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25/11/2010 | FRANCE | N°09LY02082

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 25 novembre 2010, 09LY02082


Vu la requête, enregistrée le 31 août 2009 au greffe de la Cour, présentée pour la SOCIETE FRAPPA, dont le siège social est situé 284 rue de la République à Davezieux (07400) ;

La SOCIETE FRAPPA demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 4 du jugement n° 0701981-0702094-0702242 du Tribunal administratif de Lyon du 23 juin 2009 rejetant le surplus de ses conclusions en décharge de la retenue à la source à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2003, des cotisations supplémentaires et pénalités afférentes d'impôt sur les sociétés auxquelles el

le a été assujettie au titre des exercices clos en 2002 et 2003, enfin des droits su...

Vu la requête, enregistrée le 31 août 2009 au greffe de la Cour, présentée pour la SOCIETE FRAPPA, dont le siège social est situé 284 rue de la République à Davezieux (07400) ;

La SOCIETE FRAPPA demande à la Cour :

1°) d'annuler l'article 4 du jugement n° 0701981-0702094-0702242 du Tribunal administratif de Lyon du 23 juin 2009 rejetant le surplus de ses conclusions en décharge de la retenue à la source à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2003, des cotisations supplémentaires et pénalités afférentes d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2002 et 2003, enfin des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée et pénalités afférentes qui lui ont été assignés au titre de la période du 1er janvier 2002 au 31 août 2004 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, à son leur profit, la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que le caractère sincère et probant de sa comptabilité n'a pas été remis en cause et qu'il appartient donc à l'administration de prouver la minoration du bénéfice ; qu'aucune disposition légale ou jurisprudentielle n'oblige à produire une facture pour justifier une charge, mais qu'il appartient au contribuable d'apporter la preuve tant de la réalité que du montant de la charge inscrite en comptabilité ; qu'il n'appartient pas à un contribuable, sauf exception, de justifier ses écritures comptables par un contrat écrit ; que si elle entend remettre en cause une charge justifiée par une facture, il appartient à l'administration d'apporter la preuve de l'absence ou de l'insuffisance de contrepartie pour l'entreprise ; qu'au cas d'espèce l'administration fiscale n'apporte pas la preuve de l'absence de contrepartie ;

En ce qui concerne les factures de la société Frappa-Italia :

- que, conformément aux accords avec sa filiale Frappa-Italia, laquelle convoie vers l'Italie, commercialise et fait homologuer dans ce pays les remorques qu'elle produit, elle lui vend ses produits au prix appliqués aux clients français et la rémunère pour le convoyage et l'homologation par un forfait de 1 500 euros par mois ; que le vérificateur a d'abord remis en cause cette charge comme " frais du dirigeant de Frappa-Italia" avant de considérer dans la réponse aux observations, que cette charge relevant de l'activité de la société italienne n'avait pas à être prise en compte, dans le cadre d'une gestion normale de l'entreprise, par la société française ; qu'elle pratique, à l'égard de la société italienne, un prix de vente égal voire supérieur à celui qu'elle pratique à ses clients français pour lesquels elle prend en charge l'homologation et le convoyage ; que le tribunal lui a reproché de ne justifier ni des modalités arrêtées avec la société Frappa-Italia, ni du nombre de véhicules vendus, ni de la réalité des frais engagés par cette dernière, alors qu'elle produit 26 factures de vente de véhicules à la société italienne et que celle-ci a réalisé pour 2002 et 2003 un résultat cumulé de 75 euros, ce qui démontre qu'elle a supporté des charges et qu'il n'y a eu aucune transfert de bénéfice à son profit ; que c'est à tort que le Tribunal administratif a pu considérer qu'il lui appartenait de justifier des charges supportées par Frappa-Italia et ne l'a pas déchargée de la retenue à la source ;

En ce qui concerne les factures Drax et Secfm :

