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14/10/2010 | FRANCE | N°09LY02489

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 14 octobre 2010, 09LY02489


Vu la requête, enregistrée le 23 octobre 2009 au greffe de la Cour, présentée pour Mme Nadia A, domiciliée chez M. et Mme B, ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902750 du Tribunal administratif de Grenoble, du 22 septembre 2009, rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 18 mai 2009 portant refus de lui délivrer un certificat de résidence, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant l'Algérie comme pays de destination ;

2°) de prononcer l'annulation

des décisions attaquées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un t...

Vu la requête, enregistrée le 23 octobre 2009 au greffe de la Cour, présentée pour Mme Nadia A, domiciliée chez M. et Mme B, ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902750 du Tribunal administratif de Grenoble, du 22 septembre 2009, rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère en date du 18 mai 2009 portant refus de lui délivrer un certificat de résidence, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant l'Algérie comme pays de destination ;

2°) de prononcer l'annulation des décisions attaquées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale", sous astreinte de cent euros par jour de retard, passé le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, et, à défaut, sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de prendre une nouvelle décision sur sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de son conseil, en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative et des articles 37 et 75-1 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, la somme de 1 500 euros ;

Elle soutient que :

- la décision fixant le pays de renvoi ne comporte pas la mention de son fondement légal, à savoir l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non l'article L. 515-1 de ce même code ; le tribunal administratif a commis une erreur de droit car, si la décision faisant l'obligation de quitter le territoire pouvait être dépourvue de motivation spécifique, il n'en est pas de même de celle fixant le pays de destination ; cette décision méconnaît en outre les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

- elle n'a pas vécu en Algérie jusqu'à l'âge de cinquante ans, mais a séjourné auparavant en France où est née l'une de ses filles, française par le droit du sol ;

- ses deux parents vivaient en France lorsqu'elle y est revenue en 2001 et elle les y a soignés jusqu'à leurs décès en 2004 et 2005 ;

- elle a un frère et une soeur de nationalité française et une autre soeur qui vit régulièrement en France ;

- une de ses filles, mariée à un Français, vit en France ; que deux de ses enfants vivent en France et son autre fille, titulaire de la nationalité française, doit venir s'y installer ;

- le préfet, alors qu'il était informé de l'état de sa santé, à savoir un diabète de type 2, devait demander l'avis du médecin-inspecteur de santé publique ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 septembre 2010, présenté par le préfet de l'Isère qui conclut au rejet de la requête en se rapportant à ses écritures de première instance ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 15 décembre 2009, accordant l'aide juridictionnelle totale à Mme A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946, réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 septembre 2010 :

- le rapport de M. Raisson, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Monnier, rapporteur public ;

Considérant que Mme A, ressortissante algérienne née en 1951 et divorcée en 2007 de M. B, est entrée en France en septembre 2001, sous couvert d'un visa de courte durée, accompagnée de son fils Nabil, alors âgé de 26 ans ; qu'elle a immédiatement demandé à bénéficier de l'asile territorial, statut qui lui a été refusé par une décision ministérielle du 9 avril 2003, à la suite de laquelle le préfet de l'Isère a pris à son encontre une décision lui refusant un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; que, par un premier jugement en date du 25 novembre 2008, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté, pour tardiveté, la demande en date du 3 janvier 2006 par laquelle Mme A concluait à l'annulation de la décision ministérielle susmentionnée portant rejet de sa demande l'asile territorial ; que, par le même jugement, cette juridiction a rejeté au fond sa demande en annulation du refus de certificat de résidence subséquent ; que, par un deuxième jugement du même jour, ce tribunal a rejeté la demande en annulation de la décision par laquelle le préfet de l'Isère avait refusé de lui délivrer un certificat de résidence "algérien malade" au motif que le diabète de type 2 dont elle souffrait pouvait être traité dans son pays d'origine ; que, par un troisième jugement du même jour, il a annulé la décision implicite de rejet du préfet née de l'absence de réponse au courrier par lequel, le 27 juillet 2007, la requérante avait demandé un certificat de résidence "vie privée et familiale" et a enjoint au préfet de se prononcer sur cette demande ; que, le 9 décembre 2008, une nouvelle demande a été présentée sur le même fondement en faveur de Mme A ; que, par un arrêté du 18 mai 2009, le préfet de l'Isère a rejeté "la demande de délivrance de titre de séjour de Mme Nadia A" ; que, par un jugement du 22 septembre 2009, dont appel, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande en annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision refusant un certificat de résidence :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir d'ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

