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14/12/2010 | FRANCE | N°09LY03009

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 14 décembre 2010, 09LY03009


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 29 décembre 2009, présentée pour la SA GOLSA dont le siège social est au Centre Commercial Les Grands Crus à Chenôve (21300) ;

La SA GOLSA demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0402619 du 6 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur les achats de viande qu'elle a acquittée pour la période du 1er avril 2001 au 31 octobre 2002 ;

2°) de prononcer la décharge de la taxe en litige et d'en ordonner la restitution, assortie des

intérêts moratoires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la so...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 29 décembre 2009, présentée pour la SA GOLSA dont le siège social est au Centre Commercial Les Grands Crus à Chenôve (21300) ;

La SA GOLSA demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0402619 du 6 octobre 2009 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à la restitution de la taxe sur les achats de viande qu'elle a acquittée pour la période du 1er avril 2001 au 31 octobre 2002 ;

2°) de prononcer la décharge de la taxe en litige et d'en ordonner la restitution, assortie des intérêts moratoires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que le jugement est irrégulier en ce que le tribunal a regardé le moyen tiré de la rupture d'égalité devant les charges publiques comme portant sur le régime en vigueur avant 2001, alors qu'elle avait entendu englober aussi les situations portant sur la période 2001 à 2003 ; qu'il y a une rupture d'égalité entre elle et les entreprises qui ont obtenu des dégrèvements pour cette période ; que la taxe litigieuse, après le 1er janvier 2001, n'est pas un nouvel impôt dépourvu de tout lien avec le service public de l'équarrissage, qu'elle continue de financer, nonobstant le changement d'affectation de son produit ; que sa base juridique et ses modalités de déclaration et de recouvrement sont identiques ; que l'abrogation de la taxe et l'institution d'une nouvelle ne ressort pas de l'article 302 bis ZD du code général des impôts qui ne prévoit pas l'affectation de son produit ; que cet article est incompatible avec le droit communautaire ; que l'objectif de la modification était de contribuer au financement dudit service en permettant une forte augmentation de la ressource ; qu'il n'y a pas eu notification à la Commission européenne comme exigé par l'article 88 § 3 du traité instituant la Communauté européenne ; que le principe pollueur-payeur a été méconnu ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 3 novembre 2010 par laquelle l'affaire a été dispensé d'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le traité instituant la Communauté européenne ;

Vu l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 ;

Vu la loi n° 96-1139 du 26 décembre 1996 ;

Vu la loi n° 2000-1353 du 30 décembre 2000 ;

Vu le code rural ;

Vu le code de l'environnement ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 novembre 2010:

- le rapport de M. Chanel, président,

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'en première instance, la SA GOLSA s'est bornée à mentionner la diversité des situations de fait entre différents anciens redevables de la taxe sur les achats de viande ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que le Tribunal aurait omis de statuer sur son moyen en ce qu'il aurait été relatif également à celles portant sur la période 2001 à 2003 doit être écarté :

Au fond :

Considérant qu'aux termes du § 1 de l'article 87 du traité instituant la Communauté européenne : Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre Etats membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d'Etat sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions ; qu'aux termes de l'article 88 du même traité : 1. La Commission procède avec les Etats membres à l'examen permanent des régimes d'aides existant dans ces Etats. (...) / 2. Si (...) la Commission constate qu'une aide accordée par un Etat ou au moyen de ressources d' Etat n'est pas compatible avec le marché commun aux termes de l'article 87 (...) elle décide que l'Etat intéressé doit la supprimer ou la modifier (...) / 3. La Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu'un projet n'est pas compatible avec le marché commun, aux termes de l'article 87, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L'Etat membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale ;

Considérant qu'il résulte de ces stipulations que, s'il ressortit à la compétence exclusive de la Commission européenne de décider, sous le contrôle de la Cour de justice des Communautés européennes, si une aide de la nature de celles mentionnées à l'article 87 du traité est ou non, compte tenu des dérogations prévues par ce traité, compatible avec le marché commun, il incombe, en revanche, aux juridictions nationales de sanctionner, le cas échéant, l'invalidité de dispositions de droit national qui auraient institué ou modifié une telle aide en méconnaissance de l'obligation, qu'impose aux Etats membres le § 3 de l'article 88 du traité, d'en notifier à la Commission, préalablement à toute mise à exécution, le projet ; que l'exercice de ce contrôle implique, notamment, de rechercher si les dispositions dont l'application est contestée instituent un régime d'aide, ou si une taxe fait partie intégrante d'une telle aide ;

