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10/11/2009 | FRANCE | N°07LY02137

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 10 novembre 2009, 07LY02137


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 25 septembre 2007, présentée pour M. et Mme Jean-Michel M. A, demeurant Chemin du Grand Champ à St Genis Laval (69230) ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503636 du 3 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2000, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la d

charge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 5 000 euros au t...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 25 septembre 2007, présentée pour M. et Mme Jean-Michel M. A, demeurant Chemin du Grand Champ à St Genis Laval (69230) ;

M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0503636 du 3 juillet 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2000, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

M. et Mme A soutiennent que :

- le Tribunal administratif de Lyon a outrepassé sa compétence en fondant son jugement sur l'article 759 du code général des impôts alors que cet article concerne les droits d'enregistrement ;

- il y a lieu pour la Cour de poser une question préjudicielle au juge judiciaire sur le caractère impératif ou non de l'article 759 du code général des impôts pour la détermination de la valeur des titres à déclarer pour les droits de mutation dès lors que le juge administratif n'est pas compétent pour interpréter cet article, qu'il existe une difficulté sérieuse quant à la portée de ce texte et que cette question préjudicielle est nécessaire à la solution du litige ;

- le Tribunal a entaché son jugement d'erreur de droit dès lors qu'en vertu de l'article 150-0 D du code général des impôts, le prix de revient des actions acquises à titre gratuit s'entend de la valeur retenue pour le calcul des droits de donation et non de la valeur à retenir pour le calcul de ces droits défini à l'article 759 du code général des impôts ; la plus-value éventuelle devait être ainsi déterminée à partir de la valeur qui a été retenue pour le calcul des droits de donation qui est la valeur vénale estimée et déclarée par les donateurs pour le calcul de ces droits, soit 77 euros, laquelle était supérieure au prix minimum des titres cotés défini à l'article 759 et ne contrevenait pas à ces dispositions ; les actions ayant été cédées au même prix, ils n'ont réalisé aucune plus-value ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 août 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- la demande de question préjudicielle doit être rejetée dès lors qu'il appartient au juge administratif, juge de l'impôt, de se prononcer sur la portée des articles 150-0 A et suivants du code général des impôts concernant l'imposition sur le revenu des plus-values de cession à titre onéreux d'actions, ainsi que sur les facteurs retenus par ces dispositions pour déterminer l'imposition même si elles renvoient en partie au régime des droits d'enregistrement ;

- les dispositions des articles 150-0 D et 759 du code général des impôts doivent être combinées pour déterminer le prix de revient des actions acquises à titre gratuit par les requérants ; la valeur retenue pour la détermination des droits de mutation mentionnée à l'article 150-0 A du code général des impôts servant à la détermination de ce prix de revient renvoie aux dispositions de l'article 759 et correspond au cours moyen au jour de la transmission des actions cotées au second marché qui est constitué par la moyenne du cours le plus haut et du cours le plus bas de la séance considérée ou, à défaut par le seul cours s'il n'y a eu qu'un cours ; c'est à bon droit que l'administration a ainsi considéré que la valeur d'acquisition de l'action de la SA Distriborg groupe qui devait être retenue était celle établie à l'issue de la séance du bourse du 4 juillet 2000, date de la donation, soit 44 euros au lieu de 77 euros déclarés ; la valeur vénale de 77 euros retenue pour la cession de gré à gré au groupe Wessanen d'un bloc d'actions majoritaires représentant 51,94% du capital, qui a été finalisée le 12 juillet 2000, ne pouvait servir de base à la taxation de la donation qui a eu lieu le 4 juillet alors que les titres donnés aux requérants ne représentaient que 5% du capital et ne constituait ainsi qu'un paquet minoritaire, qu'à la date du 4 juillet aucun accord de cession avec le groupe Wessanen n'était intervenu et les négociations étaient en cours, que la vente des actions à ce groupe est postérieure à la donation et a comporté logiquement une prime significative liée au transfert du pouvoir de contrôle de la société ;

