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23/09/2010 | FRANCE | N°08LY01311

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 23 septembre 2010, 08LY01311


Vu la requête, enregistrée le 6 juin 2008 par télécopie et régularisée par courrier le 9 juin, présentée pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, dont le siège est 100 avenue de Suffren à Paris (75015) ;

L'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement no 0607100 du 20 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon l'a condamné à verser une somme de 47 433 euros à Mme Angèle A, une somme de 2 000 euros à M. Raymond A et une somme de 1 093,05 euros, outre 364,35 euros au titre de l'indemnité forfaitaire à la caisse primaire

d'assurance maladie de Lyon en réparation des conséquences dommageables nées de...

Vu la requête, enregistrée le 6 juin 2008 par télécopie et régularisée par courrier le 9 juin, présentée pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, dont le siège est 100 avenue de Suffren à Paris (75015) ;

L'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement no 0607100 du 20 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon l'a condamné à verser une somme de 47 433 euros à Mme Angèle A, une somme de 2 000 euros à M. Raymond A et une somme de 1 093,05 euros, outre 364,35 euros au titre de l'indemnité forfaitaire à la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon en réparation des conséquences dommageables nées de la contamination transfusionnelle de Mme Angèle A par le virus de l'hépatite C ;

2°) à titre principal, de rejeter la demande des consorts A et les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon présentées devant le Tribunal administratif de Lyon ;

3°) à titre subsidiaire, de réformer le jugement attaqué en tant qu'il a alloué à Mme A la somme susmentionnée et de réduire cette dernière à de plus justes proportions ;

Il soutient que c'est à tort que les premiers juges ont regardé comme établi le lien de causalité entre les transfusions dont Mme A a fait l'objet en décembre 1969 et janvier 1970 à l'hôpital Edouard Herriot et la contamination de cette dernière par le virus de l'hépatite C ; que la victime a été exposée à des voies de contamination autres que la transfusion, notamment à la voie nosocomiale ; que les premiers juges ont fait un excessive appréciation des préjudices de la victime ; qu'ils se sont fondés sur un certificat médical, postérieur au rapport d'expertise, qui ne lui a pas été communiqué et qui n'a pas de caractère contradictoire ; que c'est à tort que le tribunal administratif a fortement majoré le taux d'incapacité permanente partielle de la victime ; qu'il appartient à la Cour d'ordonner une expertise si elle l'estime utile ;

Vu, enregistré le 18 mars 2010, le mémoire déposé pour M. et Mme A ; M. et Mme A demandent que la Cour :

- confirme la responsabilité de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG dans la contamination de Mme A par le VHC ;

- réforme le jugement de première instance en portant à 200 000 euros la somme réparant les atteintes de toute nature dans les conditions d'existence de Mme A, à 1 500 euros celle réparant son préjudice matériel et à 10 000 euros celle réparant le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence de M. A, ces sommes portant intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2010 ;

- condamne l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG à leur verser 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- au vu du rapport de l'expert, la contamination par les transfusions de 1969 et 1970 doit être retenue ;

- Mme A est fatiguée depuis 1969 ; c'est la fatigue qui a provoqué son syndrome dépressif et elle a dû cesser toute activité rémunérée à partir de 1984 ;

- une ITP depuis 1998 seulement n'a pas de sens ;

- Mme A est guérie de son cancer du sein et il n'y a pas lieu de réduire le taux de son IPP dont le Pr Trépot dit qu'il doit être de 60 % ;

Vu, enregistré le 22 juin 2010, le mémoire déposé pour l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG tendant à sa mise hors de cause ; il soutient que les dispositions de l'article 57 de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 étant entrées en vigueur, l'ONIAM lui est substitué dans la présente instance ;

