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24/06/2010 | FRANCE | N°08LY00320

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 24 juin 2010, 08LY00320


Vu la requête, enregistrée le 11 février 2008, présentée pour la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET, représentée par son maire en exercice, domicilié en mairie de Chatuzange le Goubet (26300) ;

La COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0404718 et 0701131 du 25 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande de Mme Viviane A, d'une part l'arrêté du 8 juillet 2004 par lequel le maire a accepté la demande de retrait de sa délégation et, d'autre part, la délibération du 6 mars 2007 par la

quelle le conseil municipal a démis l'intéressée de ses fonctions de première a...

Vu la requête, enregistrée le 11 février 2008, présentée pour la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET, représentée par son maire en exercice, domicilié en mairie de Chatuzange le Goubet (26300) ;

La COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0404718 et 0701131 du 25 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande de Mme Viviane A, d'une part l'arrêté du 8 juillet 2004 par lequel le maire a accepté la demande de retrait de sa délégation et, d'autre part, la délibération du 6 mars 2007 par laquelle le conseil municipal a démis l'intéressée de ses fonctions de première adjointe ;

2°) de rejeter les demandes présentées par Mme A devant le Tribunal administratif de Grenoble ;

3°) de mettre à la charge de Mme A la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier, dès lors que le tribunal s'est fondé sur un moyen, tiré de la naissance d'une décision implicite de rejet de la demande de Mme A, qu'il a soulevé d'office, sans que les parties n'aient été auparavant averties en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative ;

- contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, l'autorité administrative a pu retirer implicitement la décision tacite antérieure de rejet de la demande présentée par Mme A, tendant au retrait de ses délégations, en faisant droit à cette demande, aucune condition ni aucune limitation n'étant définie par la loi du 12 avril 2000 pour procéder au retrait d'une décision implicite de rejet ;

- Mme A n'avait aucun intérêt à agir contre une décision qui faisait droit à sa propre demande, alors qu'à la date de l'arrêté du 8 juillet 2004 par lequel le maire a accepté la demande de retrait de sa délégation, elle ne justifiait pas avoir expressément fait savoir qu'elle ne souhaitait plus que sa délégation lui soit retirée ; l'intéressée ne peut tirer de l'existence d'une délibération du conseil municipal approuvant le tableau d'indemnité des élus la conclusion que le maire aurait confirmé le maintien de sa délégation ;

- le retrait de la délégation de Mme A pouvait être motivé, par substitution, au motif initial tiré de la demande de retraite formulé par l'intéressée, de celui tiré de l'atteinte à la bonne marche de l'administration communale, en raison des nombreuses dissensions entre l'intéressée, plusieurs autres conseillers municipaux et le reste de l'équipe municipale, et alors que Mme A a cessé de participer à toutes les réunions des commissions dont elle était membre ;

- dès lors que l'arrêté du 8 juillet 2004 était légal, la délibération du 6 mars 2007 était fondée ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu les mémoires, enregistrés les 17 juin et 25 juillet 2008, présentés pour Mme A, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- le moyen retenu par le tribunal pour annuler l'arrêté du 8 juillet 2004 n'était pas radicalement différent de celui qu'elle avait soulevé, tiré de ce qu'à la date de cet arrêté, le maire n'était plus saisi d'une demande de retrait de ses délégations ;

- elle avait intérêt à agir contre l'arrêté en litige, dès lors qu'à la date de cet arrêté, la demande initiale du 1er mars 2004 n'existait plus, puisqu'elle avait continué à exercer sa délégation, qu'une décision implicite de rejet était née, le 1er mai 2004, que le maire avait confirmé cette délégation en proposant, lors d'une séance du conseil municipal du 7 juillet 2004, le vote du nouveau tableau des indemnités des élus, et qu'elle-même avait explicitement confirmé qu'elle renonçait à sa demande en votant en faveur de ce tableau ;

- en l'absence, à la date de l'arrêté en litige, d'une demande de retrait des délégations, le motif de cet arrêté, tiré de ladite demande, repose sur des faits matériellement inexacts ;

- contrairement à ce que soutient la requérante, elle a continué à exercer ses fonctions d'élue et ses délégations ;

- il n'existait pas, au sein du conseil municipal, de tensions de nature à perturber le fonctionnement de l'administration communale ;

- les motifs de l'arrêté du 8 juillet 2004 sont étrangers à la bonne marche de l'administration communale ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 avril 2010, présenté pour la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET, qui maintient les conclusions de sa requête, par les mêmes moyens, tout en chiffrant à 3 000 euros la somme réclamée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 avril 2010, présenté pour Mme A, qui maintient ses conclusions pour les mêmes motifs, tout en chiffrant à 3 500 euros la somme réclamée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 avril 2010, présenté pour la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET, qui maintient ses conclusions ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 mai 2010, présenté pour Mme A, qui maintient ses conclusions ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 6 juin 2010, présentée pour Mme A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er juin 2010 :

- le rapport de M. Seillet, premier conseiller ;

- les observations de Me Mamalet, pour la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET, et de Mme A ;

- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à Me Mamalet et à Mme A ;

