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10/06/2010 | FRANCE | N°07LY01622

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 10 juin 2010, 07LY01622


Vu I°), sous le n° 07LY01622, la requête, enregistrée le 27 juillet 2007, présentée pour M. et Mme Jean-Paul A, domiciliés ... (26500) ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) de réformer les articles 1er et 2 du jugement n° 0507958, en date du 14 juin 2007, par lesquels le Tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus des conclusions de leur demande en ce qu'elle tendait à ce que les Hospices civils de Lyon soient condamnés à leur verser, respectivement, une somme de 832 977,20 euros au titre de leur préjudice matériel et une somme de 389 233 euros au titre

du préjudice propre de Mme A, et a limité aux montants respectifs de 117 787...

Vu I°), sous le n° 07LY01622, la requête, enregistrée le 27 juillet 2007, présentée pour M. et Mme Jean-Paul A, domiciliés ... (26500) ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) de réformer les articles 1er et 2 du jugement n° 0507958, en date du 14 juin 2007, par lesquels le Tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus des conclusions de leur demande en ce qu'elle tendait à ce que les Hospices civils de Lyon soient condamnés à leur verser, respectivement, une somme de 832 977,20 euros au titre de leur préjudice matériel et une somme de 389 233 euros au titre du préjudice propre de Mme A, et a limité aux montants respectifs de 117 787,63 euros et 90 000 euros les sommes que les Hospices civils de Lyon ont été condamnés à leur verser ;

2°) de condamner les Hospices civils, d'une part à leur verser une somme totale de 848 874,77 euros, d'autre part à verser à Mme A une somme de 303 818,96 euros ;

3°) de mettre à la charge des Hospices civils de Lyon une somme de 6 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que :

- les sommes qui leur ont été allouées sont insuffisantes en ce qui concerne la nécessité du recours à une tierce personne, dont ils ont eux-mêmes assuré pour partie la charge,

- le préjudice économique subi par Mme A, qui a été conduite à cesser son activité professionnelle, a également été apprécié de manière insuffisante ;

- c'est à tort que le Tribunal n'a retenu que pour partie les dépenses d'aides techniques qu'ils ont dû exposer pour leur fils Ludovic ;

- enfin, c'est à tort que le Tribunal n'a pas retenu les dépenses d'aménagement de leur résidence secondaire ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 30 juin 2008, présenté pour la mutuelle générale de l'éducation nationale (MGEN) ;

Elle conclut :

- à la confirmation du jugement en ce qui la concerne ;

- à ce que la somme de 1 200 euros soit mise à la charge des Hospices civils de Lyon au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que c'est à bon droit que, dans l'attente d'une consolidation, le Tribunal a retenu ses créances provisoires ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 février 2009, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme ;

Elle conclut :

- à la réformation de l'article 3 du même jugement, en tant qu'il a limité à 764 938,41 euros les sommes que les Hospices civils de Lyon ont été condamnés à lui verser ;

- à ce que les Hospices civils de Lyon soient condamnés à lui verser la somme totale de 880 975,48 euros, outre intérêts de droit, au titre des sommes versées à M. et Mme A au titre des prestations assurées pour leurs enfants Ludovic et Benoît ;

- à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge des Hospices civils de Lyon au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'elle justifie de façon détaillée des débours exposés à ce jour, dans l'attente d'une consolidation permettant une évaluation définitive ;

Vu le mémoire, enregistré le 1er octobre 2009, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme ;

Elle conclut :

- à ce que les sommes que les Hospices civils de Lyon seront condamnés à lui verser au titre de ses débours soient portées à un montant total de 2 505 422,58 euros ;

- à ce que les Hospices civils de Lyon soient condamnés à lui verser l'indemnité forfaitaire de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

- pour le surplus, aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Elle soutient qu'elle justifie de façon détaillée des débours exposés à ce jour ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 octobre 2009, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme ; elle conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 février 2010, présenté pour les Hospices civils de Lyon ; ils concluent au rejet de la requête et des conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme ;

