La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/12/2010 | FRANCE | N°08LY01758

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 14 décembre 2010, 08LY01758


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 31 juillet 2008, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ;

Le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0402041 du 29 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a déchargé la société Act Performance des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 25 avril 1996 au 30 avril 1999 ;

2°) de remet

tre à la charge de la société Act Performance les droits et intérêts de retard en m...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 31 juillet 2008, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE ;

Le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0402041 du 29 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a déchargé la société Act Performance des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 25 avril 1996 au 30 avril 1999 ;

2°) de remettre à la charge de la société Act Performance les droits et intérêts de retard en matière de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1998 à concurrence de la décharge prononcée pour un montant de 4 453 euros ;

Le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, la société Act Performance ne se borne pas à effectuer des opérations de négociation de crédit exonérées de taxe sur la valeur ajoutée mais effectue une activité de gestion de crédit imposable à cette taxe en vertu du a) du 1° de l'article 261 C du code général des impôts dès lors que cette activité de gestion de crédit n'est pas exercée par l'établissement prêteur lui-même ;

- à titre subsidiaire, elle demande une substitution de base légale, les dispositions de l'article 256-I du code général des impôts étant substituées à celles du a) du 1° de l'article 261 C ; les services effectués par la société doivent s'analyser comme des prestations réalisées dans le cadre de la sous-traitance effectuée en matière de gestion de crédit, correspondant à une externalisation des opérations de gestion de crédit par les organismes financiers ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 1er décembre 2008, présenté pour la société Act Performance, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 7 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'affirme l'administration, elle exerce bien une activité de négociation de crédit, n'intervenant pas dans la gestion des crédits octroyés par les banques ; les commissions perçues à ce titre sont ainsi, et comme l'a jugé à bon le Tribunal, exonérées de taxe sur la valeur ajoutée sur le fondement du a) du 1° de l'article 261 C du code général des impôts ;

- la substitution de base légale ne saurait être retenue alors qu'elle ne peut être regardée comme exerçant une activité de sous-traitance de gestion de crédits pour les établissements financiers, qu'elle exerce un rôle d'intermédiaire entre son client et la banque en s'attachant à négocier les crédits avec cette dernière ; la commission versée s'analyse comme le résultat de la négociation pour la conclusion du prêt et non la rémunération d'une opération de gestion de prêt aux lieu et place de la banque ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 mars 2009, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, ET DE LA FONCTION PUBLIQUE, qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que la société reconnaissant exercer une activité de gestion de patrimoine, en sus des opérations de démarchage d'emprunteurs, d'appréciation de solvabilité et de préparation des dossiers de crédits, son activité relève bien de la gestion des crédits pour le compte de prêteurs ; la substitution de base légale est fondée dès lors que la société joue un rôle d'intermédiaire effectuant des prestations de services à titre onéreux pour le compte des prêteurs entrant de plein droit dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée en vertu de l'article 256-I du code général des impôts ; la société ne peut se prévaloir de la décision de rescrit du 7 février 2006, qui est postérieure à la mise en recouvrement des impositions en litige ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 juillet 2009, présenté pour la société Act Performance, qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que la décision de rescrit a fait l'objet d'une publication en vue de solutionner des problèmes similaires, constitue une prise de position formelle pour solutionner des contentieux en cours ou à venir, et fait référence à des décisions juridictionnelles du Conseil d'Etat et de la Cour de Justice de l'Union Européenne opposables à l'administration ; l'administration n'a pas fait appel du jugement devenu définitif du Tribunal ayant aussi déchargé des rappels de taxe sur le valeur ajoutée identiques concernant la société Act Investissement, prenant ainsi deux positions différentes contraires au principe d'égalité des contribuables devant la loi fiscale ;

Vu l'ordonnance en date du 16 mars 2010 fixant la clôture d'instruction au 30 avril 2010, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 novembre 2010 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Considérant que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE relève appel du jugement du 29 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a déchargé la société Act Performance des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déclarée redevable au titre de la période du 25 avril 1996 au 30 avril 1999 à raison de commissions versées par les établissements prêteurs ;

Considérant, d'une part, qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. ; que, d'autre part, aux termes de l'article 13 B de la sixième directive du conseil des communautés européennes du 17 mai 1977, les Etats membres exonèrent : d. les opérations suivantes : ( ...) 1° l'octroi et la négociation de crédits ainsi que la gestion de crédits effectuée par celui qui les a octroyés ; que l'article 261 C du code général des impôts, pris pour la transposition de cette directive, dispose que : Sont exonérées de taxe sur la valeur ajoutée : 1° les opérations bancaires et financières suivantes : a. l'octroi et la négociation de crédits, la gestion de crédits effectuée par celui qui les a octroyés ... ;