- qu'elle a commercialisé un grand nombre de véhicules grâce aux démarches effectuées par M. Romelli, salarié des sociétés Drax et Secfm ; qu'elle a directement remboursé M. Romelli des frais engagés par celui-ci et a par ailleurs acquitté les frais de commercialisation facturés par ces deux sociétés ; que si, au stade de la réclamation, les frais remboursés à M. Romelli ont finalement été admis en déduction, tel n'a pas été le cas pour les honoraires facturés par les société Drax et Secfm dont il était le dirigeant et le salarié ; qu'est inopérant le moyen tiré de l'absence de contrat et de justifications précises quant au montant et à la réalité des frais engagés ; qu'il n'est pas contesté que les interventions de M. Romelli ont généré plus de sept millions de chiffre d'affaires pour les années 2002 et 2003 ; que sont inopérants les arguments selon lesquels les bulletins de paye de M. Romelli ne comportaient pas la nature de son emploi ; qu'il est constant que la charge a été engagée pour les besoins de son activité et qu'il est évident qu'il y a une contrepartie aux honoraires facturés de 54 169 euros hors taxes (HT) pour 2002 et 50 534 euros hors taxes au titre de 2003 ; que la facture 9/02 du 30 septembre 2002 précise qu'elle vise la vente de matériel de transport aux sociétés Occitan et Occitrans ; qu'a été produite la liste des véhicules vendus par M. Romelli ; que le dirigeant de la société Trans Occitan atteste que c'est M. Romelli qui a pris commande des véhicules acquis par sa société auprès de FRAPPA ; qu'elle a produit une attestation de M. Mozin, gérant de la Sarl Secfm, selon laquelle les facturations faites à FRAPPA correspondaient à la prise de commande effectuée par M. Romelli et précisant que ce dernier était régulièrement pris en charge et rémunéré par la Société Secfm ; qu'il est aisé de rapprocher les autres factures émises par Drax et Secfm tant de la liste des véhicules vendus par M. Romelli que des attestations des clients de FRAPPA ; qu'est inopérante l'argumentation du vérificateur selon laquelle il n'y a aucun lien contractuel entre elle et M. Romelli et que ce dernier n'exploite pas une activité à titre individuel ;

En ce qui concerne les remboursements de frais aux commerciaux MM. Clozel et Sibier :

- qu'elle a remboursé la somme de 3 048, 98 euros à chacun de ses deux commerciaux, MM. Clozel et Siber, destinée à les dédommager du fait qu'ils ont parfois été amenés à utiliser leur véhicule personnel pour le compte de la SOCIETE FRAPPA ; que l'administration fiscale a relevé à deux reprises pour M. Clozel, et à une reprise pour M. Siber, des discordances entre la distance kilométrique prise pour base des remboursements et la distance réelle et une incohérence entre le lieu du déplacement mentionné et le lieu du repas remboursé ce même jour ; qu'elle en a conclu que pour l'intégralité, ces sommes constituaient des libéralités au bénéfice des salariés ; que quand bien même ces remboursements seraient insuffisamment justifiés, ils ne sauraient s'analyser autrement que comme un supplément de salaire ; que les sommes ayant été effectivement versées, on distingue mal quels justificatifs devraient être produits pour que les sommes soient requalifiées en salaires ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée relative à la vente de véhicules :

- que la société a cédé à deux sociétés implantées en Syrie trois véhicules immatriculés en France ; que ces véhicules ont été payés respectivement en février et mai 2003 et qu'il ne fait aucun doute qu'ils ont fait l'objet d'exportation, dès lors qu'aucune nouvelle immatriculation n'a été faite en France ; que ces trois véhicules ayant été expédiés à l'initiative des acquéreurs, ceux-ci ont conservé l'exemplaire n° 3 du document administratif unique ; que faute d'avoir produit ce document, l'administration fiscale a estimé qu'elle aurait dû collecter la taxe sur la valeur ajoutée ; que l'amende qui lui a été infligée à raison du fait qu'elle avait été payée en numéraire précise qu'il s'agissait de clients étrangers ; que s'il est vrai que l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts prévoit la production de la déclaration d'exportation visée par le service des douanes, cette obligation formelle est seulement destinée à permettre le contrôle de la réalité de l'exportation ; or en l'espèce il n'est pas sérieusement contesté que les véhicules ont été exportés ; que le refus d'exonération viole les dispositions de la 6ème directive ; qu'il est démontré que les remorques ont été vendues à des clients étrangers, qui ont acquitté le prix, et que ces remorques n'ont jamais été immatriculées en France ; qu'il n'est pas sérieux de considérer que des sociétés syriennes qui n'ont ni activité ni établissement en France y utiliseraient néanmoins des véhicules immatriculés ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée relative à la location de véhicules :