Ils soutiennent que :

- M. et Mme A ne sont pas recevables à demander en leur nom propre l'indemnisation des frais d'assistance d'une tierce personne, dès lors qu'il s'agit d'un préjudice propre de leurs enfants ; subsidiairement, le rente à verser aux parents ne pourrait être fixée qu'au prorata du nombre de nuits passées au domicile familial, ce que les requérants ne précisent pas ;

- Mme A n'a cessé son activité qu'en 2002, alors que l'accouchement est survenu en 1988, cette cessation ne pouvant dès lors en être regardée comme une conséquence directe, mais uniquement comme un choix personnel ; subsidiairement, ce chef de préjudice fait double emploi avec les sommes demandées au titre de l'assistance fournie à ses enfants ;

- les sommes demandées au titre des aides techniques pour Ludovic ne sont pas justifiées ;

- l'aménagement d'une résidence secondaire ne peut être regardé comme un préjudice découlant directement de la faute commise ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 avril 2010, présenté pour la MGEN ; elle conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 mai 2010, présenté pour M. et Mme A ; ils concluent aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Ils ajoutent :

- qu'ils s'en rapportent à l'appréciation de la Cour quant à la question de savoir si les frais d'assistance tierce personne relèvent, non de leur préjudice propre, mais de celui de leurs enfants, en faisant valoir, en tant que de besoin, qu'une procédure de tutelle était engagée à la date du jugement pour leur fils Benoît, et qu'ils sont en tout état de cause ses ayants-droit depuis son décès ;

- que la cessation anticipée d'activité de Mme A est bien la conséquence du handicap de ses deux fils, et plus précisément de l'évolution de leur état à la date à laquelle elle a pris cette décision ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 mai 2010, présenté pour M. et Mme A ; ils concluent aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Ils ajoutent qu'ils s'en rapportent à l'appréciation de la Cour quant à la question de savoir si les frais d'appareillage relèvent, non de leur préjudice propre, mais de celui de leurs enfants

Vu II°), sous le n° 07LY01912, la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 août et 23 novembre 2007, présentés pour les HOSPICES CIVILS DE LYON, dont le siège est 3 quai des Célestins à Lyon (69002) ;

Les HOSPICES CIVILS DE LYON demandent à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1er, 2, 3 et 4 du jugement susmentionné, en tant que le Tribunal administratif de Lyon les a condamnés à verser, respectivement, 117 787,63 euros à M. et Mme A, 90 000 euros à Mme A, 764 938,41 euros à la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme et 40 393,92 euros à la MGEN ;

2°) de rejeter les conclusions indemnitaires ;

Ils soutiennent que :

- le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne les débours exposés par la caisse ;

- les sommes allouées à M. et Mme A par l'arrêt de la Cour du 5 mars 1998 couvraient l'ensemble de leurs troubles dans les conditions d'existence, ce qui exclut une nouvelle indemnisation au même titre ;

- les frais d'assistance d'une tierce personne constituent un préjudice propre des victimes, et non de leurs parents ;

- il en va de même d'une partie des frais de matériels adaptés au handicap ; en tout état de cause, l'arrêté du 28 décembre 2005 fixe un plafond pour les dépenses d'aménagement du logement et du véhicule ;

- les sommes demandées au titre des pertes de revenus de Mme A font double emploi avec celles demandées au titre de l'assistance tierce personne qu'elle a fournie ; en tout état de cause, il n'est pas établi que sa cessation d'activité en 2002 soit la conséquence de l'accouchement réalisé en 1988, celle-ci procédant bien plutôt d'un choix personnel ;

