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18/01/2011 | FRANCE | N°09LY00906

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 18 janvier 2011, 09LY00906


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 28 avril 2009, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ;

Le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 070187 du 16 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a déchargé la SAS Etablissements Veyriere de la différence entre la taxe professionnelle mise à sa charge au titre de l'année 2004 et celle résultant de ce que l'indemnité d'assurance prise en compte pour la déterminat

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Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 28 avril 2009, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ;

Le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 070187 du 16 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a déchargé la SAS Etablissements Veyriere de la différence entre la taxe professionnelle mise à sa charge au titre de l'année 2004 et celle résultant de ce que l'indemnité d'assurance prise en compte pour la détermination de la valeur ajoutée est déduite des bases ayant servi au calcul de ladite taxe ;

2°) de rétablir les impositions dont la décharge a été accordée ;

Le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, la partie de l'indemnité d'assurance d'un montant de 400 000 euros devait être intégrée dans le montant de la production de l'exercice pour le calcul de la valeur ajoutée en vertu des dispositions du 2. du II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts, quand bien même elle a été comptabilisée en compte de transferts de charges, dès lors qu'elle avait pour objet de rembourser des charges exceptionnelles d'exploitation constituées par de la sous-traitance et des frais de transport et qu'elle était ainsi destinée à compenser des sommes comptabilisées en charges déductibles, conformément à deux décisions du Conseil d'Etat du 5 mai 2008 ;

- l'administration, en fixant le montant de l'indemnité devant être réintégrée dans le calcul de la valeur ajoutée, n'a pas méconnu les droits de la défense ; ce montant résulte des documents préparatoires produits dans le cadre du débat oral et contradictoire intervenu lors des opérations de vérification de comptabilité ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 16 septembre 2009, le mémoire en défense présenté par la SAS Etablissements Veyriere, qui conclut au rejet du recours ;

Elle soutient que :

- l'administration n'apporte aucun élément de nature à établir que cette indemnité qui a été comptabilisée en compte de transferts de charges correspond à des charges déductibles de la valeur ajoutée ;

- les droits de la défense ont été méconnus dès lors que l'administration n'a pas précisé dans sa proposition de rectification du 27 septembre 2005 les modalités de détermination du montant de l'indemnité ainsi réintégré et qu'elle n'a pas été ainsi mise à même de pouvoir contester ce redressement ;

Vu, enregistré le 1er févier 2010, le nouveau mémoire présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que la société était parfaitement informée des motifs de droit et de fait qui ont fondé le rehaussement ; que le montant de 400 000 francs a été estimé compte tenu de l'examen de la comptabilité et des charges comptabilisées, des éléments apportés par la société et du débat oral et contradictoire engagé ; que la société n'a contesté ni la répartition de l'indemnité effectuée par l'administration ni son montant, lors de sa réponse à la proposition de rectification qui lui a été adressée ; qu'il appartient à la société d'apporter des éléments chiffrés pour démontrer que les charges de transports et de sous-traitance générées par le sinistre et comptabilisées seraient inférieures au montant retenu ;

Vu l'ordonnance du 16 juillet 2010 prise sur le fondement de l'article R. 613-1 du code de justice administrative fixant la clôture de l'instruction au 20 août 2010 à 16 h 30 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 janvier 2011:

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Considérant qu'à l'occasion d'une vérification de comptabilité dont la SAS Etablissements Veyriere a fait l'objet, l'administration fiscale a notamment estimé que la société, qui bénéficiait du plafonnement en fonction de la valeur ajoutée de la taxe professionnelle au titre de l'année 2004, aurait dû inclure dans la valeur ajoutée produite une fraction, à hauteur d'un montant de 400 000 euros, de l'indemnité d'assurance qu'elle avait perçue à la suite de sinistres et qu'elle avait comptabilisée au compte 79 transfert de charges ; que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, ET DE LA REFORME DE L'ETAT relève appel du jugement du 16 décembre 2008 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a déchargé la SAS Etablissements Veyriere de la cotisation complémentaire de taxe professionnelle qui avait été mise à sa charge au titre de l'année 2004 à raison de la prise en compte, pour le calcul des bases d'imposition, du montant de cette indemnité dans la valeur ajoutée produite par la société ;