- dès que le vérificateur lui a fait remarquer qu'elle avait par erreur déduit la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux factures de véhicules de location utilisés par ses commerciaux, elle a immédiatement régularisé au titre de l'exercice en cours, clos au 31 décembre 2004, en créditant le compte de taxe sur la valeur ajoutée déductible ; que le redressement a été maintenu faute pour elle de n'avoir pas servi la ligne " taxe sur la valeur ajoutée antérieurement déduite à reverser " sur la déclaration déposée après clôture de l'exercice ; que le compte de taxe sur la valeur ajoutée déductible est resté malgré tout toujours débiteur ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée afférente aux honoraires Drax et Secfm :

- que contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal administratif, les sommes versées à ces deux sociétés l'ont été pour les besoins de la société : qu'elles ouvrent droit à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée les ayant grevées en application du II de l'article 271 du code général des impôts ;

Sur les pénalités relatives à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sur l'impôt sur les sociétés :

- que les pénalités pour manquements délibérés ont été maintenues à raison de la prise en charge délibérée de frais dont elle n'était pas en mesure de justifier de la réalité alors qu'il s'agit de la somme de 3 048, 98 euros effectivement versée à ses deux salariés, et qu'il n'est pas démontré que ce soit dans une intention libérale ;

Sur les pénalités relatives à la taxe sur la valeur ajoutée :

- que s'agissant de la taxe déduite sur la location des véhicules de tourisme ou de celle relative à l'exportation de véhicules, le tribunal s'est contenté de soutenir que les redressements avaient été acceptés ; que le fait qu'elle n'ait pas pu obtenir le Document Administratif Unique (DAU) en matière d'exportation ne démontre pas qu'elle a volontairement minoré les déclarations ; que s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée relative à la location de véhicules, elle a régularisé son erreur dès qu'elle s'en est rendue compte ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 février 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient :

S'agissant de l'impôt sur les sociétés, de la contribution à l'impôt sur les sociétés et de la retenue à la source :

- que le Tribunal administratif de Lyon a fait une exacte application des règles définies par la jurisprudence en matière de preuve relative aux charges ;

- que la société filiale Frappa-Italia, qui assure la commercialisation des produits en Italie a facturé à la SOCIETE FRAPPA des frais pour 36 592 euros au titre de 2003 ; que les factures mentionnent un " remboursement de dépenses " sans autre précision, que la SOCIETE FRAPPA n'a fourni aucune indication sur la nature exacte des dépenses ; que leur montant a été réintégré à la base imposable à l'impôt sur les sociétés et que les sommes correspondantes constituant un profit distribué au profit de la société italienne, il a été soumis à la retenue à la source prévue par l'article 119 bis-2 du code général des impôts ;

- que les honoraires facturés par les sociétés Sfax et Secfm pour " assistance commerciale et vente de matériel " ou " étude de marchés " en 2002 et 2003 ont été rappelées car elles n'avaient été prévues par aucun contrat, et que les sociétés avaient cessé leurs activités de holding, sans rapport d'ailleurs avec la SOCIETE FRAPPA ; que cette dernière n'a pas été en mesure d'établir et de justifier que M. Romelli, agissant comme salarié et dirigeant de ces sociétés, avait effectivement réalisé, au nom de celles-ci, des prestations commerciales pour son compte ; que les factures produites ne mentionnent pas l'intervention de M. Romelli lui-même, et que les attestations des clients ne précisent pas que l'intéressé agissait bien pour les deux sociétés en cause ; que compte tenu des attestations selon lesquelles les commandes passées faisaient suite au démarchage commercial de M. Romelli, l'administration a admis la déduction des remboursements de frais directement payés à lui par la SOCIETE FRAPPA ; que les factures Drax font notamment état de déplacements pour la création d'une unité de production au Maroc ; que la société Drax a cessé toute activité de holding en 2000 et n'avait alors plus aucun salarié ; que la Ste Secfm a géré un hôtel à Martigues jusqu'en 2001 et devait ensuite être dissoute ; que ces deux sociétés ne déposaient plus de déclaration fiscale régulière ; que M. Romelli, pour la période vérifiée, avait déclaré ne plus avoir de revenus de source française ;

