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08/04/2010 | FRANCE | N°07LY01776

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 08 avril 2010, 07LY01776


Vu la requête, enregistrée le 8 août 2007, présentée pour M. et Mme Patrick A, domiciliés ... ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504163 du 5 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier de Sainte-Foy-lès-Lyon soit condamné à leur verser la somme de 1 600 000 euros en réparation des conséquences dommageables des conditions de la naissance de leur fille Émilie le 22 décembre 2003 ;

2°) à titre principal de condamner le centre hospitalier de Sainte-Foy-l

ès-Lyon à leur verser les sommes de 296 520 euros en qualité de rerprésentants légaux...

Vu la requête, enregistrée le 8 août 2007, présentée pour M. et Mme Patrick A, domiciliés ... ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0504163 du 5 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à ce que le centre hospitalier de Sainte-Foy-lès-Lyon soit condamné à leur verser la somme de 1 600 000 euros en réparation des conséquences dommageables des conditions de la naissance de leur fille Émilie le 22 décembre 2003 ;

2°) à titre principal de condamner le centre hospitalier de Sainte-Foy-lès-Lyon à leur verser les sommes de 296 520 euros en qualité de rerprésentants légaux de leur fille à titre provisionnel dans l'attente de la consolidation, de 100 000 euros en qualité de représentants légaux de leurs enfants Vincent et Céline A et 200 000 euros aux titre de leurs troubles dans les conditions d'existence ; à titre subsidiaire, d'ordonner une contre-expertise ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Sainte-Foy-lès-Lyon une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Ils soutiennent que le handicap que présente Émilie a un lien de causalité direct et certain avec une faute du centre hospitalier ; que les circonstances de l'accouchement ont provoqué une anoxie cérébrale néonatale à l'origine des lésions cérébrales et de leurs conséquences fonctionnelles ; qu'aucune anomalie n'a été constatée, ni d'origine génétique ni dans le suivi de la grossesse, permettant de vérifier l'origine anténatale de l'accident vasculaire cérébral ; que la sage-femme étant absente de la pièce lors de la présentation de la tête de l'enfant à la vulve, il y a eu manque de surveillance et absence de respect des protocoles ; que subsidiairement l'état de santé d'Émilie est une conséquence anormale, au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de son état, d'un acte de soins et de diagnostic ; que les conclusions des expert, contredites par de nombreux praticiens, sont discutables quant à leur objectivité ; que le déroulement de l'expertise n'a pas permis que puissent être approfondies des questions essentielles ; que la souffrance néonatale cérébrale du nouveau-né lors de l'accouchement est, de très très loin, la cause la plus fréquente de souffrances cérébrales périnatales ; que les annotations de la sage-femme sont contredites par leurs propres déclarations ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la mise en demeure adressée le 27 mars 2009 au centre hospitalier de Sainte-Foy-lès-Lyon, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative, et l'avis de réception de cette mise en demeure ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 avril 2009, présenté pour le centre hospitalier de Sainte-Foy-lès-Lyon qui conclut au rejet de la requête, par les motifs que le rapport d'expertise ne permet pas de retenir le moindre manquement à son encontre, Mme A ayant pu bénéficier de l'assistance d'une sage-femme dès son arrivée, une péridurale ayant été effectuée selon les règles de l'art et la présence de la sage-femme au moment de l'expulsion étant évidente ; qu'aucune règle n'impose la présence permanente de la sage-femme au chevet de la parturiente ; que la sage-femme est arrivée immédiatement quand elle a été appelée et que le défaut de sonnette n'a pas eu la moindre incidence sur le déroulement de l'accouchement ; que la sage-femme a donné tous les soins qui s'imposaient lors de l'accouchement et, plus particulièrement, a parfaitement maitrisé la circulaire du cordon ; que les appelants n'apportent pas le moindre élément justifiant de ce que le rapport serait insuffisant ou contradictoire ; qu'il ne comporte pas d'ambiguïté sur l'absence de lien entre la circulaire du cordon et l'hémiplégie de l'enfant ;

Vu le mémoire, enregistré le 21 décembre 2009, présenté pour M. et Mme A qui, à titre principal, concluent à ce que l'expertise soit annulée et une nouvelle expertise ordonnée ; à titre subsidiaire, ramènent à 30 000 euros la somme qu'ils demandent au titre de leurs enfants Vincent et Céline, concluent pour le surplus aux mêmes fins que leur requête et portent à 5 000 euros la somme qu'ils demandent au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par les moyens que l'expertise est entachée de défaut d'impartialité, les experts ayant tutoyé les médecins et le directeur de l'hôpital, l'un d'eux étant le père d'un médecin du CHU de Lyon et l'autre travaillant pour le syndicat des gynécologues et obstétriciens de France et semblant décrier systématiquement toutes les critiques contre les obstétriciens ; que le principe du contradictoire n'a pas été respecté au cours de l'expertise, M. A n'ayant pu se faire entendre sur son récit des faits et leurs observations n'étant ni rapportées ni discutées dans le rapport ; que la thèse le l'accident vasculaire anténatal est par définition impossible à affirmer avec certitude ; que de façon tendancieuse les experts n'ont pas relevé les nombreuses anomalies du dossier médical et ne se sont pas interrogés sur la surveillance particulière que la situation de Mme A appelait ; que la sage-femme n'a pas exercé auprès de la parturiente la présence attentive permanente qui s'imposait ; que l'ensembles des dysfonctionnements a, au minima, fait perdre à l'enfant une chance de naître sans handicap ; qu'à titre infiniment subsidiaire, l'accident relève de la solidarité nationale ;

