Vu le recours, enregistré le 1er août 2007, présenté par le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES ET DE LA SOLIDARITE domicilié 39-43 quai André Citroën à Paris Cedex 15 (75902) ;
Le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES ET DE LA SOLIDARITE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°s 0506488-0604821 du 8 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon, sur les demandes de la société Irisbus et de la société Iveco France :
- d'une part, a annulé ses décisions des 7 février 2005 et 5 juillet 2006 par lesquelles ont été rejetées les demandes d'inscription de l'établissement d'Annonay sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante,
- d'autre part, lui a enjoint de procéder à l'inscription de cet établissement sur la liste précitée dans un délai de trois mois à compter de la notification du jugement ;
2°) de rejeter les demandes présentées par les sociétés Irisbus et Iveco France ;
Il soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les activités de calorifugeage à l'amiante représentaient, compte tenu du nombre d'opérations et d'installations en question, une part significative de l'activité de la société et que ces activités concernaient un nombre significatif de salariés de l'établissement d'Annonay, alors que l'activité de calorifugeage à l'amiante ne présentait qu'un caractère accessoire ne concernant que 1,3 % des salariés et ne s'effectuant que dans deux ateliers sur neuf ;
- c'est également à tort que les premiers juges se sont fondés sur les maladies professionnelles liées à l'amiante et sur le nombre de salariés en suivi médical spécial, au titre d'une exposition à l'amiante, pour considérer que les activités de calorifugeage à l'amiante ont concerné un nombre significatif de salariés de cet établissement, alors que les activités accessoires de calorifugeage n'ont pas constitué une activité générale et permanente qui aurait exposé systématiquement l'ensemble du personnel ;
- la demande d'inscription sur la liste s'inscrit dans un contexte de réduction d'effectifs ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 11 janvier 2008, présenté pour la société Iveco France, représentée par son directeur général ; la société Iveco France conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 10 000 euros soit mise à la charge de l'Etat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- les activités exercées sur le site d'Annonay nécessitaient des activités régulières et significatives de calorifugeage et de découpe de matériaux composés d'amiante et ces opérations de calorifugeage, de découpe et de pose de ces matériaux étaient quotidiennes et indispensables à l'activité de cet établissement ;
- compte tenu des activités exercées au sein de l'établissement, un nombre significatif de salariés était concerné par les activités de calorifugeage ; la surface des bâtiments concernés par l'amiante était plus importante que celle retenue par l'administration, même si deux étaient particulièrement concernés par l'activité amiante, et l'absence de cloisonnement ainsi que les caractéristiques du système de chauffage ont contribué à une exposition de l'ensemble des salariés à l'inhalation de poussières d'amiante ;
- le caractère significatif de l'exposition engendrée par l'activité ne se limite pas au nombre de maladies professionnelles liées à l'amiante reconnues et imputables à l'établissement concerné et il n'est pas nécessaire que l'ensemble des salariés ait été concerné ;
- l'allégation relative à l'utilisation de l'inscription de l'établissement en tant que mécanisme de réduction d'effectifs, est inexacte et sans portée ;
Vu le mémoire, enregistré le 3 avril 2008, présenté par le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES ET DE LA SOLIDARITE, qui maintient les conclusions de son recours par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 5 août 2008, présenté pour la société Iveco France, qui maintient ses conclusions pour les mêmes motifs ;
Vu le mémoire, enregistré le 5 décembre 2008, présenté par le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES ET DE LA SOLIDARITE, qui maintient les conclusions de son recours par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 25 septembre 2009, présenté pour la société Iveco France, qui maintient ses conclusions pour les mêmes motifs ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code du travail ;
Vu la loi n° 98-1194 du 23 décembre 1998 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 septembre 2009 :
- le rapport de M. Seillet, premier conseiller,
- les observations de Me Philippot, pour la société Iveco France,
- les conclusions de Mme Humbert-Bouvier, rapporteur public,
la parole ayant été à nouveau donnée à Me Philippot ;