- les requérants étaient redevables de l'intégralité de la plus-value réalisée sur les titres Distriborg démembrés eu égard aux dispositions de l'article 578 du code civil dès lors qu'ils étaient nus-propriétaires, que les titres ont été cédés en pleine propriété et le remploi des fonds a été maintenu démembré ;

- la demande des requérants tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative devra être rejetée dès lors qu'ils ne justifient pas le montant demandé et que l'Etat n'est pas la partie perdante dans cette instance ;

Vu les mémoires en réplique enregistrés les 24 septembre et 27 octobre 2008, présentés pour M. et Mme A, qui concluent aux mêmes fins que leur requête par les mêmes moyens ;

Ils soutiennent en outre que :

- en matière de cession de biens acquis à titre gratuit, le prix de revient servant au calcul de la plus-value est celui qui a été retenu pour les droits d'enregistrement ; il n'est pas contesté par l'administration qu'ils ont bénéficié d'une donation pour laquelle les droits ont été calculés sur la base d'une valeur unitaire de 77 euros ; ainsi, et en vertu de l'article 150-0 D du code général des impôts dont il doit être fait une stricte application, la plus-value de cession devait être déterminée à partir de ce montant qui a servi de base de calcul aux droits de mutation à titre gratuit, aucune plus-value n'ayant été ainsi réalisée ;

- à défaut de dispositions fiscales particulières entre le 1er janvier 2000 et le 13 juin 2001, l'instruction 5 G-15-94 du 27 octobre 1994 et les articles 92 B, 92 J, 92 K et 160 du code général des impôts ayant été abrogés à compter du 1er janvier 2000 compte tenu de la loi de finances 2000, il convient de se référer aux dispositions du droit civil et de tenir compte du démembrement de propriété pour déterminer la plus-value litigieuse ; conformément à la jurisprudence des Tribunaux judiciaires, la plus-value de cession réalisée doit être imposée pour partie chez l'usufruitier et pour partie chez le nu-propriétaire à concurrence des droits dont dispose chacun d'eux ;

- contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal, ils n'ont pas entendu invoquer l'application de l'instruction 5-C-1-01 du 13 juin 2001 sur le fondement de l'article L. 80-A du livre des procédures fiscales ; en outre, les instructions sont en tout état de cause interprétatives de droit et toujours invocables par le contribuable et opposables à l'administration ;

Vu le mémoire reçu par télécopie le 13 octobre 2009 et régularisé le même jour, présenté pour le ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ; il soutient en outre que l'instruction 5 C-1-01 du 3 juillet 2001, qui n'est applicable qu'à compter de sa date de publication, reprend dans son article 15 les termes des dispositions antérieures ;

Vu le mémoire reçu le 16 octobre 2009, présenté pour M. et Mme A, qui concluent aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 octobre 2009:

- le rapport de M. Segado, premier conseiller ;

- les observations de Me Chetail, avocat de M. et Mme A ;

- et les conclusions de M. Gimenez, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que, le 4 juillet 2000, les membres du foyer fiscal composé par M. et Mme A et leurs trois enfants mineurs ont acquis à titre gratuit, par donation-partage consentie par le père de Mme A, 2000 titres en pleine propriété et la nue-propriété de 11 470 titres de la société Distriborg cotés sur le second marché de la bourse de Paris ; qu'alors que le cours de l'action était à cette date de 44 euros, les requérants ont déclaré, pour le calcul des droits de mutation, que la valeur de la société Distriborg s'élevait à 77 euros l'action ; que les contribuables ont cédé ensuite leurs droits les 13 juillet et 30 septembre 2000 au prix de 77 euros l'action et n'ont pas ainsi déclaré de plus-value imposable ; que l'administration a remis en cause le prix de l'acquisition de ces titres, qu'elle a fixé à 44 euros, et a imposé entre les mains de M. et Mme A la plus-value réalisée, calculée par différence entre le prix d'acquisition de 44 euros et le prix de cession de 77 euros ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2000 à raison de ce redressement ;

