Vu la requête, enregistrée le 15 janvier 2010 au greffe de la Cour, présentée pour M. et Mme Bernard A, domiciliés 29 rue du Bois de la Caille à Lyon (69004) ;
M. et Mme A demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0802838 du Tribunal administratif de Lyon du 17 novembre 2009 rejetant la demande présentée par M. A en vue de la décharge des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée dont il a été déclaré redevable au titre de la période du 1er janvier 2000 au 30 juin 2001 ;
2°) de prononcer la décharge demandée ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, à leur profit, la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Ils soutiennent :
Sur la régularité de la procédure :
- que la procédure de taxation d'office n'était pas justifiée ;
- que l'absence de débat oral et contradictoire, qui constitue une irrégularité entrainant la décharge de l'imposition, a empêché M. A de produire les pièces qui auraient permis de justifier qu'il ne percevait qu'une rémunération de la société Immo-Pro et que les commissions déclarées par la société Cabinet Henri ont été versées à la société Immo-Pro ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
- que la taxation d'office au titre de la taxe sur la valeur ajoutée aboutit à une double taxation de ces sommes ; que M. A a en effet été salarié de la société Immo-Pro Ltd du 1er juillet 2000 au 30 juin 2001, comme en attestent les bulletins de salaires versés au dossier ; que pendant la même période, la société Cabinet Henri avait perçu les commissions sur lesquelles elle a reversé la taxe sur la valeur ajoutée afférente ; qu'elle a payé l'impôt sur les sociétés et règle les salaires et charges dont le salaire de M. A ; que le chiffre d'affaires de la société Immo-Pro provient exclusivement de la société Cabinet Henri dans le cadre du contrat d'agence conclu ; que les montants importants constituant le chiffre d'affaires (298 000 euros) déclaré par la société Immo-Pro ont été perçus par elle et ont justifié des versements importants de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'en conséquence, ces mêmes sommes ont subi deux fois l'application de la taxe sur la valeur ajoutée ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient :
- que la requête est irrecevable en tant qu'elle est présentée au nom de M. et Mme A car le rappel de taxe sur la valeur ajoutée a été mis à la charge du seul M. A à raison de son activité occulte d'agent commercial ;
- que la réclamation datée du 8 novembre 2007 et adressée par télécopie du 12 novembre 2007 est tardive en ce qu'elle vise les rappels de taxe sur la valeur ajoutée de l'année 2002, notifiés par lettre du 18 décembre 2003 et mis en recouvrement le 9 juillet 2004, car elle n'a pas été présentée dans les délais prévus par les articles R* 196-1 et R* 196-3 du livre des procédures fiscales ; qu'une telle irrégularité ne peut être couverte devant le Tribunal administratif et peut être soulevée pour la première fois en appel ; que cette réclamation est en revanche recevable en ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée émis au titre de la période du 1er janvier au 30 juin 2001 ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
- que l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle diligenté à l'encontre de M. et Mme A a révélé que M. A exerçait une activité occulte d'agent commercial au sein de la société Cabinet Henri au titre de l'année 2000 et du premier semestre de 2001, sans qu'il ait procédé à son inscription sur le registre spécial des agents commerciaux ou auprès d'un centre de formalité des entreprises ; que l'exercice du droit de communication effectué auprès du Crédit Lyonnais dans le cadre de l' examen contradictoire de la situation fiscale personnelle a révélé que la société Cabinet Henri, agence immobilière, a crédité le compte Crédit Lyonnais de M. A de 387 000 francs en 2000 et de 70 225 francs au cours du premier semestre 2001 ; que l'existence de ces chèques permet d'établir l'exercice d'une activité d'agent commercial au titre de la période en cause ; que le requérant ne saurait soutenir que la taxation d'office repose sur les seules déclarations de la société Cabinet Henri mais également sur l'encaissement des chèques dont le provenance est clairement définie ;
- que la taxation d'office est justifiée, M. A n'ayant pas satisfait à ses obligations déclaratives prévues par les articles 287-3 du code général des impôts et 242 sexies de l'annexe II audit code ; que le requérant n'est pas fondé à invoquer l'article 302 septies A du code général des impôts relatif à l'imposition selon le régime simplifié ;
- que l'absence de débat est un moyen inopérant s'agissant d'impositions établies d'office dans le cadre d'un contrôle sur pièces ; qu'au surplus l'absence de débat résulte du seul fait du contribuable ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
- que M. A ayant fait régulièrement l'objet d'une procédure de taxation d'office sur le fondement de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, il lui appartient d'apporter la preuve de l'exagération des impositions mises à sa charge, conformément aux dispositions de l'article L. 193 du même livre ;
