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09/11/2010 | FRANCE | N°09LY03021

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 09 novembre 2010, 09LY03021


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 décembre 2009, présentée pour Mme Tahina A, domiciliée ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902050 du 25 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Savoie du 27 février 2009 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) de faire injonction au préfet de la Savoie de lui délivrer un tit

re de séjour dans un délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titr...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 15 décembre 2009, présentée pour Mme Tahina A, domiciliée ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902050 du 25 juin 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Savoie du 27 février 2009 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

2°) d'annuler ledit arrêté ;

3°) de faire injonction au préfet de la Savoie de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, en cas d'annulation pour un motif de forme, d'examiner à nouveau sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Mme A soutient que :

- le refus de séjour est insuffisamment motivé dès lors qu'il ne fait pas état de sa situation administrative réelle telle qu'elle l'avait exposée et notamment de sa demande présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; le préfet ne peut lui reprocher le refus de l'employeur de renouveler son contrat et l'absence de production de pièces complémentaires notamment une promesse d'embauche, dès lors que cette situation est imputable au long délai de réponse de la préfecture à sa demande de titre salarié qui n'a pas répondu dans le délai d'un mois imparti par le jugement du Tribunal ; le préfet n'a pas respecté le délai imparti ; cette décision méconnaît l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; ce refus méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 qu'elle a invoquées dans un courrier du 23 avril 2008 ; ce refus méconnaît aussi les dispositions dudit article L. 313-14 compte tenu de sa situation personnelle, familiale, de sa parfaite intégration professionnelle, de sa situation professionnelle ;

- l'obligation de quitter le territoire est illégale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour ; cette décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les pièces desquelles il résulte que la requête a été notifiée au préfet de la Savoie, qui n'a pas produit d'observations ;

Vu l'ordonnance prise le 29 juin 2010 sur le fondement de l'article R. 613-1 du code de justice administrative fixant la clôture de l'instruction au 30 juillet 2010 à 16 heures 30 ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 19 mars 2010 accordant l'aide juridictionnelle totale à Mme A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 octobre 2010 :

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de Mme A tendant à l'annulation de l'arrêté du Préfet de la Savoie du 27 février 2009 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays dans lequel elle établit être légalement admissible ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme A a demandé, le 1er juin 2005, puis en avril 2007, la délivrance d'un titre de séjour mention salarié et, à titre subsidiaire, mention étudiant ; que, par un jugement du 27 novembre 2007, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé, pour défaut de motivation, la décision du 10 novembre 2005 par laquelle le préfet de la Savoie a refusé de lui délivrer un titre de séjour à la suite de sa demande du 1er juin 2005, ainsi que l'arrêté du 20 juillet 2007 dudit préfet lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire pris en réponse à sa demande de titre du 27 novembre 2007 ; que, par le même jugement, le Tribunal a enjoint le préfet de la Savoie de se prononcer à nouveau sur la demande de carte de séjour de Mme A dans un délai d'un mois à compter de la notification dudit jugement ; que la requérante a, par un courrier en date du 23 avril 2008, sollicité le réexamen de sa situation conformément à ce jugement du Tribunal en se prévalant notamment de l'évolution de sa situation personnelle et familiale depuis sa demande initiale et des dispositions précitées de l'article L. 313-14 relatives à la délivrance d'une carte de séjour temporaire vie privée et familiale pour des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels ; qu'il ressort des motifs mêmes de l'arrêté attaqué que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de la situation de la requérante au regard de cet article L. 313-14 qu'il ne vise d'ailleurs pas, alors que la demande de Mme A, ainsi renouvelée le 23 avril 2008 en raison de l'évolution de sa situation personnelle, invoquait expressément ce fondement et qu'il appartenait audit préfet, avant de prendre sa décision, de prendre en considération ces nouveaux éléments qui avaient été ainsi portés à sa connaissance près de dix mois auparavant, quand bien même aucun élément humanitaire nouveau n'aurait été, selon lui, fourni ; que, ce faisant, le préfet a entaché son refus de séjour d'une erreur de droit ; que, par suite, il y a lieu d'annuler la décision du 27 février 2009 refusant à Mme A la délivrance d'un titre de séjour et, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire et désignant le pays de destination ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 dudit code : Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. ;

Considérant que le présent arrêt, qui annule l'arrêté du préfet de la Savoie du 27 février 2009, implique nécessairement, eu égard au motif sur lequel il se fonde, non la délivrance d'un titre de séjour, mais le réexamen par le préfet de la situation de Mme A au regard de son droit au séjour ; que, par suite, il y a lieu seulement d'enjoindre au préfet de la Savoie de réexaminer la situation de Mme A au regard de son droit au séjour, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, et, dans l'attente de ce réexamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ;

Considérant que Mme A a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à ses conclusions fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 25 juin 2009 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 27 février 2009 du préfet de la Savoie refusant à Mme A la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire et désignant le pays de destination est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au Préfet de la Savoie de réexaminer la situation de Mme A au regard de son droit au séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, et dans l'attente de ce rééxamen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Tahina A, au préfet de la Savoie et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Délibéré après l'audience du 19 octobre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

M. Segado et M. Levy Ben Cheton, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 9 novembre 2010.

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N° 09LY03021


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY03021
Date de la décision : 09/11/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : KHEDDAR

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-11-09;09ly03021 ?
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