Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 25 juin 2008 et 28 septembre 2009, présentés pour le CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE ;
Le CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0505413 du 25 avril 2008 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à verser à Mme Corinne A une indemnité de 13 500 euros en réparation des conséquences dommageables de l'intervention qu'elle a subie le 6 octobre 2000 ;
2°) de rejeter la demande présentée par Mme Corinne A devant le Tribunal administratif de Grenoble ;
Il soutient que le Tribunal a commis une erreur de qualification juridique des faits en estimant que la perforation révélait, en l'absence d'éléments de complication, une maladresse fautive, alors qu'il s'agissait selon le rapport d'expertise d'un aléa thérapeutique ; que l'équipe soignante n'a pas commis la moindre faute, ni même la moindre maladresse ; que les conclusions de l'expert n'ont été contredites par aucune pièce du dossier ; que les premiers juges ont méconnu les conclusions de l'expert en retenant l'hypothèse de la pose du trocart comme une certitude alors que l'expert l'avait écartée ; que subsidiairement, le Tribunal a fait une appréciation exagérée des préjudices, ses troubles digestifs étant mineurs, son état dépressif ne pouvant être attribué en totalité à la perforation alors qu'il parait plus vraisemblablement en lien avec les problèmes de maternité et ses cicatrices étant inévitables compte tenu des opérations que son état appelait ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 février 2010, présenté pour Mme A qui conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à ce que la somme de 13 500 euros mise à la charge du CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE soit portée à la somme de 35 000 euros ainsi qu'à la condamnation du centre hospitalier à lui verser une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; elle soutient que l'analyse de l'expert était tout à fait contestable alors qu'une maladresse technique fautive a été commise, l'exploration de l'intégralité du grêle n'ayant pas été réalisée ainsi que l'ont relevé les praticiens qu'elle a cités ; que le déroulement du grêle devait, à plus forte raison, être réalisé dans le cas d'une ré intervention dans lequel les risques de lésions sont multipliés ; que le déficit fonctionnel permanent aurait dû être indemnisé, que le préjudice esthétique et les souffrances physiques ont été minorés ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2010 :
- le rapport de Mme Verley-Cheynel, président-assesseur ;
- les observations de Me Demailly, avocat du CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE ;
- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;
La parole ayant été de nouveau donnée aux parties présentes ;
Considérant que Mme Corinne A, alors âgée de 35 ans, qui souffrait de douleurs abdominales persistantes dans les suites d'une salpingectomie pratiquée six jours plus tôt à l'hôpital de Voiron, en raison d'une grossesse extra-utérine, a été admise le 3 octobre 2000 au CENTRE HOSPITALIER UNIVERSITAIRE DE GRENOBLE où une intervention de cure d'un abcès pelvien postopératoire a été réalisée le 6 octobre ; qu'au lendemain, la patiente a présenté un tableau septique aigu avec un écoulement abondant par la lame de drainage, imposant une reprise opératoire laquelle a été immédiatement effectuée dans le service de chirurgie digestive et a conduit à la découverte d'une perforation de l'intestin grêle ; que Mme A qui, du fait de cette complication, a dû notamment subir une iléostomie jusqu'au 27 octobre suivant et conserve une incapacité permanente partielle de 2 %, a recherché la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE ; que ce dernier fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à réparer le préjudice de Mme A ; que, par la voie de l'appel incident, l'intéressée conclut à l'augmentation des sommes, qu'elle estime insuffisantes, qui lui ont été accordées en réparation ;
Sur la responsabilité :
Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'intervention pratiquée le 6 octobre 2000 a été entamée initialement par voie coelioscopique avant d'être convertie en laparotomie compte tenu des adhérences importantes au niveau de la zone opératoire et de l'aspect inflammatoire du colon sigmoïde, le chirurgien gynécologue faisant en outre appel à un chirurgien digestif pour intervenir à ses côtés aux fins de laver et drainer la cavité péritonéale ; que s'il n'est pas contesté que la plaie de l'intestin grêle est le fait de l'intervention par coelioscopie, il résulte du rapport de l'expertise ordonnée par le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble que les plaies du tractus digestif, le plus souvent de l'intestin grêle, sont une complication connue de la coelioscopie dont la fréquence est évaluée à 3 pour mille et constituent un aléa thérapeutique ; qu'après avoir mentionné que la technique de l' open coelioscopie qui avait été employée par le chirurgien est un des moyens préconisé pour éviter ce type de lésions, l'expert indique ne pouvoir expliquer le mécanisme exact de survenue de cette plaie chez Mme A et ne relève aucun manquement aux règles de l'art de la part de l'opérateur ; que dans ces conditions, la perforation accidentelle ne saurait par elle-même révéler une faute ; que si Mme A reproche, par ailleurs, aux chirurgiens de ne pas avoir pratiqué, alors que la seconde phase de l'intervention l'aurait rendu possible, une inspection complète de l'intestin qui aurait selon elle permis de découvrir la perforation et d'y remédier aussitôt, il résulte également de conclusions de l'expert, qui a relevé que l'une des particularités de ces plaies est d'être souvent méconnues initialement, qu'en l'espèce la perforation présentée par l'intéressée devait être, à l'origine, minime, puisqu'aucun écoulement de liquide digestif n'a été observé en fin d'intervention malgré un nettoyage précis de la cavité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'aucune faute ne peut être retenue à l'encontre du CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE ; que, par suite, ce dernier est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamné à verser une indemnité à Mme A ;
Sur les frais d'expertise :
Considérant que dans les circonstances particulières de l'espèce, il y a lieu, de laisser les frais et honoraires de l'expertise à la charge définitive du CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par Mme A tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DÉCIDE :
Article 1er : Les articles 1 et 2 du jugement du Tribunal administratif de Grenoble du 25 avril 2008 sont annulés.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Grenoble et ses conclusions en appel sont rejetés.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au CENTRE HOSPITALIER DE GRENOBLE, à Mme Corinne A et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Isère. Copie en sera adressée à M. Martinon, expert.
Délibéré après l'audience du 3 juin 2010 à laquelle siégeaient :
Mme Serre, présidente de chambre,
Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,
M. Stillmunkes, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 juin 2010.
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N° 08LY01446