La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/09/2010 | FRANCE | N°08LY00876

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 28 septembre 2010, 08LY00876


Vu la requête, enregistrée le 15 avril 2008, présentée pour Mme Nathalie A, domiciliée ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700521 du 5 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001 à 2003 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros

au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'inscripti...

Vu la requête, enregistrée le 15 avril 2008, présentée pour Mme Nathalie A, domiciliée ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700521 du 5 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001 à 2003 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées et des pénalités y afférentes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que l'inscription sur ses comptes ou ceux de ses enfants des revenus professionnels de son compagnon, M. B, ne pouvait pas modifier le redevable légal des impositions dues à raison de ces revenus ; que les conditions de mise en oeuvre d'une demande de justifications à peine de taxation d'office n'étaient pas réunies, l'administration ayant comparé les revenus qu'elle avait déclarés avec le montant total des mouvements créditeurs constatés sur ses comptes, ceux de ses enfants et son compte joint avec M. B ; que l'administration ne lui a donné aucune indication sur l'origine des renseignements qu'elle a exploités pour établir les impositions litigieuses ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 novembre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que les prestations familiales et les crédits portés sur le compte bancaire joint n'ont pas été imposés ; que la commission a émis un avis favorable au maintien des rehaussements en litige ce qui attribue la charge de la preuve à la requérante ; qu'aucun des crédits inexpliqués n'a été identifié comme provenant d'une activité professionnelle ; que la requérante, qui n'avait déclaré aucun revenu, a bénéficié d'encaissements de 52 713 euros, 141 604 euros et 38 923 euros au titre des années 2001, 2002 et 2003 et qu'elle n'a pas justifié de ces crédits pour des montants de 33 424 euros, 70 717 euros et 22 600 euros au titre des années 2001, 2002 et 2003 ; que l'administration fiscale était ainsi fondée à mettre en oeuvre la procédure prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales ; que les crédits inexpliqués figurant sur le compte joint n'ont été imposés qu'au nom de M. B et que ceux figurant sur les comptes des enfants, à la charge de la requérante, n'ont été imposés qu'au nom de cette dernière ; que la contribuable a été informée de l'origine et de la teneur des renseignements recueillis par l'administration ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 janvier 2009, présenté pour Mme A, qui maintient ses conclusions ;

Elle soutient en outre que l'administration ne lui a pas adressé la mise en demeure obligatoire prévue à l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales ; que les relevés bancaires détenus par l'administration devaient obligatoirement être communiqués à la contribuable, qui en était privée, préalablement à l'envoi de la demande de justifications ; que l'absence de cette communication a fait obstacle au déclenchement du délai de 60 jours qui lui était imparti pour répondre à la demande de justifications ; que les relevés bancaires n'ont pas été obtenus des établissements concernés mais de l'autorité judiciaire, ainsi qu'il résulte du rapport établi suite à l'examen contradictoire de situation fiscale personnelle, sans qu'elle soit informée de l'origine de cette communication ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 avril 2009, présenté pour le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui maintient ses conclusions ;

Il soutient que Mme A s'étant abstenue de répondre dans le délai qui lui était imparti à la demande de justifications qui lui a été adressée, elle pouvait faire l'objet d'une taxation d'office sans mise en demeure préalable ; que la requérante ne justifie pas avoir effectué des démarches pour obtenir communication des relevés bancaires utilisés par l'administration ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 mai 2009, présenté pour Mme A, qui maintient ses conclusions ;

Elle soutient en outre que l'insuffisance de la réponse d'un contribuable à une demande de justifications doit s'apprécier globalement ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 juillet 2009, présenté pour le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui maintient ses conclusions ;

Il soutient que la contribuable s'est abstenue de toute réponse sur les revenus taxés d'office et qu'elle ne peut donc pas se prévaloir de la jurisprudence du Tribunal administratif de Marseille concernant un contribuable qui avait apporté divers éléments de réponse à une demande de justifications ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 septembre 2009, présenté pour Mme A, qui maintient ses conclusions ;

