La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/11/2009 | FRANCE | N°08LY00632

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 03 novembre 2009, 08LY00632


Vu, enregistrée le 19 mars 2008, la requête présentée pour Mme Fatiha A, domiciliée chez Mme Amina A, ... ;

Elle demande à la Cour :

1°) l'annulation du jugement n° 0707647 du Tribunal administratif de Lyon du 12 février 2008 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 7 juin 2007 par lequel le préfet du Rhône a rejeté sa demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désigné le pays de renvoi ;

2°) l'annulation de cet arrêté ;
r>3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 400 euros au titre de l'articl...

Vu, enregistrée le 19 mars 2008, la requête présentée pour Mme Fatiha A, domiciliée chez Mme Amina A, ... ;

Elle demande à la Cour :

1°) l'annulation du jugement n° 0707647 du Tribunal administratif de Lyon du 12 février 2008 qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 7 juin 2007 par lequel le préfet du Rhône a rejeté sa demande tendant à la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désigné le pays de renvoi ;

2°) l'annulation de cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- elle a vécu 17 ans en France, ses 3 frères et soeurs étant français, ses parents y résidant également, et a été victime d'un mariage forcé, ayant fait l'objet de violences conjugales et a dû entamer une procédure de divorce, un jugement étant intervenu le 16 juin 2007, lui confiant la garde habituelle de ses 4 enfants ;

- elle était enseignante en Français ;

- elle s'occupe activement de ses parents malades et de sa soeur atteinte de sclérose en plaque et présente tous les gages d'insertion ;

- son droit à une vie familiale normale a été méconnu, la présence de son ex-mari en Algérie n'étant pas une attache persistante et elle ne peut plus exercer que très difficilement la profession d'enseignante en Algérie ;

- la décision d'obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale ;

- l'article 3-1 de la convention de New York a été méconnu ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 7 juillet 2008, le mémoire présenté par le préfet du Rhône qui conclut au rejet de la requête ;

Il expose que :

- Mme A s'est mariée en Algérie en 1990, le divorce a été prononcé en octobre 2006 et elle n'a pas obtenu la garde de ses 4 enfants ;

- elle a vécu 25 ans en Algérie où elle a fondé une famille, a eu 4 enfants et n'est pas isolée, y ayant de la famille, notamment sa mère et son frère ou sa soeur aînée ;

- elle est entrée en France en août 2005 ;

- âgée de 40 ans, elle peut mener sa propre vie familiale ;

- sa décision n'a pas pour effet de séparer les enfants de leur mère.

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du 13 juin 2008 accordant à Mme Fatiha A l'aide juridictionnelle totale ;

Vu, enregistrés les 19 août et 29 octobre 2008, les mémoires complémentaires présentés pour Mme Fatiha A qui persiste dans ses précédents moyens et conclusions, soutenant en outre que :

- elle a la garde de ses enfants ;

- sa mère vit en France comme son père, en situation régulière ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi, et au séjour en France des ressortissants algériens et de leur famille ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er octobre 2009 :

- le rapport de M. Picard, premier conseiller ;

- les observations de Me Pillet, avocat de Mme A ;

- et les conclusions de Mme Marginean-Faure, rapporteur public ;

La parole ayant été de nouveau donnée aux parties présentes ;

Considérant que Mme A, ressortissante algérienne née en 1967, est entrée en France le 24 août 2005 sous couvert d'un visa court séjour ; que par un courrier en date du 19 septembre 2005, elle a sollicité, sur le fondement de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien susvisé un titre de séjour mention vie privée et familiale , implicitement puis expressément refusé par un arrêté du préfet du Rhône du 7 juin 2007 qui a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français et désigné le pays de renvoi ; qu'elle a contesté cet arrêté devant le Tribunal administratif de Lyon qui, par un jugement du 12 février 2008, a rejeté sa demande ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ; qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : Le certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'intéressée est arrivée en France avec sa mère en 1969 à l'âge de 2 ans pour rejoindre son père qui y résidait ; qu'elle y a fait ses études jusqu'en 1986 ; que repartie en Algérie où elle s'est mariée en 1990 et a travaillé en qualité de professeur de français, elle a décidé de regagner la France accompagnée de ses quatre enfants en 2005 à la suite des violences subies de la part de son mari resté en Algérie ; que son père et sa mère vivent régulièrement en France et ses trois frères et soeurs sont de nationalité française ; que dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et alors même qu'elle n'était en France que depuis près de deux ans, le refus de titre en litige est intervenu en méconnaissance des stipulations ci-dessus rappelées des articles 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 6 de l'accord franco-algérien ; que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi sont privées de base légale ; que Mme A est par suite fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;

Considérant qu'il y a lieu en l'espèce, en application des dispositions combinées des articles 37.2 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative et sous réserve que le conseil de Mme A renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le paiement à celui-ci d'une somme de 1 000 euros ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 12 février 2008 et l'arrêté du préfet du Rhône du 7 juin 2007 sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera, en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 1 000 euros au conseil de Mme A, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Fatiha A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet du Rhône.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2009 à laquelle siégeaient :

Mme Serre, présidente de chambre,

Mme Verley-Cheynel, président-assesseur,

M. Picard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 novembre 2009.

''

''

''

''

1

3

N° 08LY00632


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00632
Date de la décision : 03/11/2009
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme SERRE
Rapporteur ?: M. Vincent-Marie PICARD
Rapporteur public ?: Mme MARGINEAN-FAURE
Avocat(s) : DEBRAY JACQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-11-03;08ly00632 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award