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30/11/2010 | FRANCE | N°10LY00121

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 30 novembre 2010, 10LY00121


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 25 janvier 2010 et régularisée par courrier le 29 janvier 2010, présentée pour M. Mostefa A, domicilié chez Mme Zinouba Benmebrouk, 9 rue Reynaldo Hahn à Valence (26000) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0901741 du 21 juillet 2009 rejetant sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Drôme du 6 mars 2009 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et lui fixant un pays de destination ;>
2°) d'annuler les décisions du 6 mars 2009 susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au p...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 25 janvier 2010 et régularisée par courrier le 29 janvier 2010, présentée pour M. Mostefa A, domicilié chez Mme Zinouba Benmebrouk, 9 rue Reynaldo Hahn à Valence (26000) ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Grenoble n° 0901741 du 21 juillet 2009 rejetant sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Drôme du 6 mars 2009 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et lui fixant un pays de destination ;

2°) d'annuler les décisions du 6 mars 2009 susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Drôme, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours à compter de cette notification ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision portant refus de titre de séjour n'est pas motivée ; que le jugement attaqué devra être annulé en raison de la production de pièces tronquées ou ne pouvant être légalement communiquées par l'administration ; qu'une condamnation pénale ne suffit pas à écarter le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors que le refus de titre de séjour attaqué aurait pour conséquence de le séparer des membres de sa famille et de ses amis, établis dans la Drôme, et qu'elle le priverait du suivi médical nécessaire à son équilibre psychique ; que ce refus a fait obstacle à ce qu'il suive un stage et bénéficie d'une offre d'emploi qui lui était proposée ; que le refus de titre de séjour attaqué méconnaît également les stipulations du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée et qu'elle a été prise en violation du principe du contradictoire prévu par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; que cette décision ne respecte pas son droit au séjour en France et les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision fixant son pays de renvoi méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du 17 novembre 2009 accordant à M. Mostefa A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 17 mai 2010 et régularisé par courrier le 19 mai 2010, présenté par le préfet de la Drôme, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que le refus de titre de séjour contesté est suffisamment motivé ; que l'article L. 313-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permet de prendre en considération l'ordre public et que l'article 776 du code de procédure pénale autorise la communication du bulletin n° 2 du casier judiciaire aux administrations ; que l'atteinte au droit du requérant au respect de sa vie privée n'est pas disproportionnée, les parents et les frères du requérant vivant en Algérie ; que l'intéressé a obtenu un nouveau passeport des autorités algériennes ; que le requérant ne justifie pas avoir besoin d'un traitement médical dont le défaut pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne pourrait pas bénéficier d'un tel traitement en Algérie ; que M. A ne justifie pas de la formation professionnelle qu'il allègue et qu'il n'a jamais produit de promesse d'embauche ; que la décision portant obligation de quitter le territoire français est suffisamment motivée et qu'elle n'avait en tout état de cause pas à l'être ; que l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 n'est pas applicable ; que l'intéressé ne peut obtenir un titre de séjour sur le fondement du 5 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ou sur celui d'autres stipulations de cet accord et qu'il n'est pas protégé par les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'intéressé ne justifie pas qu'il serait dans l'impossibilité de retourner dans son pays d'origine ;

Vu l'ordonnance, en date du 20 juillet 2010, fixant la clôture d'instruction au 20 août 2010, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 novembre 2010 :

- le rapport de M. Pourny, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Considérant que M. A, ressortissant algérien né en 1981, conteste le jugement du 21 juillet 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Drôme du 6 mars 2009 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et lui fixant l'Algérie comme pays de destination ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'aux termes de l'article 777-3 du code de procédure pénale : Aucune interconnexion au sens du 3° du I de l'article 30 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ne peut être effectuée entre le casier judiciaire national automatisé et tout autre fichier ou traitement de données à caractère personnel détenus par une personne quelconque ou par un service de l'Etat ne dépendant pas du ministère de la justice. / Aucun fichier ou traitement de données à caractère personnel détenu par une personne quelconque ou par un service de l'Etat ne dépendant pas du ministère de la justice ne pourra mentionner, hors les cas et dans les conditions prévus par la loi, des jugements ou arrêts de condamnation. / Toutefois, une condamnation pénale pourra toujours être invoquée en justice par la victime de l'infraction. / Toute infraction aux dispositions qui précèdent sera punie des peines encourues pour le délit prévu à l'article 226-21 du code pénal. ; que ces dispositions ne faisaient pas obstacle à ce que le préfet de la Drôme versât au dossier de première instance le bulletin n° 2 du casier judiciaire de l'intéressé ; que si ce document, établi le 26 décembre 2008, ne faisait pas mention d'un jugement du Tribunal de grande instance de Valence du 10 mars 2009 favorable à l'intéressé, il n'était pas, contrairement à ce que soutient le requérant, tronqué ; qu'enfin, la circonstance que les premiers juges ne font pas référence à ce jugement du Tribunal de grande instance de Valence est sans incidence sur le respect des droits de la défense et la régularité du jugement attaqué ;