Elle soutient qu'elle a répondu à la demande de justifications et que l'administration n'a pas respecté le délai complémentaire qui lui avait été accordé pour compléter sa réponse lors d'un entretien ; que ce n'est pas à sa demande que l'entretien prévu a été fixé par l'administration à une date postérieure à la proposition de rectification ;

Vu l'ordonnance en date du 1er mars 2010 fixant la clôture d'instruction au 2 avril 2010, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 mars 2010, présenté pour Mme A, qui maintient ses conclusions, par les moyens exposés dans ses précédents mémoires ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 avril 2010 et régularisé par courrier le 8 avril 2010, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, qui se borne à indiquer que le mémoire enregistré le 24 mars 2010 lui est parvenu le jour de la clôture de l'instruction ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 7 septembre 2010, présentée pour Mme A, qui informe la Cour qu'elle a obtenu, par un jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 16 juillet 2010, la décharge des cotisations supplémentaires de cotisations sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2001, 2002 et 2003 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 septembre 2010 :

- le rapport de M. Pourny, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Jourdan, rapporteur public ;

Considérant que Mme Nathalie A a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2001 à 2003 ; qu'elle conteste le jugement n° 070521 du 5 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie au titre de ces années ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction alors en vigueur : En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. (...) Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés. (...) Les demandes visées aux alinéas précédents doivent indiquer explicitement les points sur lesquels elles portent et fixer à l'intéressé, pour fournir sa réponse, un délai qui ne peut être inférieur au délai de trente jours prévu à l'article L. 11. , qu'aux termes de l'article L. 16 A du même livre : Les demandes d'éclaircissements et de justifications fixent au contribuable un délai de réponse qui ne peut être inférieur à deux mois. / Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite. et qu'aux termes de l'article L. 69 dudit livre : Sous réserve des dispositions particulières au mode de détermination des bénéfices industriels et commerciaux, des bénéfices agricoles et des bénéfices non commerciaux, sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16. ;

Considérant, en premier lieu, que Mme A n'a déclaré aucun revenu au titre des années 2001, 2002 et 2003 alors que le montant des crédits constatés sur les comptes bancaires dont elle disposait avec ses enfants, rattachés à son foyer fiscal, se sont élevés à 52 713 euros, 141 604 euros et 38 923 euros au titre de ces mêmes années, sans que cette discordance ne soit imputable à des transferts de compte à compte décelables à la lecture des relevés bancaires concernés ; que l'administration fiscale était ainsi fondée, en application des dispositions précitées, à demander à Mme A des justifications sur l'origine de ces crédits ; que si Mme A soutient que l'administration fiscale ne pouvait pas mettre en oeuvre cette procédure pour redresser le montant de ses revenus, alors qu'elle savait que ces crédits correspondaient à des revenus de l'activité industrielle et commerciale déclarée par son compagnon, la vérificatrice ne disposait d'aucun élément lui permettant de rattacher lesdits crédits à cette activité industrielle et commerciale ; que le moyen tiré de ce que la demande de justifications adressée à la requérante serait entachée d'un détournement de procédure doit par suite être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mme A a répondu à la demande de justifications du 28 septembre 2004, par une lettre du 26 novembre 2004 ; que cette lettre contenait des justifications suffisantes sur l'origine d'un crédit de 22 791,35 euros et l'indication que la contribuable avait pris contact avec les établissements bancaires concernés pour obtenir copie des chèques versés sur ses comptes assortie d'une demande de rendez-vous pour transmettre des justificatifs et évoquer le dossier ; qu'eu égard à son contenu, une telle lettre, qui présentait manifestement un caractère dilatoire, ne saurait être regardée comme une demande de délai supplémentaire afin de réunir des justifications sur les crédits dont l'origine restait indéterminée ; que le moyen tiré de ce que Mme A aurait été privée à tort d'un délai supplémentaire pour réunir les justificatifs nécessaires doit par suite être écarté ; que l'intéressée n'ayant pas demandé communication des relevés bancaires utilisés par l'administration fiscale pour établir les impositions en litige, elle n'est pas fondée à soutenir que l'absence de communication desdits relevés, qui ne saurait faire obstacle au déclenchement du délai qui lui était imparti pour répondre à la demande de justifications du 28 septembre 2004, entacherait d'irrégularité la procédure d'imposition ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il résulte de l'instruction que si Mme A a justifié par sa lettre du 26 novembre 2004 du caractère non imposable d'un crédit de 22 761,35 euros constaté sur l'un des comptes de son compagnon, elle n'a apporté aucun commencement de réponse à la demande de justifications du 28 septembre 2004 pour les crédits à raison desquels des justifications lui étaient demandées ; que, dès lors, la réponse de la contribuable étant assimilable à une absence de réponse, l'administration fiscale n'était pas tenue de lui adresser la mise en demeure prévue par les dispositions précitées de l'article L. 16 A du livre des procédures fiscales avant de procéder à la taxation d'office de ces autres crédits ;