Considérant que, si Mme A soutient que, contrairement aux énonciations de l'arrêté préfectoral, son séjour en France serait antérieur à l'année 2001 parce que sa fille Noura est née en 1969 au Cannet (Alpes maritimes), il ressort des pièces du dossier qu'elle a vécu en Algérie postérieurement à cette date et elle n'apporte aucun élément quant à un éventuel séjour en France entre 1969 et 2001 ; que la circonstance qu'elle se soit occupée de ses parents, décédés en 2004 et 2005, ne peut utilement être invoquée à l'encontre des décisions préfectorales querellées, en date du 18 mai 2009 ; qu'elle n'apporte aucune information quant à la situation de ceux de ses frères et soeurs qui ne résideraient pas sur le territoire français ;

Considérant que, s'il est établi que son fils Nabil était, au jour de l'arrêté préfectoral litigieux, marié à une française et titulaire d'un certificat de résident de dix ans, il résulte des pièces même versées par Mme A au dossier que ce n'est que postérieurement à l'arrêté attaqué que sa fille Sihem est entrée en France ; qu'au jour de cet arrêté, ne résidaient donc en France qu'un de ses enfants ; qu'elle ne saurait ainsi être regardée comme ayant le centre de sa vie familiale en France ; que la décision du préfet lui refusant un certificat de résidence portant la mention "vie privée et familiale" ne méconnaissait ni l'article 6 - 5° de l'accord franco-algérien, ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que ce refus n'était pas davantage entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa situation personnelle ;

Sur la légalité de la décision faisant obligation de quitter le territoire :

Considérant qu'il est constant que tant la demande de certificat de résidence du 27 juillet 2007 que celle du 9 décembre 2008 ne sont pas fondées sur l'état de santé de Mme A ; que, dès lors, le moyen selon lequel, sachant qu'elle souffrait de diabète, le préfet aurait dû saisir le médecin-inspecteur de santé publique est inopérant ; que, par ailleurs, faute pour elle d'avoir fourni au préfet de nouvelles pièces remettant en cause le jugement précité du 25 novembre 2008, selon lequel elle pouvait bénéficier dans son pays d'origine du traitement médical que nécessitait son état de santé, Mme A ne saurait soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire serait contraire aux dispositions de l'article L. 511-4 10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant que la décision attaquée, en tant qu'elles fixe l'Algérie comme pays de destination, est suffisamment motivée en droit par le visa des dispositions de l'article L. 511-1, qui prévoient que la décision portant obligation de quitter le territoire français " fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire " ; que cette décision doit, par ailleurs, être regardée comme suffisamment motivée en fait par l'indication que l'intéressée est de nationalité algérienne et qu'elle pourra être reconduite d'office à la frontière du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays où elle établirait être légalement admissible ;

Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions, dont la décision fixant le pays de destination en cas d'éloignement forcé, par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; que, dès lors, l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre d'une décision fixant le pays de destination ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requérante n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble, a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions relatives à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de quelque somme que ce soit au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Nadia A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 23 septembre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président,

M. Raisson et Mme Besson-Ledey, premiers conseillers.

Lu en audience publique le 14 octobre 2010.

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N° 09LY02489


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY02489
Date de la décision : 14/10/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: M. Denis RAISSON
Rapporteur public ?: M. MONNIER
Avocat(s) : J. BORGES et M. ZAIEM

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-10-14;09ly02489 ?
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