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09/03/2010 | FRANCE | N°09LY00814

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 09 mars 2010, 09LY00814


Vu la requête, enregistrée par télécopie le 14 avril 2009 et régularisée le 16 avril 2009, présentée pour M. Suleyman A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805759 du 20 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des décisions en date du 6 août 2008 du préfet de l'Isère lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de

pouvoir lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une c...

Vu la requête, enregistrée par télécopie le 14 avril 2009 et régularisée le 16 avril 2009, présentée pour M. Suleyman A, domicilié ... ;

M. A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0805759 du 20 mars 2009 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir des décisions en date du 6 août 2008 du préfet de l'Isère lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir lesdites décisions ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans le délai de trente jours suivant la notification du présent arrêt sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou, à tout le moins, une autorisation provisoire de séjour dans le délai d'un mois et de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision portant refus de séjour a méconnu les dispositions de l'article L. 121-1 et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle est, en outre, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision portant refus de séjour entraîne celle de l'obligation de quitter le territoire ; que l'obligation de quitter le territoire méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 3-1 de la convention de New-York ; qu'elle est, en outre, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que, par la voie de l'exception, l'illégalité de la décision portant refus de séjour entraîne celle de la décision fixant le pays de renvoi ; que la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle est, en outre, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 23 juin 2009, accordant à M. A le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le mémoire, enregistré le 29 décembre 2009, présenté par le préfet de l'Isère qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que la décision portant refus de séjour n'a méconnu ni les dispositions de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni celles du 7° de l'article L. 313-11 du même code, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 février 2010 :

- le rapport de M. Chanel, président,

- et les conclusions de M. Gimenez, rapporteur public ;

Considérant que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté la demande de M. A, de nationalité turque, qui tendait à l'annulation pour excès de pouvoir des décisions du préfet de l'Isère en date du 6 août 2008, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

Sur la légalité de la décision portant refus de délivrance de titre de séjour :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, tout citoyen de l'Union européenne, tout ressortissant d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse a le droit de séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois s'il satisfait à l'une des conditions suivantes : / 1° S'il exerce une activité professionnelle en France ; / 2° S'il dispose pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 4° de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale, ainsi que d'une assurance maladie ; / 3° S'il est inscrit dans un établissement fonctionnant conformément aux dispositions législatives et réglementaires en vigueur pour y suivre à titre principal des études ou, dans ce cadre, une formation professionnelle, et garantit disposer d'une assurance maladie ainsi que de ressources suffisantes pour lui et pour les membres de sa famille tels que visés au 5° afin de ne pas devenir une charge pour le système d'assistance sociale ; / 4° S'il est un descendant direct âgé de moins de vingt et un ans ou à charge, ascendant direct à charge, conjoint, ascendant ou descendant direct à charge du conjoint, accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées aux 1° ou 2° ; / 5° S'il est le conjoint ou un enfant à charge accompagnant ou rejoignant un ressortissant qui satisfait aux conditions énoncées au 3°. ; qu'aux termes de l'article L. 121-3 du même code : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, le membre de famille visé au 4° ou 5° de l'article L. 121-l (...), ressortissant d'un Etat tiers, a le droit de séjourner sur l' ensemble du territoire français pour une durée supérieure à trois mois (...) ;

Considérant que M. A fait valoir que son épouse, ressortissante belge, devait prochainement débuter une formation d'assistante maternelle et que, dans l'attente, son père pourvoyait à leurs besoins ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme A, enceinte de près de neuf mois à la date de la décision attaquée, n'exerçait aucune activité professionnelle et ne justifiait pas des ressources suffisantes lui donnant droit au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, M. A, qui ne peut utilement faire valoir qu'il disposait lui-même de plusieurs promesses d'embauche, n'est pas fondé à soutenir que, son épouse disposant d'un droit au séjour, il pouvait bénéficier des 4° et 5° des dispositions précitées ; qu'il n'est pas davantage fondé à soutenir que la décision portant refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à sa situation personnelle ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) et qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que M. A soutient qu'il a vocation à vivre en France où résident son épouse, ressortissante belge, sa fille ainsi que sa soeur, de nationalité française, et où il dispose de plusieurs promesses d'embauche ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé est entré en France le 23 mars 2008, soit cinq mois avant la date de la décision attaquée ; que, si le père de M. A réside en Allemagne, ce dernier n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales en Turquie ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment de la durée et des conditions d'entrée et de séjour de l'intéressé en France et de la possibilité pour lui de reconstituer, sa cellule familiale, en Turquie ou en Belgique, la décision contestée n'a pas porté à son droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, ainsi, méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

Considérant, en premier lieu, que, pour demander l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire, le requérant ne saurait, pour les motifs précédemment indiqués, exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'un arrêté de reconduite à la frontière ou d'une obligation de quitter le territoire français, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement ;

Considérant que, pour les motifs sus-énoncés, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il ne pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire au motif qu'il avait droit à un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Considérant, en troisième lieu, que, pour les mêmes motifs, l'obligation de quitter le territoire n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ;

Considérant que si M. A soutient que la décision du 6 août 2008 priverait sa fille de sa présence en méconnaissance des stipulations précitées, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'enfant dont il s'agit n'était pas née lorsque la décision querellée a été prise ; que, par suite, le requérant ne saurait utilement se prévaloir de ces dispositions ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

Considérant, en premier lieu, que, pour demander l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi, le requérant ne saurait, pour les motifs précédemment indiqués, exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

Considérant, en deuxième lieu, que, pour les motifs sus-énoncés, la décision fixant le pays de destination n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle n'est pas davantage entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Considérant, en dernier lieu, que les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sont inopérants à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par lui et non compris dans les dépens doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Suleyman A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet de l'Isère.

Délibéré après l'audience du 2 février 2010 à laquelle siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

MM. Monnier et Segado, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 9 mars 2010.

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N° 09LY00814


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY00814
Date de la décision : 09/03/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Christian CHANEL
Rapporteur public ?: M. GIMENEZ
Avocat(s) : BRESSY-RÄNSCH DESCHAMPS VILLEMAGNE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-03-09;09ly00814 ?
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