Considérant, en quatrième lieu, qu'il incombe à l'administration, lorsqu'elle envisage de modifier les bases d'imposition d'un contribuable, d'informer celui-ci de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a pu obtenir auprès de tiers dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, afin qu'il soit mis à même de demander, avant la mise en recouvrement des impositions, que les pièces concernées soient mises à sa disposition ; que si Mme A ne conteste pas avoir été informée de la teneur des renseignements utilisés par l'administration pour établir les impositions en litige, elle soutient qu'elle n'a pas été informée de l'origine de ces renseignements, contenus dans des relevés bancaires que l'administration aurait obtenus auprès de l'autorité judiciaire ; qu'il ne résulte ni de la lettre en date du 3 septembre 2004, par laquelle la vérificatrice a informé Mme A qu'elle reprendrait contact avec elle après avoir obtenu ses relevés bancaires, ni de la demande de justifications du 28 septembre 2004, ni d'aucune autre pièce du dossier, que l'intéressée ait eu communication de l'origine des relevés bancaires utilisés pour établir les impositions en litige, que l'administration se les soit procurés auprès de l'autorité judiciaire ou directement auprès des banques concernées ; que, toutefois, eu égard à la précision des mentions figurant dans les annexes à la demande de justifications du 28 septembre 2004, indiquant, pour chaque compte concerné, les dates et les montants des crédits pour lesquels des justifications étaient demandés, Mme A ne peut être regardée comme ayant été privée, du seul fait de l'absence d'information sur les modalités d'obtention desdits relevés, de la possibilité d'en demander communication afin de présenter utilement sa défense dans le délai imparti ; que ce moyen doit par suite être écarté ;

Considérant, en dernier lieu, qu'en l'absence de toute demande de Mme A tendant à obtenir communication des relevés bancaires utilisés par l'administration pour établir les impositions en litige, cette dernière n'était pas tenue de procéder spontanément à la communication desdits relevés ; que le moyen tiré de ce qu'elle aurait méconnu les droits de la défense en ne procédant pas à cette communication ne peut dès lors être accueilli ;

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

Considérant que les impositions en litige procèdent de la taxation d'office, après avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, de crédits d'origine indéterminée constatés sur les comptes bancaires dont la requérante avait la disposition ; que, par suite, la charge de la preuve incombe à la contribuable en application de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales ;

Considérant que si Mme A soutient que l'administration fiscale ne pouvait pas imposer entre ses mains, en tant que revenus d'origine indéterminée, des revenus provenant de l'activité professionnelle de son compagnon, commettant ainsi une erreur sur l'identité du contribuable et une erreur sur la catégorie des revenus imposés, elle n'apporte aucun justificatif permettant de rattacher tout ou partie des crédits taxés d'office à l'activité de peintre en bâtiment et de couvreur exercée par son compagnon durant les années d'imposition en litige ; que, dès lors, ces moyens doivent être écartés ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande ; que les conclusions qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Nathalie A et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 7 septembre 2010 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Pourny et Segado, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 28 septembre 2010.

''

''

''

''

1

2

N° 08LY00876


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00876
Date de la décision : 28/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. François POURNY
Rapporteur public ?: Mme JOURDAN
Avocat(s) : CABINET CEJF- R. LABONNE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-09-28;08ly00876 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award