- le décompte produit par la caisse ne permet pas d'apprécier la date des débours exposés, alors que les débours exposés avant le 5 mars 1998 ont déjà été pris en compte par l'arrêt de la Cour rendu à cette date ; quant aux frais de séjour en établissement spécialisé, il se rattache au préjudice propre des enfants, préjudice que le Tribunal a réservé en attendant les conclusions de l'expertise qu'il a décidée ;

- la MGEN n'est pas recevable à former une demande indemnitaire pour les dépenses exposées avant le 5 mars 1988, comme la Cour l'avait jugé par l'arrêt rendu le 5 mars 1988 ; subsidiairement, le Tribunal a statué ultra petita en lui allouant plus qu'elle ne demandait ; ses débours correspondent en tout état de cause au préjudice propre des enfants, qui a été réservé par le Tribunal ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 2 février 2009, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme ;

Elle conclut :

- au rejet de la requête des HOSPICES CIVILS DE LYON ;

- à la réformation de l'article 3 du même jugement, en tant qu'il a limité à 764 938,41 euros les sommes que les HOSPICES CIVILS DE LYON ont été condamnés à lui verser ;

- à ce que les HOSPICES CIVILS DE LYON soient condamnés à lui verser la somme totale de 880 975,48 euros, outre intérêts de droit, au titre des sommes versées à M. et Mme A au titre des prestations assurées pour leurs enfants Ludovic et Benoît ;

- à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge des Hospices civils de Lyon au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'elle produit l'état détaillé de ses débours exposés au titre des prestations nécessitées par l'état de Benoît et de Ludovic A ;

Vu le mémoire, enregistré le 1er octobre 2009, présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme ;

Elle conclut :

- à ce que les sommes que les Hospices civils de Lyon seront condamnés à lui verser au titre de ses débours soient portées à un montant total de 2 505 422,58 euros ;

- à ce que les Hospices civils de Lyon soient condamnés à lui verser l'indemnité forfaitaire de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

- pour le surplus, aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Elle soutient qu'elle produit l'état détaillé de ses débours exposés au titre des prestations nécessitées par l'état de Benoît et de Ludovic A ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 octobre 2009, présenté pour la caisse d'assurance maladie de la Drôme ; elle conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 novembre 2009, présenté pour la MGEN ;

Elle conclut :

- à ce que les sommes que les HOSPICES CIVILS DE LYON ont été condamnés à lui verser soient ramenées à un montant de 32 647,66 euros, compte tenu du décès de Benoît A ;

- pour le surplus, au rejet de la requête ;

- à ce que la somme de 1 200 euros soit mise à la charge des HOSPICES CIVILS DE LYON au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient qu'elle produit l'état détaillé de ses débours exposés au titre des prestations nécessitées par l'état de Benoît et de Ludovic A ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 février 2010, présenté pour les HOSPICES CIVILS DE LYON ; ils concluent aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 avril 2010, présenté pour la MGEN ; elle conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 6 mai 2010, présenté pour M. et Mme A ; ils concluent aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Ils ajoutent :

- qu'ils s'en rapportent à l'appréciation de la Cour quant à la question de savoir si les frais d'assistance tierce personne relèvent, non de leur préjudice propre, mais de celui de leurs enfants, en faisant valoir, en tant que de besoin, qu'une procédure de tutelle était engagée à la date du jugement pour leur fils Benoît, et qu'ils sont en tout état de cause ses ayants-droit depuis son décès ;

- que la cessation anticipée d'activité de Mme A est bien la conséquence du handicap de ses deux fils, et plus précisément de l'évolution de leur état à la date à laquelle elle a pris cette décision ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 mai 2010, présenté pour M. et Mme A ; ils concluent aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Ils ajoutent qu'ils s'en rapportent à l'appréciation de la Cour quant à la question de savoir si les frais d'appareillage relèvent, non de leur préjudice propre, mais de celui de leurs enfants ;

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code civil ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de l'action sociale et des familles, et notamment son article L. 245-3 ;

Vu l'arrêté du 28 décembre 2005 fixant les tarifs des éléments de la prestation de compensation mentionnés aux 2°, 3°, 4° et 5° de l'article L. 245-3 du code de l'action sociale et des familles ;

Vu l'arrêté du 28 décembre 2005 fixant les tarifs de l'élément de la prestation de compensation mentionné au 1° de l'article L. 245-3 du code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 mai 2010 :

- le rapport de M. Stillmunkes, premier conseiller ;

- les observations de Me Rey, avocat de M. et Mme A ;

- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;

La parole ayant à nouveau été donnée à Me Rey, avocat de M. et Mme A.