Vu, enregistré le 23 juin 2010 par télécopie et régularisé le 28 juin 2010, le mémoire déposé pour l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX, DES AFFECTIONS IATROGENES ET DES INFECTIONS NOSOCOMIALES (ONIAM) qui conclut à ce que l'instruction soit prorogée afin qu'il puisse conclure au fond et à ce que la mise hors de cause de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG soit limitée à l'action des consorts A ; il soutient que s'il est substitué à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, c'est uniquement pour l'action des consorts A, notamment eu égard à l'avis du Conseil d'Etat n° 332716 du 22 janvier 2010 ;

Vu, enregistré le 24 juin 2010, le mémoire déposé pour M. et Mme A rédigé dans les mêmes termes que leur précédent mémoire et, en outre, ne s'opposant pas à un report de la clôture de l'instruction pour permettre à l'ONIAM de conclure au fond ;

Vu, enregistré le 3 août 2010 le mémoire déposé pour l'ONIAM tendant à ce que la Cour :

- juge que sa substitution à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG se limite aux demandes des consorts A initialement dirigées à l'encontre de cet établissement public ;

- ordonne le sursis à statuer dans la présente instance dans l'attente des conclusions de l'expertise judiciaire ordonnée en référé le 4 mai 2010 par le Tribunal administratif de Lyon ;

- à titre subsidiaire, statue ce que de droit sur l'origine post-transfusionnelle de la contamination, constate l'absence de consolidation de l'état de santé de Mme A et rejette les demandes relatives aux préjudices conditionnés par la consolidation, rejette les demandes de préjudice économique non justifiées, réduise les prétentions de Mme A, confirme le jugement en tant qu'il a accordé 2 000 euros à M. A, statue ce que de droit sur les dépens ;

Il soutient que :

- Mme A présentait d'autres facteurs de risque que la transfusion ;

- Mme A soutenant que son état s'est aggravé, une nouvelle expertise a été ordonnée et il convient de surseoir à statuer ;

- l'état de Mme A n'étant pas consolidé, le déficit fonctionnel permanent, le préjudice d'agrément et le préjudice professionnel ne peuvent être indemnisés ;

- les préjudices résultant du déficit fonctionnel temporaire et des souffrances endurées peuvent être évalués respectivement à une somme comprise entre 1 554 et 2 590 euros et à 1 840 euros ;

- le préjudice moral de M. A doit être maintenu à 2 000 euros ;

Vu, enregistré le 9 août 2010, le mémoire déposé pour M. et Mme A tendant à ce que la Cour rejette la demande de sursis à statuer qui les priverait du double degré de juridiction et faisant observer que consolidation et guérison sont deux notions différentes ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ;

Vu la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 et notamment son article 67 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 septembre 2010 :

- le rapport de Mme Serre, présidente ;

- les observations de Me Collomb, avocat de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, de Me Chemla, avocat de l'ONIAM et de Me Pollard, avocat de M. et Mme A ;

- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que Mme A, née en 1934 a été révélée séropositive à l'hépatite C en décembre 2000 ; que par la requête susvisée, l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG fait appel du jugement du 20 mars 2008 par lequel le Tribunal administratif de Lyon l'a déclaré responsable de la contamination de Mme A tandis que par la voie de l'appel incident M. et Mme A demandent l'augmentation de l'indemnisation allouée par les premiers juges ;

Sur la substitution de l'ONIAM à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG et sa portée :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique issu du I de l'article 67 de la loi susvisée du 17 décembre 2008 : Les victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l'hépatite C causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang réalisée sur les territoires auxquels s'applique le présent chapitre sont indemnisées par l'office mentionné à l'article L. 1142-22 dans les conditions prévues à la seconde phrase du troisième alinéa de l'article L. 3122-1, aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3122-2, au premier alinéa de l'article L. 3122-3 et à l'article L. 3122-4... ; qu'aux termes du IV du même article 67 de la loi susvisée du 17 décembre 2008 : A compter de la date d'entrée en vigueur du présent article, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatogènes et des infections nosocomiales se substitue à l'Etablissement français du sang dans les contentieux en cours au titre des préjudices mentionnés à l'article L. 1221-14 du code de la santé publique n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable. ; qu'il est constant que ces dispositions de l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008 sont entrées en vigueur le 1er juin 2010 ; que l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX, DES AFFECTIONS IATROGENES ET DES INFECTIONS NOSOCOMIALES (ONIAM) se trouve donc substitué à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG dans la présente instance relative à l'indemnisation du préjudice résultant de la contamination de Mme A ;