Considérant qu'aux termes de l'article 150-0 A du code général des impôts, alors applicable : I. - 1. Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles ainsi que de l'article 150 A bis, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement ou par personne interposée, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu lorsque le montant de ces cessions excède, par foyer fiscal, 50 000 francs par an (...) ; qu'aux termes de l'article 150-0 D du même code, dans sa rédaction alors applicable: 1. Les gains nets mentionnés au I de l'article 150-0 A sont constitués par la différence entre le prix effectif de cession des titres ou droits, net des frais et taxes acquittés par le cédant, et leur prix effectif d'acquisition par celui-ci ou, en cas d'acquisition à titre gratuit, leur valeur retenue pour la détermination des droits de mutation (...) ; qu'aux termes de l'article 759 du même code, dans sa version applicable aux faits de l'espèce : Pour les valeurs mobilières (...) admises aux négociations sur un marché réglementé le capital servant de base à la liquidation et au paiement des droits de mutation à titre gratuit est déterminé par le cours moyen au jour de la transmission. ;

Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ces dispositions que, pour le calcul de la plus-value imposable définie aux articles 150-0 A et 150-0 D du code général des impôts, la valeur de l'action à retenir pour la fixation du prix d'acquisition des titres obtenus à titre gratuit est celle sur laquelle auraient dû être légalement assis les droits d'enregistrement ; que, par suite, cette valeur ne peut être déterminée, en vertu des dispositions précitées de l'article 759 du code général des impôts, qu'à partir du cours moyen de l'action au jour de l'acquisition, alors même que les requérants auraient déclaré une somme supérieure pour les droits d'enregistrement ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de poser une question préjudicielle à l'autorité judiciaire pour que celle-ci détermine la portée de l'article 759 précité, l'administration était fondée à écarter le montant de 77 euros déclaré comme assiette des droits de mutation et à retenir une valeur d'acquisition de 44 euros ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 578 du code civil : L'usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d'en conserver la substance. ; qu'il ressort de ces dispositions que le nu-propriétaire est le propriétaire des biens dont l'usufruitier n'a que la jouissance temporaire ; qu'ainsi, l'usufruitier est assujetti aux impôts liés à la jouissance desdits biens tandis que le nu-propriétaire est redevable de ceux résultant de leur détention, sauf lorsque la loi ou une convention de quasi-usufruit en a disposé autrement ; que, par suite, le gain en capital réalisé à l'occasion de la cession d'un portefeuille de valeurs mobilières, dont le produit de la vente a fait l'objet d'un remploi, est imposable au seul nom du nu-propriétaire desdites valeurs ; qu'il s'ensuit que, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme A, la plus-value réalisée à l'occasion de la cession des actions qu'ils détenaient en nue-propriété, qui a engendré un gain en capital et dont le produit de la vente a été entièrement remployé, ne saurait être répartie entre eux-mêmes et les usufruitiers ; qu'enfin, si les requérants ont entendu invoquer les dispositions de la fiche n°1 de l'instruction 5 C-1-01 du 13 juin 2001 publiée le 3 juillet 2001, ils ne sauraient utilement s'en prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, dès lors que les dispositions se rapportant à leur situation contenues dans cette instruction ne rajoutent rien à la loi fiscale ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon, qui n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence en décidant de ne pas surseoir à statuer pour poser une question préjudicielle à l'autorité judiciaire, a rejeté leur demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Jean-Michel A et au ministre du budget, des comptes publics, de la fonction publique et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 20 octobre 2009, où siégeaient :

M. Chanel, président de chambre,

M. Pourny, premier conseiller,

M. Segado, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 10 novembre 2009.

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N° 07LY02137


Type d'affaire : Administrative

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. CHANEL
Rapporteur ?: M. Juan SEGADO
Rapporteur public ?: M. GIMENEZ
Avocat(s) : SCP LAMY et ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 10/11/2009
Date de l'import : 14/10/2011

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 07LY02137
Numéro NOR : CETATEXT000021385381 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-11-10;07ly02137 ?
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