Considérant que, par jugement en date du 9 avril 1996, le Tribunal administratif de Lyon a retenu la responsabilité des HOSPICES CIVILS DE LYON dans la survenue des séquelles que les deux enfants de M. et Mme A conservent en raison des conditions de leur naissance le 28 février 1988, et a ordonné une expertise pour évaluer les préjudices correspondants ; que, par jugement en date du 3 décembre 1996, le même Tribunal, compte tenu de l'absence de consolidation de l'état des enfants, a fixé le préjudice déterminable à la date de sa décision, en renvoyant à la date de la consolidation pour le restant de leur indemnisation ; que, par arrêt en date du 5 mars 1998, confirmé par décision du Conseil d'Etat en date du 16 juin 2000, la Cour de céans a confirmé ces deux jugements, sous réserve d'une réévaluation des préjudices à la date à laquelle elle a statué ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a procédé à l'évaluation des préjudices indemnisables pour la période postérieure à l'arrêt précité de la Cour, en allouant en particulier à M. et Mme A la somme de 117 787,63 euros, à Mme A la somme de 90 000 euros, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme la somme de 764 938,41 euros et à la Mutuelle générale de l'éducation nationale (MGEN) la somme de 40 393,92, ces deux derniers montants étant à parfaire au vu des conclusions d'une expertise qu'il a décidée afin de fixer, après consolidation, l'état définitif des préjudices des deux enfants ; que M. et Mme A, ainsi que la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme, demandent la majoration des sommes qui leur ont été allouées ; que les HOSPICES CIVILS DE LYON contestent en revanche les sommes qu'ils ont été condamnés à verser ;

Considérant que la requête de M. et Mme A et la requête des HOSPICES CIVILS DE LYON portent sur le même jugement et présentent les mêmes questions à juger ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt ;

Sur la régularité du jugement, en ce qui concerne les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme et de la MGEN :

Considérant, d'une part, qu'il résulte de l'instruction et notamment du dossier de première instance, que dans son mémoire du 1er mars 2007, la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme a exposé que ses débours s'élevaient au montant total de 727 391,31 euros au titre des prestations servies pour les dépenses de Benoît, et au montant total de 153 584,17 euros au titre des prestations servies pour les dépenses de Ludovic ; que les HOSPICES CIVILS DE LYON sont fondés à soutenir qu'en se bornant à indiquer que la caisse justifiait de débours à hauteur de 642 173,02 s'agissant de Benoît et de 122 765,39 euros s'agissant de Ludovic, le Tribunal n'a pas suffisamment motivé son jugement ; qu'il doit dès lors être annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction, et notamment du dossier de première instance, que dans son mémoire du 16 février 2007, la MGEN évaluait certes à un montant total de 40 393,92 euros le montant total des prestations, à la fois échues et à échoir, qu'elle constatait avoir exposées et qu'elle estimait devoir encore exposer ; qu'en revanche, elle se bornait à demander que la provision à lui verser, dans l'attente des résultats d'une expertise, porte sur les seules prestations échues, pour un montant total de 21 188,96 euros ; que, dès lors, les HOSPICES CIVILS DE LYON sont fondés à soutenir qu'en lui allouant à titre provisionnel la somme de 40 393,93 euros, le Tribunal a statué ultra petita ; que, d'ailleurs, la MGEN indique elle-même en appel que, compte tenu du décès de Benoît A survenu en 2009, le total des débours dont elle demande le remboursement doit être limité à un montant de 32 647,66 euros ; que le jugement doit en conséquence être annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de la MGEN ;

