La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/12/2009 | FRANCE | N°07LY02357

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre - formation à 3, 22 décembre 2009, 07LY02357


Vu la requête, enregistrée le 20 octobre 2007, présentée pour M. André A, domicilié à ..., M. Jean-Pierre B, domicilié ... à ..., M. Bernard B, domicilié à ..., M. Guy E, domicilié à ..., M. Jean-Claude E, domicilié à ..., M. Laurent C, domicilié à ..., M. Daniel D, domicilié à ..., M. Dominique F, domicilié à ..., Mme Danielle E, domiciliée ... à ... et M. Vincent B, domicilié à ... ;

M. A et autres demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501297 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 8 août 2007 qui a rejeté leur demande tenda

nt à l'annulation de :

- la délibération n° 35 du 13 mai 2005 par laquelle le conseil mu...

Vu la requête, enregistrée le 20 octobre 2007, présentée pour M. André A, domicilié à ..., M. Jean-Pierre B, domicilié ... à ..., M. Bernard B, domicilié à ..., M. Guy E, domicilié à ..., M. Jean-Claude E, domicilié à ..., M. Laurent C, domicilié à ..., M. Daniel D, domicilié à ..., M. Dominique F, domicilié à ..., Mme Danielle E, domiciliée ... à ... et M. Vincent B, domicilié à ... ;

M. A et autres demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0501297 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 8 août 2007 qui a rejeté leur demande tendant à l'annulation de :

- la délibération n° 35 du 13 mai 2005 par laquelle le conseil municipal de la commune de Coltines (Cantal) a décidé de maintenir en réserve une surface de 60 hectares 41 ares des terres de la section Bourg-Fraissinette-Chassagne, pour permettre l'installation de nouveaux agriculteurs et pour permettre aux ayants droit de cette section de bénéficier d'une estive collective,

- la délibération n° 36 du 13 mai 2005 par laquelle le conseil municipal de la commune de Coltines a organisé la gestion de l'estive collective de la section Bourg-Fraissinette-Chassagne pour l'année 2005 et a mandaté le maire pour fixer les modalités du fonctionnement de cette estive,

- l'arrêté du 19 mai 2005 du maire de la commune de Coltines intervenu en application de cette seconde délibération et concernant la gestion et l'entretien de l'estive collective pour l'année 2005 ;

2°) d'annuler ces décisions ;

3°) de condamner la commune de Coltines à leur verser à chacun une somme de 150 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Les requérants soutiennent que :

- pour les motifs énoncés par le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand dans son jugement du 6 avril 2005, l'arrêté du 19 mai 2005 doit être déclaré nul et de nul effet ; qu'il ne ressort pas de la compétence du conseil municipal, à défaut de commission syndicale instituée, dans la mesure ou cette commission aurait pu être constituée en application des articles L. 2411-5 et D. 2411-1 du code général des collectivités territoriales, de décider le maintien en réserve de certains lots et de décider du règlement de gestion des estives collectives ; que la décision de créer une réserve foncière exploitée en estive collective ne constitue pas une simple décision de gestion ;

- l'article L. 2411-7 du code général des collectivités territoriales prévoit que la commission syndicale est appelée à donner son avis sur les modalités de jouissance des biens de section dont les fruits sont perçus en nature ; que le fait que cette commission n'existe pas résulte de la seule décision du maire de ne pas mettre en oeuvre la désignation des membres de cette commission, comme le prévoit l'article L. 2411-5 du code général des collectivités territoriales ; qu'en effet, il est constant que le nombre d'électeur est supérieur à 10 ; que les électeur n'ont jamais été invités par le représentant de l'Etat, à la demande du maire, à procéder à la désignation des membres de la commission ;

- le Tribunal a estimé que le conseil municipal pouvait décider des modalités de jouissance des biens, dans la mesure où aucune demande n'a été présentée par deux tiers des électeurs ou le conseil municipal ; que, toutefois, en application de l'article L. 2411-3 du code général des collectivités territoriales, la décision de constituer une commission syndicale n'appartenait pas uniquement aux deux tiers des électeurs, mais aussi au conseil municipal ; que la commune, qui désire assurer seule la gestion des biens de la section, ne peut se prévaloir de l'absence de commission syndicale, faute pour elle d'avoir sollicité la désignation des membres de la commission ;

- en dehors des trois hypothèses prévues par l'article L. 2411-5 du code général des collectivités territoriales, les prérogatives de la commission syndicale ne peuvent être exercées par le conseil municipal ; qu'en l'espèce, il est constant que le nombre d'électeurs est supérieur à 10, qu'aucune convocation n'a été adressée par le représentant de l'Etat en vu de la constitution de la commission et que les revenus et produits de la section excèdent le seuil minimal prévu ; que, par suite, le conseil municipal ne pouvait se substituer à la commission syndicale ;

