La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/04/2010 | FRANCE | N°08LY00297

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 08 avril 2010, 08LY00297


Vu la requête, enregistrée le 8 février 2008, présentée pour le DEPARTEMENT DE L'ALLIER ;

Le DEPARTEMENT DE L'ALLIER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700108 du 6 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé la décision en date du 21 novembre 2006 du président du conseil général prononçant le licenciement de Mme Annie A et lui a enjoint de réintégrer l'intéressée ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme Annie A devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

3°) de mettre à la c

harge de Mme Annie A une somme de 3 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice...

Vu la requête, enregistrée le 8 février 2008, présentée pour le DEPARTEMENT DE L'ALLIER ;

Le DEPARTEMENT DE L'ALLIER demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0700108 du 6 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé la décision en date du 21 novembre 2006 du président du conseil général prononçant le licenciement de Mme Annie A et lui a enjoint de réintégrer l'intéressée ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme Annie A devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

3°) de mettre à la charge de Mme Annie A une somme de 3 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que le jugement est irrégulier en ce qu'il ne comporte pas le visa des deux mémoires qu'il a produits devant lui, ni n'analyse son argumentation relative au comportement de M. A qui est à l'origine de la mesure ; qu'il est entaché d'erreur de droit en considérant qu'il ne pouvait prononcer le licenciement sur le fondement de l'article L. 773-19 du code du travail ; que la mention de l'article L. 773-12 constituait une simple erreur matérielle de sa part et qu'il avait entendu fonder sa mesure sur l'article L. 773-19, ainsi qu'en atteste le respect des formalités préalables ; que les motifs pour lesquels le licenciement est envisagé n'ont pas à apparaître dans la convocation à l'entretien préalable mais doivent être exposés au cours de ce dernier ; que les difficultés rencontrées par son époux ont rendu impossible pour le département de lui confier la garde d'enfants ; que subsidiairement l'irrégularité de procédure éventuelle est sans incidence sur la décision de licenciement, laquelle est parfaitement fondée au vu des risques que courraient des enfants accueillis au domicile de Mme A ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2008, présenté pour Mme A qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge du DEPARTEMENT DE L'ALLIER au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par les moyens que la minute du jugement comprend le visa de l'ensemble des mémoires et que l'absence de visa ne rend pas systématiquement irrégulier le jugement intervenu lorsque ce dernier répond précisément au moyen développé dans ce mémoire, comme en l'espèce ; que sa convocation à un entretien préalable de licenciement ne saurait suffire à elle seule à justifier la substitution de base légale ; qu'aucun motif réel et sérieux n'est invoqué dans la décision de licenciement ; que le seul motif invoqué dans la lettre de licenciement est matériellement inexact ; qu'à aucun moment la procédure pénale concernant son mari n'a été évoquée dans la décision de licenciement ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 janvier 2009, présenté pour Mme A qui conclut à titre reconventionnel à ce que la Cour assortisse d'une astreinte de 100 euros par jour de retard l'obligation de réintégration qui pèse sur le département et pour le surplus aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 juin 2009, présenté pour la DEPARTEMENT DE L'ALLIER qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'action sociale et des familles ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mars 2010 :

- le rapport de Mme Verley-Cheynel, président-assesseur ;

- les observations de Mme A ;

- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que Mme A qui était employée par le DEPARTEMENT DE L'ALLIER en qualité d'assistante maternelle agréée à titre permanent depuis le 23 mars 1995, a fait l'objet d'une mesure de licenciement prononcée par le président du conseil général le 21 novembre 2006 ; que le département fait appel du jugement du 6 décembre 2007 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a annulé cette décision pour erreur de droit ;

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-2 du code de justice administrative : La décision ... contient le nom des parties, l'analyse des conclusions et mémoires ainsi que les visas des dispositions législatives ou réglementaires dont elle fait l'application ... ; qu'il résulte de l'examen du jugement attaqué que celui-ci a omis de viser les mémoires présentés par le DEPARTEMENT DE L'ALLIER en réponse à la requête présentée par Mme A ; que le requérant est ainsi fondé à soutenir que ledit jugement, quand bien même il aurait répondu à certains de ses moyens en défense, est irrégulier ; qu'ainsi il doit être annulé ;

Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A devant le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand ;