Considérant que le Tribunal a réservé l'examen des préjudices propres de Benoît et de Ludovic, dans l'attente des conclusions de l'expert qu'il a désigné ; que, compte tenu des liens nécessaires qui existent entre l'appréciation du préjudice de Ludovic et de Benoît et celle des dépenses de la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme et de la MGEN, qui sont subrogées dans les droits des victimes à hauteur des sommes qu'elles leur ont versées, l'examen des conclusions indemnitaires de la caisse primaire d'assurance maladie de Lyon et de la MGEN est renvoyé au Tribunal administratif de Lyon, pour y faire l'objet d'un examen global au vu notamment des conclusions de l'expert désigné par ce Tribunal ;

Sur les préjudices de M. et Mme A :

En ce qui concerne les troubles dans les conditions d'existence de M. et Mme A :

Considérant que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme A, le Tribunal n'a pas statué sur les frais d'assistance d'une tierce personne, dès lors qu'il a au contraire désigné un expert pour évaluer le préjudice définitif de Ludovic et de Benoît, en réservant l'examen des conclusions indemnitaires y afférentes ; que la somme de 50 000 euros que le Tribunal a alloué à M. et Mme A l'a en réalité été au titre de leurs troubles dans les conditions d'existence ; que, toutefois, par l'arrêt susmentionné du 5 mars 1998, qui confirme sur ce point le jugement du 3 décembre 1996, la Cour a déjà procédé à l'indemnisation définitive des troubles dans les conditions d'existence subis par les parents ; que les HOSPICES CIVILS DE LYON sont dès lors fondés à soutenir que ce chef de préjudice ne pouvait, sans méconnaître la chose jugée, faire l'objet d'une nouvelle indemnisation ; que ceci ne préjudicie au demeurant pas des sommes qui pourront, le cas échéant, être allouées par le Tribunal au titre des frais d'assistance d'une tierce personne nécessités par l'état de Benoît et de Ludovic ;

En ce qui concerne les frais exposés par M. et Mme A :

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'expertise du 7 mars 2002 ordonnée en première instance, que Ludovic, du fait de son handicap, écrit lentement et de façon peu lisible, et que l'aide d'un ordinateur lui est utile pour pouvoir communiquer par écrit ; que, dans ces circonstances particulières, les frais d'acquisition de matériels informatiques en 1999 puis en 2001, pour un montant total de 3 799,66 euros, qui ne sont pas sérieusement contestés, doivent dès lors être regardés comme en lien avec les séquelles résultant des conditions de l'accouchement ; qu'il en est de même des frais d'acquisition d'un fauteuil roulant tout terrain, établis à hauteur d'un montant de 2 800,14 euros ; que, toutefois, les HOSPICES CIVILS DE LYON font valoir à bon droit que ces frais, de même que les autres frais liés aux handicaps de Ludovic et de Benoît, font partie de leur préjudice propre et non du préjudice de leurs parents ; qu'ainsi, contrairement à ce qu'a estimé le Tribunal, ces sommes ne peuvent être retenues au titre du préjudice matériel de M. et Mme A, mais devront être prises en compte par le Tribunal, lors de l'examen, qu'il a réservé, du préjudice de Ludovic et de Benoît, à la seule exception de la somme, non sérieusement contestée, de 33 230,10 euros, correspondant aux frais de déplacement supportés par M. et Mme A pour se rendre auprès de leurs enfants, lors des hospitalisations de ces derniers, qui peut leur être allouée au titre de leur préjudice propre ;