- que les justificatifs fournis quant au frais de déplacement remboursés à MM. Closel et Siber révèlent de nombreuses incohérences ; que ces remboursements ne peuvent en tout état de cause être regardés comme des salaires car, dans les écritures de la société, ils ont comptabilisés, mais indistinctement en frais généraux et non comme tels, ainsi que le prescrit l'article 54 bis du code général des impôts ; qu'ils représentent donc des avantages occultes relevant de l'article 111 c du code général des impôts ;

S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée :

- en ce qui concerne les exportations : que l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée est subordonnée aux termes de l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts à la production d'une déclaration ; que cette sujétion n'est pas contraire à la sixième directive ; que les justificatifs produits par la SOCIETE FRAPPA n'établissent pas l'exportation vers la Syrie ;

- en ce qui concerne la taxe grevant la location de véhicules : que la régularisation de taxe sur la valeur ajoutée en janvier 2005 ne fait pas obstacle au redressement notifié et mis en recouvrement au titre de la période vérifiée ;

- en ce qui concerne la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée grevant les honoraires des sociétés Sfax et Secfm : que ces prestations n'ayant pas été engagées dans l'intérêt de l'entreprise, la taxe sur la valeur ajoutée afférente n'est pas déductible ;

S'agissant des pénalités :

- que c'est à bon droit que les premiers juges ont considérés que la prise en charge délibérée des frais kilométriques des commerciaux et la production de pièces justificatives non probantes permettait de justifier la mauvaise foi ; que s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée récupérée sur la location des véhicules, la régularisation tardive ne fait que confirmer la mauvaise foi ;

- que la circonstance que la SOCIETE FRAPPA ait été précédemment redressée pour avoir, en méconnaissance des dispositions de l'article 237 de l'annexe II au code général des impôts à la visée par le service des douanes, à tort exonéré de taxe sur la valeur ajoutée des opérations de cession de véhicules dont l'exportation n'est pas établie , constitue une motivation suffisante des pénalités ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 octobre 2010, présenté pour la SOCIETE FRAPPA qui conclut aux mêmes fins que la requête, par les mêmes moyens ;

Elle soutient, en outre :

- s'agissant des factures de la société Frappa-Italia : qu'il ne lui appartient pas de produire les justificatifs exacts des frais engagés par celle-ci ; qu'elle démontre qu'elle n'a pas eu à supporter d'autres frais de convoyage et d'homologation que ces factures à raison des ventes réalisées en Italie ; qu'il importe peu que l'accord porte ou non sur un montant mensuel forfaitaire ; qu'elle apporté la preuve que la société italienne a supporté des frais puisque son résultat cumulé sur 2002 s'établit à 75 euros ;

- s'agissant des honoraires facturés par les sociétés Drax et Secfm : que le rapprochement des factures litigieuses versées au débat, la liste chiffrée des commandes prises par M. Romelli et les attestations de ses clients permet de faire la correspondance entre les factures des sociétés Drax et Secfm et l'activité commerciale déployée par M. Romelli à son bénéfice ; qu'il y a un lien entre M. Romelli et les sociétés Drax et Secfm puisqu'il est démontré que M. Romelli est président de la société Drax, et que le gérant de la SARL Secfm atteste des facturations faites à la SOCIETE FRAPPA, ce qui est confirmé par l'administration ; qu'il ressort des pièces produites par l'administration que M. Romelli est bien salarié de la SARL Secfm ;

- s'agissant des frais de déplacement remboursés à MM. Closel et Siber : qu'il ne peut s'agir d'avantages en nature ; que l'arrêt du 24 mars 2006 ne peut s'appliquer en l'espèce car les intéressés n'ont ni la qualité de dirigeants, ni celle d'associés ; que les sommes ne peuvent être regardées que comme un complément de salaire, déductibles ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la sixième directive 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 21 octobre 2010 :

- le rapport de M. Raisson, premier conseiller ;

- les observations de Me Duraffourd, avocat de la SOCIETE FRAPPA ;