Considérant que Mme A, élue au conseil municipal de la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET et premier adjoint au maire de ladite commune, a demandé, par une lettre du 1er mars 2004, adressée au maire par plusieurs élus, de reprendre les délégations qu'il lui avait consenties ; que, par un arrêté du 8 juillet 2004, le maire de Chatuzange le Goubet a accepté, à compter du 10 juillet 2004, la demande de retrait de délégation présentée le 1er mars 2004 par Mme A ; que, par une délibération du 6 mars 2007, le conseil municipal a décidé de démettre cette dernière de ses fonctions de premier adjoint, aux motifs de ses absences du conseil des adjoints depuis 2004 et du retrait de ses délégations ; que la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET fait appel du jugement du 25 janvier 2008 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande de Mme Viviane A, d'une part l'arrêté du 8 juillet 2004 par lequel le maire a accepté la demande de retrait de sa délégation et, d'autre part, la délibération du 6 mars 2007 par laquelle le conseil municipal a démis l'intéressée de ses fonctions de première adjointe ;

Sur la recevabilité de la demande de Mme A tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2004 :

Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'à la suite de la demande de retrait de ses délégations qu'elle avait présentée le 1er mars 2004, Mme A aurait explicitement renoncé au bénéfice de cette demande ; que les circonstances qu'elle a continué, jusqu'à l'arrêté en litige du 8 juillet 2004, d'exercer ses fonctions, que le maire a soumis au conseil municipal, lors de sa séance du 7 juillet 2004, un tableau des indemnités allouées aux adjoints, et qu'elle a elle-même voté en faveur de la proposition d'attribution de ces indemnités, ne sont pas de nature, par elles-mêmes, à démontrer son intention de renoncer à sa demande ; que la circonstance qu'une décision implicite de rejet de cette demande serait née du silence gardé par l'administration à l'expiration du délai de deux mois fixé par les dispositions de l'article 21 de la loi du 12 avril 2000 susvisée, ne faisait pas obstacle à ce que ledit rejet implicite soit retiré ou abrogé par la suite, et que le maire fasse finalement droit à la demande dont il pouvait s'estimer toujours saisi ; qu'ainsi, dès lors que la demande présentée par Mme A le 1er mars 2004 a été satisfaite, par l'arrêté en litige du 8 juillet 2004, et nonobstant l'écoulement d'un délai de quatre mois entre la date de la demande et celle dudit arrêté, l'intéressée n'avait pas intérêt à contester sa légalité ; que, dès lors, ladite demande était, comme le soutenait la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET en défense devant le tribunal, irrecevable ; que, par suite, c'est à tort que la recevabilité de la demande de Mme A tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2004 en litige a été admise par le jugement attaqué qui doit être, dès lors, annulé ; qu'il y a lieu, par suite, d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Grenoble, tendant à l'annulation de cet arrêté, qui doivent être rejetées, en raison de leur irrecevabilité ;

Sur la demande de Mme A tendant à l'annulation de la délibération du 6 mars 2007 :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, le conseil municipal de Chatuzange le Goubet, par sa délibération du 6 mars 2007, a décidé de démettre Mme A de ses fonctions de premier adjoint, aux motifs de ses absences du conseil des adjoints depuis 2004 et du retrait de ses délégations, par l'effet de l'arrêté du 8 juillet 2004 ; que Mme A ne peut utilement invoquer, au soutien des conclusions de sa demande tendant à l'annulation de ladite délibération, l'illégalité dudit arrêté du 8 juillet 2004 qui, ainsi qu'il vient d'être dit, ne lui fait pas grief ; que, dès lors, c'est à tort que, pour prononcer l'annulation de la délibération du 6 mars 2007 en litige, les premiers juges se sont fondés sur le motif tiré de ce que ladite délibération se trouvait privée de base légale en raison de l'illégalité de l'arrêté du 8 juillet 2004 ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme A tant devant le Tribunal administratif de Grenoble qu'en appel ;

Considérant, en premier lieu, que la délibération du 6 mars 2007 en litige a été prise, en particulier, au motif du retrait des délégations initialement consenties à Mme A ; que cette dernière ne peut, dès lors, utilement se prévaloir de ce qu'il n'appartiendrait pas au conseil municipal de se prononcer sur le maintien en fonction d'un adjoint en dehors de l'hypothèse d'un retrait de délégations ;

Considérant, en deuxième lieu, que Mme A ne conteste pas, au soutien des conclusions de sa demande tendant à l'annulation de la délibération du 6 mars 2007, le motif tiré de ses absences nombreuses du conseil des adjoints depuis le mois de mars 2004 jusqu'à la date de cette délibération ;

Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal aurait pris la même décision s'il ne s'était fondé que sur les deux motifs tirés du retrait des délégations de Mme A et de ses absences au conseil des adjoints ; que, dès lors, l'intéressée ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que, contrairement aux affirmations du maire lors de la séance du conseil municipal du 6 mars 2007, elle n'aurait pas marqué publiquement sa faveur pour l'opposition municipale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé, à la demande de Mme A, la délibération du conseil municipal du 6 mars 2007 en litige ;

Sur les conclusions des parties tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET, qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par Mme A et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0404718 et 0701131 du 25 janvier 2008 du Tribunal administratif de Grenoble est annulé.

Article 2 : Les conclusions de Mme A sont rejetées.

Article 3 : Mme A versera la somme de 1 000 euros à la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la COMMUNE DE CHATUZANGE LE GOUBET et à Mme Viviane A.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2010, à laquelle siégeaient :

M. Fontanelle, président de chambre,

M. Seillet et Mme Pelletier, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 24 juin 2010.

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N° 08LY00320


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00320
Date de la décision : 24/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FONTANELLE
Rapporteur ?: M. Philippe SEILLET
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : SELARL CABINET CHAMPAUZAC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-06-24;08ly00320 ?
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