Considérant qu'aux termes de l'article 1647 B sexies du code général des impôts dans sa rédaction en vigueur à la date de l'imposition en litige : I. Sur demande du redevable, la cotisation de taxe professionnelle de chaque entreprise est plafonnée en fonction de la valeur ajoutée produite au cours de l'année au titre de laquelle l'imposition est établie ou au cours du dernier exercice de douze mois clos au cours de cette même année lorsque cet exercice ne coïncide pas avec l'année civile. La valeur ajoutée est définie selon les modalités prévues au II. / Pour les impositions établies au titre de 1999 et des années suivantes, le taux de plafonnement est fixé à 3,5 % pour les entreprises dont le chiffre d'affaires de l'année au titre de laquelle le plafonnement est demandé est inférieur à 21 350 000 euros, à 3,8 % pour celles dont le chiffre d'affaires est compris entre 21 350 000 euros et 76 225 000 euros et à 4 % pour celles dont le chiffre d'affaires excède cette dernière limite. (...) / II. 1. La valeur ajoutée mentionnée au I est égale à l'excédent hors taxe de la production sur les consommations de biens et services en provenance de tiers constaté pour la période définie au I. / 2. Pour la généralité des entreprises, la production de l'exercice est égale à la différence entre : / D'une part, les ventes, les travaux, les prestations de services ou les recettes ; les produits accessoires ; les subventions d'exploitation ; les ristournes, rabais et remises obtenus ; les travaux faits par l'entreprise pour elle-même ; les stocks à la fin de l'exercice ; / Et, d'autre part, les achats de matières et marchandises, droits de douane compris ; les réductions sur ventes ; les stocks au début de l'exercice. / Les consommations de biens et services en provenance de tiers comprennent : les travaux, fournitures et services extérieurs, à l'exception des loyers afférents aux biens pris en crédit-bail, ou des loyers afférents à des biens, visés au a du 1° de l'article 1467, pris en location par un assujetti à la taxe professionnelle pour une durée de plus de six mois ou des redevances afférentes à ces biens résultant d'une convention de location-gérance, les frais de transports et déplacements, les frais divers de gestion. (...) ;

Considérant que ces dispositions fixent la liste limitative des catégories d'éléments comptables qui doivent être pris en compte dans le calcul de la valeur ajoutée en fonction de laquelle sont plafonnées les cotisations de taxe professionnelle ; que pour déterminer si une charge ou un produit se rattache à l'une de ces catégories, il y a lieu de se reporter aux dispositions du plan comptable général dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée ; qu'aux termes de l'article 38 quater de l'annexe III au code général des impôts : Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt ; que si les indemnités d'assurances perçues par une entreprise pour compenser un sinistre doivent être inscrites au crédit du compte 79 transfert de charges et si ce compte ne pouvait être rattaché à aucune des rubriques prévues pour le calcul de la valeur ajoutée par l'article 1647 B sexies avant sa modification par l'article 85 de la loi de finances pour 2006 du 30 décembre 2005, ces indemnités doivent, dans le cas et dans la mesure où elles compensent des charges qui ont été elles-mêmes déduites par cette entreprise pour la détermination de sa valeur ajoutée au titre des consommations de biens et services en provenance de tiers, être regardées, au sens et pour l'application des dispositions de cet article et en particulier du 1. de son II, comme une production de l'exercice au cours duquel elles ont été perçues par le redevable ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SAS Etablissements Veyriere a, le 6 avril 2004, perçu une somme de 824 100 euros correspondant à une indemnité d'assurance versée par son assureur, la compagnie Groupama Rhône-Alpes, à la suite d'un sinistre survenu en 2003 ; que l'administration fait valoir, sans être contredite, qu'elle a constaté qu'une fraction de cette indemnité, dont le montant a été estimé à hauteur de 400 000 euros, était destinée à compenser des charges exceptionnelles comptabilisées par la société, en se fondant sur l'examen de la comptabilité de la société ainsi que sur les éléments apportés par cette dernière au cours du débat contradictoire engagé lors des opérations de vérification de comptabilité ; qu'elle a notamment pris en compte des documents préparatoires transmis par la société qui ont permis de constater que cette indemnité avait pour objet, d'une part, de compenser une perte de taux de marge brute résultant de la diminution de son chiffre d'affaires et, d'autre part, de rembourser des charges d'exploitation exceptionnelles constituées essentiellement par de la sous-traitance et des frais de transport et que les prétentions de la société étaient sensiblement équivalentes concernant le montant à verser pour chacune de ces fractions ; que la SAS Etablissements Veyriere ne fait état d'aucun élément de nature à remettre en cause ceux ainsi exposés par l'administration lesquels permettent de regarder l'indemnité litigieuse de 400 000 euros comme ayant eu pour objet de compenser des charges exceptionnelles comptabilisées ; que, par suite, cette somme de 400 000 euros, alors même qu'elle a été inscrite avec le montant de l'autre fraction de l'indemnité au compte transfert de charges et que ce compte ne pouvait être rattaché à aucune des rubriques prévues pour le calcul de la valeur ajoutée par l'article 1647 B sexies avant sa modification par l'article 85 de la loi de finances pour 2006 du 30 décembre 2005, doit, dans la mesure où elle compense des charges qui ont été déduites par la SAS Établissements Veyriere pour la détermination de sa valeur ajoutée au titre des consommations de biens et services en provenance de tiers, être regardée, au sens et pour l'application de l'article 1647 B sexies, et en particulier du 1. de son II, comme une production de l'exercice au cours duquel elle a été perçue par la société ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que, pour prononcer la décharge de l'imposition en litige relative à la fraction d'indemnité d'assurance en cause d'un montant de 400 000 euros, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand s'est fondé sur ce que cette dernière ne pouvait être regardée comme une production de l'exercice en cours au regard de l'article 1647 B sexies du code général des impôts et n'aurait pas dû être incluse dans la valeur ajoutée produite pour le calcul du plafonnement de la valeur ajoutée de la taxe en litige ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par SAS Etablissements Veyriere tant en première instance qu'en appel ;