- et les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;

- la parole ayant été à nouveau donnée à Me Duraffourd ;

Considérant que la SOCIETE FRAPPA, qui fabrique des remorques frigorifiques à Davezieux (Ardèche) a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les années 2001 à 2003, période prolongée jusqu'à août 2004 en matière de taxe sur la valeur ajoutée ; qu'à l'issue de ce contrôle divers redressements lui ont été notifiés en matière d'impôt sur les sociétés, de taxe sur la valeur ajoutée et de retenue à la source ; que le Tribunal administratif de Lyon, saisi du litige, a réduit les pénalités dont étaient assortis certains chefs de redressements ; que la SOCIETE FRAPPA fait appel au titre des redressements et pénalités restant à sa charge ;

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés et les contributions à l'impôt sur les sociétés :

Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1) Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main d'oeuvre, les loyers des immeubles dont l'entreprise est locataire (...) " ; qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du même code que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; qu'en ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ;

Considérant qu'en vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis ; que la seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense ; que le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications ;

S'agissant des frais facturés par la société Frappa-Italia :

Considérant que la société Frappa-Italia, filiale de la SOCIETE FRAPPA est chargée de la commercialisation en Italie des remorques fabriquées par sa société mère ; qu'elle lui a facturé sous le libellé " remboursement de dépenses ", des frais d'un montant de 1 500 euros mensuels ; que le vérificateur a remis en cause le caractère déductible de ces frais au motif que leur nature et leur utilité pour la société n'apparaissaient pas ; que si la SOCIETE FRAPPA soutient qu'ils rémunèrent le convoyage et l'homologation des remorques vendues en Italie, cette facturation n'est appuyée sur aucune convention et son montant est totalement indépendant du nombre de remorques vendus en Italie ; qu'à raison de cette explication, qui n'est pas en cohérence avec les faits, la SOCIETE FRAPPA doit être regardée comme n'établissant ni la nature ni la réalité de la contrepartie aux versements effectués au bénéfice de Frappa-Italia ; que par conséquent, l'administration fiscale était fondée à remettre en cause la déduction du montant de ces factures au revenu imposable de la SOCIETE FRAPPA ;

S'agissant des honoraires facturés par les sociétés Drax et Secfm :

Considérant, ainsi que l'a relevé le Tribunal administratif que la SOCIETE FRAPPA a porté en charges pour 53 969 euros en 2002 et 50 534 euros en 2003 des factures émises par les sociétés holding Drax et Secfm et libellées pour l'essentiel à raison d'honoraires de commercialisation de produits fabriqués par la SOCIETE FRAPPA ; qu'elle a par ailleurs remboursé des frais de déplacement à M. Romelli ; que de nombreuses attestations de clients établissent que c'est à la suite du démarchage effectué par M. Romelli qu'elles ont acquis les véhicules fabriqués par la SOCIETE FRAPPA ; que, toutefois, le vérificateur a rejeté la charge constituée par ces factures ; que le ministre fait en effet valoir que la SOCIETE FRAPPA n'avait aucune convention avec les sociétés Drax et Secfm ; que s'il est allégué que M. Romelli en était dirigeant ou salarié, l'administration fiscale relève que ces sociétés holding ont cessé leur activité en 2000 pour Drax et 2001 pour Secfm, que cette dernière avait pour activité la gestion d'un hôtel, domaine sans rapport avec l'activité de la société FRAPPA, que leur siège social avait été fixé à la même adresse de domiciliation, que M. Romelli a déclaré ne plus avoir, sur la période concernée, de revenus d'origine française et que la société Secfm n'a pu présenter à l'administration les factures comptabilisées par la société FRAPPA ; qu'ainsi l'administration doit être regardée comme apportant la preuve que les sociétés Drax et Secfm n'ont pas pu fournir à la SOCIETE FRAPPA les prestations pour lesquelles cette dernière les a rémunérées ; que c'est donc à bon droit qu'elle a rejeté ces charges supportées par la SOCIETE FRAPPA, laquelle, dans les circonstances très particulières de l'espèce se devait de vérifier que c'était effectivement des sociétés Drax et Secfm qu'elle était débitrice à raison des prestations de commercialisation de M. Romelli ;

