Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 5 mai 2008 et 1er décembre 2008, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND ;
Le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement 0700190 du 19 février 2008 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand l'a condamné à verser à Mlle Carole A une indemnité de 70 750 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier une somme de 2 256,71 euros en réparation des conséquences dommageables du traitement d'oxygénothérapie dont elle a fait l'objet dans les suites de sa naissance le 1er avril 1970 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mlle Carole A devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;
Il soutient que c'est à tort que le Tribunal lui a imputé une faute dans la mise en oeuvre du traitement par oxygénothérapie alors qu'à l'époque il n'existait aucun consensus ni protocole relatif à l'oxygénothérapie et à ses effets sur la rétinopathie, les premiers travaux n'ayant été publiés qu'en 1980 et qu'un consensus sur la prise en charge des nouveau-nés remonte à la fin des années 1980 ; que compte tenu de la très grande prématurité de l'enfant, d'épisodes de cyanose, dont l'existence est attestée du fait de la réalisation de radiographies le 3 avril, et de difficultés respiratoires notées le 22 avril, l'oxygénothérapie était parfaitement appropriée ; qu'à tout le moins le Tribunal aurait dû ordonner une nouvelle expertise ; qu'au surplus l'oxygénothérapie n'est pas la cause exclusive de la rétinopathie du nouveau-né et qu'il n'y a pas de lien de causalité direct et certain entre les séquelles et le traitement administré ; que subsidiairement, il n'y aurait eu que perte de chance d'éviter la perte d'acuité visuelle ; qu'une partie des préjudices ne comporte aucun lien avec la rétinopathie mais s'explique par d'autres affections ; que les indemnités sont en toute hypothèse excessives ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2009, présenté pour Mlle A qui conclut au rejet de la requête, par la voie de l'appel incident demande que le centre hospitalier de Clermont-Ferrand soit condamné à lui payer 179 200 euros à titre de dommages et intérêts provisionnels et conclut à ce qu'une somme de 1 600 euros soit mise à la charge du centre hospitalier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par les moyens que les fautes du centre hospitalier ressortent des termes mêmes du rapport d'expertise, que l'administration à titre systématique d'une oxygénothérapie n'était pas justifiée en l'absence de signe évocateur d'une maladie respiratoire, que la valeur de la pression artérielle en oxygène n'a pas été recherchée, que le rapport que produit le centre hospitalier n'a pas été établi de manière contradictoire, que sa perte progressive de la vue est en lien avec la rétinopathie et son état évolutif ;
Vu le mémoire, enregistré le 8 avril 2010, présenté pour le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et par les motifs en outre que, c'est à tort que le Tribunal a retenu un taux d'IPP de 38 % alors que l'expert l'avait évalué à 29 % ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juillet 2010 :
- le rapport de Mme Verley-Cheynel, président-assesseur ;
- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public;
Considérant que Mlle Carole A qui, née le 1er avril 1970, a été transférée le même jour au service de néonatologie de l'Hôtel-Dieu de Clermont-Ferrand en raison de sa prématurité au terme de 28 semaines, a mis en cause la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE CLERMONT-FERRAND, dont dépend cet établissement, en raison des séquelles de rétinopathie qu'elle présente et qu'elle impute aux soins qui lui y ont été administrés entre le 2 avril et 15 juin 1970, date de sa sortie ; que le centre hospitalier universitaire fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif l'a condamné, pour faute, à indemniser le préjudice de Mlle A ; que cette dernière, par la voie de l'appel incident, conclut à la réévaluation des indemnités, qu'elle estime insuffisantes, qui lui ont été allouées par les premiers juges ;
Considérant que s'il est constant que la rétinopathie du prématuré dont est affectée Mlle A est susceptible d'être en lien avec l'oxygénothérapie dont elle a fait l'objet dans les jours qui ont suivi sa naissance, l'état du dossier ne permet pas de se prononcer avec certitude sur l'indication et le suivi du traitement dont elle a fait l'objet au regard tant des connaissances scientifiques de l'époque que des moyens matériels dont disposait alors l'établissement hospitalier, compte tenu de l'extrême prématurité qu'elle présentait ; que le dossier ne permet pas non plus de statuer sur l'étendue éventuelle des préjudices en lien avec la prise en charge hospitalière ; qu'il y a lieu, par suite, avant de statuer sur les conclusions dont la Cour est saisie, de procéder à une nouvelle expertise médicale aux fins précisées ci-après ;
DÉCIDE :
Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la requête du CENTRE HOSPITALIER DE CLERMONT-FERRAND et les conclusions incidentes de Mlle A, procédé à une expertise confiée à deux médecins aux fins de :
1°) décrire l'état de Mlle Carole A lors de sa prise en charge par le CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND le 1er avril 1970 et préciser la nature des soins et examens qui ont été pratiqués lors de son hospitalisation à l'Hôtel-Dieu.
2°) déterminer si les soins et traitements entrepris étaient adaptés à son état.
3°) réunir tous les éléments devant permettre de déterminer si, au moment précis des faits, les soins administrés étaient conformes aux règles de l'art admises à l'époque, compte tenu des connaissances scientifiques et des moyens matériels dont pouvait disposer l'établissement à cette date exacte.
4°) se prononcer sur l'origine de l'état actuel de Mlle A et préciser si, compte tenu de son état général, une autre prise en charge adaptée aurait été possible à l'époque des faits et de nature à éviter la survenance de la rétinopathie ou à en limiter les conséquences pour l'intéressée. Dans l'affirmative d'évaluer, le cas échéant, la perte de chance que l'absence de soins adaptés a entraîné pour l'intéressée d'échapper à l'aggravation de son état de santé.
5°) décrire la nature et l'étendue des séquelles que présente Mlle A en lien avec la prise en charge hospitalière. De déterminer, la date de consolidation de son état, la durée de l'incapacité temporaire totale, le taux de l'incapacité permanente partielle, de préciser l'importance des troubles dans les conditions d'existence et de déterminer l'importance des souffrances endurées, des préjudices esthétique et d'agrément.
6°) faire toutes constatations utiles.
Article 2 : Pour l'accomplissement de leur mission les experts convoqueront les parties, examineront Mlle A, se feront remettre l'ensemble de ses dossiers médicaux et tous les documents utiles à l'accomplissement de leur mission, notamment l'expertise prescrite par le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand et pourront entendre tous sachants.
Article 3 : Les deux experts spécialisés en ophtalmologie d'une part et en réanimation néonatale d'autre part, seront désignés par le président de la Cour. Ils accompliront leur mission dans les conditions prévues par les articles R.621-2 et R. 621-14 du code de justice administrative. Le rapport d'expertise sera déposé dans un délai de quatre mois suivant la prestation de serment.
Article 4 : Tous droits, moyens et conclusions des parties sur lesquels il n'est pas statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE CLERMONT-FERRAND, à Mlle Carole A et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Allier.
Délibéré après l'audience du 1er juillet 2010 à laquelle siégeaient :
Mme Serre, présidente de chambre,
Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,
M. Picard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 22 juillet 2010.
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N° 08LY01027