Considérant que, pour l'application de ces dernières dispositions, les opérations de négociation s'entendent des opérations d'entremise par lesquelles une personne autre que l'une des parties au contrat fait le nécessaire pour que ces parties concluent effectivement un tel contrat, sans que le négociateur ait un intérêt propre quant à son contenu, ces opérations pouvant consister, entre autres, à indiquer à une partie au contrat les occasions de conclure un tel contrat, à entrer en contact avec l'autre partie et à négocier au nom et pour le compte du client les détails des prestations réciproques ; que les opérations de gestion de crédits accomplies par des intermédiaires et détachables des opérations d'octroi ou de négociation de crédits, constituent des opérations de gestion de crédits ne pouvant être exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée que si ces opérations de gestion ont été réalisées par celui qui a octroyé le crédit ; qu'enfin, lorsque l'une des parties au contrat a confié à un sous-traitant des opérations matérielles liées au contrat, telles que l'information de l'autre partie, la réception et le traitement des demandes de crédits objets du contrat, sans qu'elles soient assorties de prestations d'entremise visant à la conclusion individuelle d'un tel contrat, ces opérations ne revêtent pas le caractère d'une activité de négociation ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que, concernant les rappels litigieux, la société Act Performance exerce notamment une activité consistant à conseiller ses clients sur les crédits immobiliers et à les orienter, en fonction de leurs besoins, vers les établissements financiers pour l'obtention de prêts bancaires ; que, dans le cadre de cette activité, elle recueille auprès de ses clients des informations et documents nécessaires à la détermination de leurs besoins ainsi qu'à la constitution d'un dossier de prêt demandé par les établissements financiers prêteurs ; qu'elle transmet à ces derniers les dossiers complets de demande de crédit de ses clients en vue de l'obtention de ce prêt, la décision d'octroi du crédit relevant de l'établissement bancaire prêteur ; qu'enfin la société requérante n'est rémunérée par l'organisme prêteur qu'à la condition que les clients ainsi conseillés par elle concluent un contrat de crédit ; que les opérations en cause réalisées par la requérante, qui n'était pas partie au contrat, ont consisté à faire le nécessaire pour que ces parties, en l'occurrence son client et l'établissement financier pouvant répondre aux besoins de celui-ci, concluent effectivement un tel contrat, l'activité de conseil patrimonial devant être regardée, concernant ces opérations, comme n'intervenant que dans une phase préliminaire en se limitant à l'assistance du client dans le choix de la solution et des crédits les mieux adaptés à ses besoins et à sa situation, sans qu'elle ait eu un intérêt propre quant à leur contenu en vue de la conclusion desdits contrats ; que les tâches ainsi réalisées sont liées à des opérations d'octroi et de négociation de crédits et ne sauraient être regardées, contrairement à ce qu'allègue à titre principal l'administration, comme des opérations de gestion de crédits détachables de celles-ci ; que par ailleurs, contrairement à ce que soutient l'administration à titre subsidiaire, ces opérations ne sauraient se résumer en des tâches matérielles liées au contrat que les établissements bancaires lui auraient sous-traitées, lesquelles tâches ne relèveraient pas des exonérations définies par les dispositions précitées et seraient soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, alors que, dans le cadre de ces opérations, la société intimée a réalisé des prestations d'entremise entre ses clients et les établissements bancaires en vue de la conclusion de contrats individuels ; que les opérations en cause effectuées par la société Act Performance revêtent, en revanche, le caractère d'opérations bancaires ou financières de négociation et d'octroi de crédits au sens des dispositions précitées, et les commissions perçues dans le cadre de ces opérations sont ainsi exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée sur le fondement du a du 1° des dispositions précitées de l'article 261 C du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, ET DE LA FONCTION PUBLIQUE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a déchargé les rappels de taxe litigieux ;

Sur les frais non compris dans les dépens :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par la société Act Performance et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le recours du MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à la société Act Performance une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT et à la société Act Performance.

Délibéré après l'audience du 23 novembre 2010, où siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Pourny et Segado, premiers conseillers,

Lu en audience publique, le 14 décembre 2010.

''

''

''

''

1

2

N° 08LY01758


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY01758
Date de la décision : 14/12/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : LONJON et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-12-14;08ly01758 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award