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24/06/2010 | FRANCE | N°09LY02220

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 24 juin 2010, 09LY02220


Vu la requête, enregistrée le 21 septembre 2009, présentée pour M. Dézidériu-Romulus A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902648, en date du 7 juillet 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Loire du 8 janvier 2009 portant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter l

e territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ...

Vu la requête, enregistrée le 21 septembre 2009, présentée pour M. Dézidériu-Romulus A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0902648, en date du 7 juillet 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Loire du 8 janvier 2009 portant obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit à l'expiration de ce délai, à défaut pour lui d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire de transmettre son entier dossier ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations et des l'article L. 121-1 et L. 511-1 du code de l'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile ; que la décision susmentionnée viole encore les dispositions de la directive n° 2004/38/CE du Parlement Européen et du Conseil du 29 avril 2004 et les dispositions du 5ème alinéa de l'article 1.1 de la circulaire n° NOR INT/D/06/00115/C du 22 décembre 2006 relative aux modalités d'admission au séjour et d'éloignement des ressortissants roumains et bulgares à partir du 1er janvier 2007 ; que la décision contestée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations des article 3-1, 9-1 et 10 de la convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 mai 2010, présenté par le préfet de la Loire qui conclut au rejet de la requête ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 mai 2010, présenté pour M. A qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;

Vu la directive n° 2004/38/CE du Parlement Européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative aux droits des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, et notamment son article 24 ;

Vu la circulaire n° NOR INT/D/06/00115/C du 22 décembre 2006 relative aux modalités d'admission au séjour et d'éloignement des ressortissants roumains et bulgares à partir du 1er janvier 2007 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2010 :

- le rapport de Mme Serre, présidente ;

- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;

Considérant que par la requête susvisée, M. A fait appel du jugement n° 0902648, en date du 7 juillet 2009, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 8 janvier 2009 par lesquelles le préfet de la Loire lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination vers lequel il serait reconduit ;

Sur les conclusions tendant à la transmission du dossier :

Considérant qu'il appartient au juge de prendre les mesures d'instruction qu'il estime utile à la solution du litige dont il est saisi ; que les conclusions de M. A tendant à ce que le préfet soit enjoint de transmettre son entier dossier sont donc irrecevables ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : I - L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa (...). La même autorité peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse à quitter le territoire français lorsqu'elle constate qu'il ne justifie plus d'aucun droit au séjour tel que prévu par l'article L. 121-1 (...) , qu'aux termes de l'article L. 121-1 du même code : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : (...) 2°) S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie (...) ; et qu'aux termes de l'article R. 121-4 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : ... L'assurance maladie mentionnée à l'article L. 121-1 doit couvrir les prestations prévues aux articles L. 321-1 et L. 331-2 du code de la sécurité sociale. / Lorsqu'il est exigé, le caractère suffisant des ressources est apprécié en tenant compte de la situation personnelle de l'intéressé. En aucun cas, le montant exigé ne peut excéder le montant du revenu minimum d'insertion mentionné à l'article L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles ou, si l'intéressé remplit les conditions d'âge pour l'obtenir, au montant de l'allocation de solidarité aux personnes âgées mentionnée à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale. / La charge pour le système d'assistance sociale que peut constituer le ressortissant mentionné à l'article L. 121-1 est évaluée en prenant notamment en compte le montant des prestations sociales non contributives qui lui ont été accordées, la durée de ses difficultés et de son séjour (...) ;

Considérant en premier lieu qu'il résulte de ces dispositions combinées que l'autorité administrative peut, sans avoir été saisie au préalable d'une demande de titre de séjour par le ressortissant communautaire qui n'est pas dans l'obligation d'en posséder un pour séjourner en France, prendre à son encontre une décision l'obligeant à quitter le territoire français dès lors qu'elle constate qu'il ne remplit aucune des conditions énumérées à l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, le moyen, soulevé par le requérant, tiré de l'impossibilité, pour l'autorité préfectorale, de prendre, à l'encontre d'un ressortissant communautaire, une décision portant obligation de quitter le territoire français indépendante de toute décision sur son séjour, doit être écarté ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure administrative et contentieuse auxquelles sont soumises l'intervention et l'exécution des décisions par lesquelles l'autorité administrative signifie à l'étranger l'obligation dans laquelle il se trouve de quitter le territoire français ; que, dès lors, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration, qui fixe les règles générales de procédure applicables aux décisions devant être motivées en vertu de la loi du 11 juillet 1979, ne saurait être utilement invoqué par M. A à l'encontre de l'arrêté litigieux du 8 janvier 2009 qui, contrairement à ce qu'il soutient, porte uniquement sur l'obligation pour lui de quitter le territoire français et ne comporte pas de refus de séjour ;