Considérant que le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES ET DE LA SOLIDARITE fait appel du jugement du 8 juin 2007 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions des 7 février 2005 et 5 juillet 2006 par lesquelles ont été rejetées les demandes d'inscription de l'établissement d'Annonay de la société Irisbus, propriété de la société Iveco France depuis 2003, sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;
Considérant qu'aux termes du I de l'article 41 de la loi du 23 décembre 1998 dans sa rédaction issue de l'article 36 de la loi du 29 décembre 1999 : Une allocation de cessation anticipée d'activité est versée aux salariés et anciens salariés des établissements de fabrication de matériaux contenant de l'amiante, des établissements de flocage et de calorifugeage à l'amiante ou de construction et de réparation navales, sous réserve qu'ils cessent toute activité professionnelle, lorsqu'ils remplissent les conditions suivantes : / 1° Travailler ou avoir travaillé dans un des établissements mentionnés ci-dessus et figurant sur une liste établie par arrêté des ministres chargés du travail, de la sécurité sociale et du budget, pendant la période où y étaient fabriqués ou traités l'amiante ou des matériaux contenant de l'amiante ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté, que les salariés de l'établissement d'Annonay de la société Irisbus, dans lequel sont fabriqués des autobus et des autocars, ont procédé quotidiennement à des opérations de découpage, de perçage et de montage de plaques d'amiante, destinées à l'isolation de trappes de visite des véhicules, jusqu'en 1985, ainsi qu'à la pose des tresses isolantes en amiante autour des tuyaux d'échappement, jusqu'en 1973 ; que le rapport rédigé par l'inspection du travail, en décembre 2005, fait état d'un environnement du poste, au sein d'une ligne de fabrication regroupant environ 200 personnes, relativement empoussiéré, et évoque aussi l'exposition à l'amiante des magasiniers ; que, de même, un rapport établi, à la demande de l'entreprise, par le bureau Véritas, fait état, dans les deux ateliers concernés, servant également de sites de stockage des matériaux amiantés à raison d'une quantité correspondant à une ou deux journées de production, de la présence d'un nombre de salariés compris entre 60 et 150 personnes, outre 50 personnes présentes dans le magasin du bâtiment concerné, où étaient stockées des quantités de plaques et cordons d'amiante correspondant à la production d'une période comprise entre quinze jours et un mois ; qu'il ressort également du rapport du médecin du service médical de l'entreprise en date du 3 mai 2007 que le nombre de salariés exposés à l'amiante, déduit du nombre de salariés faisant l'objet d'un suivi médical spécial, doit être évalué à 23 % de l'effectif moyen sur la période concernée ; que, dès lors, nonobstant les circonstances que l'activité de calorifugeage à l'amiante par la pose de plaques et de cordons d'amiante n'ait été exercée que dans deux ateliers sur les neuf que compte l'établissement, alors au demeurant que le rapport de l'inspecteur du travail susmentionné évoque également d'autres tâches utilisant des matériaux contenant de l'amiante, telles que la réfection des freins ou la pose de joints, et que les salariés affectés spécialement à l'activité de pose des plaques et cordons amiantés auraient été en nombre restreint et n'auraient pas consacré l'intégralité de leur temps de travail quotidien à cette tâche, l'auteur des décisions en litige a fait une inexacte application des dispositions législatives précitées en refusant de regarder l'établissement d'Annonay de la société Irisbus comme un établissement ayant recouru à des opérations de calorifugeage, au sens des dispositions législatives précitées, au cours de la période concernée par ces opérations ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES ET DE LA SOLIDARITE, qui ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que la demande d'inscription aurait été formulée dans un contexte de réduction des effectifs de l'établissement, n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé ses décisions des 7 février 2005 et 5 juillet 2006 par lesquelles ont été rejetées les demandes d'inscription de l'établissement d'Annonay de la société Irisbus sur la liste des établissements susceptibles d'ouvrir droit à l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante ;
Sur les conclusions de la société Iveco France tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés à l'occasion de la présente instance par la société Iveco France et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le recours du MINISTRE DU TRAVAIL, DES RELATIONS SOCIALES ET DE LA SOLIDARITE est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à la société Iveco France au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville et à la société Iveco France.
Délibéré après l'audience du 29 septembre 2009 à laquelle siégeaient :
M. Fontanelle, président de chambre,
MM. Reynoird et Seillet, premiers conseillers.
Lu en audience publique, le 20 octobre 2009.
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N° 07LY01708