Sur la légalité de la décision de licenciement :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2005-706 du 27 juin 2005 relative aux assistants maternels et aux assistants familiaux, applicable à la date de la décision en litige : Les articles L. 773-3 à L. 773-11, L. 773-17 à L. 773-23 et L. 773-25 à L. 773-28 du code du travail s'appliquent aux assistants maternels et aux assistants familiaux employés par des personnes morales de droit public. [...]. ; qu'aux termes des dispositions de l'article L. 773-12 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2006-586 du 23 mai 2006 : Le particulier employeur qui décide de ne plus confier d'enfant à un assistant maternel qu'il employait depuis trois mois doit notifier à l'intéressé sa décision de rompre le contrat par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La date de présentation de la lettre recommandée fixe le point de départ du délai-congé éventuellement dû en vertu de l'article L. 773-13. L'inobservation de ce délai donne lieu au versement d'une indemnité compensatrice du congé dû. [...] ; qu'aux termes de l'article L. 773-19 du même code : L'employeur qui envisage, pour un motif réel et sérieux, de licencier un assistant maternel ou un assistant familial qu'il emploie depuis trois mois au moins, convoque celui-ci et le reçoit en entretien dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 122-14. Au cours de l'entretien, l'employeur est tenu d'indiquer le ou les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié. L'employeur qui décide de licencier un assistant maternel ou un assistant familial visé à la présente section doit notifier sa décision dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéas de l'article L. 122-14-1 et la motiver conformément au premier alinéa de l'article L. 122-14-2. [...]. ; qu'il résulte des dispositions précitées, d'une part, que la procédure de rupture du contrat organisée par l'article L. 773-12 du code du travail n'est pas applicable aux assistants maternels employés par des personnes morales de droit public et, d'autre part, que l'employeur qui décide de licencier un assistant maternel pour un motif réel et sérieux doit énoncer le ou les motifs du licenciement dans sa décision ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision par laquelle le président du conseil général de l'Allier a prononcé le licenciement de Mme A est motivée dans les termes suivants : la fin de prise en charge des enfants que vous avez accueillis ainsi que l'impossibilité pour le service de vous confier la garde des enfants correspondants à votre agrément. ; qu'elle se réfère par ailleurs expressément à l'article L. 773-12 du code du travail ; que si le DEPARTEMENT DE L'ALLIER fait valoir, en défense, que cette référence résulterait d'une simple erreur matérielle et qu'il aurait, en considération des difficultés posées par le comportement du mari de l'intéressée à l'égard d'une jeune fille qu'ils avaient accueillie à leur domicile, entendu faire application de l'article L. 773-19 du même code, il est constant que la décision litigieuse ne mentionne pas un tel motif ; que dans ces conditions, et alors même que ledit motif aurait été évoqué lors de l'entretien préalable au licenciement, Mme A est fondée à soutenir que la décision du 21 novembre 2006 est illégale et doit par suite être annulée ;

Sur les conclusions aux fins de réintégration sous astreinte :

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et des propres écritures de Mme A que celle-ci a été réintégrée en qualité d'assistante maternelle par décision du président du conseil général de l'Allier en date du 19 février 2008 ; que dans ces conditions les conclusions de Mme A aux fins de réintégration sous astreinte sont devenues sans objet ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme A, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que le DEPARTEMENT DE L'ALLIER demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

Considérant, en revanche, qu'il y a lieu de faire droit aux conclusions de Mme A tendant à ce que soit mis à la charge du DEPARTEMENT DE L'ALLIER le paiement d'une somme de 2 500 euros au titre des frais de même nature qu'elle a exposés tant en première instance qu'en appel ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 6 décembre 2007 est annulé.

Article 2 : La décision du président du conseil général de l'Allier en date du 21 novembre 2006 prononçant le licenciement de Mme Annie A est annulée.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions aux fins de réintégration formulées par Mme A.

Article 4 : Le DEPARTEMENT DE L'ALLIER versera à Mme A une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions du DEPARTEMENT DE L'ALLIER tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié au DEPARTEMENT DE L'ALLIER et à Mme Annie A .

Délibéré après l'audience du 18 mars 2010 à laquelle siégeaient :

Mme Serre, présidente de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Stillmunkes, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 avril 2010.

''

''

''

''

1

5

N° 08LY00297


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00297
Date de la décision : 08/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme SERRE
Rapporteur ?: Mme Geneviève VERLEY-CHEYNEL
Rapporteur public ?: Mme MARGINEAN-FAURE
Avocat(s) : SCP WAQUET-FARGE-HAZAN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-04-08;08ly00297 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award