Vu la requête, enregistrée le 30 avril 2009, présentée pour M. Didier A, domicilié ... ;
M. A demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0706729, en date du 24 février 2009, en tant que le Tribunal administratif de Lyon a limité à un montant de 9 595 euros la somme que les hospices civils de Lyon (HCL) ont été condamnés à lui verser et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;
2°) de condamner les HCL à lui verser une somme totale de 147 832,30 euros, sous déduction des sommes perçues à titre provisionnel ;
3°) subsidiairement, de décider une nouvelle expertise ;
4) de mettre à la charge des HCL une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- le Tribunal n'a pas suffisamment évalué le préjudice résultant des souffrances endurées ;
- il a surtout subi un préjudice professionnel avéré du fait de l'infection nosocomiale dont il a été victime, la perte de revenus se cumulant avec une perte de droits à retraite ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 14 juin 2010, présenté pour les Hospices civils de Lyon (HCL) ; ils concluent au rejet de la requête ;
Ils soutiennent que :
- la perte de revenus est très limitée dans le temps, dès lors que le requérant demeurait apte à reprendre une activité professionnelle ;
- en outre, les difficultés de son entreprise ne peuvent être imputées exclusivement à l'infection nosocomiale ;
- enfin, le requérant ne produit pas les justificatifs qui seraient nécessaires pour établir la réalité des chiffres avancés ;
- le pretium doloris retenu par le Tribunal doit être approuvé ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 juillet 2010, présenté pour M. A ; il conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 23 août 2010, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Loire, venant aux droits de la CPAM de Roanne ; elle conclut :
- à ce que les HCL soient condamnés à lui verser la somme de 5 790,86 euros au titre de ses débours;
- à ce que la somme de 800 euros soit mise à la charge des HCL au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que ce montant correspond aux indemnités journalières qu'elle a été amenée à verser du fait de l'infection nosocomiale ;
Vu le courrier, en date du 7 octobre 2010, par lequel le président de la 6ème chambre a informé les parties, sur le fondement des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la Cour était susceptible de se fonder sur le moyen, relevé d'office, tiré de l'irrégularité du jugement en l'absence de mise en cause régulière de la caisse primaire d'assurance maladie de Roanne ;
Vu le mémoire, enregistré le 15 octobre 2010, présenté pour M. A ; il conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
Il ajoute que l'absence de mise en cause de la caisse s'explique par le fait que sa demande ne portait que sur son préjudice personnel, professionnel et économique ;
Vu le mémoire, enregistré le 3 novembre 2010, présenté pour les HCL ; ils concluent :
- au rejet des conclusions de la CPAM de la Loire ;
- pour le surplus, aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
Ils ajoutent que :
- la CPAM de la Loire n'établit pas être subrogée dans les droits du requérant alors que les débours ont été exposés par la CPAM de Roanne ;
- en tout état de cause, la CPAM ne justifie pas du lien de causalité entre ses débours et la faute reprochée ;
Vu le mémoire, enregistré le 16 novembre 2010, présenté pour la CPAM de la Loire ; elle conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
Elle ajoute qu'elle vient aux droits de la CPAM de Roanne et a dès lors qualité pour réclamer le remboursement des dépenses que cette dernière a engagées ;
Vu le courrier, en date du 19 novembre 2010, par lequel la Cour a informé les parties, sur le fondement des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce qu'elle était susceptible de se fonder sur le moyen, relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées pour la première fois en appel par la CPAM de la Loire, alors que la CPAM de Roanne, aux droits de laquelle elle vient, avait été mise à même de faire valoir ses droits en première instance et avait négligé de le faire ;
Vu le mémoire, enregistré le 26 novembre 2010, présenté pour la CPAM de la Loire ; elle conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;
Elle ajoute que, si elle avait bien été informée de l'instance en cours devant le Tribunal et n'a pas produit, cette seule circonstance ne la prive pas du droit de former un appel incident ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu l'avis relatif à la fusion des caisses primaires d'assurance maladie de Roanne et de Saint-Etienne, publié au JORF du 7 août 2009 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 décembre 2010 :
- le rapport de M. Stillmunkes, premier conseiller ;
- les observations de Me Chantelot, avocat de M. A ;
- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;
La parole ayant à nouveau été donnée aux parties présentes ;
Considérant que M. A a été opéré à l'hôpital Louis Pradel de Lyon, le 2 janvier 2003, pour la réalisation d'un pontage aorto-coronaire ; que, dans les suites de cette intervention, il a été victime d'une infection par staphylocoque doré ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a condamné les hospices civils de Lyon (HCL), dont relève l'hôpital Louis Pradel, à lui verser la somme de 9 595 euros ; que M. A demande en appel la majoration des sommes qui lui ont été allouées, alors que les HCL, qui ne contestent pas le principe de leur responsabilité, se bornent à demander la confirmation du jugement ; que, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Loire, venant aux droits de la CPAM de Roanne, demande pour sa part le remboursement des sommes qu'elle a versées ;