Considérant toutefois que l'ONIAM fait valoir que le recours des caisses de sécurité sociale subrogées dans les droits d'une victime d'un dommage organisé par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, s'exerce à l'encontre des auteurs responsables de l'accident survenu à la victime et ne peut être exercé contre l'ONIAM dès lors qu'il prend en charge la réparation de ce dommage au titre de la solidarité nationale ;

Considérant qu'aux termes de l'article 102 de la loi susvisée du 4 mars 2002 : En cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Le doute profite au demandeur. ; que ces dispositions instituent un régime de présomption de responsabilité ; qu'ainsi les préjudices résultant de la contamination par le virus de l'hépatite C du fait d'une transfusion sanguine sont indemnisés lorsque l'administration est déclarée responsable du fait de la fourniture d'un sang qui a pu en être à l'origine ;

Considérant par ailleurs que si le premier alinéa de l'article L. 1142-22 du code de la santé publique définit L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales [comme] ... un établissement public à caractère administratif de l'Etat, ... chargé de l'indemnisation au titre de la solidarité nationale, dans les conditions définies au II de l'article L. 1142-1, à l'article L. 1142-1-1 et à l'article L. 1142-17, des dommages occasionnés par la survenue d'un accident médical, d'une affection iatrogène ou d'une infection nosocomiale ainsi que des indemnisations qui lui incombent, le cas échéant, en application des articles L. 1142-15 et L. 1142-18 , les deux alinéas suivants disposent qu'il ... est également chargé par diverses lois successives de la réparation ou de l'indemnisation des victimes de divers dommages qui ne relèvent pas tous explicitement ou nécessairement de la solidarité nationale ;

Considérant ainsi que, lorsqu'il se trouve substitué à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG dont seule, jusqu'alors, la responsabilité pouvait être recherchée par les victimes atteintes d'une hépatite C contractée par voie transfusionnelle, l'ONIAM ne se présente pas en qualité de payeur au titre de la solidarité nationale, mais comme responsable de la contamination ; qu'il n'est donc pas fondé à soutenir que l'action subrogatoire de la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon serait irrecevable à son encontre ; que la circonstance que les dispositions de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique prévoient dans le cadre de la procédure amiable qui est mise en place par l'article 67 de la loi susvisée du 17 décembre 2008 que l'offre d'indemnisation est faite à la victime dans les conditions fixées aux deuxième, troisième et cinquième alinéas de l'article L. 1142-17 , c'est-à-dire en tenant compte des prestations de la caisse dont elle a bénéficié, est sans incidence sur les droits de la caisse eux-mêmes et ne saurait en tout état de cause réduire ses droits dans les instances en cours où l'ONIAM est légalement substitué à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG ;

Sur la responsabilité :