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

Considérant que le moyen tiré de ce que le refus de titre de séjour opposé à M. A serait insuffisamment motivé doit être écarté par adoption des motifs retenus par les premiers juges que la Cour fait siens ;

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, 2- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ; que M. A fait valoir qu'il est bien intégré en France, pays où il réside depuis 2001, auprès de membres de sa famille, qu'il y a reçu une formation professionnelle susceptible de déboucher sur une promesse d'embauche, et obtenu des soins médicaux ; qu'il ressort, toutefois, des pièces du dossier que l'intéressé, célibataire et sans enfant, est entré en France après avoir vécu près de vingt ans en Algérie, pays où il n'est pas dépourvu d'attaches familiales, ses parents et plusieurs de ses frères s'y trouvant encore, et qu'il s'est maintenu sur le territoire français, malgré plusieurs refus de titre de séjour consécutifs aux rejets de ses demandes tendant à l'obtention de l'asile territorial puis à la reconnaissance de la qualité de réfugié, sans qu'il soit établi que ce maintien était imposé par le suivi d'un traitement médical dont le défaut aurait été susceptible d'avoir des conséquences graves pour l'intéressé ; que, dès lors, sans qu'il soit besoin de prendre en considération une condamnation pénale pour des faits anciens, laquelle n'est pas mentionnée dans le refus de titre de séjour litigieux, il ne ressort pas des pièces du dossier que ce refus porte une atteinte disproportionnée au droit de M. A au respect de sa vie privée et familiale au regard des motifs de ce refus ; que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées doivent par suite être écartés ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi n° 2007-1631 du 20 novembre 2007 : I. - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. (...) , qu'aux termes de l'article L. 511-4 du même code : Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ou d'une mesure de reconduite à la frontière en application du présent chapitre : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; (...) et qu'aux termes de l'article L. 512-1 du même code : L'étranger qui fait l'objet d'un refus de séjour, d'un refus de délivrance ou de renouvellement de titre de séjour ou d'un retrait de titre de séjour, de récépissé de demande de carte de séjour ou d'autorisation provisoire de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français mentionnant le pays de destination peut, dans le délai d'un mois suivant la notification, demander l'annulation de ces décisions au tribunal administratif. Il peut demander le bénéfice de l'aide juridictionnelle au plus tard lors de l'introduction de sa requête en annulation. Son recours suspend l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français sans pour autant faire obstacle au placement en rétention administrative dans les conditions prévues au titre V du présent livre. / Le tribunal administratif statue dans un délai de trois mois à compter de sa saisine. Toutefois, en cas de placement en rétention de l'étranger avant qu'il ait rendu sa décision, il statue, selon la procédure prévue à l'article L. 512-2, sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français et de la décision fixant le pays de renvoi, au plus tard soixante-douze heures à compter de la notification par l'administration au tribunal de ce placement. / Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues au titre V du présent livre et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. ;

Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation ; que le requérant ne peut dès lors se prévaloir des dispositions des articles 1er et 3 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 pour soutenir que l'obligation qu'il conteste serait insuffisamment motivée ;

Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision portant obligation de quitter le territoire français ;

Considérant que si le requérant soutient disposer d'un droit au séjour faisant obstacle à ce qu'il fasse l'objet d'une obligation de quitter le territoire français, il ne justifie pas remplir les conditions permettant d'obtenir un titre de séjour en France ; que ce moyen doit par suite être écarté ;

Considérant que les certificats médicaux versés au dossier ne suffisent pas à établir que l'état de santé de M. A nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité ; que le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne saurait ainsi être accueilli ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ; que les risques allégués par M. A en cas de retour dans son pays d'origine ne sont pas établis ; que le moyen tiré de ce que la décision lui fixant l'Algérie comme pays de destination méconnaîtrait ces dispositions ne peut ainsi être retenu ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que les conclusions qu'il présente au titre des articles L. 911-1 à L. 911-3 et L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Mostefa A et au ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration. Copie en sera adressée au préfet de la Drôme.

Délibéré après l'audience du 9 novembre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Pourny et Segado, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 30 novembre 2010.

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N° 10LY00121

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10LY00121
Date de la décision : 30/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. François POURNY
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : LETELLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-11-30;10ly00121 ?
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