Considérant, en second lieu, que M. et Mme A établissent que les séquelles dont sont atteints leurs enfants ont par ailleurs nécessité la réalisation de travaux dans une maison de famille, afin qu'ils puissent y accueillir leurs enfants, pour un montant de 18 899,95 euros ; que, dans les circonstances de l'espèce, ils sont fondés à demander le remboursement de ces frais qui sont précisément justifiés dans leur principe et dans leur montant ;

En ce qui concerne les pertes de revenus de Mme A et son préjudice d'incidence professionnelle :

Considérant qu'il est constant que Mme A n'a cessé d'exercer son activité d'enseignante, en prenant une retraite anticipée, qu'en 2002, soit 14 ans après l'accouchement litigieux, alors en outre que son fils Benoît, dont le handicap est le plus lourd, était placé depuis 1998 dans une institution spécialisée et que l'évolution de Ludovic était favorable ; qu'il n'est pas établi que cette retraite anticipée aurait été rendue nécessaire du fait de l'évolution de l'état de santé de Ludovic et de Benoît en 2002 ; qu'en revanche, il résulte de l'instruction et notamment des indications concordantes de médecins ayant suivi Mme A, que la charge particulière des soins consacrés à ses enfants, alourdie du fait de leurs séquelles, a affecté son activité professionnelle et a rendu plus difficile la perspective d'une continuation d'activité ; qu'il sera fait une juste appréciation de l'incidence professionnelle de cette situation pour Mme A en lui allouant à ce titre une somme de 10 000 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté le surplus de leurs conclusions, ceci ne préjugeant au demeurant pas des conséquences à tirer par le Tribunal du rapport de l'expert qu'il a désigné lors de l'examen des conclusions qu'il a réservées ; que les HOSPICES CIVILS DE LYON sont pour leur part uniquement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le même jugement, le Tribunal a partiellement fait droit aux conclusions de M. et Mme A, en ne limitant pas à un montant total de 52 130,05 euros la somme qui leur a été allouée et en ne limitant pas à un montant de 10 000 euros la somme qui a été allouée à Mme A ; qu'enfin, les conclusions indemnitaires de la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme et de la MGEN sont renvoyées au Tribunal administratif de Lyon pour qu'il y soit statué ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge des HOSPICES CIVILS DE LYON, qui n'ont pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, une somme quelconque au titre des frais exposés par M. et Mme A, par la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme et par la MGEN, et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 117 787,63 euros que les HOSPICES CIVILS DE LYON ont été condamnés à verser à M. et Mme A par l'article 1er du jugement du 14 juin 2007 est ramenée au montant de 52 130,05 euros.

Article 2 : La somme de 90 000 euros que les HOSPICES CIVILS DE LYON ont été condamnés à verser à Mme A par l'article 2 du jugement du 14 juin 2007 est ramenée au montant de 10 000 euros.

Article 3 : Les articles 3 et 4 du jugement du 14 juin 2007 sont annulés.

Article 4 : Les conclusions indemnitaires de la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme et de la MGEN sont renvoyées au Tribunal administratif de Lyon pour qu'il y soit statué.

Article 5 : La requête de M. et Mme A, ainsi que les conclusions de la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme et de la MGEN au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et que le surplus des conclusions de la requête des HOSPICES CIVILS DE LYON sont rejetés.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Jean-Paul A, aux HOSPICES CIVILS DE LYON, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Drôme et à la Mutuelle générale de l'éducation nationale. Copie en sera adressée au ministre de la santé et des sports.

Délibéré après l'audience du 20 mai 2010 à laquelle siégeaient :

Mme Verley-Cheynel, président de la formation de jugement,

MM. Picard et Stillmunkes, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 10 juin 2010.

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N° 07LY01622,...


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07LY01622
Date de la décision : 10/06/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme VERLEY-CHEYNEL
Rapporteur ?: M. Henri STILLMUNKES
Rapporteur public ?: Mme MARGINEAN-FAURE
Avocat(s) : SCP ARNAUD - REY

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-06-10;07ly01622 ?
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