Considérant qu'il résulte des dispositions susrappelées de l'article 102 de la loi susvisée du 4 mars 2002 qu'il appartient au demandeur, non seulement de faire état d'une éventualité selon laquelle sa contamination par le virus de l'hépatite C provient d'une transfusion, mais d'apporter un faisceau d'éléments conférant à cette hypothèse, compte tenu de toutes les données disponibles, un degré suffisamment élevé de vraisemblance ; que si tel est le cas, la charge de la preuve contraire repose sur le défendeur ; que ce n'est qu'au stade où le juge, au vu des éléments produits successivement par ces parties, forme sa conviction que le doute profite au demandeur ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le Tribunal de grande instance de Lyon, que Mme A, hospitalisée à l'hôpital Edouard Herriot à Lyon, a subi le 4 décembre 1969 une mammectomie avec curage ganglionnaire et le 22 janvier 1970 une hystérectomie subtotale conservatrice ; que lors de ces deux interventions elle a été transfusée avec des produits sanguins élaborés et fournis par le centre de transfusion sanguine de Lyon aux droits et obligations duquel l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, puis l'ONIAM sont substitués ; que Mme A s'est révélée séropositive au virus de l'hépatite C en décembre 2000 ; qu'en raison de l'ancienneté des faits aucune enquête transfusionnelle n'a pu être menée ; que selon l'expert les transfusions litigieuses sont l'origine la plus probable de la contamination de la victime ; qu'il a ainsi noté que le fait qu'elle soit porteuse du génotype 1 et que les résultats d'un bilan biologique en date du 28 janvier 1970, révèlent une augmentation des transaminases, accrédite, en l'absence d'autre cause de cytolyse hépatique évidente, l'hypothèse d'une hépatite virale C contractée lors de la transfusion pratiquée en décembre 1969 ; que si l'expert a également fait état d'autres possibilités de contamination, notamment par voie nosocomiale, il a toutefois précisé que l'origine transfusionnelle demeurait la plus vraisemblable ; que dans ces conditions c'est à bon droit que le tribunal administratif a estimé que Mme A apportait un faisceau d'éléments conférant un degré suffisamment élevé de vraisemblance à l'hypothèse selon laquelle l'introduction du virus de l'hépatite C dans son organisme avait pour origine les transfusions incriminées ; que le requérant, qui fait état de la diversité des sources possibles d'infection sans fournir aucun élément précis, ne démontre pas que les produits litigieux ne sont pas à l'origine de la contamination de Mme A ; qu'il n'est, par suite, pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont regardé comme établi le lien de causalité entre les transfusions dont Mme A a fait l'objet et sa contamination et l'ont condamné à réparer les conséquences dommageables de celle-ci ;

Sur l'évaluation du préjudice :

En ce qui concerne la demande de sursis à statuer formulée par l'ONIAM :

Considérant que la Cour est saisie en appel du jugement du 20 mars 2008 du Tribunal administratif de Lyon ; qu'il lui appartient de statuer sur la présente requête et d'évaluer le montant des réparations à la date de sa décision au vu des éléments dont elle dispose et établis à cette date, ce sans préjudice d'éléments nouveaux qu'une expertise postérieure pourrait révéler et qui pourraient faire l'objet d'une nouvelle demande devant le tribunal administratif ; qu'ainsi la circonstance que le juge des référés du Tribunal ait ordonné, le 4 mai 2010, une nouvelle expertise afin notamment de décrire l'évolution de l'état de Mme A et de dire si elle est en lien avec l'infection par le virus de l'hépatite C dont elle est atteinte, est sans incidence sur le déroulement de la présente instance ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère patrimonial :

Quant aux dépenses de santé :

Considérant que le requérant ne conteste pas que la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon a exposé une somme de 1093,05 euros, allouée à cette dernière par le jugement attaqué, pour la prise en charge de l'affection hépatique de son assurée sociale ;

Quant aux autres dépenses :

Considérant que le requérant ne conteste pas que Mme A a exposé une somme de 933 euros, allouée à cette dernière par le jugement attaqué, au titre des frais d'assistance pendant les opérations d'expertise et de communication d'un dossier médical ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère personnel de Mme A :

Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expertise ordonnée par le Tribunal de grande instance de Lyon, que Mme A restait atteinte au jour de l'expertise d'une hépatite C chronique d'activité modérée associée à une légère fibrose ; que l'intéressée a été contrainte de subir un traitement antiviral qui a engendré des effets secondaires, notamment un prurit intense, sans parvenir à éradiquer le virus de son organisme, et une biopsie hépatique ; que l'expert a souligné l'impossibilité à la date de l'expertise d'obtenir une guérison compte-tenu des graves antécédents dépressifs de la victime qui constituent une contre-indication à certains traitements par antiviraux ; qu'il a évalué à 2 sur une échelle de 7 les souffrances endurées, a qualifié les souffrances morales et psychologiques de modérées, a retenu l'existence d'un préjudice d'agrément, a fixé à 10 % l'incapacité temporaire partielle liée à l'hépatite C entre 1998 et 2004 et a fixé à 7 % le taux d'incapacité permanente partielle imputable à cette même affection ; que la victime qui doit s'astreindre à une surveillance médicale régulière, éprouve des craintes légitimes quant à l'évolution de son état de santé et subit des troubles de toute nature dans les conditions d'existence en raison de la contamination virale ; que c'est à bon droit que les premiers juges ont décidé que le taux d'incapacité permanente partielle proposé par l'expert devait être fortement majoré compte tenu de ce que Mme A produisait un certificat médical d'un professeur d'un service d'hépatologie en date du 11 août 2005 qui attestait d'une aggravation de l'hépatite C et notamment de l'apparition d'une cirrhose ; que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur ce certificat médical dès lors qu'en admettant même qu'il ne lui ait pas été communiqué, il a nécessairement eu connaissance dudit certificat dont l'essentiel était reproduit dans la demande de Mme A et dans son mémoire ultérieur ; que par ailleurs cette pièce peut être retenue à titre d'information par le juge administratif dans la mesure où elle a été versée au dossier et soumise, de ce fait, au débat contradictoire des parties ; qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'expertise, que les premiers juges ont fait une juste appréciation de l'ensemble des préjudices à caractère personnel de Mme A en lui en allouant une somme de 46 500 euros ;

Sur les préjudices à caractère personnel de M. A :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le Tribunal a justement apprécié le préjudice résultant des troubles de toute nature dans les conditions d'existence de M. A du fait de la contamination virale de son épouse en lui allouant une somme de 2 000 euros ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG auquel est substitué l'ONIAM et les conclusions incidentes de M. et Mme A doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de condamner l'ONIAM à verser à M. et Mme A la somme qu'ils demandent au titre des frais qu'ils ont exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG et les conclusions incidentes de M. et Mme A sont rejetées.

Article 2 : L'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX, DES AFFECTIONS IATROGENES ET DES INFECTIONS NOSOCOMIALES (ONIAM) est substitué à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG dans les condamnations prononcées par les articles 1, 2 et 3 du jugement no 0607100 du 20 mars 2008 du Tribunal administratif de Lyon.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'ETABLISSEMENT FRANÇAIS DU SANG, à l'OFFICE NATIONAL D'INDEMNISATION DES ACCIDENTS MEDICAUX, DES AFFECTIONS IATROGENES ET DES INFECTIONS NOSOCOMIALES, à M. et Mme A et à la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon.

Délibéré après l'audience du 2 septembre 2010 à laquelle siégeaient :

Mme Serre, présidente de chambre,

MM. Picard et Stillmunkes, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 23 septembre 2010.

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No 08LY01311


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY01311
Date de la décision : 23/09/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01 RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE. RESPONSABILITÉ EN RAISON DES DIFFÉRENTES ACTIVITÉS DES SERVICES PUBLICS. SERVICE PUBLIC DE SANTÉ. - RESPONSABILITÉ EN MATIÈRE DE TRANSFUSION SANGUINE. SUBSTITUTION DE L'ONIAM À L'EFS DANS LES CONTENTIEUX EN COURS EN APPLICATION DU IV DE L'ARTICLE 67 DE LA LOI N° 2008-1330 DU 17 DÉCEMBRE 2008. LIMITATION DES OBLIGATIONS DE L'ONIAM À CELLES QUI SONT CELLES DE LA SOLIDARITÉ NATIONALE VIS-À-VIS DES VICTIMES - ABSENCE.

60-02-01 Les dispositions de l'article 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002


Composition du Tribunal
Président : Mme SERRE
Rapporteur ?: Mme Claire SERRE
Rapporteur public ?: Mme MARGINEAN-FAURE
Avocat(s) : CLAPOT et LETTAT AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-09-23;08ly01311 ?
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