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15/12/2009 | FRANCE | N°07LY01988

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 15 décembre 2009, 07LY01988


Vu le recours, enregistré le 31 août 2007, présenté pour l'Etat par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ;

Le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0302250 du 8 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a condamné l'Etat à verser à M. Bernard A la somme de 55 800 euros, en réparation du préjudice résultant du refus de maintenir celui-ci en activité ;

2°) de fixer le montant de l'indemnité due à M. A à la somme

de 12 855,12 euros ;

Le ministre soutient que M. A ne pouvait prétendre qu'à une an...

Vu le recours, enregistré le 31 août 2007, présenté pour l'Etat par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ;

Le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0302250 du 8 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a condamné l'Etat à verser à M. Bernard A la somme de 55 800 euros, en réparation du préjudice résultant du refus de maintenir celui-ci en activité ;

2°) de fixer le montant de l'indemnité due à M. A à la somme de 12 855,12 euros ;

Le ministre soutient que M. A ne pouvait prétendre qu'à une année de prolongation d'activité dès lors qu'à la date du 13 juin 2004, l'intéressé aurait bénéficié d'une pension au taux maximum de 75 % ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré les 19 novembre et 4 décembre 2007, présenté pour M. A qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que la requête est irrecevable en l'absence de production du jugement attaqué ; que le ministre n'est pas recevable à faire état, en appel, d'une loi antérieure au jugement et dont il n'a pas demandé l'application au tribunal ; que les fonctionnaires bénéficiaires du maintien en activité en vertu des dispositions de l'article 88 de la loi du 28 décembre 2001 continuent à bénéficier de ce dispositif jusqu'à leur radiation des cadres ; qu'il pouvait bénéficier du maintien en activité au regard des dispositions de l'article 69 de la loi du 21 août 2003 dès lors qu'il n'a pas travaillé 160 trimestres ; que le montant de sa perte de revenus s'élève à 19 645,36 euros nets par an, primes incluses ; que de plus, l'évaluation de son préjudice doit tenir compte de la perte de chance d'être promu au grade de commissaire divisionnaire et de son préjudice moral ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 avril 2008, présenté pour M. A qui conclut au rejet de la requête et demande la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 3 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que le tribunal a exactement évalué son préjudice dès lors qu'il aurait pu bénéficier de plusieurs années de maintien en activité, que les annuités obtenues au titre de la bonification du cinquième prévue par la loi du 8 avril 1957 sont réduites à due concurrence des services accomplis au-delà de la limite d'âge, qu'il avait une chance sérieuse d'être promu au grade supérieur pendant cette prolongation d'activité, qu'il y a lieu de tenir également compte de la perte des primes, de l'incidence de la décision sur le montant de sa pension, et de son préjudice moral ;

Vu l'ordonnance en date du 23 juin 2008 fixant la clôture d'instruction au 25 août 2008, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2001-1276 du 28 décembre 2001 ;

Vu la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 ;

Vu le décret n° 95-655 du 9 mai 1995 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er décembre 2009 :

- le rapport de M. Givord, président-assesseur ;

- les observations de M. A ;

- et les conclusions de Mme Schmerber, rapporteur public ;

La parole ayant été, de nouveau, donnée à la partie présente ;

Considérant que par un jugement du 7 juin 2007, le Tribunal administratif de Grenoble a annulé la décision du 13 décembre 2002, confirmée le 1er avril 2003, par laquelle le MINISTRE DE L'INTERIEUR avait rejeté la demande de M. A de maintien en activité au-delà de la limite d'âge, et a condamné l'Etat à lui payer la somme de 55 800 euros, en réparation du préjudice subi pendant trois ans, jusqu'à l'âge de 60 ans ; que le MINISTRE DE L'INTERIEUR demande à la Cour de réformer ce jugement en tant qu'il a indemnisé l'intéressé pour une période de plus d'une année, et pour un montant supérieur à 12 855 euros ;

Considérant en premier lieu, que le jugement attaqué du 8 juin 2007 était annexé à la requête du MINISTRE DE L'INTERIEUR ; que dès lors, M. A n'est pas fondé à soutenir que la requête susvisée du MINISTRE DE L'INTERIEUR était irrecevable faute d'être accompagnée de ce jugement ; qu'en deuxième lieu, le MINISTRE DE L'INTERIEUR, défendeur en première instance, est recevable à faire valoir devant le juge d'appel tout moyen de droit, même non présenté devant le tribunal ;

Considérant qu'aux termes du II. de l'article 88 de la loi susvisée du 28 décembre 2001 : - Sans préjudice des droits au recul des limites d'âge reconnus au titre des dispositions de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires des corps actifs de la police nationale mentionnés à l'article 19 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité, et dont la période de services effectifs accomplis est inférieure au nombre maximal d'annuités liquidables dans la pension civile mentionné à l'article L. 14 du code des pensions civiles et militaires de retraite, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, peuvent, sur leur demande et sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en position d'activité. / La prolongation d'activité prévue à l'alinéa précédent, soumise à reconduction annuelle par le MINISTRE DE L'INTERIEUR, ne peut avoir pour effet de maintenir le fonctionnaire concerné en activité au-delà de son soixantième anniversaire. / Cette prolongation d'activité est prise en compte au titre de la constitution et de la liquidation du droit à pension, nonobstant les dispositions prévues par les articles L. 10 et L. 26 bis du code des pensions civiles et militaires de retraite. Toutefois, les annuités obtenues au titre de la bonification du cinquième prévue par l'article 1er de la loi n° 57-444 du 8 avril 1957 instituant un régime particulier de retraites en faveur des personnels actifs de police sont réduites à due concurrence de la durée des services accomplis au-delà de la limite d'âge. ; qu'il résulte de ces dispositions que le fonctionnaire maintenu en activité au-delà de la limite d'âge applicable à son grade pour une année, n'a pas un droit acquis à être maintenu en activité jusqu'à son soixantième anniversaire ; qu'il appartient à l'autorité administrative de faire application des textes en vigueur à la date de chacun des renouvellements annuels de l'autorisation ;