- que si le requérant soutient que les commissions en provenance de la société Cabinet Henri, encaissées sur son propre compte bancaire, concernent la société Immo-Pro Ltd, il n'apporte aucune élément pour le justifier ; que les pièces jointes à la requête ne constituent pas la preuve d'une double imposition ; que M. A reconnait que le chiffre d'affaires déclaré par la société Immo-Pro correspond au montant perçu par celle-ci alors que le litige porte sur les commissions qu'il a reçu de la société Cabinet Henri ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 2010 :
- le rapport de M. Raisson, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;
Considérant que M. et Mme A ont fait l'objet d'un examen de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2000, 2001 et 2002 ; qu'à l'issue de ce contrôle, le vérificateur a considéré que les sommes versées à M. A par la société Cabinet Henri et déclarées par cette dernière comme des commissions révélait une activité occulte d'agent commercial au titre de l'année 2000 et pour la période du 1er janvier au 30 juin 2001 ; que le vérificateur a notifié les redressements correspondants en matière d'impôt sur le revenu et contributions sociales au titre des années 2000 et 2001 selon la procédure de taxation d'office sur le fondement de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales ; qu'il a également, dans le cadre d'un contrôle sur pièces, notifié à M. A des rappels de taxe sur la valeur ajoutée relative à cette activité non déclarée, selon la même procédure ; que M. et Mme A font appel du jugement du Tribunal administratif de Lyon qui a rejeté la demande de M. A en décharge du rappel de cette taxe, ainsi que des pénalités dont elle a été assortie ;
Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir soulevées par le ministre :
Sur la régularité de la procédure :
Considérant, qu'aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : (...) 2° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 68 du même livre : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une première mise en demeure. Toutefois, il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure si le contribuable change fréquemment son lieu de résidence ou de principal établissement, ou a transféré son activité à l'étranger sans déposer la déclaration de ses résultats ou de ses revenus non commerciaux, ou ne s'est pas fait connaître d'un centre de formalités des entreprises ou du greffe du tribunal de commerce, ou si un contrôle fiscal n'a pu avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers " ;
Considérant que, pour établir que M. A a exercé, au cours de la période litigieuse, une activité occulte d'agent commercial et se trouve donc bien dans une situation relevant de l'évaluation d'office, l'administration fiscale indique que la déclaration souscrite par cette société en application de l'article 240 du code général des impôts fait état de commissions versées à M. A en qualité d'agent commercial ; que ces déclarations sont corroborées par les éléments communiqués par la banque de M. A dont il ressort que l'intéressé a encaissé, en provenance de la société Cabinet Henri, des chèques d'un montant total de 387 000 francs au cours de l'année 2000 et de 70 225 francs au cours du premier semestre 2001 ; que, dans ces conditions, l'administration fiscale doit être regardée comme établissant que M. A exerçait bien, à titre personnel, une activité occulte d'agent commercial au cours de la période du 1er janvier 2000 au 30 juin 2001 ; que si l'intéressé était également durant cette période salarié de la société Immo Pro Ltd et soutient que les sommes litigieuses seraient en fait la rémunération des services que cette société rend à la société Cabinet Henri, il n'apporte aucun élément pour appuyer cette allégation ; que, par suite, M. A s'étant abstenu de produire dans les délais, ainsi qu'il lui appartenait de le faire, les déclarations de résultat afférentes à cette activité non salariée, c'est à bon droit qu'il a été imposé d'office en application des dispositions précitées du livre des procédures fiscales ; que le moyen tiré de ce qu'il n'y aurait pas eu un dialogue oral et contradictoire ne peut être utilement invoqué ;
Sur le bien fondé des impositions :
Considérant que si le moyen selon lequel la société Immo-Pro s'est déjà acquittée de la taxe sur la valeur ajoutée à raison de sommes qu'elle a perçue de la société Cabinet Henri, doit être regardé comme fondé sur l'allégation que la rémunération de cette société aurait transité par le compte bancaire du requérant, M. A n'établit ni la réalité de ce reversement, ni le fondement sur lequel, à supposer cette rétrocession avérée, il aurait été personnellement dispensé de collecter la taxe sur la valeur ajoutée afférente ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Lyon, par le jugement attaqué, a rejeté la demande de M. A :
Sur les conclusions relatives à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par M. et Mme A et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M et Mme Bernard A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.
Délibéré après l'audience du 25 novembre 2010 à laquelle siégeaient :
M. Duchon-Doris, président de chambre,
M. Montsec, président-assesseur,
M. Raisson, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 décembre 2010.
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N° 10LY00172