçu délégation pour ce faire par un arrêté préfectoral du 23 février 2009, valablement publié le même jour au recueil des actes administratifs de la préfecture ; que le moyen tiré d'une incompétence de l'auteur de l'arrêté du 9 juin 2009 doit, par suite, être écarté ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 : Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. (...) , qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. et qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (...) L'obligation de quitter le territoire n'a pas à faire l'objet d'une motivation. (...) ;

Considérant que l'arrêté attaqué mentionne les articles L. 313-11, L. 511-1, L. 742-6 et L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il indique notamment que l'intéressée, née en 1960, de nationalité arménienne, est entrée seule en France en 2007, que l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides a rejeté sa demande d'asile par une décision du 22 mai 2009 et que l'intéressée n'établit pas être exposée à des risques en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, même si cet arrêté ne fait pas état d'une insuffisance des attaches personnelles de Mme B en France et mentionne que son concubin réside en Russie , alors qu'elle aurait déclaré être mariée avec M. D résidant en Ukraine, il comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement des décisions portant refus de titre de séjour et fixation de pays de destination qu'il contient ; que, dès lors, ces deux décisions sont suffisamment motivées ; que, par ailleurs, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'avait pas à être motivée ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué serait insuffisamment motivé doit être écarté ;

Sur la légalité interne de l'arrêté du 9 juin 2009 :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant que Mme B, entrée en France en 2007, à l'âge de 47 ans, fait valoir l'importance de ses attaches amicales en France, sa volonté d'intégration et son adhésion aux valeurs de la République, ainsi que les risques auxquels elle serait exposée, avec son époux de nationalité azerbaïdjanaise, en Arménie, en Azerbaïdjan ou en Ukraine, en raison de tensions entre les communautés arménienne et azérie ; que, toutefois, l'intéressée n'établit ni être dépourvue de toute attache familiale dans le pays dont elle a la nationalité, ni l'impossibilité de poursuivre la vie commune avec son époux hors de France ; que, dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et des conditions d'entrée et de séjour en France de Mme B, la décision attaquée n'a pas porté, eu égard aux buts qu'elle poursuit, une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale et, par suite, n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, pour les mêmes motifs et en l'absence de tout autre élément, la décision n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B n'est pas fondée à soulever, par la voie de l'exception, l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui est opposé par l'arrêté attaqué à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français contenue dans ce même arrêté ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. aux termes duquel : Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ;

Considérant que Mme B soutient qu'elle encourt des persécutions en cas de retour dans le pays dont elle a la nationalité, ainsi d'ailleurs qu'en cas de retour en Ukraine, en raison de son origine arménienne et de l'origine azérie de son époux ; que, toutefois, par la seule production d'attestations manuscrites de voisins ou amis, qu'il n'est pas utile de faire traduire aux frais de l'aide juridictionnelle par un interprète assermenté, et en l'absence de document ou justificatif suffisamment probant concernant les persécutions qui auraient déjà été endurées, Mme B n'établit pas la réalité de risques personnellement et directement encourus en cas de retour en Arménie ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Gayane B et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 1er mars 2011 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

M. Pourny et M. Lévy-Ben Cheton, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 22 mars 2011.

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N° 10LY00982


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY00982
Date de la décision : 22/03/2011
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. François POURNY
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : SELARL REFLEX DROIT PUBLIC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-03-22;10ly00982 ?
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