- dans le cadre du bail à ferme ou de la convention pluriannuelle d'exploitation prévus par l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales, seul le preneur assume les obligations qui incombent normalement au propriétaire du fonds, c'est-à-dire l'entretien du fonds ; qu'au contraire, dans le cadre du contrat de prise en pension d'animaux, la personne assume l'intégralité des travaux et obligations qui incombent normalement au propriétaire du fonds ; que la délibération du 13 mai 2005 fixe les conditions d'un contrat de prise en pension d'animaux entre la commune et les ayants droit de la section ; qu'un tel contrat n'est pas prévu par les dispositions de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales, qui précisent de manière exclusive que les terres à vocation agricole et pastorale doivent être attribuées par bail à ferme ou par convention pluriannuelle d'exploitation ; qu'en outre, ladite modalité, qui a pour conséquence d'entraîner le mélange des cheptels, est contraire à toute règle sanitaire ; que, contrairement à ce que le Tribunal a estimé, le contrat de prise en pensions d'animaux qui peut être conclu dans le cadre de la délibération du 13 mai 2005, exclut de facto l'attribution des biens par bail ou convention pluriannuelle d'exploitation ; que la prise en pension d'animaux constitue un mode de jouissance exclu par lesdites dispositions, parce qu'il empêche l'ayant droit de disposer pleinement du lot ;

- 120 hectares de la section, qui compte environ 180 hectares, ont déjà fait l'objet d'une division ; qu'en décidant de maintenir en réserve foncière les 60 hectares de Lachamp tout en refusant d'attribution d'un lot à Mme Danièle E et à M. Vincent B, le conseil municipal a créé une disparité entre les ayants droit ; que l'attribution d'un lot à ces intéressés aurait pourtant été justifiée ; que, si le 6ème alinéa de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales prévoit, chaque fois que possible, la constitution d'une réserve foncière destinée à permettre ou faciliter les nouvelles installations agricoles, la réserve doit avoir effectivement pour objet de permettre l'installation d'agriculteurs ; que les demandes d'attribution de lots de section présentées par les susnommés ont toujours été rejetées ; que le conseil municipal ne peut donc justifier sa décision de constitution d'une réserve foncière ; que le conseil municipal ne peut justifier sa décision par la volonté de permettre aux ayants droit de bénéficier de l'estive collective, ce qui est contraire aux dispositions de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales, qui n'autorisent pas la constitution d'une réserve foncière dans un tel but ; qu'en réalité, l'estive collective a pour but de maintenir un mode de gestion en dehors des dispositions du 2ème alinéa de cet article ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 16 mai 2008, présenté pour la commune de Coltines, qui demande à la Cour :

- de rejeter la requête ;

- de condamner les requérants à lui verser solidairement une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

La commune soutient que :

- les délibération et l'arrêté attaqués sont rigoureusement identiques aux délibérations du 3 mai 2004 et à l'arrêté du même jour, qui ont fait l'objet d'un recours, lequel a été rejeté par un jugement du 28 mars 2006 du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand ; qu'il y a donc lieu de rejeter le présent recours, rigoureusement identique au précédent ; que la requête tend à l'annulation de décisions confirmatives ;

- les requérants, qui restent bénéficiaires des biens de la section et ne sont pas privés de leur qualité d'ayants droit, ne disposent d'aucun intérêt à agir ;

- la quasi totalité de la superficie de la section, qui est d'environ 210 hectares, fait l'objet de baux à ferme et de conventions pluriannuelles d'exploitation ; que la réserve foncière, dont la superficie n'est que de 58 hectares 12, a toujours été utilisée en estive collective, depuis plus de 30 ans ; que cette estive résulte des décisions des autorités municipales et des usages locaux ; que cette façon de procéder est conforme à la loi, l'avant dernier alinéa de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales précisant d'ailleurs que, chaque fois que possible, il sera constitué une réserve foncière destinée à permettre ou faciliter de nouvelles installations agricoles ; qu'une réserve foncière doit donc bénéficier d'une souplesse de contrat ; que la réserve foncière a permis l'installation d'un jeune agriculteur en 2005 ; que d'autres jeunes agriculteurs peuvent solliciter prochainement un superficie ; qu'il n'est pas contestable que l'estive collective constitue, de tous temps, le mode de gestion de la réserve foncière ; que la seconde délibération attaquée constitue seulement un règlement intérieur ; que la décision de constituer une réserve foncière avec jouissance collective résulte de délibérations antérieures qui n'ont jamais été critiquées ; que, dans l'attente, la réserve peut être jouie de façon collective, selon les usages locaux ; que la notion même de réserve justifie que les terrains puissent être disponibles et réservés ; qu'en conséquence, les terrains ne peuvent être grevés d'un bail à ferme, ou même d'un convention pluriannuelle ;