Considérant que, lorsqu'une imposition est, telle la taxe professionnelle, assise sur la base d'éléments qui doivent être déclarés par le redevable, l'administration ne peut établir, à la charge de celui-ci, des droits excédant le montant de ceux qui résulteraient des éléments qu'il a déclarés qu'après l'avoir, conformément au principe général des droits de la défense, mis à même de présenter ses observations ; que les dispositions de l'article L. 56 du livre des procédures fiscales, en vertu desquelles la procédure de redressement contradictoire prévue par les articles L. 55 à L. 61 de ce livre n'est pas applicable en matière d'impositions directes perçues au profit des collectivités locales, ont pour seul effet d'écarter cette procédure de redressement contradictoire mais ne dispensent pas du respect, en ce qui concerne la taxe professionnelle, des obligations qui découlent du principe général des droits de la défense ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que par lettre en date du 27 septembre 2005, l'administration s'est référée à la vérification de comptabilité de la société à laquelle elle a procédé, a mentionné les éléments ayant servi à déterminer la nature et le montant de cette fraction d'indemnité d'assurance de 400 000 euros, a précisé les raisons pour lesquelles celle-ci devait être incluse dans la valeur ajoutée produite pour le calcul du plafonnement de la valeur ajoutée de la taxe en litige, a indiqué les nouvelles modalités de détermination de la valeur ajoutée par l'entreprise ainsi que les nouvelles bases d'imposition et le montant, en droits, du rehaussement en résultant ; qu'elle a aussi, par ce même courrier, informé la société de la possibilité de présenter ses éventuelles observations dans un délai de 30 jours ; que, par ailleurs, par un courrier du 8 novembre 2005, l'administration a répondu aux observations formulées par la société le 24 octobre 2005 concernant la fraction d'indemnité en litige, en précisant les raisons pour lesquelles cette somme devait être intégrée dans le montant de la production de l'exercice 2004 pour le calcul de la valeur ajoutée malgré qu'elle ait été inscrite dans un compte de transfert de charges ; que, dans ces conditions, et alors que la mise en recouvrement de cette imposition n'est intervenue qu'à compter du 30 avril 2006, l'administration a, conformément au principe général des droits de la défense, mis la société intimée à même de présenter ses observations sur les redressements envisagés, dans un délai raisonnable ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, ET DE LA REFORME DE L'ETAT est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a accordé à la SAS Etablissements Veyriere la décharge de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle au titre de l'année 2004 résultant de la différence entre la taxe professionnelle mise initialement à sa charge au titre de l'année 2004 et celle résultant de ce que l'indemnité d'assurance prise en compte pour la détermination de la valeur ajoutée a été déduite des bases ayant servi au calcul de ladite taxe ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances devant les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ;

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que demande la SAS Établissements Veyriere au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 16 décembre 2008 est annulé.

Article 2 : Les droits de cotisation de taxe professionnelle de l'année 2004 dont le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand avait prononcé la décharge sont remis intégralement à la charge de la SAS Etablissements Veyriere.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT et à la SAS Etablissements Veyriere.

Délibéré après l'audience du 4 janvier 2011, à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Pourny et Segado, premiers conseiller.

Lu en audience publique, le 18 janvier 2011.

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N° 09LY00906


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY00906
Date de la décision : 18/01/2011
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : FIDAL SOCIETE D' AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-01-18;09ly00906 ?
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