Considérant, en troisième lieu, que la décision litigieuse indique que le requérant déclare être entré en France le 10 juillet 2008, constate qu'aucune pièce du dossier ni aucune information portée à la connaissance de l'administration par l'intéressé ne permet de démontrer qu'il entre dans une catégorie ouvrant droit au maintien au séjour au-delà de trois mois, précise que compte tenu de la date récente de l'entrée de M. A en France, de ce qu'il ne démontre pas être dépourvu de tout lien dans son pays d'origine, où il a vécu de façon continue, la décision qui lui est opposée ne porte pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et observe que M. A n'établit pas être exposé à de graves menaces en cas de retour dans son pays d'origine ; qu'ainsi, la décision susmentionnée comporte l'énoncé de suffisamment de circonstances de fait propres à permettre aux juges d'apprécier la situation personnelle de l'intéressé ; qu'en tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de la Loire n'aurait pas procédé à un examen suffisant de la situation personnelle de M. A ;

Considérant, en quatrième lieu, que d'une part, si M. A soutient que la décision querellée serait intervenue en l'absence de connaissance, par le préfet de la Loire, de la date de son entrée sur le territoire français, le préfet de la Loire produit un procès-verbal d'audition en date du 17 juillet 2008 signé par l'intéressé, établi en présence d'un interprète en langue roumaine, dans lequel M. A reconnaît être entré en France le 10 juillet 2008 ; qu'il n'est ni allégué ni établi qu'il aurait, postérieurement à cette date, quitté le territoire français ; qu'ainsi, M. A n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait retenu à tort qu'il s'était maintenu sur le territoire français depuis plus de trois mois ; que, d'autre part, le requérant ne produit aucune pièce de nature à établir qu'il dispose de ressources suffisantes et d' une assurance maladie ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir qu'en ne démontrant pas qu'il serait devenu une charge déraisonnable pour le système d'assurance sociale français, le préfet aurait commis une erreur d'appréciation ; que, dès lors, il résulte de ce qui précède que le préfet de la Loire pouvait légalement obliger M. A à quitter le territoire en application des dispositions combinées des articles L. 121-1, L. 121-4 et L. 511-1 I du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant en cinquième lieu que le préfet de la Loire, qui a procédé à l'examen préalable de la vie privée et familiale de M. A avant de décider de l'obliger à quitter le territoire, n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant aux conséquences de cette mesure sur la situation personnelle de celui-ci, eu égard à la faible durée et aux conditions de son séjour en France ; que si M. A et sa compagne, avec laquelle il s'est marié le 18 février 2009, ont ensemble deux enfants, le premier né le 16 décembre 2003 en Roumanie et le second né en France le 12 août 2005, il ne ressort pas des pièces du dossier que sa compagne soit en situation régulière en France, ni que le couple soit particulièrement bien intégré en France et dépourvu d'attaches dans son pays d'origine ; que dès lors le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant, ne saurait être accueilli ;

Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes du point 1 de l'article 10 de la convention des Nations Unies sur les droits de l'enfant susvisée : Conformément à l'obligation incombant aux Etats parties en vertu du paragraphe 1 de l'article 9, toute demande faite par un enfant ou ses parents en vue d'entrer dans un Etat partie ou de le quitter aux fins de réunification familiale est considérée par les Etats parties dans un esprit positif, avec humanité et diligence. Les Etats parties veillent en outre à ce que la présentation d'une telle demande n'entraîne pas de conséquences fâcheuses pour les auteurs de la demande et les membres de leur famille ; que M. A ne saurait utilement se prévaloir de ces stipulations à l'encontre de la décision litigieuse portant, pour lui, obligation de quitter le territoire français dans la mesure où la décision susmentionnée n'est pas au nombre des demandes de quitter le territoire d'un Etat partie au sens des stipulations précitées ;

Considérant enfin, que, comme l'a relevé le tribunal administratif, la directive 2004/38/CE du Parlement et du Conseil du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres, a été transposée par l'article 23 de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration et le décret n° 2007-371 du 21 mars 2007, repris aux articles L. 121-1 et suivants et R. 121-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le requérant, qui ne soutient pas que ces dispositions seraient incompatibles avec la directive 2004/38/CE, ne saurait utilement invoquer directement cette directive à l'encontre d'une décision individuelle ; que, d'autre part, M. A ne saurait utilement se prévaloir de la méconnaissance, par la décision attaquée, des dispositions du 5ème alinéa de l'article 1.1 et de l'article 1.2.2 de la circulaire du 22 décembre 2006 susvisée, ses dispositions ayant été annulées par une décision n° 301813, 307022 du 19 mai 2008 du Conseil d'Etat statuant au contentieux, et les autres de ses prévisions étant dépourvues de toute valeur réglementaire ;

Sur la légalité de la décision distincte fixant le pays de destination :

Considérant que M. A ne soulève aucun moyen à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision susvisée ; que, par suite, elles doivent être rejetées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ; que ses conclusions tendant à la mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Dézidériu-Romulus A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet de la Loire.

Délibéré après l'audience du 3 juin 2010 à laquelle siégeaient :

Mme Serre, présidente de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Picard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 juin 2010.

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N° 09LY02220


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY02220
Date de la décision : 24/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme SERRE
Rapporteur ?: Mme Claire SERRE
Rapporteur public ?: Mme MARGINEAN-FAURE
Avocat(s) : AUDREY LEREIN ET CLEMENTINE FRANCES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-06-24;09ly02220 ?
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