S'agissant des remboursements de frais aux commerciaux MM. Clozel et Siber :

Considérant que la SOCIETE FRAPPA a porté en déduction, au titre de l'exercice clos en 2002, les sommes versées à deux de ses commerciaux qui correspondraient au remboursement des frais engagés par ces derniers lors de l'utilisation de leur véhicule personnel pour les besoins de la société ; qu'en appel la société, à défaut de pouvoir justifier des frais ainsi déduits, soutient que les sommes en cause doivent être regardées comme des compléments de salaire, par nature déductibles ; que, cependant, ayant pour contrepartie déclarée le remboursement de dépenses non engagées dans l'intérêt de l'entreprise, ces versements constituent des avantages en nature ; que faute d'avoir été inscrits explicitement comme tels en comptabilité, en infraction avec les termes de l'article 54 bis du code général des impôts, ils ne peuvent être déduits du bénéfice imposable ;

En ce qui concerne la retenue à la source :

Considérant qu'aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) " ; qu'aux termes de l'article 111 du même code : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : c. Les rémunérations et avantages occultes " ; qu'aux termes de l'article 119 bis dudit code : " 2. Sous réserve des dispositions de l'article 239 bis B, les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187 1. Lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France. Un décret fixe les modalités et conditions d'application de cette disposition. (...) " ; qu'aux termes de l'article 10 de la convention franco-italienne du 5 octobre 1989 susvisée : " 1. Les dividendes payés par une société qui est un résident d'un Etat à un résident de l'autre Etat sont imposables dans cet autre Etat. 2. Toutefois, ces dividendes sont aussi imposables dans l'Etat dont la société qui paie les dividendes est un résident, et selon la législation de cet Etat, mais si la personne qui reçoit les dividendes en est le bénéficiaire effectif, l'impôt ainsi établi ne peut excéder : a) 5 p. cent du montant brut des dividendes si le bénéficiaire effectif est une société passible de l'impôt sur les sociétés qui a détenu directement ou indirectement, pendant une période d'au moins 12 mois précédant la date de la décision de distribution des dividendes, au moins 10 p. cent du capital de la société qui paie les dividendes ; (...) 9. a) Le terme " dividendes " employé dans le présent article désigne les revenus provenant d'actions, actions ou bons de jouissance, parts de mine, parts de fondateur ou autres parts bénéficiaires à l'exception des créances, ainsi que les revenus soumis au régime des distributions par la législation de l'Etat dont la société distributrice est un résident ; (...) " ;

Considérant, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, que les sommes facturées à la SOCIETE FRAPPA par sa filiale italienne Frappa-Italia n'étaient pas déductibles du bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés ; que, dès lors, les sommes acquittées par la SOCIETE FRAPPA constituent des revenus distribués au profit de la société italienne au sens des dispositions précitées, passibles de la retenue à la source au taux fixé à l'article 10 de la convention franco-italienne en matière fiscale ; que la SOCIETE FRAPPA n'est pas donc pas fondée à en demander la décharge ;

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

S'agissant de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée sur les exportations :

Considérant qu'aux termes de l'article 262 du code général des impôts : " I. Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : 1° les livraisons de biens expédiés ou transportés par le vendeur ou pour son compte, en dehors de la Communauté européenne ainsi que les prestations de services directement liées à l'exportation ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 74 de l'annexe III audit code, dans sa version applicable au litige : " 1. Les livraisons réalisées par les assujettis et portant sur des objets ou marchandises exportés sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée à condition : (...) c. Que le fournisseur établisse pour chaque envoi une déclaration d'exportation, conforme au modèle donné par l'administration, qui doit, après visa par le service des douanes du point de sortie, être mise à l'appui du registre visé au a. Toutefois, lorsque l'exportation est réalisée par l'entremise d'un intermédiaire agissant au nom et pour le compte d'autrui, et que celui-ci est désigné comme expéditeur des biens sur la déclaration d'exportation, le fournisseur met à l'appui du registre prévu au a un exemplaire de sa facture visée par le service des douanes du point de sortie. (...) " ;