Considérant qu'aux termes de l'article 80 de la loi susvisée du 21 août 2003 : Sauf disposition spéciale contraire, les dispositions du présent titre entrent en vigueur le 1er janvier 2004. ; qu'en l'absence de dispositions spéciales, les nouvelles conditions de maintien en activité au-delà de la limite d'âge fixées par l'article 69 de la loi susmentionnée sont entrées en vigueur le 1er janvier 2004 ; que dès lors, M. A, ayant atteint le 14 juin 2003 la limite d'âge de son grade, son maintien en activité pour une année supplémentaire, le 14 juin 2004, n'aurait pu être autorisé que sur le fondement des dispositions de l'article 69 de la loi susvisée du 21 août 2003 ;

Considérant qu'aux termes de l'article 69 de la loi susvisée du 21 août 2003 : Sont insérés, après l'article 1er de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, deux articles 1er-1 et 1er-2 ainsi rédigés :

Art. 1er-1. - Sous réserve des droits au recul des limites d'âge reconnus au titre des dispositions de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité. / La prolongation d'activité prévue à l'alinéa précédent ne peut avoir pour effet de maintenir le fonctionnaire concerné en activité au-delà de la durée des services liquidables prévue à l'article L. 13 du même code ni au-delà d'une durée de dix trimestres. / Cette prolongation d'activité est prise en compte au titre de la constitution et de la liquidation du droit à pension. (...). ; et qu'aux termes de l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite : I.-La durée des services et bonifications admissibles en liquidation s'exprime en trimestres. Le nombre de trimestres nécessaires pour obtenir le pourcentage maximum de la pension civile ou militaire est fixé à cent soixante trimestres. / Ce pourcentage maximum est fixé à 75 % du traitement ou de la solde mentionné à l'article L. 15. / Chaque trimestre est rémunéré en rapportant le pourcentage maximum défini au deuxième alinéa au nombre de trimestres mentionné au premier alinéa. / II. Le nombre de trimestres mentionné au premier alinéa du I évolue dans les conditions définies, pour la durée d'assurance ou de services, à l'article 5 de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites. ;

Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date du 14 juin 2003, M. A avait un total des services et bonifications de trente huit années sept mois et dix-huit jours lui donnant droit à une pension établie sur le pourcentage maximum de 75 % du traitement prévu par les dispositions précitées ; qu'ainsi, et alors même qu'il ne comptait pas cent soixante trimestres de service, le 14 juin 2004, son maintien en activité ne pouvait pas être légalement autorisé par le ministre ; que par suite, ce dernier est fondé à soutenir que M. A ne justifie pas d'une perte de rémunération au-delà du mois de juin 2004 ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'il n'est pas établi par les pièces du dossier que M. A a perdu une chance sérieuse de promotion, entre les mois de juin 2003 et juin 2004, au grade de commissaire divisionnaire de police ; que dès lors, l'intéressé n'est pas fondé à demander une indemnité en compensation de la non perception d'un traitement, de primes et d'une pension de retraite d'un montant supérieur à celui effectivement liquidé ;

Considérant, en troisième lieu, que le préjudice financier résultant du refus illégal de maintien en activité de M. A est égal à la différence entre le traitement net qu'il aurait perçu s'il avait été maintenu en activité jusqu'au mois de juin 2004, y compris les indemnités dont il aurait bénéficié, et la pension de retraite dont il a bénéficié ; qu'il ressort des pièces du dossier que ce préjudice doit être évalué à la somme de 18 645,36 euros ;

Considérant, en quatrième lieu, que M. A perçoit le pourcentage maximum de la pension fixé par les dispositions précitées de l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite ; que dès lors, l'intéressé n'est pas fondé à soutenir que son maintien en activité lui aurait permis de bénéficier d'un montant plus élevé de sa pension de retraite ;

Considérant, en dernier lieu, que dans les circonstances de l'espèce il sera fait une juste appréciation du préjudice moral de M. A, résultant du refus illégal de le maintenir en activité, en lui allouant la somme de 1 000 euros ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES, est fondé à demander la réformation du jugement susvisé du Tribunal administratif de Grenoble, et à ce que l'indemnité que l'Etat a été condamné à verser à M. A soit fixée à la somme de 19 645,36 euros ;

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'a pas la qualité de partie perdante, verse à M. A une somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE

Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. A la somme de 19 645,36 euros.

Article 2 : L'article 2 du jugement susvisé du 8 juin 2007 du Tribunal administratif de Grenoble est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Les conclusions de M. A tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au MINISTRE DE L'INTERIEUR, DE L'OUTRE-MER ET DES COLLECTIVITES TERRITORIALES et à M. Bernard A.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2009, à laquelle siégeaient :

M. Fontanelle, président de chambre,

M. Givord, président-assesseur,

Mme Pelletier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2009.

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N° 07LY01988

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. FONTANELLE
Rapporteur ?: M. Pierre Yves GIVORD
Rapporteur public ?: Mme SCHMERBER
Avocat(s) : SCP BORE ET SALVE DE BRUNETON

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 15/12/2009
Date de l'import : 14/10/2011

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 07LY01988
Numéro NOR : CETATEXT000021750110 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-12-15;07ly01988 ?
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