Vu l'ordonnance en date du 22 décembre 2009 fixant la clôture d'instruction au 5 janvier 2010, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 5 janvier 2010, présenté pour le centre hospitalier de Sainte-Foy-lès-Lyon qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les motifs, en outre, que les requérants n'apportent pas d'éléments suffisamment précis et concrets pour justifier le défaut d'impartialité des experts qu'ils invoquent, le seul tutoiement ne pouvant révéler une attitude partiale ; que le conflit d'intérêt invoqué n'est pas démontré ;

Pris connaissance du mémoire, enregistré après clôture le 11 mars 2010 présenté par le centre hospitalier de Sainte-Foy-lès-Lyon;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 mars 2010 :

- le rapport de Mme Verley-Cheynel, président-assesseur ;

- les observations de Me Bazy, avocat de M. et Mme A Patrick, et de Me Demailly, avocat du centre hospitalier de Sainte-Foy-lès-Lyon ;

- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que M. et Mme A qui imputent aux conditions de la naissance de leur fille Émilie, le 22 décembre 2003 au centre hospitalier de Sainte-Foy-lès-Lyon, l'hémiplégie qui a été diagnostiquée chez celle-ci au cours du 4ème mois de vie, font appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Lyon, après avoir ordonné une expertise par jugement avant dire droit, a rejeté leur demande indemnitaire dirigée contre cet établissement ;

Sur les moyens tirés de l'irrégularité de l'expertise :

Sans qu'il soit besoin d'examiner leur recevabilité :

Considérant qu'eu égard aux usages dans la profession, la seule circonstance que les médecins experts aient pu, au cours de la réunion d'expertise, pratiquer le tutoiement avec les représentants du centre hospitalier n'est pas de nature à établir qu'ils auraient manqué à leur devoir d'impartialité ; qu'il en est de même d'un supposé lien de filiation d'un des experts avec un médecin des Hospices civils de Lyon dont, au demeurant, le centre hospitalier de Sainte-Foy-lès-Lyon est totalement indépendant ; qu'enfin, eu égard au recours par le juge à un homme de l'art dans le cadre d'une expertise, l'appartenance d'un des médecins experts au syndicat professionnel national de sa spécialité n'est pas de nature en l'espèce à remettre en cause son objectivité, alors d'ailleurs que les soins litigieux n'ont pas été pratiqués par un médecin praticien ;

Considérant que si M. A soutient qu'il aurait été empêché de s'exprimer au cours de la réunion d'expertise, il ressort des termes mêmes du rapport que les experts ont tenu compte d'observations faites par l'intéressé, notamment sur son récit du déroulement de l'accouchement, auxquelles ils ont répondu de manière argumentée ; qu'ainsi les requérants n'établissent pas que l'expertise aurait été dépourvue de caractère contradictoire ; que la circonstance que le rapport ne mentionne pas des erreurs matérielles que M. et Mme A relèvent, notamment quant à certains renseignements figurant au dossier médical de la parturiente, est par elle-même sans incidence sur la régularité de l'expertise ;

Sur la responsabilité :

Considérant que bien qu'il résulte de l'instruction que l'accouchement assez rapide de Mme A ait été mal anticipé par la sage-femme, qui après l'avoir examinée à 3 heures 30 et avoir constaté une présentation céphalique toujours fixée haute, n'était pas restée auprès de la parturiente et a dû être requise in extremis, à 3 heures 50, par le mari de cette dernière alors que le crâne du bébé était visible à la vulve, il ne ressort pas des conclusions du rapport d'expertise que ces circonstances aient entraîné des conséquences dommageables pour la mère et pour l'enfant née à 3 heures 57 ; que si les requérants, s'appuyant sur leurs propres constatations et sur des avis médicaux qu'ils ont sollicités par ailleurs, font valoir que le handicap que présente leur enfant trouverait son origine dans une souffrance foetale due selon eux à une stagnation, avant l'arrivée de la sage-femme et l'expulsion, de la tête de l'enfant qui présentait un enroulement du cordon et était cyanosé, il est toutefois constant que jusqu'à la sortie de l'enfant le rythme cardiaque foetal est resté strictement normal, que le circulaire du cordon, lequel était lâche, a été écarté sans difficulté par la sage-femme, que le bilan d'APGAR était normal à cinq minutes et qu'aucune anomalie clinique n'a été notée dans les premiers jours de vie ; que dans ces conditions, et alors qu'il n'est pas contesté que, comme le relèvent les experts, une asphyxie per-partum entraine des conséquences cliniques beaucoup plus larges que celles d'une hémiplégie strictement unilatérale que présente le jeune Émilie, il résulte de l'instruction, sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle expertise, que les séquelles qu'elle conserve n'engagent pas la responsabilité du centre hospitalier de Sainte-Foy-lès-Lyon ;

Considérant qu'il ne résulte pas de l'instruction que l'hémiplégie dont est atteinte la jeune Émilie soit directement imputable à des actes de prévention de diagnostic ou de soins ; que, par suite, elle n'ouvre pas droit à réparation au titre de la solidarité nationale ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande indemnitaire ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête M. et Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Patrick A, au centre hospitalier de Sainte-Foy-lès-Lyon et à la Mutuelle Générale de l'Education nationale de Paris. Une copie en sera adressée aux experts.

Délibéré après l'audience du 18 mars 2010 à laquelle siégeaient :

Mme Serre, présidente de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Stillmunkes, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 avril 2010.

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N° 07LY01776


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07LY01776
Date de la décision : 08/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme SERRE
Rapporteur ?: Mme Geneviève VERLEY-CHEYNEL
Rapporteur public ?: Mme MARGINEAN-FAURE
Avocat(s) : SCP DUFOUR HARTEMANN et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-04-08;07ly01776 ?
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