Considérant que, nonobstant les termes des dispositions sus-rapportées, l'assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée qui livre un bien à un acquéreur résidant en dehors de la communauté européenne peut établir la réalité de la livraison par d'autres moyens de preuve que par la production de l'exemplaire n° 3 du document administratif unique (DAU) ; que le vérificateur a estimé que la SOCIETE FRAPPA aurait du soumettre à la taxe sur la valeur ajoutée les ventes de trois véhicules, conclues les 22 novembre 2002, 27 janvier et 16 mai 2003 avec des sociétés syriennes au motif que l'exportation de ces véhicules n'était pas établie ; qu'en se contentant de soutenir que les trois véhicules ont été acquis par des sociétés étrangères qui n'ont pas d'établissement en France, qu'ils ont été payés et n'ont pas été réimmatriculés en France, la société requérante n'établit pas que ces ventes pouvaient bénéficier des dispositions précitées de l'article 262 du code général des impôts ;

S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible sur la location de véhicules :

Considérant que la SOCIETE FRAPPA a déduit la taxe sur la valeur ajoutée afférente à la location de véhicules destinés au transport de personnes au titre des années 2002 à 2004 ; que si elle ne conteste pas que les dispositions des articles 271 du code général des impôts et de l'article 242 de l'annexe II à ce même code n'autorisent pas une telle déduction, elle soutient néanmoins avoir régularisé, le 31 décembre 2004, sa situation au titre de l'année 2004 en retranchant la somme de 3 748 euros de son compte de taxe sur la valeur ajoutée déductible ; que, toutefois, cette régularisation qui est intervenue postérieurement à la période de taxation en litige, laquelle s'est achevée le 31 août 2004, est sans incidence sur le bien-fondé du rehaussement ; qu'il appartenait seulement à la SAS FRAPPA, si elle s'y croyait fondée, de demander à l'administration fiscale le remboursement de la régularisation alléguée de décembre 2004 ;

S'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible afférente aux honoraires des sociétés Drax et Secfm :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les sommes versées en paiement des honoraires facturés par les sociétés holding Drax et Secfm n'ont pas été engagées dans l'intérêt de la société FRAPPA ; que, par suite, la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé le montant de honoraires dont s'agit n'est pas déductible en application des dispositions précitées de l'article 271-I-1 du code général des impôts ;

Sur les pénalités :

Considérant, en ce qui concerne les pénalités relatives à l'impôt sur les sociétés et à la contribution sur l'impôt sur les sociétés, que la société requérante se contente de soutenir que les versements effectués au profit de ses salariés Clozel et Siber ne constituaient pas des libéralités ; qu'il résulte cependant de ce qui précède que ces sommes ne pouvant être regardées ni comme des remboursement de frais, ni comme des compléments de salaires, constituent des libéralités occultes ; que la circonstance que la SOCIETE FRAPPA ne pouvait ignorer ce caractère justifie la pénalité prononcée ;

Considérant que la société requérante conteste le bien-fondé des pénalités prononcées à raison des rappels de taxe sur la valeur ajoutée fondés, d'une part, sur l'impossibilité de déduire la taxe payée à l'occasion la location de véhicules de tourisme, d'autre part, pour ne pas avoir collecté ladite taxe lors de la vente de véhicule alors que l'exportation n'était pas démontrée ; que la notification de redressements du 14 juin 2005 justifie les pénalités de mauvaise foi afférentes par le fait que de telles rectifications avaient été opérées lors d'un précédent contrôle portant sur une période antérieure ; que l'administration fiscale est fondée à soutenir que la réitération des irrégularités dénoncées antérieurement révèle une volonté délibérée d'éluder l'impôt ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SOCIETE FRAPPA n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon n'a fait que partiellement droit à sa demande ;

Sur les conclusions relatives à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par la société FRAPPA et non compris dans les dépens ; qu'au surplus les frais en cause ne sont pas chiffrés ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE FRAPPA est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE FRAPPA et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 21 octobre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Duchon-Doris, président de chambre,

M. Montsec, président-assesseur,

M. Raisson, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 novembre 2010.

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N° 09LY02082


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY02082
Date de la décision : 25/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: M. Denis RAISSON
Rapporteur public ?: M. MONNIER
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS DURAFFOURD GONDOUIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-11-25;09ly02082 ?
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