En application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, par une ordonnance du 6 mars 2009, la clôture de l'instruction a été fixée au 27 mars 2009 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 2009 :

- le rapport de M. Chenevey, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Besson, rapporteur public ;

Considérant que, par une délibération n° 35 du 13 mai 2005, le conseil municipal de la commune de Coltines a décidé de maintenir en réserve une partie, d'une surface de 60 hectares 41 ares, des terrains appartenant à la section de commune de Bourg-Fraissinette-Chassagne, pour permettre l'installation de nouveaux agriculteurs et, dans l'attente, pour permettre aux ayants droit de la section de bénéficier d'une estive collective ; que, par une seconde délibération n° 36 du même jour, le conseil municipal a organisé la gestion de l'estive collective pour l'année 2005 et a mandaté le maire pour fixer les modalités de fonctionnement de cette estive ; qu'en application de cette délibération, par un arrêté du 19 mai 2005, le maire a défini les modalités de gestion et d'entretien de l'estive collective pour l'année 2005 ; que M. A et neuf autres ayants droit de la section de commune de Bourg-Fraissinette-Chassagne demandent l'annulation de ces deux délibérations et de cet arrêté ;

Sur les fins de non-recevoir opposées par la commune de Coltines :

Considérant, en premier lieu, que les requérants, qui sont tous des ayants droit de la section de commune de Bourg-Fraissinette-Chassagne, disposent d'un intérêt à agir à l'encontre des décisions attaquées, qui concernent cette section de commune, même si, comme le fait valoir la commune de Coltines, leur qualité d'ayant droit n'est pas remise en cause par ces décisions ;

Considérant, en deuxième lieu, que les requérants ont précédemment saisi le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand d'une demande d'annulation d'une délibération du 3 mai 2004 organisant la gestion des biens de la section de commune de Bourg-Fraissinette-Chassagne et d'un arrêté du même jour réglementant le droit d'estive sur cette section pour 2004 ; que cette demande a été rejetée par un jugement n° 040971 du 28 mars 2006 ; que ce jugement ne fait pas obstacle à ce que les requérants demandent l'annulation de nouvelles décisions du conseil municipal ;

Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que des décisions ayant le même objet que les décisions attaquées aurait précédemment été prises par le conseil municipal et le maire et seraient devenues définitives ; que, par suite, la commune de Coltines ne peut soutenir que les délibérations et l'arrêté attaqués présentent un caractère purement confirmatif ;

Sur la légalité des décisions attaquées :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 2411-7 du code général des collectivités territoriales : La commission syndicale est appelée à donner son avis sur les modalités de jouissance des biens de la section dont les fruits sont perçus en nature (...) ;

Considérant qu'en application de ces dispositions, les décisions attaquées ne pouvaient, compte tenu de leur objet précité, intervenir qu'après avis de la commission syndicale de la section de commune de Bourg-Fraissinette-Chassagne ; que, si la commission syndicale n'a pas été constituée, la commune de Coltines ne se prévaut d'aucune circonstance qui aurait rendu impossible la désignation des membres de cette commission, dans les conditions prévues par l'article L. 2411-3 du code général des collectivités territoriales ; qu'il n'est pas contesté qu'aucune des hypothèses prévues par l'article L. 2411-5 du même code, dans lesquelles la commission syndicale n'est pas constituée, n'est vérifiée en l'espèce ; que, dans ces conditions, à défaut d'avoir été précédées d'avis de la commission syndicale, les décisions attaquées sont intervenues sur une procédure irrégulière ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requérants sont fondés à soutenir que les délibérations du 13 mai 2005 et l'arrêté du 19 mai 2005 sont entachés d'illégalité ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'annuler le jugement attaqué et ces décisions ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les requérants, qui ne sont pas, dans la présente instance, parties perdantes, soient condamnés à payer à la commune de Coltines la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de cette commune le versement d'une somme quelconque au bénéfice des requérants sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand du 8 août 2007 est annulé.

Article 2 : Les délibérations du 13 mai 2005 du conseil municipal de la commune de Coltines et l'arrêté du 19 mai 2005 du maire de cette commune sont annulés.

Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. André A, à M. Jean-Pierre B, à M. Bernard B, à M. Guy E, à M. Jean-Claude E, à M. Laurent C, à M. Daniel D, à M. Dominique F, à Mme Danielle E, à M. Vincent B, à la commune de Coltines et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2009 à laquelle siégeaient :

M. Fontbonne, président de la formation de jugement,

M. Chenevey et Mme Chevalier-Aubert, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 22 décembre 2009.

''

''

''

''

1

2

N° 07LY02357


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 07LY02357
Date de la décision : 22/12/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FONTBONNE
Rapporteur ?: M. Jean-Pascal CHENEVEY
Rapporteur public ?: M. BESSON
Avocat(s) : SCP MOINS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-12-22;07ly02357 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award