Considérant qu'il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, d'une part, que les taxes n'entrent pas dans le champ d'application des stipulations précitées du traité instituant la Communauté européenne concernant les aides d'Etat, à moins qu'elles constituent le mode de financement d'une mesure d'aide, de sorte qu'elles font partie intégrante de cette mesure, d'autre part, que, pour que l'on puisse juger qu'une taxe, ou une partie d'une taxe, fait partie intégrante d'une mesure d'aide, il doit exister un lien d'affectation contraignant entre la taxe et l'aide en vertu de la réglementation nationale pertinente, en ce sens que le produit de la taxe est nécessairement affecté au financement de l'aide ;

Considérant que l'article 1er de la loi du 26 décembre 1996 relative à la collecte et à l'élimination des cadavres d'animaux et des déchets d'abattoirs et modifiant le code rural, a inséré dans le code général des impôts un article 302 bis ZD instituant, à compter du 1er janvier 1997, une taxe sur les achats de viande due par les personnes qui réalisent des ventes au détail de viande, dont le produit était affecté à un fonds faisant l'objet d'une comptabilité distincte, ayant pour objet de financer la collecte et l'élimination des cadavres d'animaux et des saisies d'abattoirs reconnus impropres à la consommation humaine et animale, activités correspondant au service public de l'équarrissage défini à l'article 264 du code rural en vigueur au cours des années d'imposition en litige ; que le II de l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000 de finances rectificative pour 2000, entré en vigueur le 1er janvier 2001, a limité à la période du 1er janvier 1997 au 31 décembre 2000 l'affectation de la taxe sur les achats de viande au fonds mentionné ci-dessus ; qu'en conséquence, à compter du 1er janvier 2001, en l'absence de dispositions prévoyant l'affectation de cette taxe, celle-ci est devenue une recette du budget général de l'Etat ; qu'à compter de cette même date, le service public de l'équarrissage a été financé au moyen d'une dotation inscrite au budget général de l'Etat ;

Considérant qu'aux termes du 1er alinéa de l'article 18 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, en vigueur au cours des années d'imposition en litige : Il est fait recette du montant intégral des produits, sans contraction entre les recettes et les dépenses. L'ensemble des recettes assurant l'exécution de l'ensemble des dépenses, toutes les recettes et toutes les dépenses sont imputées à un compte unique, intitulé budget général ; qu'en vertu du principe à valeur constitutionnelle d'universalité budgétaire résultant de ces dispositions, les recettes et les dépenses doivent figurer au budget de l'Etat pour leur montant brut, sans être contractées, et l'affectation d'une recette déterminée à la couverture d'une dépense déterminée est interdite, sous réserve des exceptions prévues au second alinéa de l'article 18 ; qu'en application de ce principe et de la législation nationale relative à la taxe sur les achats de viande, et sans qu'il soit besoin de se référer aux travaux parlementaires dont est issu l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000, à compter du 1er janvier 2001, il n'existait juridiquement aucun lien d'affectation contraignant entre la taxe et le service public de l'équarrissage, et aucun rapport entre le produit de la taxe et le montant du financement public attribué à ce service ; qu'en exécution des règles ainsi applicables, à compter de cette même date, la taxe sur les achats de viande était une recette du budget général, dépourvue de tout lien avec le budget du ministère de l'agriculture et la dotation inscrite à ce budget servant à financer le service public de l'équarrissage ; que la taxe sur les achats de viande n'entrant pas, ainsi, à compter du 1er janvier 2001, dans le champ d'application des stipulations précitées du traité instituant la Communauté européenne concernant les aides d'Etat, la SA GOLSA ne peut invoquer, au soutien de sa demande en restitution de l'imposition en litige, une éventuelle méconnaissance par les autorités françaises, à l'occasion de la modification du mode de financement du service public de l'équarrissage résultant des dispositions de l'article 35 de la loi du 30 décembre 2000, des obligations qu'imposent la première et la dernière phrases du § 3 de l'article 88 du traité instituant la Communauté européenne ;

Considérant, par ailleurs, que compte tenu de l'absence de lien d'affectation contraignant entre la taxe sur les achats de viande et le service public de l'équarrissage à compter du 1er janvier 2001, sont inopérants au soutien d'une demande en restitution de la taxe sur les achats de viande acquittée au titre des années 2001 et 2002 le moyen tiré de ce que le régime d'aide constitué par le service public de l'équarrissage aurait dû être notifié à l'origine à la Commission européenne et celui tiré de ce que le service public de l'équarrissage méconnaîtrait le principe pollueur-payeur ;

Considérant que la requérante ne peut utilement se prévaloir de ce que certains de ses concurrents auraient bénéficié de dégrèvements pour soutenir que les impositions litigieuses méconnaîtraient le principe d'égalité;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SA GOLSA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SA GOLSA est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA GOLSA et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Pourny et Segado, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 14 décembre 2010.

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N° 09LY03009


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY03009
Date de la décision : 14/12/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Christian CHANEL
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : FIDAL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-12-14;09ly03009 ?
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