Sur la recevabilité des conclusions de la CPAM de la Loire :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de la fiche skipper jointe au dossier de première instance, que le Tribunal a communiqué à la CPAM de Roanne la demande de M. A et les pièces de la procédure, la mettant ainsi à même de faire valoir ses droits devant lui ; que la CPAM de la Loire, qui vient aux droits de la CPAM de Roanne, admet au demeurant expressément que cette dernière avait été régulièrement informée de l'instance en cours devant le Tribunal administratif ; qu'elle n'a néanmoins pas produit devant le Tribunal et a ainsi négligé de faire valoir ses droits en première instance ; que la CPAM de la Loire est dès lors irrecevable à présenter des conclusions indemnitaires pour la première fois en appel ;
Sur les conclusions de M. A :
En ce qui concerne le préjudice personnel :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'expertise médicale réalisée devant la CRCI, que M. A a subi des souffrances évaluées par l'expert à 4,5/7, ainsi qu'un préjudice sexuel ; qu'il en sera fait une juste appréciation en évaluant les préjudices correspondants à un montant total de 7 800 euros ;
En ce qui concerne le préjudice professionnel :
Considérant que M. A, ancien pilote de kart, a créé la SARL MD Motors, dont il était associé-gérant, avec pour activité la vente et le montage de moteurs et chassis de kart, ainsi que l'assistance des pilotes dans les compétitions ; qu'il résulte de l'instruction et notamment de l'expertise médicale susmentionnée, que la guérison clinique de l'infection nosocomiale contractée en janvier 2003 a été acquise dès le 27 mai 2003, même si l'antibiothérapie a, par précaution, été maintenue jusqu'en janvier 2005 ; que l'expert souligne que l'asthénie dont se plaint M. A ne peut être rattachée à cette infection et qu'il ne souffre des suites de celle-ci d'aucun déficit physiologique objectivement mesurable ; qu'il estime ainsi que M. A est apte à reprendre une activité professionnelle, sans aucune incapacité permanente partielle ; qu'il évalue enfin à neuf mois la durée d'incapacité temporaire totale imputable à l'infection, sans retenir aucune période d'incapacité temporaire partielle ;
Considérant, en premier lieu, qu'en ce qui concerne la période d'incapacité temporaire totale susmentionnée, les avis d'imposition produits par M. A en appel font apparaître qu'il a perçu un montant de salaires de 11 823 euros en 2002, mais n'a perçu à ce titre que 2 426 euros en 2003 ; que, toutefois, la CPAM de la Loire indique lui avoir versé un montant total d'indemnités journalières de 5 790,86 euros au titre de la période d'incapacité temporaire totale imputable à l'infection nosocomiale ; que la perte de revenus restée à la charge de M. A s'élève ainsi au montant total de 3 606,14 euros ;
Considérant, en second lieu, que M. A soutient que son état de santé l'a durablement empêché de reprendre son activité professionnelle, affectant les résultats de sa société et entraînant une perte définitive de revenus et de droits à retraite ; que, toutefois, comme il vient d'être dit, il était apte à reprendre une activité et n'était atteint d'aucune incapacité permanente partielle, ni même d'incapacité temporaire partielle ; qu'en outre, l'expertise comptable réalisée devant la CRCI, dont il se prévaut, est sommaire et ne se fonde pas sur une analyse complète et documentée de l'activité de la SARL MD Motors ; qu'il résulte en revanche de l'expertise comptable produite par les HCL, qui se fonde sur des éléments précis et détaillés, que les résultats de la SARL étaient en réalité continûment négatifs depuis l'exercice clos en 2000, les difficultés que cette société a rencontrées ne pouvant dès lors être imputées à l'infection nosocomiale dont M. A a été victime en 2003 ; que M. A ne fournit aucun élément susceptible de contredire ces constatations, la seule simulation sommaire réalisée par son expert comptable ne reposant sur aucune justification précise ; qu'ainsi, il n'est pas fondé à demander à être indemnisé au titre d'une incidence professionnelle de l'infection postérieurement à l'achèvement de la période d'incapacité temporaire totale ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit utile de recourir à une nouvelle expertise, que M. A est uniquement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon n'a pas porté la somme que les HCL ont été condamnés à lui verser au montant total de 11 406,14 euros, sous déduction des sommes qui lui ont déjà été versées à titre provisionnel ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge des HCL quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par M. A et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La somme que les hospices civils de Lyon sont condamnés à verser à M. A est portée au montant de 11 406,14 euros, sous déduction des sommes qui lui ont été versées à titre provisionnel.
Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 24 février 2009 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. Didier A, aux hospices civils de Lyon et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire. Copie en sera adressée au ministre du travail, de l'emploi et de la santé.
Délibéré après l'audience du 2 décembre 2010, à laquelle siégeaient :
M. Vivens, président de chambre,
Mme Steck-Andrez, président-assesseur,
M. Stillmunkes, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 décembre 2010.
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N° 09LY00925